dimanche 28 décembre 2008

1er Janvier 2009 - Tous mes vœux !

En ce premier jour de l’an, je vous dis à tous et à chacun, en toute simplicité et profondeur de cœur : Bonne et heureuse année !

Que faudra-t-il pour que cette année 2009 soit bonne ? Que souhaitons-nous ? La santé, du travail, assez d’argent pour vivre correctement, des satisfactions diverses…, réussir ce que nous entreprenons… ? Et aussi la paix, plus de justice, plus de compréhension… ?

Oui, voilà ce que souhaitent la plupart des gens. Et nous, chrétiens, nous souhaitons tout cela aussi. Car nous ne sommes pas de purs esprits, et le fait d’être chrétiens ne nous empêche pas de souhaiter la santé et la réussite. Nos responsabilités sont diverses et parfois importantes. Et cette vie terrestre doit être aussi belle que possible pour tous.

Dieu lui-même souhaite pour tous ce bonheur tout simple qui manque encore si durement à tant de nos frères. Jésus aurait-il guéri tant de malades si la santé n’avait pas été importante à ses yeux ? Aurait-il multiplié les pains pour donner à manger aux foules qui le suivaient ? Ne négligeons pas, ne méprisons pas ce genre de choses, ni pour nous-mêmes, ni à plus forte raison pour les autres. D’ailleurs, n’est-ce pas là-dessus que nous serons jugés à l’heure de notre mort : « J’ai eu faim et tu m’as donné à manger, nous dira le Seigneur…. J’étais malade et tu es venu me voir…. Tout ce que tu as fait pour le plus petit de tes frères, c’est à moi que tu l’as fait ».

Mais nous savons aussi que le simple bonheur matériel ne peut pas nous suffire et qu’il ne nous rassasiera jamais complètement. Nous savons que nous sommes faits pour beaucoup plus.

Alors, à la lumière de Noël, cherchons à quelles conditions cette nouvelle année 2009 pourra être belle et bonne !

Noël, n’est-ce pas « Dieu avec nous » ?

Alors je souhaite tout simplement que le Seigneur soit avec vous tout au long de cette année. C’est d’ailleurs le souhait que le prêtre vous renouvelle à plusieurs reprises tous les dimanches : « Le Seigneur soit avec vous ! ».

Puissions-nous vivre de plus en plus avec le Seigneur, vivre de sa Lumière, en tenant compte de ses appels, de ses désirs que l’Esprit-Saint peut souffler en notre cœur. Puissions-nous vivre avec le Seigneur, nous nourrir de plus en plus de sa Parole…

Oui, Noël, c’est « Dieu avec nous » parce que, au-delà de ces nourritures terrestres qui nous sont indispensables, nous avons faim et soif de sa vie, de sa Lumière, de sa Parole, même quand nous n’y pensons pas. L’homme ne vit pas seulement de pain, de santé, de bien-être matériel ou de vacances - même si ces désirs sont légitimes -…, mais de Dieu ! St Augustin disait : « Seigneur, tu nous as faits pour toi, et notre cœur restera toujours insatisfait tant qu’il ne reposera pas en toi ». Il y a en nous une dimension que Dieu seul peut remplir.

Que 2009 soit pour chacun de vous une année de bien-être avec tout ce que vous pouvez souhaiter pour vous-mêmes, pour vos familles… Et que 2009 soit en même temps pour chacun une année de compagnonnage avec Jésus Christ, Fils de Dieu incarné, par la prière, par l’Eucharistie, par la méditation de l’Evangile, par la simple élévation de son esprit vers Lui….

Oui, que le Seigneur soit avec vous, en vous ! C’est tellement mon souhait pour chacun.

Noël – 31 Décembre - En élan vers Dieu Trinité

Hier, à l’exemple de Marie – « Elle méditait en son cœur » -, nous étions encouragés à exercer notre mémoire afin de découvrir les traces de Dieu en notre vie : au fur et à mesure que nous progressons dans le temps, nous ramassons le passé afin de l’intégrer dans un élan vers l’avenir. C’est ce que fait, par exemple St Matthieu dans sa généalogie de « Jésus-Christ, fils de David, fils d’Abraham ». Il remonte jusqu’à ce patriarche pour reprendre toute l’Histoire Sainte afin de mieux découvrir l’accomplissement des promesses faites à Abraham.
  • St Luc, lui, propose une généalogie qui remonte jusqu’à Adam, … jusqu’à Dieu !
  • St Jean, au sommet de la pensée néo-testamentaire, reprend les choses « au commencement ». Tous les mots, ici, sont lourds de signification.
    • « Et le Verbe était avec Dieu » - « pros ton Théon », en grec -. Ce « pros », mieux que d’indiquer une simple compagnie (« avec » Dieu), veut souligner tout un mouvement permanent de relation, un élan permanent de vie avec Dieu.
    • Et St Jean indique plus loin : « Le Fils Unique nous a fait connaître le Père ». Mais le verbe, ici, (ézégèsato) ne veut surtout pas entendre une connaissance intellectuelle, spéculative ; son sens primitif est « conduire » : Le Fils nous conduit vers le Père ! Là encore, il s’agit d’un élan de vie !

Autrement dit, tout le périple terrestre que nous faisons est contenu dans ce « pros Théon », dans cet élan vers Dieu.

Mais l’élan de l’homme avait été comme embourbé par diverses servitudes, aliénations… qui l’empêchaient de bondir vers Celui qui l’avait pourtant créé « à son image et ressemblance ». Aussi, Celui qui, dans la Trinité, est parfaite « Image du Dieu invisible » (Col 1.15) a comme détourné son élan vers le Père pour « passer » au milieu des fils d’Adam et leur redonner leur élan premier. Il nous faut donc être attentif pour être de plus en plus sur la trajectoire de Jésus qui passe en notre vie, être comme les aveugles de Jéricho qui « apprenant que c’était Jésus qui passait, se mirent à crier : « Seigneur, aie pitié de nous ! » »

Alors, c’est évident, il nous fera connaître le Père, c’est-à-dire il nous « conduira » vers le Père, nous redonnera l’élan nécessaire pour aller vers le Père. Et ce n’est pas par hasard que ce même St Jean notera à la fin de son évangile les paroles de Jésus : Maintenant, « je remonte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu ». Il s’agit, là encore, de la même conjonction de relation : « pros », « vers » mon Père et votre Père.

C’est tout ce voyage que nous avons à faire ici bas : reprendre élan vers le Père, à la suite du Christ, lui qui n’est qu’élan vers le Père.

St Jean avait bien compris cela, lui qui écrit dans sa première lettre : « Nous vous annonçons la Vie éternelle qui était tournée vers (pros) le Père et qui s’est manifestée à nous…, nous vous l’annonçons afin que vous aussi, vous soyez en communion avec nous. Et notre communion est communion avec le Père et avec son Fils Jésus Christ » (I Jn 12.-3).

Evidemment, nous sommes plongés ici dans le mystère de la Trinité où chaque Personne divine n’est que élan vers les deux autres…, n’est que « relation » vers l’autre…, comme disent les théologiens. L’un d’eux, un peu poète, disait : « imaginez un oiseau qui ne serait que vol ! ».

Oui, cet élan, à la suite du Christ, transfigure notre existence. On est appelé, dans la réalité la plus banale de l’existence, à exorciser l’égoïsme pour, peu à peu, devenir comme Dieu, « à son image et ressemblance », sans égoïsme, n’être plus que élan, relation vers Dieu, vers l’autre. N’exister que comme relation vers Dieu, vers l’autre… !

Oui, Dieu n’est pas un solitaire. On est appelé à le voir comme une famille, une harmonie. Et quand Jésus dit : « Qu’ils soient un comme nous sommes un », ce n’est pas une vague comparaison. C’est le mystère même de Dieu qui vient comme nous envelopper afin de vivre, dès ici bas, le mieux possible, d’une charité qui soit « épiphanie », manifestation de Dieu Trinité.

Noël – 30 Décembre - Une mémoire toujours jeune

Il est certain que Anne qui était prophète, de la tribu d’Aser, le huitième fils de Jacob dont le nom signifie « Bonheur », se trouve dans les mêmes sentiments de bonheur que ceux du vieillard Syméon : sentiments d’action de grâces, de reconnaissance pour les bienfaits de Dieu à propos de cet enfant, Jésus, « Lumière qui éclaire les nations païennes et gloire d’Israël » … (cf. 29 Déc.).

On peut se permettre - non sans humour - une remarque amusante : si l’on regarde les personnes qui entourent Jésus depuis sa conception, on dirait que l’Ancien Testament vient en quelque sorte mourir sur les rives du Nouveau Testament !.
  • Oui, l’Ancien Testament se meurt : il y a Zacharie et son épouse Elisabeth « avancés en âge » (Lc 1.7), sans espoir d’enfant… Il y a Syméon qui « n’en peut plus » ! Il faut que l’Esprit Saint le « pousse » vers le temple à la rencontre de l’enfant Jésus… Et puis Anne : quatre vingt quatre ans ! Rendez-vous compte ! Elle « claudiquait » aux abords du temple dans l’espérance du salut d’Israël… Bref, il n’est question que de vieillesse….
  • Au contraire, le Nouveau Testament ne parle que de jeunesse. Il y a Marie, une toute jeune fille de 14-15 ans, 16 ans tout au plus. Il y a Jean-Baptiste ; il « gambade » déjà dans le sein de sa mère (Lc 1.41) à l’arrivée de son cousin, Jésus. Il y a, bien sûr, la naissance de Jésus lui-même… Et tout le monde parle de cet enfant. Bref, il n’est question que de jeunesse…

Il faut donc se le dire et se le redire : à la suite de Jésus, un chrétien est toujours un enfant (de Dieu) ! Un chrétien n’est jamais vieux. Un chrétien est toujours jeune dans son âme. Un chrétien reste toujours jeune. St Augustin avait raison de lancer ce slogan à la jeunesse de son temps : « Cherchez donc le Christ, jeunes gens, pour rester jeunes » ! (« Quaerite ergo, juvenes, Christum ut maneatis juvenes »).

Après cette première remarque qui se veut une louange aux anciens toujours jeunes, il est bon de remarquer que le passage de Jésus au temple est « encadré » par cette remarque de St Luc : « Marie retenait tous ces événements et les méditait en son cœur ». (Lc 2.19 & 51).

Voilà bien la spiritualité biblique la plus fondamentale. Au lieu d’« échafauder » des systèmes qu’on plaque sur la réalité de la vie, il vaudrait mieux s’exercer à toujours déchiffrer l’existence sous le regard de Dieu au fur et à mesure que les années se déroulent. Marie ne faisait pas autre chose. Elle « méditait en son cœur ». Si Dieu lui avait « tout dit » à l’Annonciation, à la Présentation au Temple, « elle méditait en son cœur » le dessein de Dieu qui se réalisait - certainement pas toujours comme elle l’aurait imaginé - dans le concret de son existence.

A nous aussi, baptisés, tout nous est dit sur notre destinée. Et nous nous mettons en route sans trop savoir les chemins que Dieu nous fera prendre pour arriver au terme que nous connaissons par la foi. Et à la suite du Christ, un jour peut venir où nous ferons, nous aussi, comme Abraham, comme Marie et tant d’autres, l’expérience, peut-être au fond même de l’absurde humainement parlant, que Dieu ne nous a pas quittés du regard. Nous serons au seuil de cette vision de Celui qui nous voit maintenant, que nous verrons « tel qu’il est » et comme il nous voit. Et cette connaissance sera transformante : nous serons divinisés !

Oui, méditons comme Marie ! Non pas en faisant de nos souvenirs un « mémorial » (comme un album de souvenirs), mais en « faisant mémoire » c’est-à-dire en regardant les traces du Seigneur en notre vie pour mieux envisager notre avenir !

Noël – 29 Décembre - Action de grâces pour le Don de Dieu

La première démarche de Marie et de Joseph est de se rendre au temple pour présenter Jésus, pour offrir deux tourterelles en holocauste !

Holocauste ! Un mot désuet, inhabituel aujourd’hui ! Mais pour un Juif, il traduisait alors toute la reconnaissance que l’homme doit manifester envers son Créateur en toutes circonstances.

Le sens de ce mot, en hébreu, signifie : « faire monter des choses qui montent ». A l’exemple de Marie et de Joseph, ce devrait être notre attitude première, fondamentale : prendre possession de tout ce que Dieu accorde pour rebondir de tout notre être dans la reconnaissance.
  • Quand le psalmiste (ps. 104) regarde la création, il ne peut que s’écrier : « Bénis le Seigneur, ô mon âme ! ».
  • Quand Ezéchiel et bien d’autres avec lui reçoivent la « Parole de Dieu », celle-ci descend jusqu’au plus profond d’eux-mêmes ; ils en “tressaillent de joie“. Et, de tout leur être, s’élèvent vers Dieu, en de multiples expressions, louanges et actions de grâces.
  • Quand le chrétien reçoit la « Parole de Dieu » - Verbe fait chair ! -, celle-ci devient sa nourriture de vraie vie. Et il se permet, à l’appel du Christ qui a offert sa vie en action de grâces au Père, d’en faire une « Eucharistie » : l’action de grâces par excellence !

Oui, la condition de l’homme ici-bas est « royale » et « sacerdotale ». Il est « Roi » puisque Dieu a tout remis entre ses mains. Mais, de ce fait, il devient « Prêtre » du Dieu Très-Haut en lui faisant hommage de tout don reçu : « Tout est à vous ; mais vous êtes au Christ ; et le Christ est à Dieu ! ». (I Co. 3.21).Et cela dans les grandes circonstances de la vie comme dans les moments les plus communs comme l’action de grâce pour un repas convivial (benedicite) avant de partager celui du Royaume de Dieu.

La démarche de Marie et Joseph s’inscrit donc dans cette conception « royale et sacerdotale » de l’existence : Recevoir gratuitement et rendre grâces.

C’était la démarche de tout bon Juif depuis toujours… , depuis Jacob, le fondateur du peuple juif.
  • N’avait-il pas nommé son premier enfant Ruben (racine : « voir ») : on ne voit Dieu que si l’on reconnaît qu’il nous voit sans cesse…
  • N’avait-il nommé son deuxième fils : Shiméon (racine : “écouter“) : on n’écoute Dieu que si l’on reconnaît qu’il nous écoute sans cesse.
  • Voir et écouter : deus attitudes qui doivent toujours se conjuguer : aussi avait-il nommé son troisième fils : Lévi (racine : “lier“). Parce que Dieu voit et entend, l’homme commence, même ici-bas, à le voir et à l’écouter (comme Agar au puits de « Lahaï Roï » : « Serais-je vue, parce qu’il me voit ? » – Cf. Gen. 16.13-14).
  • C’est alors qu’il reçoit un quatrième fils : Judah qui signifie : reconnaissance, action de grâces (d’où vient le mot « Juif »).

Alors, muni de ce sentiment permanent et indéfectible, Jacob affrontera les combats de la vie, affrontera l’ange de Dieu lui-même en ce lieu qu’il nommera « Penouël » (qui veut dire « face de Dieu »). Car même les durs combats de la vie deviennent alors une “vision de Dieu“. Aussi, c’est en ce moment terrible de son existence que Jacob devient « Israël » : « Que Dieu soit ta force ! » (Cf ; Gen. 33.29).

Dans ce sentiment de la « reconnaissance », même un dur combat de la vie devient « vison de Dieu » : Tout est grâce, s’écriera St Paul… Je puis tout en celui qui me fortifie.

N’est-ce pas ce qu’annonçait Syméon à propos de Jésus : « Il sera un signe de division » par le combat suprême de son mystère pascal. Mais « le voile du temple se déchirera pour que nous puissions voir celui qui nous voit sans cesse ». Et Marie participera, dans un sentiment de reconnaissance et d’action de grâce, au « combat » de son divin Fils qui accomplit celui de Jacob : « ton cœur sera transpercé par une épée ».

Que Marie nous aide surtout aux durs moments de notre existence, au dur combat de la mort elle-même : « Soyez toujours dans l’action de grâces », disait St Paul.

vendredi 26 décembre 2008

Tous mes vœux encore, avec St Etienne.

Un simple mot aujourd’hui pour vous redire : « Saint et joyeux Noël ! ». Et je vous transmets ce souhait par l’intermédiaire de St Etienne dont c’est la fête en ce jour.

Je ne sais plus pourquoi cette « mémoire de St Etienne » est placée au lendemain de la Nativité du Christ. Cette fête du premier martyr pourrait bien se célébrer après Pâques…

Peut-être ! Cependant une précision : les Actes des Apôtres rapportent que de faux témoins accusaient Etienne de blasphémer contre le « LIEU » c’est-à-dire contre le temple de Jérusalem. Avaient-ils fondamentalement tort ? En tous les cas, sans aucun doute, ils avaient énormément durci leur accusation - c’est fréquent cela -. Car Etienne lui-même n’avait-il pas dit lors de son procès : « Le Très-Haut n’habite pas des demeures faites de mains d’homme » (Actes 7.48). C’est clair ! Et au moment de sa mort, il s’écrira : « Je contemple les cieux ouverts et le Fils de l’Homme debout à la droite de Dieu… ».

Autrement dit, il avait bien compris, Etienne, la signification du voile du temple qui se déchire au moment de la mort du Christ, événement que nous rapportent les trois évangélistes synoptiques.

Or, ce voile du temple cachait le lieu de la « Demeure » de Dieu, la “shékhinah“, ce mot dont la racine signifie : « Le Voisin », Dieu se faisant déjà « voisin » de l’homme !

Et au moment de la déchirure du voile du temple qui cachait donc ce « voisinage » de Dieu avec l’homme, celui-ci peut commencer à « voir celui qui nous voit sans cesse » ! Aussi, St Jean de conclure comme naturellement : « Et le Verbe s’est fait chair et il a habité (« voisiné ») parmi nous. Et nous avons vu sa gloire… ! ».

Alors, aujourd’hui, avec St Jean, derrière ce voile du temple qui s’est déchiré définitivement, on peut contempler l’enfant Jésus avec Marie et Joseph…, cet enfant qui deviendra, par sa mort et sa résurrection, « pierre rejetée » et pourtant « pierre maîtresse » en vue de la construction du véritable TEMPLE de Dieu. Et ce nouveau Temple, c’est son Corps dont nous sommes appelés à devenir les membres…

Derrière le voile : d’abord la crèche : « Et le Verbe s’est fait chair… ». C’est Dieu qui devient notre « voisin »…

Aussi, St Etienne me permet de vous redire : “SAINT ET JOYEUX NOEL“ ! Que Dieu « voisine » avec vous tous !

samedi 20 décembre 2008

Avent – 3ème Sem. – 20-21 décembre - Noël approche !

Noël approche ! Et comme je souhaiterais qu’il y ait un grand sentiment d’espérance pour tous… et de communion en Jésus, Dieu fait homme.

Pour le manifester je transmets une partie de mon homélie du 1er Dimanche de l’Avent sur ce sujet :

Il nous faut donc être attentif, être en éveil, veiller afin de voir celui qui vient sans cesse. « Veiller », c’est l’un des maître-mots de ce temps de l’Avent. Etre attentif à cette présence du Christ qui, de jour en jour, dans les modestes ou les dures réalités de nos vies et par de multiples intermédiaires, vient, ne cesse de venir à nous.

« Veillez donc », répète St Paul ! Malheureusement, ce mot, en français, n’évoque pas l’image vigoureuse du verbe que St Paul a forgé, tout exprès, à cet effet. Pour évoquer l’homme d’espérance, Paul le représente comme un guetteur : « Apo-kara-dokein », un guetteur qui dresse la tête et tend le cou (kara) pour épier (dokein) et tâcher de découvrir au loin (apo) ce à quoi il s’attend. « Apo-kara-dokein ».

A vrai dire, cette attitude ne peut être qu’éprouvante. On est tous tentés de laisser tomber la tête, comme les vierges de l’évangile qui cèdent au sommeil, incapables alors de chanter celui qui va venir. Non ! « Apo-kara-dokein » : dresser la tête pour voir au plus loin de notre chemin terrestre, au-delà même de nos souffrances si possible, celui qui vient ; être guetteur comme le vigile au sommet des caravelles d’autrefois qui seul pouvait crier le premier : « Terre ! » ‘ – « Veillez donc ! », répète St Paul avec tous les apôtres. Autrement dit, les chrétiens doivent être - surtout à un certain âge, c’est plus facile - des « insomniaques vigilants » : « Grègoreite », d’où est venu le prénom très chrétien : Grégoire ! Un Grégoire, c’est un homme qui « veille », qui « guette ».

Alors, je conclurai :

  • Savez-vous véritablement ce que c'est que de veiller ?
  • Savez-vous ce que c'est que d'attendre un ami, et de le voir tarder ?
  • Savez-vous ce que c'est que d'être dans l'anxiété au sujet d'une chose qui peut arriver ou ne pas arriver ?
  • Savez-vous ce que c'est que d'avoir un ami au loin, d'attendre de ses nouvelles, et de vous demander jour après jour ce qu'il fait en ce moment, et s'il est bien portant ?
  • Savez-vous ce que c'est que de vivre pour quelqu'un qui est près de vous, à tel point

    • que vous lisez dans son âme,
    • que vous prévoyez ses désirs,
    • que vous souriez de son sourire,
    • et que vous vous attristez de sa tristesse,
    • que vous êtes abattus lorsqu'il est ennuyé,
    • et que vous vous réjouissez de ses succès ?

Et bien, VEILLER DANS L'ATTENTE DU CHRIST EST UN SENTIMENT QUI RESSEMBLE A CEUX-LA, autant que les sentiments de ce monde sont quelque peu capables de figurer ceux d'un autre monde". (Cardinal Newman 1801-1890)

vendredi 19 décembre 2008

Avent – 3ème Sem. – Vendredi – Doute et Infécondité Foi et Fécondité

Doute et infécondité - Foi et Fécondité.

Dieu promet à Zacharie, comme autrefois à Abraham - il faut souligner le parallèle -, le plus merveilleux cadeau, celui d'un enfant. Mais le vieillard doute ! Il est trop vieux; il n'a plus de force… Aussi, réclame-t-il un signe. Et il n'obtient que le signe de son doute : il est réduit au silence ! Il ne peut plus parler puisqu'il n'a pas cru, puisqu’il n’a pas voulu recevoir la Parole divine !

Oui, il faut bien le remarquer : puisque le doute rend sourd à la Parole de Dieu, les lèvres de l'incrédule sont paralysés. Il réduit Dieu au silence ; et réduisant Dieu au silence, il se condamne à être muet ! Conséquence logique ! La Parole de Dieu, si efficace habituellement, devient stérile…, à cause du doute. C’est fréquent et dramatique cela ! Et, bien plus, on va alors s’étonnant : que fait donc Dieu ?

Cependant, pour Zacharie, comme pour chacun d'entre nous, Dieu agit. Il agit toujours malgré nos obstacles et nos freins. Voici qu'un père radieux tient dans ses mains le "Don de Dieu" - c'est la signification du nom de Jean -. Enfin, il reconnaît le « Don de Dieu ». Alors, reconnaissant enfin le « Don de Dieu », les lèvres du sceptique s’ouvrent : il proclame, il chante, il rend grâce devant tous ! …

C’est que Dieu emploie toujours la même pédagogue envers l’homme : Zacharie revit la même aventure qu'Abraham, l'aventure d'une véritable fécondité, celle d’une "paternité". Ils ont connu tous les deux la plus grande épreuve, celle de la stérilité, de la solitude. Cependant, l'un et l'autre, comme tout homme plus ou moins sceptique, ont été visités par la grâce de Dieu : Je te donnerai un enfant: Isaac, « l'enfant du rire » (qui répond au rire sceptique de Sara et d’Abraham), Jean-Baptiste « le Don de Dieu » qui répond au doute de Zacharie !

Sachons donc remarquer en nos vies les divers « dons de Dieu » pour que nous puissions passer du doute stérile à une foi féconde, à cette grâce de la « paternité », qu’elle soit charnelle ou spirituelle. Baptisés, nous avons tous à vivre de cette « paternité » : transmettre la vie ! LA VIE MÊME DE DIEU ! Sachons nous en souvenir en ce temps de Noël. Dieu veut toujours s’incarner en l’homme… Il nous demande de collaborer à sa paternité divine !

jeudi 18 décembre 2008

Avent – 3ème Sem. – Jeudi – Le Silence de Joseph

Le silence de Joseph

Il est très difficile, me semble-t-il, de parler de St Joseph, lui qui ne parlait pas : nous n’avons pratiquement aucune parole de lui !

On peut se demander si Jésus n’avait pas voulu avoir sur terre une « image », en quelque sorte, de son Père du ciel, de Celui qui n’a pas besoin de “paraître“, de Celui qui “EST“ ? Et cela suffit : « JE SUIS » !

Ainsi, Joseph, ce grand silencieux, nous invite à ajuster sans cesse nos diverses attitudes à ce que nous sommes en réalité afin que les grâces reçues soient de plus en plus manifestes et non cachées sous des apparences trompeuses et trop humaines… : « Mes bien-aimés, dès à présent, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. Nous savons que lorsqu’il paraîtra, nous lui serons semblables, puisque nous le verrons tel qu’il est » (I Jn 3.2). C’est notre vocation de baptisés : être de plus en plus, en tant qu’enfants de Dieu, “à son image et à sa ressemblance“ de sorte que cette réalité soit manifeste même sans paroles et surtout sans artifices !

Et puis, je pense que St Joseph avait bien perçu que les grandes actions de Dieu se réalisent plutôt dans le silence que dans le bruit : l’avènement de l’Emmanuel - Dieu parmi les hommes - ne s’était-il pas accompli alors qu’ « un silence paisible enveloppait tous les êtres et que la nuit était au milieu de sa course… » (Sag 18.14, verset que l’Eglise a toujours attribué à l’accomplissement du mystère de l’Incarnation).

Certes, le silence en soi n’est pas un but ! Certains n’aiment pas « se montrer », « s’avancer », « paraître ». Il ne s’agit pas là, obligatoirement, d’une grande vertu. Ce peut être tout simplement l’effet d’un tempérament. Mais il reste que si le silence n’est pas en soi un but, il peut être un excellent moyen d’acquérir, de façon plus habituelle, une relation avec Dieu et l’entretenir. Le silence établi autour de soi et surtout en soi, ce silence qui évacue tous ces bruits évanescents et sans consistance, est une condition pour acquérir un « cœur qui écoute », comme dit St Luc, un cœur capable d’accueillir la Parole, le Verbe de Dieu, à l’exemple de St Joseph.. C’est alors que la prière - ce dialogue cœur à cœur avec Dieu -, peut s’établir. Et puis une âme de silence - c’est évident - entretient en elle-même, plus facilement, un esprit de charité fraternelle. C’est quand elle surgit d’un silence profond que la parole est plus ajustée pour entretenir des relations humaines en la relation avec CELUI QUI EST et qui ne se révèle que par une seule Parole, son Fils Unique : “Ecoutez-le !“ : c’est la seule parole que Dieu-Père nous dit !

St Joseph, priez pour nous ! Que votre silence admiratif devant l’ « Emmanuel » nous aide à « être » et devant Dieu et devant les hommes, plutôt que de « paraître » !

mercredi 17 décembre 2008

Avent – 3ème Sem. – Mercredi – Notre Généalogie


Notre Généalogie !

Fastidieuse que cette généalogie selon St Matthieu ! C’est sans doute - reconnaissons-le - que nous ne connaissons pas suffisamment notre « Histoire Sainte » !

Il faut savoir que le Prologue de l’Evangile selon St Matthieu commence par ces mots : « Généalogie de Jésus Christ » et se termine par : « Il sera appelé Nazôréen ». Ces deux incises - l’initiale et la finale - sont comme les termes d’une inclusion qui englobe les songes de Joseph et les affreuses interventions du roi Hérode.
Les deux termes de cette inclusion ne sont sans doute pas gratuits de la part de St Matthieu, de sorte que l’on peut légitimement les rapprocher : « Généalogie du Nazôréen ! ».

Mais quel est le sens de « Nazôréen » ? Certes, il peut évoquer la bourgade de Nazareth ! Mais, très souvent, un mot hébreu, par sa racine, est une caisse de résonnance aux multiples vibrations d’interprétation. Et pour St Matthieu, ce « bon scribe qui sait tirer de son trésor du neuf (N.T.) et de l’ancien (A.T.) », ce terme évoque la figure du “Serviteur“ décrite par Isaïe, ce “Serviteur“ que Dieu a « formé » (nadzar), comme un potier son vase, ou « gardé » (naçar) en vue d’une alliance éternelle entre Dieu et l’homme (Cf. Is 42.6 sv - 49.6 sv). (en vue d’une d’une recréation : cf . note 1)

Autrement dit, Matthieu reprend dans sa Généalogie toute l’ « Histoire sainte » depuis Abraham pour montrer que tout converge vers Celui, le Christ, que Dieu a « formé », a « gardé » comme « Serviteur » de son dessein de salut pour tout homme, malgré tous les refus de celui-ci. Aussi l’a-t-il « gardé » comme « Serviteur souffrant ».

Personnellement, j’imagine la Généalogie de Matthieu (avec le Prologue) comme l'étrange festin que l’Apôtre fit après sa conversion (il n’y a que des « pécheurs » !). En cette Généalogie, Matthieu semble ramasser toute l’humanité pécheresse au plus profond de la terre pour la relever par l’amour souffrant de ce « Nazôréen » que Dieu a « formé », « gardé » envers et contre tout, pour que s’accomplisse le salut de l’homme et son Alliance définitive avec Dieu. C’est, avec ce « Nazôréen », comme une re-création. Dieu a créé en sept jours (Cf. Genèse) ; Matthieu dénombre quatorze (2x7) générations à chaque phase de l’Histoire sainte… Dieu ne cesse de créer ; il amplifie même sa création avec le Christ, ce « Serviteur souffrant », « formé », « gardé » pour notre re-création !

A chacun de conclure ces quelques remarques par sa prière ! Mais je me dis :

  • Nous faisons partie désormais de cette Généalogie : « Quiconque croit que Jésus (ce “Nazôréen“) est le Christ, est né de Dieu ! » (I Jn 5.1). Il nous a engendrés par sa Parole (Cf. Jacq 1.18).
  • Et celui qui est né de Dieu, l’Engendré (Unique Fils de Dieu fait homme, ce « Nazôréen ») le « garde » ! - Et celui qui nous « garde », nous “forme“ ; il nous “garde“, il nous “forme“, il nous engendre en nous donnant les arrhes de son Esprit (cf I Co. 5.5).
  • Et il nous demande, en nous « formant », en nous « gardant » de collaborer à son œuvre, « lui qui veut que tous les hommes soient sauvés ! » ( I Tim. 2.4).

Ainsi, qui que vous soyez, surtout si vous traversez souffrances et épreuves - celles du « Serviteur souffrant » en vue de sa glorification en chacun de nous -, dites-vous, répétez-vous : « malgré mes fautes, je suis né de Dieu grâce au Christ, ce Nazôréen qui me « garde », qui me « forme“ pour vivre et faire vivre de Dieu jusqu’à ce que la vie même du Christ soit pleinement manifestée ».

C’est ma prière. Que ce soit aussi la vôtre, aujourd’hui, avec moi.

Note 1 :Tertulien nous offre une belle image de la création par Dieu : « Les mains de Dieu étaient à l’ouvrage : elles touchaient, pétrissaient, étiraient, façonnaient la glaise qui ne cessait de s’ennoblir à chaque impression des mains divines. Imagine-toi Dieu occupé, appliqué tout entier à cette création : mains, esprit, activité, conseil, sagesse, providence, amour surtout orientaient son travail ! C’est qu’à travers ce limon qu’il pétrissait, Dieu entrevoyait déjà le Christ qui un jour serait homme : Verbe fait chair, comme cette terre qu’il avait entre les mains ».

mardi 16 décembre 2008

Avent – 3ème Sem. - Mardi - Le Repentir

L’un dit « oui » et l’autre dit « non » ! Cependant, celui-ci fait le « oui » et celui-là fait le “non” ! C’est assez fréquent, n’est-ce pas ? Il reste vrai que dire “oui” et l’accomplir… dans la vie religieuse, le mariage…, comme c’est parfois difficile ! Il nous faut toujours avoir les yeux fixés sur le Christ qui veut nous conduire au « oui » total que nous cherchons d’abord, peut-être, au travers de nos diverses négations. Il veut nous conduire jusqu’au bout de son « Oui » !

Pour nous aider, Jésus nous enseigne : « Un homme avait deux fils… ». Le premier répond : « Non » ! Le second répond : « Oui ! ».

Et Jésus semble préférer le premier : celui dont la vie restera à jamais marquée par un refus premier, celui qui a dû revenir, brisé dans son amour-propre et mendiant d’une miséricorde ! Pourquoi cette préférence ? C'est parce qu'à côté de la vertu de constance, il y a la route du repentir, qui reste le plus sûr accès à la vigne du Seigneur. Que nous ayons dit « oui » à Dieu ou d’abord dit « non », nous avons tous à faire la découverte de ce passage essentiel, nécessaire, inévitable : la pâque du repentir.

Dans le cas d'une générosité spontanée, d'un « oui » immédiat, nous courons le risque de trop nous appuyer sur nous-mêmes. Alors, l'expérience de nos faiblesses, l'humiliante brisure d'un échec peut-être peuvent, par le repentir, nous ramener vers Dieu : « Va désormais travailler à ma vigne ! ».

Peut-être sommes-nous de ceux qui sont toujours fidèles à leur « oui » initial. Le pli est pris depuis l’enfance…, conjugale ou religieuse. On acquiesce à tout ce qui est demandé… Cependant quand la foi bouscule les vieilles habitudes, c’est parfois le repli derrière mille excuses très raisonnables. Et le « oui » initial glisse…, glisse dans l’anonymat d’un conformisme réconfortant mais insatisfaisant ! Mais loin de nous abandonner à cette vacuité suffisante, le Christ s'ingénie à nous faire comprendre que nos petites réussites humaines sont chimères… Et, un jour, nos propres forces venant à manquer, le repentir d’un subtil orgueil nous conduit à mieux écouter : « Va désormais travailler à ma vigne ! ».

Et ceux qui s’engagent sur un refus premier, qui font la rugueuse mais « libérante » expérience de leur faiblesse extrême ressentent souvent, sur le chemin chaotique de leur désarroi, une présence miséricordieuse qui les accompagne toujours et les conduit jusqu’à ce regard de pardon que le Seigneur jette un jour sur eux. Le souvenir de cette miséricorde divine ne peut s’effacer. Ils savent, eux, désormais… ils savent alors répondre à l’invitation permanente : « Va désormais travailler à ma vigne ! ».

Oui, quelque soit notre cheminement, la porte unique du salut reste celle du repentir !

Car l'essentiel n'est pas de rester « juste », - ce n'est pas possible ! -, mais de devenir « saint », c’est-à-dire un incessant repentant. Jésus n'est pas venu pour les justes mais pour les pécheurs, parce que les justes qui ne cherchent pas à se convertir sans cesse, ne sont plus des justes, mais des satisfaits…, alors que les pécheurs repentis, par leur abandon en la miséricorde de Dieu, provoquent sa joie et sont sanctifiés… Oui, il n'y a que des pécheurs ! « Moi le premier », disait St Paul. Et parce que nous sommes « tous pécheurs », nous sommes « tous appelés » à devenir des saints ! Malgré notre péché ! Mieux : « par la grâce de nos péchés », osera dire St Augustin. Un Père du désert affirmait : « Celui qui reconnaît son péché est plus grand que celui qui ressuscite un mort ». Il entre en la Vigne éternelle du Seigneur ! “Va désormais travailler à ma vigne !”.

Nous ne sommes, nous, peut-être, ni de ceux qui ont vraiment dit « oui », ni de ceux qui ont carrément répondu « non ». On ne dit jamais définitivement « non », et on ne dit jamais pleinement « oui ».

Il n'y a que le Christ qui n'ait été que « oui » en tout.

Et Marie dont la vie a été tournée d'emblée vers Dieu par un « oui » sans mélange et sans retour. Notre Dame du « Oui », priez pour nous, maintenant, et à l’heure de notre mort ! C’est avec elle que nous pouvons, dans la confiance, l’humilité et la joie, entendre la voix du Père, pleine d'autorité et de tendresse, nous redire en cet instant même : « Mon enfant, va travailler à ma vigne » !

lundi 15 décembre 2008

Avent – 3ème Sem. - Lundi - L'Histoire de Balaam

Elle est digne d’un conte de Perrault, cette histoire de Balaam (Nb 24). Il faut la raconter aux enfants ; avec votre talent narratif, ils en seront émerveillés, tout « esbaudis », réjouis, j’en suis sûr !

Le roi de Moab (à l’est de la mer morte) voit d’un mauvais œil les Hébreux s’installer à l’ouest. Alors, il demande à un « Voyant » célèbre, à ce Balaam qui a une réputation de magicien (c’est l’ancêtre de nos « Rois-mages »; et, de plus, il arrive du pays d’Abraham) de venir maudire ce peuple d’immigrés ! C’est toujours, plus ou moins, d’actualité !

Pour faire court, Balaam monté sur son âne va pour maudire le peuple de Dieu. Mais cet âne voit soudainement sur le chemin l’ange de Dieu lui barrer le passage, une épée à la main. Une première fois, il se cabre ; une seconde fois il dévie contre la muraille, blessant quelque peu son cavalier ; une troisième fois, il se couche. Alors, Balaam, en colère le rudoie.

Et voici que l’âne se met à parler ! Et oui, un âne qui parle ! « Pourquoi me battre ; je t’ai toujours été fidèle ! Mais regarde donc… ! ». Et Balaam voit l’ange de Dieu lui barrant la route comme une armée, l’empêchant d’aller maudire le Peuple de Dieu !

Il faut bien le remarquer : c’est un âne qui d’abord voit l’ange de Dieu. Dès lors, l’âne de notre vie évoque certains moyens que Dieu prend pour nous parler. Car cet âne de Balaam prend la parole, figurez-vous ! Certains pensent que les ânes ne parlent pas. Ils ont tort. Ce sont des ânes ! Car l’âne de Balaam symbolise toutes les voies de nos vies qui semblent sans issue, rudes, escarpées et fatigantes… et qui mènent finalement à quelque chose…, à Dieu. Quand on vieillit et que l’on voit le passé, on a une grande dévotion pour l’âne de Balaam, pour tous ces “ânes“ qui se sont manifestés en notre existence, des messagers de Dieu, finalement !

Et puis, l’âne a un grand rôle dans la Bible… C’est l’animal messianique par excellence… C’est pourquoi on le place dans nos crèches.

Mais revenons à ce Balaam qui comprend finalement qu’il doit non point maudire, mais bénir ! Et c’est l’un des oracles de cet « homme au regard pénétrant » que présente notre lecture d’aujourd’hui. Il voit un « astre » se lever. C’est l’étoile de David, l’étoile du “Messie-Roi“ ; c’est l’étoile de la crèche ; c’est l’étoile de l’ « Emannuel », Dieu-avec-nous ! Et Balaam bénit Dieu et son peuple !

Finalement, j’aimerais bien être cet âne de Balaam ! « J’avance comme un âne », écrivait jadis le Cardinal Etchegarray. Il a bien rempli sa mission, cet âne : désigner la présence de Dieu en nos vies.

Que le Seigneur soit avec vous ! Et ne rudoyez pas les ânes de votre vie !

samedi 13 décembre 2008

Avent – 2ème Sem. - Vendredi - L'ambivalence...

« Le sentiment du « chez soi » garde une ambivalence profonde » - Mounier.

Ambivalence ! Ambivalence ! Telle est souvent notre nature !
  • Nous dansons sous le soleil alors que notre cœur saigne.
  • Nous pleurons. Et ces pleurs guérissent une blessure.
  • Nous buvons ; mais c’est du « sang de la vigne ! », comme dit le mot hébreu.
  • Nous jeûnons. Mais notre esprit se purifie.
  • Nous travaillons. Et c’est en vain, selon le pessimiste Ecclésiaste.
  • Nous dormons ; et au matin des pensées neuves surgissent.

C’est vrai, la demeure de l’homme est souvent ambivalente. L’être humain est satisfait d’une chose et toujours insatisfait de mille autres. Aussi est-il toujours évident que lorsque l’on regarde quelqu’un, on n’en voit que la moitié ; l’autre moitié est entourée d'un silence impossible à rompre qui pourtant, elle aussi, secrète joie ou chagrin.

Oui, Ambivalence ! Ambivalence ! Chacun reste ambivalent, avec, ici-bas, la grâce elle-même et le péché, tout à la fois.

Mais si l’on sait “écouter“ à travers heurs et malheurs mélangés, si l’on reste attentif, comme dit la première lecture, si l’on sait regarder, alors on découvre le « fleuve » (comme celui du Jourdain pour passer en la Terre promise) ; il y a la « mer » (traversée libératrice de la mer rouge). Et la postérité de nos œuvres sera comme les grains sur le sable (Allusion à Abraham). Ton nom (comme celui de la Bien-aimée du Cantique des cantiques), sera pour toujours “gravé“ dans le cœur de Dieu.

Que l’on ne s’inquiète donc pas trop ! Que l’on mange ou que l’on boive, disait déjà St Paul, .

faites tout - parmi les danses ou les pleurs, au moment de l’opulence ou de la privation, dans les veilles ou le sommeil…

faites tout pour la gloire de Dieu. Et la Sagesse de Dieu se révèlera finalement toujours juste à travers ce qu’elle fait. .

Efforçons-nous à cette FOI, .

à cette ESPERANCE. .

Et il sera certain que nous nous retrouverons, nous tous les ambivalents de la terre, dans l’UNITE de l’AMOUR de Dieu en son ciel.

Avent – 2ème Sem. - Jeudi - Un mot tout simple...Jean-Baptiste / Elie

Jean-Baptiste (Ev.), grande figure de l’Avent, nous interpelle tous. – « Et si vous voulez bien comprendre, le prophète Elie qui doit venir, c’est lui ! » Oui, dans la tradition juive, Elie, monté au ciel sur son char de feu, devait revenir. Qui était Elie ?

On peut retenir trois points :

Dégoûté par les violences de son époque (“les violents cherchent à s’en emparer“) - c’est toujours d’actualité - , par les injustices (de la reine Jézabel, notamment) - c’est toujours d’actualité -, Elie est découragé - c’est toujours d’actualité - ; il fait une « dépression » ! Et oui, cela arrive.

Réconforté par Dieu, il marche vers l’Horeb, la montagne Sainte. Et là, grâce au silencieux passage de Dieu, en ce désert, il renouvelle l’Alliance conclue avec Moïse.

C’est alors que réconforté par le « Dieu d’Alliance », il va proclamer le « Dieu UNIQUE » face à toutes les religions polythéistes de l’époque (épisode des prêtres de Baal).

Trois points qui ponctuent parfois notre cheminement terrestre : Découragement par toutes sortes de difficultés ; Renouvellement de notre vocation de baptisé (par l’Eucharistie surtout) ; Proclamation du Règne de Dieu !Je le sais, ces trois phases alternent souvent dans notre existence d’ici-bas où « le Royaume des cieux subit la violence… ». Sachons-le !

Mais retenons encore les paroles prophétiques d’Isaïe : « Je suis le Seigneur ton Dieu. Je te prends par la main droite, et je te dis : Ne crains pas. Je viens à ton secours ! ».

mercredi 10 décembre 2008

Avent – 2ème Sem. - Lundi-Mardi

Il faut lier les lectures de ces deux jours (isaïe). C’est une scène à la fois historique, liturgique et eschatologique.

- Historique : Le peuple Juif revient d’exil par cette fameuse route des multiples « allers et retours » (Ouest-Est-Ouest) . C’est là l’œuvre de Dieu qui, lui-même, ouvre la voie. Aussi est-elle « royale » ! Et sur son passage, tout refleurit. La terre devient luxuriante et féconde comme celle du Liban, du Carmel et de la plaine fertile de Sharon près de la côte.

- Scène liturgique : Ce retour d’exil prend la forme d’une procession vers Jérusalem, vers le Temple du Seigneur. Ce ne sont que chants de joie et d’allégresse ! Les sourds, les boiteux, les muets – cette catégorie de personnes exclue du Temple depuis la malédiction du jeune David conquérant la colline de Sion – font partie du cortège. Signe messianique : le Seigneur fait entrer tous les hommes au cœur droit dans son Temple, sans discrimination.

- Scène eschatologique : Car avec le Messie, « tous ceux qui appartiennent au Seigneur » feront leur entrée en cette Jérusalem dont « Dieu est l’architecte et le fondateur » (Heb.) – Ils y entreront en ce jour UNIQUE (« erad » en hébreu. Cf. Zach. 14.3) qui rappelle le premier (UNIQUE « erad ». Cf. Gen) jour de la Création. C’est dire que toutes les tensions du monde se résolveront dans l’UNITE divine ; la création s’harmonisera – dans ce retour d’exil – dans cette UNITE divine !

Et quand Jésus prie : « Que ton Règne vienne ! », quand, entrant à Jérusalem le jour des Rameaux, il guérit, à la « Belle Porte », un aveugle qui le suit…, il a certainement à la mémoire tous ces textes qui lui étaient familiers depuis son enfance.

Dans la culture juive, cette « Belle Porte », à l’est du Temple, encore appelée improprement à cause d’une mauvaise traduction du grec : « Porte d’Or » et que l’on voit aujourd’hui face à un cimetière juif, est entièrement murée jusqu’à la fin des temps. Seul, le Messie doit l’ouvrir.

Chrétiens, nous le savons, cette porte est déjà ouverte depuis la Résurrection du Seigneur, le jour où le voile du Temple s’est déchiré afin que nous puissions déjà “voir celui qui nous voit sans cesse“. Jésus n’a-t-il pas dit : “Je suis la porte !“. Aussi, cette « Belle Porte » est-elle encore appelée : « Porte de la miséricorde » : tous les boiteux et aveugles que nous sommes spirituellement peuvent y entrer à la suite de Jésus.

Immaculée Conception - 8 décembre 2008

« Aujourd’hui sachons communier au regard de Dieu sur Marie afin que notre propre regard en soit transfiguré. ».

Le regard de Dieu

«…Je te salue, pleine de grâce. », dit l’ange de la part de Dieu. En regardant Marie, Immaculée, Dieu se contemple lui-même, en quelque sorte. En Marie, il se voit « à son image et ressemblance » ; il se retrouve au matin de sa Création : « Dieu vit tout ce qu'il avait fait ; et que cela était bon » : « Tota pulcra es Maria ». Comme tu es belle, toi qui es totalement née de Dieu ! ». C'est la relation à Dieu-Père, Créateur, qui constitue la beauté, la dignité de Marie. Son âme est toute orientée vers Dieu, Créateur et Père.

« Mais le regard de Dieu n'est pas seulement celui d'un Père , il est celui d’un époux : « L’Esprit Saint viendra sur toi ». Marie a été créée à l’image et à la ressemblance de Dieu, pour une union incroyable, en vue d'une fé-condité extraordinaire. L'évangile de l'Annonciation pourrait se résumer, dans une “demande en mariage“ : « Marie, veux-tu devenir la mère de mon Fils ? ». « Oui, tu as été choisie entre toutes les femmes ». … : « Que tu es belle ma bien-aimée, et sans aucune tache ! » (Cant.des Cant). Marie, elle seule, peut parfaitement reprendre les expressions de St Jean de la Croix : « Votre beauté, Seigneur, est telle qu’en nous regardant mutuellement, je parais semblable à vous en votre beauté et je me vois en votre beauté ».

« Mais il ne faut pas oublier le pourquoi de la grandeur de Marie » : « Tu concevras et enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus-Sauveur. L'enfant sera saint et sera appelé Fils de Dieu ». Et Élisabeth la saluera bientôt du nom de « mère de [son] Seigneur ».

Comment Dieu n'aurait-il pas comblé de tous ses dons celle qu'il destinait à être la mère de son Fils Unique et bien aimé ? Tout à l'heure c'était sa relation au Père, à l’Esprit qui rendait Marie « toute belle ». Mais on peut dire aussi que c'est sa relation au Fils qui fait la grandeur de Marie. Oui, le Seigneur a fait pour toi des merveilles, ô Marie, et nous sommes de ces générations qui te proclament bienheureuse.

Notre regard

Mais à force de communier au regard de Dieu sur Marie, de contempler Marie « par lui, avec Lui, en Lui », notre regard finira bien par lui devenir semblable.

Il nous faut retrouver, avec Marie, le monde tout neuf, voulu par Dieu au matin de la Création, tel qu’il sera au matin de la recréation éternelle. Avec Marie, nous pouvons dire que ce qui fait encore la bonté et la beauté du monde, c’est bien sa relation à Dieu-Père, Créateur.

Et si notre pauvre monde a été souillé, alors il faut le mettre, - c’est notre mission - le remettre, grâce à Marie, en relation avec son Fils, Jésus-Sauveur, venu pour laver le monde que nous salissons. Marie nous associe à l’œuvre de son Fils, pour la plus grande joie de Dieu-Père qui, en son Fils, « nous a choisis (comme Marie) avant la création du monde pour que, dans l’Amour, nous soyons saints et irréprochables sous son regard ».

Et Marie nous aide grandement en inspirant nos actions et surtout en vivifiant nos prières si nécessaires. Si, à cause de l’âge et des infirmités, nous ne pouvons rien faire d’autre que de prier, ou même que d’avoir un élan vers Dieu qui englobe tous les hommes, redisons-nous que c’est le principal, en nous demandant seulement : notre regard priant est-il assez pur pour envelopper – comme Marie qui porte Jésus-Sauveur – tous les hommes dans l’Amour de Dieu notre Père ? Afin que tous parviennent « à l’image et à la ressemblance » de Dieu.


vendredi 5 décembre 2008

Avent – 1ère Sem. - Vendredi -

"Croyez-vous ?" "Que tout s’accomplisse selon votre foi !".

La FOI ! Si vous en aviez gros comme une graine de moutarde, dira Notre-Seigneur. Il est vrai que la foi est, apparemment, une notion assez complexe dans le Nouveau Testament, parce qu’elle englobe l’espérance, la charité, parce qu’elle engage toutes les facultés : volonté, intelligence, sensibilité. Mais c’est l’attitude la plus simple et la plus fondamentale de l’homme vis-à-vis de Dieu !

Pourquoi ? Parce que :

* Dieu est TOUT ! Il est Créateur et Fin dernière de l’homme, "Celui par qui et pour qui sont toutes choses" (Heb 11.10).

* Et l’homme, lui, n’est que créature, indigence congénitale, faiblesse permanente, une "ardente vacuité", disait le P. Sertillanges.

Et si l’homme prend conscience de sa condition, il ne pourra que se relier activement à Dieu pour en recevoir lumière et force, solidité. La foi n’est pas autre chose. Le Dieu vivant et véritable est immuable et puissant - tel "un rocher, une forteresse" (ps.) -. Il ne peut dire que la vérité. Ses promesses, d’une manière ou d’une autre, se réalisent toujours.

Il est le Dieu de l’"AMEN" ! (Is. 65.16 – Rm. 3.3).

La racine du mot hébreu "AMEN" signifie : stabilité, solidité. Voilà qui est Dieu ! Elle évoque donc l’idée de soutien, d’appui : "Ayez foi en Dieu, et vous serez soutenus" (2 Chro. 20 .20) - "Si vous ne tenez pas fermes (si vous croyez pas), vous ne subsisterez pas", dit le prophète Isaïe dans un jeu de mots familier à la langue hébraïque : - Lo ta’aminu , lo té’aménu - comme un babillement d’enfant). Aussi, cette racine du mot "amen" évoque-t-elle parfaitement le nourrisson porté par sa mère. Le petit enfant s’appuie sur les bras qui le soutiennent ; il s’abandonne à leur protection ; c’est là qu’il reçoit les principaux soins. Il n’est donc pas étonnant que, religieusement, c’est l’attitude requise par le Seigneur pour entrer dans le Royaume des cieux : "devenir comme de petits enfants".

Ainsi la foi consiste à se tenir ferme en vertu d’une relation à une autre personne, et à se relier solidement à elle, en lui faisant confiance.

La Foi, c’est cette sorte de relation de l’homme faible avec Dieu fort. C’est cette foi que nous évoquons lorsque nous disons : "Amen".

jeudi 4 décembre 2008

Avent – 1ère Sem. - Jeudi - "Veillez" !

«"Veillez !", ne cessent de nous dirent les apôtres et St Paul tout particulièrement en ce temps de l’Avent ! "Veillez !".».

Il nous faut donc être attentif, être en éveil, veiller afin de voir celui qui vient sans cesse. "Veiller", c’est l’un des maître-mot de ce temps de l’Avent. Etre attentif à cette présence du Christ qui, de jour en jour, dans les modestes réalités de nos vies et par de multiples intermédiaires, vient, ne cesse de venir à nous.

"Veillez donc", répète St Paul ! Malheureusement, ce mot, en français, n’évoque pas l’image vigoureuse du verbe que St Paul a forgé, tout exprès, à cet effet. Pour évoquer l’homme d’espérance, Paul le représente comme un guetteur : "Apo-kara-dokein", un guetteur qui dresse la tête et tend le cou (kara) pour épier (dokein) et tâcher de découvrir au loin (apo) ce à quoi il s’attend. "Apo-kara-dokein". A vrai dire, cette attitude ne peut être qu’éprouvante. On est tous tentés de laisser tomber la tête, comme les vierges de l’évangile qui cèdent au sommeil, incapables alors de chanter celui qui va venir. Non ! “Apo-kara-dokein“ : dresser la tête pour voir au plus loin possible, par delà les contingences de nos existences, celui qui vient à nous, le Christ ; être guetteur comme le vigile au sommet des caravelles d’autrefois qui seul pouvait crier le premier : "Terre !" ‘ - "Veillez donc !", répète St Paul avec tous les apôtres. Autrement dit, les chrétiens doivent être - surtout à un certain âge, c’est plus facile – des "insomniaques vigilants" : "Grègoreite", d’où est venu le prénom très chrétien : Grégoire ! Un Grégoire, c’est un homme qui "veille", qui “guette“.

Alors, je dirais :

  • Savez-vous véritablement ce que c'est que de veiller ?
  • Savez-vous ce que c'est que d'attendre un ami, et de le voir tarder ?
  • Savez-vous ce que c'est que d'être dans l'anxiété au sujet d'une chose qui peut arriver ou ne pas arriver ?
  • Savez-vous ce que c'est que d'avoir un ami au loin, d'attendre de ses nouvelles, et de vous demander jour après jour ce qu'il fait en ce moment, et s'il est bien portant ?
  • Savez-vous ce que c'est que de vivre pour quelqu'un qui est près de vous, à tel point

    • que vous lisez dans son âme,
    • que vous prévoyez ses désirs,
    • que vous souriez de son sourire,
    • et que vous vous attristez de sa tristesse,
    • que vous êtes abattus lorsqu'il est ennuyé,
    • et que vous vous réjouissez de ses succès ?

Alors, je dirais :

Et bien, VEILLER DANS L'ATTENTE DU CHRIST EST UN SENTIMENT QUI RESSEMBLE A CEUX-LA, autant que les sentiments de ce monde sont quelque peu capables de figurer ceux d'un autre monde".

mercredi 3 décembre 2008

Temps de l’Avent : Première semaine - Mercredi

«De grandes foules vinrent à lui, avec des boiteux, des aveugles, des estropiés, des muets, et beaucoup d’autres infirmes. Jésus les guérit!».

Il y aurait beaucoup à dire sur la multiplication des pains, ce Signe des signes accomplis par Notre Seigneur! Je me permets de m’attacher à un détail. St Matthieu, à la charnière des deux Testaments, ce “bon scribe qui tire de son trésor du l’Ancien et du neuf“, autrement dit qui discerne dans les paroles et les gestes de Notre Seigneur l’accomplissement des actions divines au travers des âges passés (ici : la manne, et le miracle d’Elisée) est le seul à insister sur la présence des aveugles, des estropiés… etc. Pourquoi ?

C’est que ce bon scribe de Matthieu connaît bien son “Histoire Sainte“. Quand David est sur le point de conquérir la petite colline des Jébuséens qui deviendra Jérusalem où sera construit le temple de Dieu, ses ennemis lui firent savoir : “Tu n’entreras ici qu’en écartant les aveugles et les boiteux !“. C’était pour dire : “David n’entreras pas ici“. Et pourtant, David s’empara de la colline de Sion ; et l’on s’exclamera,: “Quant aux boiteux et aux aveugles, ils dégoûtent David“. Et on ira répétant : “Aveugles et boiteux n’entreront pas dans la Maison“, dans la Cité de David, dans le Temple. (cf. 2 Sam 5/6 sv). Et depuis lors, c’est vrai, les aveugles et les boiteux… ne pouvaient entrer dans le temple ! Seul le Messie, d’après les prophètes (Isaïe) pourra supprimer cette exclusion, cette discrimination.

Aussi, Jésus, descendant de David certes, mais nouveau Moïse que Moïse lui-même avait annoncé comme plus grand que lui, et qui, mieux que lui, peut donner à tous sans exception le vrai pain venu du ciel, et donner accès pour tous au vrai Temple de Dieu qu’il est lui-même (son Corps !) répondra aux émissaires de Jean-Baptiste qui lui demandaient : “Es-tu celui qui doit venir ?“…, il répondra : “Allez dire à Jean : les aveugles voient, les sourds entendent, les boiteux marchent, les pauvres sont évangélisés…“. Ce qui veut dire : Je suis le Messie annoncé par les prophètes, Messie pour toutes les nations sans exception, ce Messie qu’Israël doit lui-même reconnaître et annoncer au monde entier.

Détail historique et amusant mais qui entraîne une seule et importante remarque : Désormais, même si nous sommes aveugles, estropiés, muets, infirmes… - et nous le sommes tous d’une manière ou d’une autre -, sachons que Jésus nous accueille et nous accueillera à son festin du Royaume de Dieu dans la Jérusalem céleste et dont l’Eucharistie est le repas viatique pour y parvenir.

Une seule remarque qui est une question : “Savons-nous nous reconnaître suffisamment aveugles et infirmes ? Car Jésus n’a-t-il pas dit : “Je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs !“. Et certains, inconsciemment, de penser : “Et nous alors, les justes, que va-t-on devenir ?“. Je serais tenter de dire que ce genre de question est presque du domaine de l’incurable!

mardi 2 décembre 2008

Temps de l’Avent : Première semaine - Mardi

« Tout m’a été confié par mon père. Et personne ne connaît qui est le Fils, sinon le Père. Et personne ne connaît qui est le Père, sinon le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler ». Et il le révèle par leur Esprit commun (« exultant de joie sous l’action de l’Esprit Saint ».

Nous rentrons là dans le mystère de la Sainte Trinité ! Un mystère, ce n’est pas un rébus, une énigme. Ce n’est pas quelque chose que l’on ne comprend pas ; c’est quelque chose que l’on n’aura jamais fini de comprendre. Ce qui est tout différent.
« Dieu est Amour, dit St Jean », Et cet Amour est échangé entre le Père, le Fils et le Saint Esprit.

Qu'est-ce que l'amour d'un père ? Un amour de père, c'est un amour donné. Quand il s'agit d'un père dans une famille humaine, il est de l'amour donné. Mais quand il s'agit du Père dans la Sainte Trinité, le Père est TOUT l'Amour donné.

Qu'est-ce que l'amour d'un fils ? Un amour de fils, c'est l'amour reçu. Quand il s'agit d'un fils dans une famille humaine, il est de l'amour reçu. Quand il s'agit du Fils dans la Sainte Trinité, il est TOUT l'Amour reçu. C'est parce qu'il est tout l'Amour reçu que le Père n'a qu'un Fils Unique, Jésus, en qui il épuise éternellement sa nature et sa vie.

Et qu'est-ce que l'Esprit ? L'esprit, dans une famille humaine, c'est de l’amour échangé. Quand il s'agit de l'Esprit dans la famille éternelle, en Dieu, il est TOUT l'Amour échangé.

Le Père est TOUT l'Amour donné. Le Fils est TOUT l'Amour reçu. L'Esprit est TOUT l'Amour échangé.

Et n'oublions surtout pas : l'Esprit Saint qui est TOUT l'Amour échangé et que le Fils nous révèle et nous envoie de la part du Père, habite en nos cœurs depuis le baptême.

Tout Amour vient du Père. Le Fils est la Gloire de l'Amour : “Celui-ci est mon Fils unique, en qui Je me glorifie” (Matt. 3,17). - “Père, glorifie-moi de la Gloire que J'avais auprès de Toi… ” (Jn. XVII, 5).

Depuis notre baptême, notre union dans le Christ est le grand plan de Dieu : “Nous récapituler tous en Jésus” (Eph. 1,10) pour nous permettre de glorifier notre Père des Cieux... par son Fils, dans l’Esprit. Etre, nous aussi la Gloire du Père ! Comment peut être glorifié Dieu ? Par la louange. Qu'y a-t-il à louer en Dieu ? LUI, c'est-à-dire sa vie, son être, sa nature, ses Personnes, c'est-à-dire l'Amour, car “Dieu est Amour”.

Et il y a une chose de très remarquable dans l’évangile de St Luc. A la suite de l’exclamation de Notre Seigneur, St Luc récapitule l’enseignement du Christ : Aimer Dieu et aimer son prochain (parabole du Bon Samaritain) !!!
C’est ainsi que nous vivons déjà de la vie même de Dieu-Trinité !

Temps de l’Avent – Première semaine – Lundi (suite)

« Beaucoup viendront de l’Orient et de l’Occident et prendront place au festin du Royaume de Dieu ».

Oui, cet universalisme que proclame Jésus n’est pas évident. C’est le drame de l’Histoire de l’Eglise et encore notre drame. Mais, là encore, il faut situer cet idéal dans une évolution, dans une progression qui est le résultat de toute une « pédagogie » de Dieu à notre égard. Comme pour l’éducation d’un enfant. Au début, l’enfant ne pense facilement qu’à lui-même. Il ne fait que crier ses besoins (ne seraient-ce qu’alimentaires), ses envies… Il est égoïste. Mais au fur et à mesure que sa personnalité se construit, peu à peu, il devient capable d’accueil, capable de regarder son frère, sa sœur comme un autre lui-même…

Ainsi, de même, quand le peuple d’Israël, nouvellement « enfanté » en l’Alliance du Sinaï après sa « sortie » d’Egypte, arrive entre en « Terre promise », il n’a pas d’autres moyens, pour garder sa trop jeune consistance spirituelle, sa foi au Dieu Unique, au Dieu de l’Alliance, face au polythéisme ambiant, cette « abomination des nations », que de pratiquer égoïstement (comme un enfant) l’« anathème ». Il est encore « spirituellement » égoïste.

Il suffit de se souvenir de toutes les conquêtes narrées dans le livre de Josué qui est un livre plus théologique qu’historique.

Il suffit de se souvenir d’Elie, si grand pourtant. Avec l’aide de Dieu, il confond les prêtres de Baal. Cependant l’épisode se termine ainsi : « Elie fit descendre les prêtres de Baal près du torrent de Qishôn et il les égorgea » (I Rois 18). Bigre ! Elle n’est quand même pas très normative, cette histoire-là !Malheureusement, l’histoire de l’Eglise elle-même comporte des incidents analogues. C’est qu’il faut situer tout cela dans une certaine évolution… On ne peut pas donner n’importe quelle nourriture à un grand malade. Il faut commencer par renforcer peu à peu les aptitudes d’assimilation de son corps pour qu’il devienne capable d’intégrer. Et bien, il en de même dans l’histoire de l’Eglise, dans l’histoire de l’« homme spirituel » (au sens paulinien du mot). Il faut sans cesse trouver et retrouver sa consistance dans sa foi pour ne pas être désintégré afin de mieux intégrer.

Il faut se rappeler l’épisode de Pierre à Jaffa. Il est dépassé par les événements : des païens qui viennent à la foi au Christ ! C’est après son grand « songe gastronomique », qu’il comprend : il peut baptiser ce païen de Centurion, Corneille ! Quel grand pas ! Des païens peuvent être assimilés au Corps du Christ !

Et peu à peu, l’Eglise prendra conscience de sa vocation à l’universalité.

C’est St Paul, me semble-t-il, l’apôtre « des îles lointaines » qui a donné la formule d’orientation pour une juste intégration : « Tout est à vous ; mais vous, vous êtes au Christ ; et le Christ est à Dieu ! ».

Il y a une telle puissance d’intégration dans le Christ ! Un chrétien ne doit donc avoir aucune pusillanimité devant tout ce qui est proposé au nom de l’art, de la science et face aux nations quelles qu’elles soient. Mais encore faut-il qu’il ait une personnalité d’adulte, capable d’intégration : « Vous, vous êtes au Christ ! ». C’est tout le problème de la consistance personnelle dans la foi qui donne la capacité d’intégration. Il y a toujours un risque de dislocation à cause de tout ce qui nous est offert matériellement, intellectuellement, spirituellement, à droite comme à gauche.

Alors il faut savoir pratiquer ce grand remède : Il faut, de temps à autre, savoir retourner au « désert », ce lieu privilégié où Dieu parle au cœur [Il y a un jeu de mots en hébreu, dans Amos 2.16 : "Je la conduirai au désert (rBdMi midbar) et je parlerai (yTrBdI dibarti) à son cœur » : « midbar dibarti » : « au désert, je parlerai »)]. C’est dans ce « désert » qu’on retrouve de la consistance dans notre foi afin de mieux accueillir, intégrer, digérer tout ce qui se présente…

Temps de l’Avent – Première semaine – Lundi (à suivre)

«Beaucoup viendront de l’Orient et de l’Occident et prendront place au festin du Royaume de Dieu».

C’est un fait : Jésus aimait se rendre en « terre païenne ». A l’ouest comme à l’est ! Par exemple, après le grand signe de la multiplication des pains - qui rappelle le «don» de la manne au désert et qui annonce le « don » de l’Eucharistie -, énervé par l’opposition systématique des pharisiens, déçu par l’incompréhension de ses apôtres, Jésus se rend à Bethsaïde où il guérit un sourd-muet : « Il fait entendre les sourds et parler les muets » (Mc 7.37). Eux, les sourds, païens, ils comprennent! Et proclament! (kérygme).

Puis (d’après Math), il envoie ses disciples le précéder sur « l’autre rive » pendant qu’il va prier. Il les rejoint, marchant sur les eaux tumultueuses, ce qui rappelle l’épisode de la tempête apaisée (Mc 4.35); deux récits qui font allusion au livre de Jonas, ce livre le plus universaliste de l’A.T. : ce sont des païens qui se convertissent à la Parole de Dieu! Des païens! Arrivé en Décapole, pays païen par excellence (Ils élèvent des cochons et en mangent, rendez-vous compte!), il guérit (où il avait déjà guéri) un « démoniaque » qui, lui, veut « suivre Jésus »! Mais Jésus l’envoie proclamer (kérygme) dans la Décapole les merveilles qu’il a fait pour lui. C’est un païen, le premier, qui « proclame » (kérygme) le message de Jésus!

Et pourquoi ne pas situer là l’épisode de la « Syro-phénicienne », païenne de l’Ouest (sud du Liban actuel), figure qui correspond à ce païen démoniaque de l’est. Elle, elle semble avoir compris - au contraire des pharisiens et même des disciples - le sens du signe par excellence de la multiplication des pains puisque qu’elle se suffirait des « miettes qui tombent de la table ». Elle seule, cette païenne, semble quelque peu comprendre ce grand Signe de Jésus!

C’est un fait! Jésus aime les païens! Il séjourna que peu de temps en Judée et encore moins en Samarie. Beaucoup plus en Galilée, autour du lac et dans la plaine d’Izréël. Et souvent en terre païenne (Syro-Phénicie, Décapole, Hermon…). La « confession de Pierre » eut lieu en terre païenne, dans les parages des sources du Jourdain !

Cet « universalisme » que Jésus proclame autant par ses paroles que par ses actes, n’est pas toujours évident. Ce fut le « drame » de l’Eglise elle-même en certaines époques de son Histoire. C’est peut-être aussi le drame de notre foi? Simple réflexion!