vendredi 29 mai 2009

Résurrection (Paul) - Pâques 7 – Vendredi – (Actes 25.13 sv)

“Ils (Paul et ses accusateurs) ont eu une discussion à propos d’un certain Jésus qui est mort et dont Paul affirme qu’il est VIVANT !“.

Ainsi parlait le procurateur, le Juge Festus au roi Agrippa, son invité, avec son épouse Bérénice. Remarquons, au passage, que ce juge Festus est d’une probité exemplaire et d’une intelligence lumineuse au point que l’on peut dire qu’une des meilleures définitions du christianisme fut prononcée par la bouche de ce juge romain, païen pourtant ! (Occasion de prier pour tous les magistrats…).

Paul, marqué sur le chemin de Damas par la Lumière éclatante qu’est le Christ du permanent matin de Pâques ne cessera d’affirmer haut et fort : “Le Christ est ressuscité !“. - “Si le Christ n’est pas ressuscité, notre prédication est vaine et vaine aussi votre foi ! Mais non ! Le Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui sont morts…“(I Co. 15.17).

Toute la vie de Paul chantera ce verset du psaume 68ème : “Dieu est pour nous le Dieu des victoires ; et les portes de la mort sont à Dieu le Seigneur !“ (68.21).

Et de ville en ville, tel sera le message de Paul !

- A Athènes, ville raffinée, intellectuelle, son message ne sera pas reçu. Il en fera une quasi dépression !

- A Corinthe, ville portuaire, à la réputation sulfureuse, il saura se faire comprendre, puisant ses arguments non plus, du coup, dans des spéculations philosophiques, mais dans la réalité des interventions divines à l’égard de son peuple : “notre Dieu est le Dieu des victoires…“ ; et sa dernière victoire, c’est sur la mort elle-même !

Se référant probablement à la célèbre victoire nocturne de Gédéon remportée bizarrement en cassant des cruches qui contenaient des torches (de sorte que la montagne où se trouvaient les Hébreux parut soudainement comme divinement embrasée, ce qui effraya l’ennemi qui s’enfuit…cf Juges 7), il écrira : “Ce trésor (lumineux de la vie victorieuse de la mort), nous le portons dans des cruches pour que soit manifestée que cette puissance (de vie en nous) vient de Dieu et non point de nous“ (II Co. 4.7). [Désormais, qu’un chrétien dise à un autre chrétien : “T’es une cruche“ ne doit pas être considérée comme une offense !]

Certes, l’homme par sa fragilité est une cruche. Mais quand la cruche se cassera, c’est alors que le trésor qu’elle contient - cette lumière de vie divine en lui - sera manifeste et totalement victorieuse (sur la mort). Et Paul de préciser : à chacune de nos respirations, nous recevons la vie de Dieu… A chaque instant, ce mystère de mort et de résurrection imprimé au plus profond de notre être par le caractère baptismal se manifeste… Même si l’homme extérieur (la cruche!) part en ruine, notre être intérieur (ce trésor lumineux de vie) se renouvelle à l’image du Créateur…

- A Jérusalem, Paul affrontera ses compatriotes sur ce même sujet.

- Et a Césarée, lors de son procès, il s’adressera au roi Agrippa, l’invité du juge Festus : Toi qui es Juif, tu devrais comprendre cela ! Car la résurrection des morts ne se prouve pas par des raisonnements philosophiques (ce qu’il avait voulu faire à Athènes) ; elle est déjà inscrite dans le réalisme de notre histoire (juive) : - le passage de la mer rouge, du Jourdain, - toutes les victoires de vie en la plaine d’Izréël, (où Dieu n’a cessé de “semer“ - sens de ce mot - la vie pour son peuple !), - et celle remportée sur les Assyriens (Isaïe), - et la renaissance du peuple après l’exil… etc. Souviens-toi, dit-il !

Et cette conviction de la vie, de la résurrection pour le peuple élu est passée peu à peu en la conscience individuelle. L’un des Maccabées, ces martyrs de la puissance grecque, ne disait-il pas : “Scélérat que tu es, tu nous exclus de cette vie présente, mais le Roi du monde nous ressuscitera pour une vie éternelle… C’est du ciel que je tiens ces mains que tu vas me couper, mais c’est de Dieu que j’espère les recouvrer…“. (II Mac 7.9sv).

De plus, selon un autre courant de pensée, le juste doit être récompensé... Aussi avec Jésus ressuscité, c’est Dieu qui sort de son silence et ne laisse pas le Juste voir le Shéol. Au matin de Pâques, il prend en main sa cause. Et nous avons alors la conviction que “si nous marchons comme Jésus a marché“, si nous passons par où il est passé, nous parviendrons là où il est. Il y a désormais une “tête de pont“ par-delà l’absurde. C’est déjà inscrit en nous par le baptême !

St Paul a vécu ce mystère de mort et de résurrection sur la route de Damas. Mais tout au long de sa vie, il a fait l’expérience que ce baptême qu’il avait reçu se manifestait, se traduisait d’instant en instant. La vie du Christ en nous se manifeste en chaque instant, comme à chaque moment, il y a la vie en nous chaque fois qu’on inspire pour expirer, rendre le souffle… Et quand viendra un moment où on rendra notre dernier souffle, ce sera dans la certitude que Dieu à qui nous remettrons ce dernier souffle nous le rendra. Car il est capable, lui qui nous a créés, de nous re-créer. Oui, notre Dieu est un Dieu qui a les issues de la mort elle-même !

jeudi 28 mai 2009

St Paul ! - Pâques 7 – Jeudi – (Actes 22.30 sv)

Il est beaucoup question de St Paul dans les lectures de ces jours-ci. Aussi, je ne ferai pas d’homélie aujourd’hui. D’ailleurs, la véritable homélie, dirait St Paul, c’est vous, celle que vous écrivez vous-mêmes en vos vies : “De toute évidence, vous êtes une lettre du Christ écrite non avec de l’encre, mais avec l’Esprit du Dieu vivant, non sur des tables de pierre (comme la Loi au Sinaï), mais sur des tables de chair, sur vos cœurs“ (2 Co. 3.3). Je préfère donc vous transmettre aujourd’hui comme trois clefs permettant d’entrer davantage dans la pensée de cet apôtre des nations…

Première clef : Paul disait : “Je suis né à Tarse, ville qui n’est pas sans importance“. Cette ville comprenait 300.000 habitants environ, avec un port à quelques kilomètres. Grâce à sa position commerciale, elle était opulente ; et sa population était très mélangée. Elle faisait la jonction entre l’Occident et l’Orient. Pompée, César y étaient passés. Marc-Antoine et la reine Cléopâtre s’y étaient rencontrés en grande pompe et magnificence… pour leur perte !!! Ainsi, la Providence préparait Paul à ne pas faire de différence entre Juifs et Romains, Grecs ou Barbares, hommes libres ou esclaves.

Même si le jeune Paul, en tant que Juif, ne pouvait entrer en sa célèbre université où enseignait encore un philosophe admiré, Athénodore (ancien maître et ami de l’empereur Auguste), il bénéficiait de tout un courant de culture grecque. Il apprit la langue commune de l’époque - la “koinè“ – qu’il saura parfaitement manier. Cette ville universitaire était bercée de philosophies, religions, de pensées artistiques très diverses. Paul écrira plus tard : “Scrutez les courants d’idées et retenez ce qui est bon !“ (I Thes. 5.21).

Aux jeux des stades de la ville (interdits pourtant à un Juif), il empruntera ses plus belles comparaisons : “Vous courriez si bien !“, dira-t-il aux Galates. “Pour moi, je poursuis ma course pour tâcher de remporter le prix“ (Ph. 3.12).

A la porte de la ville, il y avait la statue de Sardanapale, roi légendaire de Ninive (7e s. – cf. Delacroix), avec cette inscription assyrienne : “Voyageur, mange, bois et laisse-toi vivre !“. - “Si les morts ne ressuscitent pas, dira St Paul, mangeons et buvons, car demain nous mourrons“ (I Co. 15.32).

Bref, Paul est un citadin jusqu’au bout des ongles. Dans ses lettres, il ne parle pas du travail de la terre au contraire de Jésus qu’il prêche ! Lui qui a beaucoup voyagé, il ne fera jamais allusion aux magnifiques paysages qu’il a du rencontrer… Oui, St Paul était un citadin. Et il n’en avait pas honte !

Deuxième clef : Paul disait encore : “Je suis Hébreu, fils d’Hébreu, pharisien, fils de pharisien !“. Son nom “Shaoul“ veut dire “Désiré“, “Demandé à Dieu“. Désiré par sa mère sans doute, comme naguère Anne qui désirait un fils qu’elle appellera “Samuel“ (Dieu a entendu). Cependant Paul ne parlera jamais de sa mère. Mourut-elle jeune ? Cela expliquerait les sentiments de reconnaissance envers la mère de Rufus qui s’était dévouée pour lui d’une manière si délicatement féminine (Cf. Rm 16.13). On suppose seulement qu’il a eu une sœur. En tous les cas, il était fier d’être hébreu. Il gardera pour son peuple il tendresse émue : “Je souhaiterais être maudit moi-même, séparé du Christ, pour mes frères, ceux de ma race…“ (Rm 9.1sv).

Les Juifs avaient un excellent système d’éducation :
  • A partir de 5 ans, Paul apprend l’essentiel de la Loi et l’histoire de son peuple ; il vibre à la pensée du Messie attendu.
  • A dix ans, il fait la dure expérience de la tradition orale (préceptes) : “Ne fais pas ceci, fais cela…“… Peut-être n’en a-t-il pas gardé un excellent souvenir, lui qui conseillera : “Parents, n’exacerbez pas vos enfants…“.
  • Il apprend un métier. (Tarse était réputé pour son tissage). C’est obligatoire dans l’éducation juive. Car le “pur intellectuel“ est mal vu ; c’est à la limite du pathologique. Et puis ne faut-il pas gagné sa vie soi-même ?
  • A 18 ans, il part à Jérusalem écouter un maître vénéré (Act.5.34), Gamaliel, homme au cœur généreux et compréhensif, petit fils de Hillel, esprit souple et universaliste. “Je faisais des progrès dans le judaïsme, surpassant la plupart de ceux de mon âge et de ma race par mon zèle débordant pour les traditions de mes pères“ (Ga. 1.14). C’est ainsi qu’il apprit la Bible par cœur. (Il n’avait ni ordinateur ni bibliothèque durant ses voyages au cours desquels il la cite).

Bref, esprit curieux, ouvert, ayant le goût du beau langage, même si les idées se bousculaient un peu trop au portillon de ses lèvres, il avait acquis une solide culture juive, gardant le souci de la Tradition, de l’orthodoxie et aussi - il faut le dire - une subtilité quasi rabbinique !

Enfin Paul disait : “Je suis citoyen romain“. Son père avait acheté ou acquis ce titre, privilège très important excluant les peines déshonorantes et donnant droit à être jugé par le tribunal impérial. C’est ainsi qu’il en appellera à César lors du procès que les Juifs lui intenteront. Il semble qu’il était fier de ce titre car il admirait probablement l’ordre romain, voyant en celui-ci l’obstacle qui empêcherait que s’établisse, comme il dira, le règne de l’ “homme d’iniquité“.

Voilà en quelques traits le portrait intellectuel, moral et religieux de Paul ! A sa suite, nous qui avons hérité, de façons diverses, de biens des richesses - celles d’intelligence, de cœur et d’âme - savons-nous non seulement les transmettre, mais les utiliser pour le service et des hommes et de Dieu tout à la fois ?

mercredi 27 mai 2009

Notre Combat! Pâques 7 – Mercredi – (Actes 20.28 sv – Jn 17.11sv)

“Père garde-les du Mauvais“, priait Jésus.
“Il s’introduira parmi vous des loups redoutables“, disait Paul.

“Père, garde mes disciples dans la fidélité“, priait encore Jésus,
“Soyez attentifs à vous-mêmes“, disait Paul aux Anciens d’Ephèse !

Oui, la vie est un combat à l’extérieur de nous, contre le Mauvais ; et à l’intérieur de nous-mêmes contre nos défaillances possibles. Pour illustrer ce combat, je me permets un très court résumé d’un travail d’autrefois, à propos des psaumes :
  1. La vie est un combat impitoyable. Et pour ce combat, il y a deux ennemis : le ”Juste” et le ”Révolté”. Tous deux disent non :
    • l'un refuse la voie de Lumière ; l'autre celle des ténèbres (note 1)
    • l'un dit non à l'iniquité du monde ; l'autre à la puissance de Dieu.

    (1) - Oh ! Heureux l'homme qui ne suit pas le conseil des méchants,
    (25) - O Dieu ! Fais-moi connaître tes chemins de vie ;


  2. Le ”Révolté” dit non … à Dieu !Ses noms sont multiples : homme de mensonge, de malice, de ruse, de violence…! Son esprit forge le trouble, sa langue la perfidie, son seul slogan étant : “Dieu n’est pas !” Mais il se heurte au ”Juste” qui lui révèle Dieu qu’il refuse et dont le nom seul bouleverse ses horizons aveugles. Il le tente, l’asservit. Cependant, si pour le Révolté il n’y a qu’un seul meurtre possible, celui du ”Juste”, sa nostalgie demeure le meurtre à jamais impossible : le déicide. Le Révolté tente d’assouvir dans le meurtre du ”Juste” son remords de ne pouvoir tuer Dieu. Aussi, le révolté vit et périt dans l’absurde.

    (14) - L'insensé déclare : "Non et non ! Dieu n’existe pas !"
    (52) - Il préfère le mal au bien, le mensonge à la justice ;
    (37) - Toujours, il complote dans le dos du juste :
    (41) -"Quand va-t-il mourir ?" "Il s'en est remis à Dieu, qu'il le délivre !"

  3. Le ”Juste est donc l’opprimé, le “souffrant” par excellence. Mais en même temps il est l’homme droit, le sage ; il est surtout le fervent de Dieu. Il aime Dieu et veut être aimé de lui ! - Il refuse donc le mal, les divers compromis avec le monde ! Et il déclare la guerre à la guerre du Révolté contre lui !
    Mais au combat, il va les mains nues, car pour lui, Dieu seul est son appui. Il sait que la force ne sert à rien, ne résout rien ; elle n’est que la sanglante maîtresse du Révolté.

    (27:9) - O Dieu, ne me laisse pas, ne m'abandonne pas !
    (18:89) - Je t'aime, Seigneur, ma force.
    (27.1) - Oui, Dieu est ma lumière. De qui aurais-je peur ?

  4. Cependant, sur cette route de malheur, le ”Juste” a un viatique : la Parole de Dieu. Par elle, il se sait déjà “enfant de Dieu”. Elle lui fait goûter déjà, quelque peu, à la Vie éternelle ! Elle trace sa ligne de conduite.

    (19) - La Parole de Dieu est parfaite, source de paix, Elle réconforte le cœur.
    Elle est plus désirable que l'or, que l'or le plus fin ;

  5. Mais, las ! Cette Parole de Dieu, cette Parole d’amour et de tendresse lui révèle, en même temps, sa souillure intérieure et ses fautes : il se sent indigne de Dieu. Ses fautes l’accablent et l’empêchent d’avancer vers son Dieu ! Son tourment le plus insupportable est de se voir, par sa faute, séparé de Dieu, captif de sa propre stérilité. Mais il espère toujours !

    (38:5) - Mes fautes m’obsèdent, elles me pèsent comme un fardeau.
    (51:3) - Pitié pour moi, Dieu, en ton amour, lave-moi de mon mal ;
    (38:2) - en ton indignation, ne me rejette pas !
    (51:12) - Recrée au-dedans de moi un cœur pur ;

  6. Mais Dieu va intervenir. Il envoie un libérateur, le Messie ! Il est à la fois :
    • ce fils d’homme, le ”Juste” par excellence venant affronter le Révolté ; il est “l’homme des douleurs”, pur de tout péché. Mis à mort, il offrira son sang par fidélité à Dieu !
    • Mais il est aussi le Messie de gloire ! La mort est vaincue et la route du Révolté définitivement écrasé s'évanouit comme un cauchemar.

      Par lui, en lui, avec lui, le ”Juste” est réhabilité à tout jamais, établi pour toujours dans la paix !

    Ce ”Juste” par excellence, lui aussi, a pu dire :

    (22:2) - “Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?
    Mais comme Messie de Dieu, il dit aux insensés :
    (75:5) - "Arrêtez vos folies" ! "Ne redressez plus la tête, en narguant Dieu d’un air hautain" !
    Aussi, Dieu lui a dit :
    (2:7) - "Toi, mon fils, moi, aujourd'hui, je t'ai engendré".

  7. Alors, ce sera le Règne de Dieu ! Car le sacrifice du Messie de Dieu marque aussi son retour à Dieu en Roi de gloire, attestant le pardon et la Rédemption de tous !

    Le Révolté vaincu, tous les peuples de la terre abandonnent leurs faux dieux. Ils retournent à Dieu, se prosternent devant lui et le célèbrent.

    Par lui, avec lui, en lui, ce sera la Réconciliation de tous avec Dieu, de tous les hommes entr’eux !

    Et tous chanteront la gloire de Dieu et celle de son Messie !

    (99:1-2) - Dieu règne ; il règne sur tous les peuples !
    37:20 Ses ennemis se fanent comme les fleurs des champs ;
    (96:10) - ils partent en fumée ! Criez à toutes les nations : “Dieu seul !”
    (47:2) - Acclamez-le avec des chants de joie ! Alleluia !


    Tel est notre combat,
    • combat extérieur avec le Révolté qui règne sur le monde !
    • combat intérieur à cause de nos fautes !

    Telle est notre espérance avec le Christ !
    Tel est notre avenir dans le Christ !

Note 1 : Les citations sont toutes tirées des psaumes.

mardi 26 mai 2009

La Gloire de Dieu. Pâques 7 – Mardi – (Actes 17.1 sv.)

Il est à noter que les mots “gloire“, “glorifier“ sont employés six fois dans notre évangile d’aujourd’hui ! Vous vous souvenez certainement du sens du mot “gloire“ dans la Bible. En hébreu, le mot “kabod“ signifie : “être lourd“, “ce qui donne de l’importance, de la magnificence“. Ainsi, la gloire de l’olivier, c’est son huile !

Or, Dieu, personne ne l’a jamais vu ! Il “habite une lumière inaccessible“ (I Tim. 6.16) que l’œil ne peut soutenir ! Cependant son Etre de lumière impénétrable - sa transcendance, dirions-nous - rayonne. Si la lumière du soleil que l’œil ne peut soutenir dévoile tout ce qui existe sur terre, les rayons divins, eux, créent ce qu’ils illuminent en même temps : “Les cieux racontent la gloire de Dieu“. La gloire de Dieu, c’est sa manifesta-tion : “Tout don vient d’en haut, du Père des lumières !“, dira St Jacques (Jac. 1.17). Et il reste vrai que la création est le premier livre de la connaissance de Dieu : “depuis la création, les perfections invisibles de Dieu sont visibles dans ses œuvres. Aussi sont-ils inexcusables ceux qui ne lui rendent ni gloire ni actions de grâce“ (Rm 1.19 sv).

Bien plus, Dieu s’est fait homme en Jésus Christ : “Il a habité parmi nous ; nous avons vu sa gloire, cette gloire que, Fils unique plein de grâce et de vérité, il tient du Père“. (Jn 1.14). Fils de Dieu, il est “le resplendissement de sa gloire, l’effigie de sa substance“ (Heb 1.3).

Aussi, le premier signe que posa Jésus fut celui de Cana : “tel fut le premier signe ; il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui !“ (Jn 2) (1).

Et le dernier signe qu’annonçait le miracle de l’eau changé en vin (2) fut le signe de son sang répandu pour la multitude (avec sa résurrection) : “L’heure est venue où le Fils de l’homme va être glorifié“ (Jn 12.23), où la splendeur de sa puissance divine sera la plus manifeste aux yeux de la foi. Car ce n’est qu’avec les yeux de la foi que cette gloire divine est reconnue : “si tu crois, disait Jésus à Marthe, tu verras la gloire de Dieu ?“ (Jn 11.40).

C’est avec cette foi que nous pouvons lire l’évangile d’aujourd’hui, en compagnie de Jean, le contemplatif !
  • “Père, donne-moi la gloire que j’avais au commencement du monde !“. En Dieu, tous les rayons lumineux du “Père des lumières se focalise en son Fils, Verbe de lumière (Jn 1.9). La gloire de Dieu-Père rayonne sur son Fils (Cf. II Co. 4.6). Il est “le Seigneur de gloire“ (I Co. 2.8), cette gloire qu’Isaïe avait déjà eu le privilège de contempler (cf. Jn 12.41).
  • Et en Dieu, le Fils est entièrement “tourné vers le Père“ (Jn 1.1). (3). La gloire du Fils rejaillit sur Dieu Père : “Tout ce qui est moi est à toi… !“. “Père, priait Jésus, glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie !“
  • Et l’échange de cette gloire entre le Père et le Fils est comme leur respiration commune, un souffle commun : leur Esprit. L’Esprit est la gloire et du Père et du Fils. Et la résurrection de Jésus est leur gloire commune : “Dieu le Père l’a ressuscité d’entre les morts“ (Gal 1.1) avec son Esprit (Rm 8.11).

Voilà la vie “glorieuse“ au sein même de la Trinité que Jean contemple !

Bien plus, désormais, la gloire du Christ ressuscité, gloire qu’il tient du Père avec le Saint-Esprit, se reflète en ses disciples, les transforme à son image et ressemblance “de gloire en gloire“ (II Co. 3.18). Avec le Christ, les chrétiens se savent déjà “citoyens des cieux“ (Cf. Col. 3.1) ; ils doivent “briller comme des foyers de lumière“ (Ph 2.15sv). Ici-bas, leur vie est un cheminement vers la “gloire éternelle dans le Christ (I Pet 5.10), à laquelle Dieu les a appelés ( I Thess 2.12). La souffrance même sera transfigurée (I Pet 4.14). “La tribulation du moment nous prépare, bien au-delà de toute mesure, un poids éternel de gloire“ (II Co 4.17). Car le Christ nous a aimés ; il s’est livré lui-même pour l’Eglise qui est son Corps ; “il voulait se la présenter à lui-même toute resplendissante de gloire, sans tâche ni ride, mais sainte et immaculée“ (Eph. 5.25.27). Alors on peut dire : chrétiens, nous sommes destinés à participer à cette “gloire éternelle dans le Christ“ (I Pet 5.10), lorsqu’à la fin des temps, “ le Fils de l’homme viendra dans la gloire de son Père avec ses anges“ (Mc 8.38).

La gloire du Christ ressuscité nous enserrera dans ces liens d’amour que s’échangent éternellement le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Nous connaîtrons que Dieu est UN et comment il est UN. Là, nous serons connus et nous connaîtrons. Là, nous nous connaîtrons et nous nous reconnaîtrons dans la gloire de l’amour du Père et du Fils et du Saint-Esprit.

Tel sera notre partage à la fin, sans fin, quand le Christ apparaîtra nous donnant “la couronne de gloire qui ne se flétrit pas“ ( I Pet 5.4).

(1) A rapprocher de Ex. 14.31 : Les Hébreux virent le prodige (traversée de la mer rouge, signe fondateur de l’identité du peuple) ; Ils crurent en Dieu et en Moïse son serviteur.

(2) A remarquer qu’en hébreu, vin se dit : “sang de la grappe“ !

(3) “pros théon“, en grec. “pros“ qui marque une orientation active, incessante. A remarquer que c’est la même expression que l’évangéliste emploiera dans la réponse de Jésus à Marie de Magadala : “Je monte vers mon Dieu (“pros theon“) qui est votre Dieu“ (Jn 20.17).

lundi 25 mai 2009

Institution et liberté ! – Pâques 7 – Lundi – (Actes 15.26 sv.)

C’est un sujet difficile que me suggère la lecture : celui de l’Institution (Institution-Eglise) et de la liberté dans l’Esprit-Saint !

Il est certain que l’Esprit de Dieu est à l’origine de l’Institution ! Cela va de la structuration du peuple de Dieu dans l’A.T., jusqu’à l’unité du Peuple de la Nouvelle Alliance dans le Christ qui récapitule tout en lui !

Mais l’Esprit Saint qui a suscité et suscite l’Institution se réserve toujours la possibilité de la stimuler par des interventions imprévues qui viennent, parfois, de l’extérieur de l’Eglise. Aux apôtres qui s’étonnent qu’un étranger à leur groupe puisse chasser les démons, Jésus répond : “Qui n’est pas contre nous et avec nous !“ (Mc 9.18).

Le premier à en faire l’expérience, c’est St Pierre, le chef de l’Institution pourtant (Actes 10.24) : après son “songe gastronomique“ qu’il a eu à Joppé (Actes 10.9sv), il va chez le centurion Corneille. Là il prêche à des païens. Pendant qu’il prêche, l’Esprit Saint tombe sur Corneille et ceux de sa famille. Alors Pierre aura cette réflexion : “Peut-on refuser le baptême à ceux qui ont reçu l’Esprit Saint tout comme nous ?“.

C’est ce qui est arrivé également à Paul tout au long de ses voyages missionnaires et à Ephèse tout particulièrement.

C’est une question toujours actuelle : Il y a l’“Institution“ avec tout son cadre plus ou moins rigide mais qui véhicule toute une richesse extraordinaire. Et, il y a toute une floraison de groupuscules ou d’individus (appelés ou non “charismatiques“) qui étonnent parfois par leur comportement, leur langage. Cependant, on est interloqué par ce qu’ils font. Ils semblent avoir, eux aussi, reçu l’Esprit pour faire ce que les gens de l’“Institution“ oublient parfois de faire : ils prient - en un langage incompréhensible parfois, mais ils prient ! -. Ils récupèrent ceux que l’on pense irrécupérables. … etc…

Face à cette constatation, notre réflexion peut se nourrir de St Paul au début de sa lettre aux Ephésiens (celle où l’apôtre se découvre le plus).

St Paul, là, est, lui aussi, comme enivré de l’Esprit Saint. Il est “en ex-tase“. L’unique phrase par laquelle il essaie d’exprimer sa pensée comporte une bonne dizaine de versets tant il peine à développer ce qu’il ressent :
  • Béni soit le Dieu et le Père de Notre Seigneur Jésus Christ…qui nous a prédestinés avant la création à être, tous (ceux de l’intérieur et ceux de l’extérieur), des fils adoptifs en Jésus Christ,
    • en qui nous avons la rédemption par son sang…,
  • … Béni soit Dieu qui ramène tout sous le Christ comme sous un seul chef,…
    • les êtres célestes et les êtres terrestres… ;
  • … Béni soit Dieu en qui nous (Juifs) avons, par avance, espéré dans le Christ…
  • … Béni soit Dieu en qui, vous (païens), avez cru pour être louange de sa gloire.
    • Que ce Dieu vous donne un Esprit de sagesse pour le connaître vraiment.
    • Qu’il ouvre votre cœur à sa lumière pour que vous sachiez
      • quelle espérance donne son appel,
      • quelle est le richesse de sa gloire,
      • quelle immense puissance il a déployée pour tous, les croyants…

“Que Dieu vous donne un Esprit pour connaître…“ !

Il faut que la Loi soit inscrite dans le cœur par l’Esprit-Saint qui seul fait comprendre les exigences de la Nouvelle Alliance. Insister sur les règlements de l’Institution avant d’être “enivré“ de l’Esprit Saint qui nous fait connaître l’extraordinaire dessein d’amour de Dieu, cela conduit à une impasse. St Thomas d’Aquin ose dire que la Loi nouvelle condamnerait plus que la loi ancienne si elle n’était pas inscrite dans le cœur par l’Esprit Saint. Il n’y a pas de reconnaissance sans connaissance. Et la connaissance se fait par l’Esprit Saint qui nous conduit vers la vérité tout entière ! Il n’y a pas de morale chrétienne sans connaissance ; et la connaissance (pas toujours intellectuelle) donnée par l’Esprit Saint provoque une reconnaissance, une action de grâce de toute notre vie, quasi liturgique, dit St Paul, à la gloire de Dieu, le Père !

C’est dans ce processus que Paul parle ensuite de morale … à propos du mariage : Ce sacrement est grand, dit-il. Et je le dis par rapport à cette grande histoire d’amour qui trouve son sens plénier dans les Noces du Christ et de l’Eglise que chante l’Evangile de St Jean, de Cana à la Croix.

Et Il peut encore dire : Priez en tout temps, dans l’Esprit. - “Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, tout ce que vous faites” (I Co 10.31), faites-le dans l’Esprit-Saint. Il a purifié nos cœurs pour que notre vie devienne, dans les spontanéités de notre liberté, une liturgie à la gloire du Dieu vivant. (Héb 9.14). (C’est le sens d’un “benedicite“, par ex avant le repas).

Sans l’Esprit-Saint, semble dire Paul aux “joannistes“ d’Ephèse qui ignoraient jusqu’à son existence, on ne peut être chrétien, on ne peut comprendre la nouveauté de la Nouvelle Alliance dont la Loi est écrite dans les cœurs par l’Esprit Saint. Sinon elle devient une loi que ni nos pères ni nous n’avons pu porter, dit St Pierre au Concile de Jérusalem (Actes 15.10).

Ne penser qu’aux règlements de l’Institution, sans cette ivresse de l’Esprit-Saint écrivant en nos cœurs, ce n’est pas possible, ce n’est pas chrétien… Tout le Nouveau Testament l’affirme !

Que cette Loi soit écrite en nos cœurs (Cf 2 Co 3.2) ; elle stimulera les spontanéités de notre liberté pour qu’on l’accomplisse en vue du plein épanouissement de ce que Dieu a mis en nous de meilleur quand il nous a créés à son image et à sa ressemblance…

vendredi 22 mai 2009

Après l’Ascencion - Pâques 6 - Vendredi

“Maintenant, vous êtes tristes. Mais je vous reverrai…“.

Je profite de cette phrase pour méditer avec vous quelque peu sur le mystère de l’Ascension que nous avons célébré hier.

Quand Jésus quitte la terre, au jour de l'Ascension, il laisse seulement onze hommes qui sont les témoins de sa vie, les dépositaires de ses paroles et de son Esprit, onze hommes faibles, tristes et apeurés, que l'Esprit de Pentecôte transformera en Apôtres. Ils n'auront pas peur de dire alors : "Ce Jésus que vous avez crucifié, il est vivant, Dieu l'a ressuscité : nous en sommes témoins"!

Mais avant ce jour de Pentecôte, les Apôtres se regroupent en "Communauté de foi" avec Marie, Mère de Jésus ; et ils prient ; ils expérimentent cette autre forme de la présence de Jésus, dans la prière ! La prière est certainement un des moyens de rendre présent le Christ en nous-mêmes, dans le monde. Et c’est le but de l’ouverture de cette chapelle voulue par notre évêque : manifester la présence de Dieu au cœur de notre ville. Et, en son nom je vous remercie d’y participer. Il viendra lui-même nous encourager le 19 juin en la fête du Sacré-Cœur ! - Jésus n'a-t-il pas dit : "Lorsque deux ou trois sont réunis en mon Nom, je suis là, au milieu d'eux" ? Alors, n'oublions pas la prière personnelle et communautaire.

Deuxième remarque, entre l'Ascension et la Pentecôte, les Apôtres - et nous avec eux - entrent dans le temps de l'Eglise, ce temps où l'on ne voit plus Jésus, mais aussi ce temps où Jésus vivant, ressuscité, nous reste présent par sa parole et par les sacrements.

C'est dans la “Communauté des croyants“, c'est-à-dire dans l'Eglise, que la Parole de Jésus, proclamée, est vivante pour nous aujourd'hui. C’est dans l’Eglise et par l’Eglise que cette parole divine est la mieux comprise. Le pape Benoît XVI l’a rappelé dernièrement. C’est ensemble que nous pouvons le mieux découvrir la Parole de Dieu, l’approfondir.

C'est dans l'Eglise également que Jésus nous laisse des signes de sa présence, des signes tangibles et porteurs de vie, que l'on appelle sacrements.

Les sacrements sont des rencontres avec Jésus qui nous parle, nous touche et nous sauve à travers les signes - paroles et gestes - de l'Eglise. Par le prêtre, c'est toujours Jésus qui baptise, Jésus qui pardonne, Jésus qui s'offre pour nous à son Père et se donne à nous (dans la communion).

Ainsi, en se rassemblant dans la prière après l'Ascension, en baptisant trois mille hommes le jour de la Pentecôte, en annonçant la Bonne Nouvelle de la Résurrection et en célébrant l'Eucharistie, les Apôtres ont vérifié, en Eglise, la justesse de cette parole de Jésus : "Et moi, je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde". Les Apôtres nous montrent ainsi le chemin de la fidélité : nous rassembler en Eglise, avec Marie ; prier pour recevoir l'Esprit de Dieu ; vivre les sacrements comme des rencontres personnelles avec Jésus ressuscité pour devenir ses témoins dans la vie de tous les jours ! C’est notre mission de baptisés !

Utilisons ces moyens que Jésus nous donne pour être en contact avec lui et vivre de Lui. Et principalement l'Eucharistie, comme vous le faites. Sans l'Eucharistie, on ne peut véritablement se dire et être chrétien !Enfin, dernière remarque : en ces derniers jours du mois de mai, consacré à Marie, une phrase des Actes des Apôtres doit retenir notre attention. Au jour de la Pentecôte, il est dit : "Les Apôtres participaient fidèlement à la prière avec quelques femmes, dont Marie, la Mère de Jésus".C'est la seule fois où Luc mentionne la présence de Marie priant au milieu des Apôtres. Dans un parallèle suggestif, Luc montre que Marie est là, à Jérusalem, pour la naissance de l'Eglise comme elle était à Bethléem pour la naissance de Jésus. Car l'Eglise, c'est "Jésus répandu et communiqué" (disait Bossuet). La Pentecôte est la naissance de ce Corps mystique du Christ - qu'est l'Eglise - ouvert à tous les hommes. A cette naissance, comme à celle de Jésus à Bethléem, Marie est là, Mère du Christ, Mère de l'Eglise. C'est par elle que tout prend corps. Elle n'est jamais étrangère au don de Dieu pour nous. Luc nous montre ainsi la place décisive de Marie dans l’œuvre du salut.

Marie nous conduit toujours à Jésus dans la docilité à l'Esprit-Saint. Elle nous accompagne dans tous les sacrements, gestes de Jésus dans l'Eglise d'aujourd'hui. Elle nous invite toujours à nous rassembler pour prier.

Que Marie nous accompagne aujourd’hui et demain ! Que Marie vous accompagne aujourd’hui et demain !

mercredi 20 mai 2009

Humilité et colère ! - Pâques 6 - Mercredi - (Jacq 1.19 sv)

“Mes frères, dit St Jacques, tout homme doit être prompts à écouter, lent à parler, lent à se mettre en colère !“.

Notre Dieu est un Dieu “lent à la colère et plein de fidélité !“ (Ex. 34.6). Pourtant, souvent il est écrit : “La colère du Seigneur s’enflamma !“.

Moïse, “l’homme, est-il dit, le plus doux que la terre ait porté“ (Nb 12.3), a eu des mouvements de colère mémorables (Ex. 32.19 ; Nb 16.15).

Jésus lui-même avait parfois “un regard plein de colère“ (Mc 3.5). Et il a chassé les vendeurs du temple en se fabriquant des fouets de corde (Jn 2.14sv), lui qui affirmait: “Je suis doux et humble de cœur !“ (Mth 11.29).

Qu’est-ce donc que la colère ? Qu’est-ce donc que l’humilité ? Jésus a bien affirmé : “Quiconque se met en colère contre son frère en répondra au tribunal“ (Mth 5.22). Aussi, St Paul conseille : “Etes-vous en colère ? Ne péchez pas !“ (Eph 4.26). Y-a-t-il donc une colère sans péché ?

St Thomas d’Aquin distingue la colère antécédente et la colère conséquente. La première, c’est l’emportement imprévisible, soudain, violent comme un orage. En ce cas, “mieux vaut reprendre que couver sa colère“ (Si 20.2). L’humeur tempétueuse n’est jamais bonne, jamais constructive, jamais bénéfique.

La “colère conséquente“ se manifeste en prenant certaines formes, en respectant certaines étapes que Jésus indique : “Si ton frère vient à pécher…“ va le trouver…, au besoin avec des témoins ou finalement, dis-le à l’Eglise ! S’il n’écoute pas, qu’il soit comme un païen, un publicain (Mth 18.15).

Il y a donc une hiérarchie à suivre.

C’est vrai : il y a parfois un moment où il faut intervenir avec force, avec cette “colère conséquente“, ce genre de colère qui fait, d’après les médecins, secréter de l’adrénaline, ce qui donne un surcroît de force pour faire ce qu’il faut faire , pour dire ce qu’il faut dire, pour des mises au point nécessaires, et parfois le plus tôt possible !

Alors, l’humilité? L’humilité ne consiste pas à toujours s’effacer ! La Bible est d’ailleurs une magnifique école de discernement dont on a besoin en notre époque qui pratique facilement l’amalgame (surtout les mass-médias).

Il faut savoir distinguer, discerner, par exemple, entre :
  • l’accusation et la correction fraternelle,
  • le gaspillage et la générosité,
  • l’économie et la pauvreté,
  • le repentir et la culpabilité, cet “univers morbide de la faute“ (Dr Reinhardt),
  • la résignation et la patience,
  • l’agressivité et la force,
  • l’obéissance et la flagornerie, la servilité,
  • la sincérité et la vérité,
  • le silence et le mutisme,
  • la providence et la fatalité,
  • l’habitude et la routine,
  • la foi et la crédulité,
  • l’émulation et la jalousie,
  • etc.

La Bible nous aide à ne pas nous laisser entraîner dans l’amalgame. Ainsi faut-il distinguer l’humilité et le complexe d’infériorité. Ce n’est pas la même chose. Il y a des gens qui s’effacent…, qui s’effacent… Alors, parfois, la rancune, le ressentiment s’accumulent et, tout d’un coup, il y a l’explosion d’un volcan. L’humilité véritable n’est pas une question de supérieur ou d’inférieur. L’humilité est correspondance le plus possible à la vérité. Et devant la vérité, il ne faut pas s’effacer systématiquement. Il faut parfois agir avec force, (“colère conséquente !“).

Cela peut aller loin et demander du courage. Dans sa Somme théolo-gique (traité de la charité), St Thomas d’Aquin se demande s’il faut pratiquer la correction fraternelle envers les supérieurs. Il conclut positivement. Naturellement il y a manière de faire (Dans la célère édition Léonine de la Somme, il est écrit dans la marge au crayon, m’a-t-on dit : “J’ai essayé ; ce n’est pas à faire !“. Celui-là avait du mal s’y prendre !).

L’humilité ne consiste pas à s’effacer, mais à chercher la vérité ! St Paul écrit à Timothée : “Ce n’est pas un esprit de crainte que Dieu nous a donné, mais un Esprit de force, d’amour, de maîtrise de soi !“ (2 Tim. 17.40).

En cet Esprit de force peut s’exprimer parfois par une “sainte colère“. Quand il y a des difficultés (sérieuses, j’entends), il faut savoir engager le débat, toujours avec grand respect et hardiesse ! Ce qui ne supprime pas la charité. Au contraire !

mardi 19 mai 2009

L’homme “bon“ ! L’épikie - Pâques 6 - Mardi - Chrétien ! (3) – (Actes 15.22)

Les Chrétiens est ceux qui appartiennent au Christ : “Pour moi, vivre, Christ“, disait St Paul. (Sens de « christianoi »).

Cette attachement au Christ peut aller jusqu’à subir la persécution. La lecture nous en donne un exemple. (Sens péjoratif de « chrèstianoi »).

Malgré la persécution, les chrétiens restent des hommes foncièrement “bons“ ! (Sens mélioratif de « chrèstianoi »). Dieu lui-même n’est-il pas “lent à la colère et plein de bonté fidèle ?“ (Nb. 14.18). Et Notre Dame s’exclamera que “sa bonté s’étend de génération en génération“ (Lc 1.50). Et si nous voulons “demeurer en cette bonté“ (Rm. 11.22), il faut que notre bonté elle-même “soit reconnue par tous les hommes !“ (Ph. 4.5).

Pour cela, le Christ nous envoie son Esprit, lui qui, selon l’Evangile doit confondre le monde
  • en matière de péché : la foi en Dieu bon confondra le monde mauvais.
  • en matière de justice : c’est la bonté de Dieu, manifesté en Jésus mort et ressuscité, qui justifiera le monde, “ajustera“ les hommes à sa bonté.
  • en matière de jugement : car la victoire de Jésus par son mystère pascal implique la condamnation du mal et de son auteur.

Aussi, le disciple du Christ, devant témoigné de la bonté de Dieu manifesté en Jésus, - et cela, parfois, jusqu’au “martyre“ (mot qui veut dire “témoin“) - doit être “bon“, réellement ! Le chrétien est un homme “bon“,
  • pratiquant le désintéressément,
  • ayant toujours une pureté du cœur,
  • ignorant petitesses, jalousies ou rivalités,
  • apte à servir la concorde et la paix!

De cette sorte de bonté, St Paul en fait un attribut privilégié de l’« agapè », de l’amour de charité, de cet amour qui vient de Dieu : Or tout chrétien expérimente la délicieuse bonté de Dieu : “Rejetez donc toute méchanceté… si vous avez goûté que le Seigneur est bon“ (I Pet 2.4 qui cite Ps 34.9).

Aussi, le chrétien doit-il rayonner cette bonté du Père céleste qui se reflète sur le visage de ses enfants. Ce doit être le trait le plus accusé de la physionomie du véritable disciple du Christ, puisque la venue et la vie du Fils de Dieu sur terre fut une épiphanie de la « chrètotès », de la bonté de Dieu : “… lorsque se sont manifestés la bonté de Dieu et son amour pour les hommes…“ (Tite 3.4).

Cette bienveillance, cette bonté est éminemment libérale et généreuse. Le « chrèstos », le chrétien qui est bon, est non seulement serviable, empressé, obligeant, mais effectivement donnant. Il semble ne posséder quelque bien que pour en faire participer autrui. Le “charitable“ devient comme la providence de son prochain ; il dépense et se dépense pour l’aider : “Pour moi, je dépenserai et me dépenserai moi-même tout entier pour vous“ (II Cor. 12.15). Bien plus, ses “gracieuses donations“ s’effectuent avec le tact et le sourire du divin amour qu’est l’ « agapè ».

Il semble que tous ces aspects du tempérament chrétien modelé par l’ « agapè », soient résumés dans le terme d’ épikie, intraduisible, (terme que, malheureusement, on ne trouve plus dans les dictionnaires récents !). Le mot exprime, en effet, d’après les auteurs anciens,
  • l’honorabilité et la droiture,
  • la santé morale et l’équilibre du jugement que l’on reconnaît surtout au sens de la mesure,
  • la gentillesse, la “douceur“ : “Moi, Paul, en personne, je vous le demande par la douceur et la bonté de Christ…“ (II Co. 10.1).

L’épikie désigne :
  • tantôt la courtoisie : “Pour ne pas t’importuner, l’exposé sera bref…“, disait Tertullus, l’avocat adverse de Paul devant le juge Félix (Actes 24.4),
  • tantôt la bienveillance qui modère l’inflexible sévérité du courroux légitime,
  • tantôt cette équité qui corrige ce que la stricte application de la loi écrite pourrait avoir d’odieux ou d’injuste (d’après Platon ou Socrate).

En Dieu, elle est synonyme de miséricorde !

Notons aussi que cette qualité dans les rapports humains n’exclut pas l’humour et la malice d’esprit : “Que votre langage soit toujours aimable, assaisonné de sel, avec l’art de répondre à chacun comme il faut ! “ (Col 4.6).

Finalement, Clément d’Alexandrie (avec bien d’autres auteurs chrétiens) avait raison : “Les chrétiens, « christianoi », ceux qui ont cru au Christ (« christos ») sont bons (« chrèstoi ») et appelés tels (« chrèstianoi »)“.

Demandons à l’Esprit Saint de nous accorder cette bonté, cette qualité de l’amour de Dieu, notre Père, à notre égard, amour manifesté en tant de bonté par Jésus Christ. Alors, nous serons chrétiens.

lundi 18 mai 2009

Chrétien (2) : le persécuté ! - Pâques 6 - Lundi - (Actes 15.26sv)

“Et vous aussi, vous rendrez témoignage parce que vous êtes avec moi… On vous exclura des synagogues. Et même l’heure vient où quiconque vous tuera croira rendre honneur à Dieu !“.

Il est vrai que Notre Seigneur nous a bien avertis : “S’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront aussi !“ (Jn 15.20). N’est-ce pas un certain Saoul qui persécutait l’Eglise à peine naissante ? “Avec frénésie, je persécutais l’Eglise“, confessera-t-il (I Co. 15.9). Et ce faisant, il pensait certainement “rendre honneur à Dieu“ ! Or, devenu Paul, il s’exclamera après ses premiers voyages missionnaires : “Quelles persécutions, j’ai subies !“. (II Tim 9.11). Et il préviendra lui aussi : “Tous ceux qui veulent vivre avec piété dans le Christ Jésus seront persécutés !“ (II Tim 3.12). Et l’on sait également qu’après la mort d’Etienne, premier martyr, une vague de persécution s’abat sur Jérusalem ; les disciples du Christ sont obligés de fuir ; et c’est ainsi qu’ils iront évangéliser la Samarie et au-delà : “Le sang des martyrs est semence de chrétiens“, dira plus tard Tertullien.

Les persécutions ne sont pas toujours violentes et meurtrières. Mais elles sont de tous les temps ! La plus banale, mais non la moins pernicieuse est la moquerie, le dédain, l’ostracisme… Elle se traduit aujourd’hui par une “christianophobie“, comme on a dit. Mgr Billé écrivait en l’an 2000 (il était président de la Conférence épiscopale) : “On peut se demander si depuis quelques temps, la situation de procès latent (contre l’Eglise) ne s’est pas aggravée… Il est vraisemblable qu’il s’agisse d’une sorte d’antichristianisme“. Cette situation est frappante dans le monde médiatique “comme le montre une avalanche d’événements récents et significatifs“. Que dirait aujourd’hui Mgr Billé devant cette “christianophobie“ qui va parfois jusqu’à la haine du Christ.

On peut en souffrir, certes ! Mais il ne faut pas s’en étonner. J’en profite pour donner une seconde explication au mot “chrétien“. C’est donc à Antioche qu’est apparue cette appellation pour désigner les disciples du Christ. J’ai déjà souligné que les manuscrits ont souvent hésité sur la prononciation « christianoi » ou « chrèstianoi ».

Nous avons déjà vu le sens de « christianoi », le plus obvie sans doute : ceux qui appartiennent au Christ, appartenance que résumait St Paul par sa formule : “Pour moi, vivre, Christ !“.

Mais le mot « chrèstianoi » n’est pas indifférent. Ce mot vient, bien sûr, de « chrèstos » qui veut dire : “bon“, qui exprime l’honnêteté, les bonnes mœurs, qui désigne l’homme de bien !

Alors, les Antiochiens - ceux qui repoussaient les disciples du Christ - les ont-ils surnommés « chrèstianoi », mais dans un sens très péjoratif. On sait, par les auteurs païens, que les Antiochiens avaient un esprit très caustique et qu’ils aimaient les surnoms moqueurs. Dans un sens péjoratif, « chrèstos » signifierait alors le “bon homme“, l’homme bon, mais d’une bonté si bonasse qu’elle en devient ridicule aux yeux de la société. Elle en deviendrait même nuisible ! Par analogie, on pourrait peut-être dire aujourd’hui : “chrétien-crétin“, celui qui toujours “se fait avoir“, tant il parait naïf dans sa bonté ! Et la moquerie devient ostracisme. Certains connaissent cela aujourd’hui ! Je ne sais s’il faut retenir cette explication. Ce que je sais : mieux vaut pécher par trop de bonté que n’en pas avoir par raison trop calculatrice… ! En tous les cas, ce mot pouvait être employé avec malveillance pour manifester du mépris, du dédain pour les disciples du Christ, mépris toujours plus ou moins répandu aujourd’hui !

Mais ce vocable pouvait aussi être employé par les chrétiens eux-mêmes dans un bon sens : Clément d’Alexandrie écrivait : “Le disciple du Christ, celui qui a cru au Christ (“christos“), est bon (chrèstos) et appelé tel“. Soyons donc toujours bons ! Comme le Christ lui-même…

J’ajoute avec triste malice que la persécution vient parfois, paradoxalement, des persécutés eux-mêmes, inconsciemment !

Un jour, une femme alla se confesser à St Philippe Néri (un saint du 16ème siècle, très original), s’accusant d’avoir dit du mal de certaines personnes. Le saint lui accorda l’absolution mais lui donna une étrange pénitence. Il lui demanda de rentrer chez elle, de prendre une poule et de revenir le voir en plumant la poule le long du chemin. Lorsqu’elle fut de retour, il lui dit : “Maintenant, rentre à la maison et ramasse une à une les plumes que tu as laissées tomber en venant jusqu’ici“. - “C’est impossible, s’exclama-t-elle. Le vent les a sûrement dispersées entre-temps, dans toutes les directions“. St Philippe Néri lui répondit : “Tu vois : de même qu’il est impossible de ramasser les plumes lorsqu’elles ont été éparpillées par le vent, il est également impossible de retirer des ragots et des calomnies une fois qu’ils ont été prononcés“.

Que de persécutés, nous ne devenions pas persécuteurs !

dimanche 17 mai 2009

6e Dimanche de Pâques 00/B

Facilement nous nous disons "chrétiens" ; nous disons "catholiques" ! Et c’est déjà bien de savoir l’affirmer !
  • “Chrétien“, cela veut dire que nous adhérons, nous appartenons au Christ, à Jésus, Fils de Dieu fait homme, mort et ressuscité pour nous !
  • “Catholique“, cela veut dire “universel“, car le message de Jésus Christ et l’accomplissement de son mystère pascal, ce mystère de mort et de vie, ne concernent pas simplement un groupe d’adhérents, mais tous les peuples du monde entier ! “Dieu ne fait pas différence entre les hommes, nous a dit la première lecture ; mais quelle que soit leur race, il accueille les hommes qui l’adorent et font ce qui est juste !“. Et St Paul précisera : “Le Christ est mort pour tous !“. Etre catholique, c’est avoir reçu mission par le baptême et la confirmation de témoigner de cette universalité de l’amour de Dieu pour tous, du salut offert à tout homme en Jésus !

Les apôtres eux-mêmes n'ont pas compris cela du premier coup. Volontiers, St Pierre se serait contenté d'annoncer aux seuls Juifs le message du Christ qui, pour lui, accomplissait parfaitement les Ecritures, était, autrement dit, le Messie annoncé par les prophètes d’Israël pour Israël ! Il a fallu que les circonstances et l'Esprit Saint le poussent à s'ouvrir au monde païen. Dans le récit de la 1ère lecture, le centurion Corneille symbolise le monde romain de cette époque. Pierre est surpris de découvrir que le message de Jésus concerne tout autant ce monde romain, païen, que le monde juif. Et plus tard, St Paul se fera gloire d'annoncer l'Evangile dans le monde grec, à Antioche, Ephèse, Athènes, Corinthe, etc... Et tous les apôtres, finalement, feront de même dans les pays les plus divers !

Peu à peu, le message du Christ deviendra vraiment “universel“, catholique. Tout au long de l'histoire, des baptisés partiront de partout, et de chez nous - tel le Bx Basile Moreau - … et partent aujourd’hui encore annoncer la "Bonne Nouvelle" jusqu'au plus profond de tous les continents.

Or, nous vivons actuellement, avec des moyens de communication modernes et très rapides qui accentuent cette exigence de l’universalité, de la mondialisation comme l’on dit : notre petite planète "Terre" devient de plus en plus une sorte de grand village où nous apprenons à circuler rapidement, à voyager partout, et à vivre ensemble entre gens de nationalités différentes. Combien d'entre nous n'ont pas un ou plusieurs membres de leur famille partis à l'étranger pour quelques mois, plusieurs années, voire pour longtemps ! Dans nos grandes villes, nous ne cessons de croiser Africains, Européens, Asiatiques... Oui, le monde entier devient de plus en plus comme un grand village.

Mais cela ne se fait pas facilement, comme ce ne fut pas facile pour Pierre : pour apprendre à vivre ensemble entre races différentes, à se comprendre, à s’estimer, et surtout à témoigner du Christ mort et ressuscité pour tous (c’est notre mission de baptisés, de confirmés), il y faut de la bonne volonté et un minimum d'intelligence pour éviter incompré-hension, voire affrontements et nous ouvrir ainsi aux autres. Ce fut le massage de Jean-Paul II surtout au seuil du 3ème millénaire. C’est encore le message du pape Benoît XVI qu’il a bien souligné lors de son pèlerinage en Terre Sainte !

Aussi, nous chrétiens, catholiques, qui devons donc avoir cet esprit “universel“, nous avons reçu mission de favoriser cette ouverture à tous les hommes. Catholiques, nous ne sommes pas une secte qui, souvent, a tendance à se refermer sur elle-même ! Le grand projet de Dieu sur le monde, c'est que tous les hommes finissent par former ensemble une immense famille - la famille de Dieu - où tous se voudront frères les uns des autres, en s’enrichissant mutuellement ; car chacun doit garder son identité, ses propres valeurs : ce ne doit pas être une fusion - un amour fusionnel est toujours dangereux -, mais une communion dans la diversité de tous.

St Jean et l'évangile nous le rappellent aujourd'hui en nous donnant le secret de cette “universalité“, de cette fra-ternité voulue par le Christ : “Aimez-vous les uns les autres... Vous êtes tous frères... Ayez pour les autres un regard d'a-mitié, de bienveillance, de considération…”. “Aimez-vous !“.


Il est d'ailleurs très remarquable que le mot “amour”- si banal en notre langue, malheureusement - (ou aimer ou ami) soit répété plus de dix fois dans ce court passage de l'Évangile d’aujourd’hui.

Cette insistance de la part de Jésus doit attirer notre atten-tion sur un fait bien reconnu : l'amour est la condition essen-tielle et voulue par Dieu-Créateur de l'existence humaine.

Mais surtout, cette insistance de Jésus donne un sens à cette exigence de l’amour quand il ajoute l'expression mémorable “comme je vous ai aimés”.

Autrement dit, Jésus se présente bien comme étant lui-même le modèle de l'amour, dans ses paroles comme dans ses gestes les plus simples. Cependant, il ne nous indique pas seulement le modèle à suivre qu’il est lui-même. Il va plus loin ; il nous propose à la fois un nom et un lieu à cet amour en ajoutant : Demeurez dans mon amour ! Habiter l’Amour qu’il est lui-même, Fils de Dieu fait homme, mort et ressuscité pour tous! Habiter le cœur du Christ !

Etre dans le cœur du Christ ! Généralement, l'amour engendre une sorte de mouvement circulaire qui souvent s'arrête dès que le domaine de la solidarité est atteint... Comme si le commandement du Seigneur ne devait trouver un écho que dans la dimension horizontale, que dans la seule expression du service social si important soit-il. Or, l'amour dont nous parle le Christ comporte certes cette dimension, en est une traduction ; mais il va encore plus loin, plus haut. L'amour dont il parle et en lequel il faut demeurer vient d'en haut, de Dieu, vient du cœur de Jésus, Fils de Dieu fait homme, mort et ressuscité pour tous !

Pour un Catholique qui doit cultiver l’esprit d’universali-té, les dimensions verticales et horizontales de l'amour doivent toujours dessiner la croix du Christ qui nous ai aimés jusqu’au don total de lui-même ! Oui, c’est l’amour, mais l’amour de Dieu-Père manifesté et transmis par le Christ qui, seul, peut nous rendre frères de tout homme, qu’il soit de l’Est ou de l’Ouest, du Nord ou du midi ; seul l’amour que Dieu donne et qui peut aller jusqu’au don suprême de soi est universel et nous rend frères de tout homme quel qu’il soit.

Et avec le Christ qui a manifesté un tel amour, on comprendra mieux que jusque dans le don de soi, il y a aussi la joie : “Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que vous soyez comblés de joie !”. La joie est fille de l’amour, de cet Amour qui vient de Dieu! Car Dieu est Amour.

Catholiques, nous venons en cette cathédrale nous unir par l’Eucharistie, - ce mystère pascal ! - au Christ qui nous a manifesté cet Amour divin qui est universel pour tout homme ! Habiter l’Amour, le cœur du Christ, Fils de Dieu fait homme, mort et ressuscité pour tous, tel doit être la mission du Catholique. Et on sait que cela peut aller jusqu’au don de soi-même, mais toujours dans la joie d’un “Alleluia“ pascal !

vendredi 15 mai 2009

Chrétien ! (1) – Pâques 5 – Vendredi – (Actes 15.22)

Lorsqu’un groupe se développe, s’accroît, s’élargit, il est normal qu’il rencontre des difficultés d’adaptation, des problèmes d’intégration, voire des situations de tensions… Il ne faut surtout pas s’en étonner. C’est ce qui est arrivé à Antioche où très vite “grand fut le nombre de ceux qui se tournaient vers le Seigneur en devenant croyants“ (Act 11.31). Je ne m’attarderai pas sur ces querelles bien connues entre chrétiens d’origine juive et ceux d’origine grecque, romaine, querelles qui provoquèrent ce qu’on appellera le “Concile de Jérusalem“ !

Aussi, je ferai plutôt une réflexion qui rejoint l’évangile à propos de cette ardente Communauté d’Antioche où, nous dit St Luc, “pour la première fois, le nom de « chrétien » fut donné aux disciples“ (Actes 11.26).

Que veut dire ce mot, chez St Luc ? C’est important pour nous qui nous disons chrétien, de chrétienne !

Il faut dire que les manuscrits (grecs) ont souvent hésité sur la prononciation : « christianoi » ou « chrèstianoi ». Différence d’une seule lettre !

Prenons d’abord la première hypothèse : Cristiavoi : “ceux qui appartiennent au Christ“ (I Co. 15.23). “Vous, vous êtes au Christ, dira St Paul ; et le Christ est à Dieu“ (I Co. 3.23). (cf. Gal 3.29). Le Chrétien est celui qui a une relation de dépendance avec le Christ, qui relèvent du Christ, gravitent dans son orbite, qui est de “la maison du Christ“ (Cf. I Tim 3.15), (comme, par exemple, les hérodiens étaient “les gens de la maison d’Hérode“). Le chrétien se réclame de Christ.

En conséquence, les chrétiens sont les serviteurs du Christ : “Accorde, Seigneur, à tes serviteurs , priaient St Pierre et St Jean, de dire ta Parole avec pleine assurance“ (Act 4.29). Et St Paul de noter : “Si j’en étais encore à plaire aux hommes, je ne serais plus serviteur du Christ“ (Gal 1.10). Et il parlera d’un chrétien, Epaphras, en disant : “ce serviteur de Jésus ne cesse de mener pour vous le combat de la prière“ ( Col 4.12).

Bien plus, les chrétiens sont même comme des soldats du Christ, résolus à mourir avec lui, comme ils vivent avec lui : “Si nous mourons avec lui, avec lui, nous vivrons. Si nous souffrons avec lui, avec lui nous règnerons…“ (II Tim. 2.11). Et prêts à mourir pour le Christ, ils deviennent par lui, avec lui, en lui, des “saints“ (Rm. 1.7, c’est-à-dire des consacrés à Dieu. Car Jésus étant l’“Oint“ de Dieu, c’est-à-dire “Messie“, c’est-à-dire “Christ“ (même signification), les chrétiens participent à cette même onction, de sorte que le baptême est une onction qui consacre les fidèles à Dieu et au Christ : “Celui qui vous affermit avec vous en Christ et qui vous donne l’onction, c’est Dieu !“ (II Co. 1.21). Ils sont donc “réservés“, séparés pour son culte et son service.

On pourrait résumer tout cela par cette phrase de St Paul : “Pour moi, vivre, c’est Christ !“ (Ph. 1.21). Et la forme grammatical de la phrase souligne que le verbe “vivre“ et le mot “Christ“ sont comme interchangeables !

On conçoit dès lors qu’une communion si intime avec le Seigneur fasse de la vie des chrétiens une révélation de la présence et de l’action de leur Seigneur : “Si l’on vous outrage pour le nom du Christ, heureux êtes-vous… Si c’est comme chrétien que l’un d’entre vous ait à souffrir, qu’il n’ait pas de honte et qu’il glorifie Dieu pour ce nom“ (I Pet 4.14-16). Et on sait avec quelle fierté les martyrs revendiqueront le titre de chrétiens, à commencer par Ste Blandine, première martyre en notre pays, à Lyon (177) : “je suis chrétienne“, proclamait-elle, haut et fort ! Peut-être se souvenait-elle que Jacques avait qualifié le titre de chrétien, blasphémé par les païens, de “beau nom“ (Jac 2.7).

Etre chrétien, c’est être véritablement en union avec le Christ qui nous a tant manifester l’amour de son Père pour tous les hommes… et qui nous demande de répandre cet amour de Dieu autour de nous, comme il nous le dit dans l’évangile : “Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés !“. Et il poursuit : je vous ai choisis, je vous ai mis à cette place afin que vous partiez, que vous donniez du fruit et que votre fruit demeure…“. Que le “beau nom“ de chrétien soit donc pour chacun d’entre nous comme une prédiction de notre destinée. (“Nomen est omen“, comme on dit en latin : le nom est prédiction !). Le “beau nom“ de chrétien !

Après avoir parlé des « christianoi »,, il faudrait développer quelque peu le sens de « chrèstianoi ». Mais ce sera pour une autre occasion…

jeudi 14 mai 2009

Vocation ! - Pâques 5 - Mercredi - (Actes 1.15-26)

La lecture nous présente la vocation de St Matthias dont c’est la fête aujourd’hui !

C’est une occasion de prier pour les vocations, vocations sacerdotales, religieuses, certes, mais aussi pour la vocation de chacun d’entre nous, la vocation de tout baptisé. Car le Christ appelle chacun d’entre nous : “Viens, suis-moi !“. Baptisés, nous sommes tous “appelés“ : “Venez à moi !“. Appelés, nous sommes tous “envoyés“ : “Allez !“. D’ailleurs, très habituellement, ce n’est que dans le champ de la “moisson baptismale“ que peuvent fleurir des vocations sacerdotales ou religieuses. Toute l’histoire de l’Eglise l’atteste !

Aussi, prions ! C’est la première nécessité ! Prier, demander ! Certes, dira-t-on, Dieu sait ce dont nous avons besoin, ce dont son Eglise a besoin. Oui, mais il veut que notre propre désir s’enflamme dans la prière pour nous rendre davantage capables de recevoir ce qu’il prépare, ce qu’il désire pour nous ! Or, la demande la plus urgente et la plus importante à formuler est bien celle-ci : “Que ton Règne vienne !“. Cette prière de demande contient toutes les autres : “Demandez de grandes choses, disait Origène ; et les petites vous seront ajoutées“.

C’est à remarquer : juste avant l’élection de Matthias, Luc note : “Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière avec quelques femmes dont Marie, la mère de Jésus, et avec ses frères“. Et, ensuite, l’assemblée priait ainsi : “Seigneur qui connais le cœur de tous les hommes, montre-nous celui que tu as choisis“… Montre-nous, Seigneur ceux que tu choisis… Donne-leur l’énergie, la force de te répondre… ! Montre, Seigneur, à chacun de nous ton appel.

Et il est assez significatif que juste après l’élection de Matthias, Luc relate la venue de l’Esprit Saint, au jour de la Pentecôte. La prière suscite toujours la venue du Saint Esprit afin que tout “appelé“ puisse prier, être enseigné, conduit ! C’est la marque de tout apostolat ! L’Esprit vient…
  • Pour prier : L’Esprit vient en nous car “personne ne peut dire : “Jésus est Seigneur“ (Dieu) que sous l’action de l’Esprit Saint (I Co. 12.3).
  • Pour enseigner : Jésus avait promis : “L’Esprit vous introduira dans la vérité toute entière“ (Jn 16.13).
  • Pour conduire : “Seuls sont fils de Dieu ceux qui se laissent mouvoir par l’Esprit de Dieu !“ (Rm 8.14).

“Priez sans cesse“, recommandait St Paul ! Prions pour toutes les vocations : “Viens, Esprit Saint, Viens en nos cœurs, Visite l’âme de tes fidèles“, en vue de “l’appel d’en-haut que Dieu nous adresse en Jésus Christ“ (Phil. 3.14). C’est ainsi que Dieu suscitera en son Eglise les apôtres dont elle a besoin, car “comment invoquer Dieu sans croire en lui ? Comment croire sans d’abord entendre ? Comment entendre sans prédicateur ? Et comment prêcher sans être envoyé ?“ (Rm 11.14). Ne cessons donc pas de prier : Que le Seigneur envoie des ouvriers pour sa moisson !

Remarquons encore que toute vocation – baptismale, sacerdotale, religieuse – a une double fonction :
  • Le baptisé, le prêtre, le religieux doivent être d’abord des témoins : “Il faut que l’un d’entre nous devienne témoin de la Résurrection“. C’est ce que le Christ dira lui-même à Paul sur le chemin de Damas : “Je te suis apparu pour t’établir témoin de la vision dans laquelle tu viens de me voir…“ (Actes 26.16). Le baptisé, tout missionnaire doit être témoin de cette révélation qu’il reçoit intérieurement : le Christ est ressuscité ; il est Vivant parmi nous, en nous. Celui qui est “appelé“ et “envoyé“ témoigne que le Christ ne cesse de ressusciter et de vivre en lui, en chacun de nous. Il est le Vivant qui conduit à la Vie !
  • Témoin de la Vie du Christ en lui, alors, il ne peut pas ne pas dire : “Nous ne pouvons pas ne pas publier ce que nous avons vu et entendu…“ (Actes 4.19). “Malheur à moi si je n’annonçais pas l’Evangile“, dira St Paul (I Co. 9.16).

Aussi, pour terminer, je me permets une réflexion : N’avez-vous pas eu, vous aussi, à un moment de grâce, comme l’expérience palpable de la présence du Christ en vous, de la Résurrection du Christ en chacun de vous ?

L’apostolat de tout baptisé, prêtre ou religieux, c’est d’abord expérimenter la puissance du Christ ressuscité qui est capable de “mener par-delà la mort“ elle-même. “Non, je ne mourrai pas, je vivrai, je chanterai“ (Ps 118.17). Chanter cette expérience du Vivant en nous, c’est la “liturgie“ de toute notre vie : “Il est juste et bon de te louer…“. Laudare, benedicere, predicare : louer, bénir, prêcher… C’est proclamer les hauts faits de Dieu : Magnificat, disait Notre Dame ! “contemplata aliis tradere“, disait St Thomas d’Aquin : transmettre aux autres ce que l’on a vu, contemplé !

mardi 12 mai 2009

La “vraie Vigne…“ - Pâques 5 - Mercredi - (Jean 15.1-8)

L’amour du paysan palestinien pour sa vigne féconde est manifeste à travers tout l’Ancien Testament. Il se reflète tout particulièrement dans cette exclamation d’Isaïe : “Que je chante pour mon ami le chant du bien-amé et de sa vigne“. (Is.5.1).

Cette image était si expressive pour le Juif cultivateur que, souvent, elle avait été choisie pour traduire l’amour de Dieu envers son peuple : ce peuple qui, comme un plant vigoureux devait, selon le psalmiste, étendre ses sarments sur les montagnes, enlacer les cèdres géants et s’étirer jusqu’à la mer“ (Ps 80.11-12). Mais ce projet avait été trahi : “je t’avais planté comme une vigne portant du fruit ; comment t’es-tu changé en vigne inconnue, aux fruits infects ?“ (Jér. 2.21). Cependant, aux heures tragiques, quand Dieu, déçu par des vendanges de péché, éprouvera sa vigne, un chant d’espérance s’élèvera : “Reviens, Seigneur, visite cette vigne, celle que ta puissance a plantée !“ (Ps 80).

Oui, le Seigneur est revenu ; il a visité sa vigne au jour de l’Incarnation de son Fils, au jour de sa mort sur la croix ruisselante d’un “vin nouveau“, son sang “répandu pour la multitude“, au jour de sa résurrection qui transmet une vie nouvelle. “Celui qui boira à cette coupe nouvelle aura la vie pour toujours !“.

Alors, Jésus peut affirmer : “Je suis la Vigne, la véritable“ ; et il veut imprégner de sa sève nouvelle l’ensemble des sarments, l’humanité entière !

Aussi, à cette parole du Seigneur : “Sans moi, vous ne pouvez rien faire“, doit correspondre une forte proclamation de foi, à l’exemple de Pierre : “Oui, Seigneur, vraiment tu es le Fils de Dieu. Tu as les paroles de la vie éternelle ! A qui d’autre irions-nous ?“.

Jésus avait bien conscience de ne pas vivre sa mort et sa résurrection pour lui tout seul, mais pour le compte de l’humanité de toute l’humanité !

Alors, pour nous, que signifie la mort du Christ, pour nous que signifie sa résurrection ?

En reprenant les deux phases du mystère pascal de Jésus à notre propre compte, nous pouvons affirmer : c’est vrai, sans Jésus vivant, la mort ne signifie rien (“Sans moi, vous ne pouvez rien faire“). Sans le Christ ressuscité, la mort c’est du néant, c’est du rien, c’est l’échec, la destruction ; c’est de l’absurde !

Mais avec le Christ, même notre mort peut “signifier“ quelque chose, un passage nécessaire vers la “Vie de Dieu“. Avec le Christ, la maladie, les souffrances, les échecs, les épreuves qu’il faut savoir combattre de toutes nos forces, comme le Christ l’a fait au cours de sa vie terrestre, peuvent cependant avoir un sens. Et St Paul ose écrire : “Je considère tout comme déchets, afin de gagner le Christ. Il s’agit de le connaître, lui, avec la puissance de sa résurrection et la communion à ses souffrances ; il s’agit de lui devenir conforme dans sa mort, afin de parvenir si possible à ressusciter d'entre les morts. (Phil. 3.9-10).

Non, l’homme n’est pas voué au néant, mais à la Vie. Chacun des actes que je fais pour lutter contre le mal, être solidaires de mes frères, chacun des actes familiaux, sociaux, professionnels… et tant d’autres que je pose, peut prendre dans le Christ une sorte de solidité et de certitude de succès.

Chacune de nos Eucharisties nous rappelle ce mystère pascal du Christ par lequel nous devons, nous aussi, passer afin de mieux manifester la Vie du Christ, sa résurrection, la Vie même de Dieu !

Je suis, dit Jésus, la vraie Vigne qui donne la vraie vie, celle même de Dieu qui est éternelle. Et vous, vous êtes les sarments en lesquels coule la sève de la vraie Vie !

Certes, il peut arriver que, sur le cep, pousse un sarment qui ne suit pas la loi du plant, qui se développe en bois en et en feuilles. Le vigneron appelle cela une “gourmand“ ; il le coup et le jette. Peut-il exister des hommes qui font profession d’évangile sans porter du fruit ? St Ignace d’Antioche recommandait déjà au 2ème siècle : “gardez-vous des excroissances nuisibles que Jésus Christ ne cultive pas !“.

Pour aujourd’hui, gardons en notre cœur cette autre paroles de Notre Seigneur : “Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là donne beaucoup de fruit !“.
La Paix - Pâques 5 - Mardi – (Jean 14.27-31)

“Je vous laisse la paix ; je vous donne ma paix !“

Dom Guéranger – vous comprendrez que je le cite – écrivait à la future première Abbesse de Solesmes, la jeune Cécile Bruyère : “La chose la plus importante est de ne jamais perdre le calme et de conserver la paix de son âme. Dans le cours de la vie, bien des choses vous choquent ; faut-il pour cela perdre la paix de l’âme ? Non, assurément. Il n’y a de mal pour nous que dans ce qui nous sépare de Dieu !“.

Qu’est-ce donc que la paix ? Comment l’acquérir et la conserver ?

En hébreux, le mot “shalom“ - que l’on traduit par paix - vise surtout le bien-être qui résulte de l’épanouissement de toutes les virtualités que le Créateur a mises en chacun de nous : les épanouir parfaitement, de façon harmonieuse !

On pourrait dire que l’homme de paix, c’est le “kalosagaqoj“ grec (kaloj: : bon ; agaqoj : beau, noble). C’est la profondeur de sa bonté qui transparaît dans la beauté de ses nobles attitudes : un “gentleman“, “l’honnête homme“ du 17ème siècle ! Et l’harmonie qui se dégage de l’accord parfait entre toutes ses facultés (intelligence, volonté, sensibilité) ne peut que solliciter et provoquer un chant mélodieux de toutes les relations : entre individus, cités, états… Ce sera alors le “bien-être“ social : la paix !

Mais pour un Juif, ce “bien-être“ ne peut s’obtenir que par un don de Dieu. Aussi, le mot “shalom“ sous-entend une relation amicale, une alliance amoureuse avec Dieu : “Je fais don de mon alliance, dit Dieu à Moïse, en vue de la paix !“ (Deut .25.12).

Une paix qui appelle à une action parfois combattive. Car la paix n’est ni la paresse ni un faux désintéressement ! Quand Gédéon s’aperçoit finalement que c’est bien le Seigneur qui lui est apparu et qui l’envoie défendre le peuple contre les Madianites, il appelle le lieu de l’apparition divine, paradoxalement : “Le Seigneur est Paix !“.

Chez les prophètes, la paix sera surtout un bien messianique : cf Is. 2.2sv ; Ps 46.10 : “Le Seigneur, le Tout-Puissant, est avec nous. Il arrête les combats jusqu’au bout de la terre !“ – Osée 2.20 : “Je conclurai pour eux en ce temps-là une alliance avec les bêtes des champs, les oiseaux du ciel et les reptiles de la terre. L’arc, l’épée et la guerre, je les briserai…“. (Cf. Zach 9.9sv ; Michée 5.4).

La Septante a traduit le mot “shalom“ par “eirhnh“ (d’où notre mot “irénisme, irénique) : c’est l’absence de conflits qui, pour un disciple du Christ, ne peut être également qu’un don, une grâce de Dieu. Aussi St Paul associe les deux mots pour saluer les Corinthiens par exemple : “A vous grâce et paix ! (Ils en avaient besoin !) de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ“ (I Co. 1.3 ; cf. I Pierre 1.2 ; Apoc 14.9). Si la grâce (“Carij“) est la faveur divine (Cf. Annonciation), la paix (“eirhnh“) est la somme des biens que l’homme en retire : biens spirituels et humains tout à la fois ! C’est le bonheur chrétien ! De sorte que l’on pourrait dire : La grâce commence tout ; la paix couronne tout !

Et comme nous sommes dans une chapelle occupée autrefois par des Religieuses de la Visitation, Ordre fondée par St François de Sales, on peut citer ce grand auteur spirituel qui affirmaient ses convictions et donnaient ses conseils avec, tout à la fois, grande fermeté et grande douceur : “Paix !, dit-il, laquelle ne s’acquiert en cette vie que par l’union de l’entendement, de la mémoire et de la volonté avec l’esprit – et de l’esprit avec Dieu !“ - “Si nous voulons avoir la paix en nous-mêmes, il ne faut avoir qu’une volonté et qu’un seul désir, imitant St Paul qui ne voulait prêcher et sçavoir qu’une seule chose, à sçavoir Notre Seigneur Jésus Christ et iceluy (celui-ci) crucifié ; car nous posséderons comme lui la vraie paix si nous ramassons bien toutes nos puissances et facultés intérieures afin de les occuper toutes en l’amour de notre doux Sauveur, lequel sans doute ne manquera pas de nous visiter afin de nous donner sa sainte paix…“.

Oui, la paix comme la joie, n’est pas précisément une vertu, mais le fruit de la plus hautes des vertus. La paix est fille de la charité. Il faut la rechercher, dit St Pierre (I Pet. 3.11 ; cf Ps 34.15) et la poursuivre. Elle aura parfois l’air de fuir ; il ne faut pas se décourager, s’irriter de ses lenteurs qui sont, après tout, que nos propres lenteurs à nous. Il n’y a jamais de raison de sortir de cette paix : ni événements, ni souffrance, ni fautes même ; car on ne corrige pas des erreurs avec du désordre ; et le repentir n’est pas du trouble…

Mère Térésa avait raison :
  • Le fruit de la prière est la foi…
  • Le fruit de la foi est l’Amour…
  • Le fruit de l’Amour est la paix.

lundi 11 mai 2009

La Trinité en nous ! - Pâques 5 - Lundi - (Jean 14.21-26)

“Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l’aimera ; nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui !“

Voilà bien la seule “manifestation“ que Dieu décide toujours de faire: habiter le cœur de ceux qui croient en lui, qui l’aiment. C’est sa “gloire“ (au sens biblique du mot “kabod“) : la “manifestation lumineuse“ de Dieu sur terre, “gloire“ de Dieu chantée jusqu’au ciel : “Gloria in excelsis Deo…“

Cette expérience de la présence d’une personne absente, nous la faisons déjà dans nos amours humaines : nous nous surprenons en train de parler, dans un dialogue intérieur, avec l’être aimé et pourtant éloigné ou même décédé… ! Expérience donnée seulement à ceux qui aiment !

“Si quelqu’un m’aime“, dit Jésus. On se plaint de l’absence de Dieu : “Où est-il ton Dieu ?“, demande l’incroyant. Et chez certains chrétiens, cette question est sous-jacente : on pense à Jésus comme à un modèle d’humanité à admirer, à imiter si possible, mais, si éloigné... Or, Jésus affirme qu’il n’est pas seulement un modèle d’homme dont le message peut faire réfléchir ! Il est un Vivant, un Vivant agissant, qui est certes entré dans le “monde de Dieu“, invisible. Mais ce monde qui est bien hors du temps lui permet d’être le contemporain de tous temps, de tout homme.

“Où est-il ton Dieu ?“. Alors, Jésus lui-même de répondre :

“Si quelqu’un m’aime, nous viendrons chez lui !“. C’est le lieu de la rencontre ! Il est là au cœur de ceux qui l’aiment. Quand Jésus dit cela, il est à quelques heures de sa mort. Il avait déjà dit qu’il serait le Temple nouveau, à rebâtir en trois jours, ce temple où les Juifs éprouvaient le sentiment d’une “présence réelle“ de Dieu. Ici, Jésus va plus loin : il ose dire qu’à partir de son départ, cette présence ineffable, cachée certes, sera assurée par ceux qui l’aiment. Quelle responsabilité ! Par son amour, par notre amour, nous devenons “christophores“, “porteurs du Christ“ !

“Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole !“. – Entre ceux qui s’aiment, il y a écoute, dialogue. Rien de pire, pour nos amours, que de ne “pas écouter“, de ne “pas parler“. C’est le drame, parfois, de certaines relations. Aussi, Jésus révèle une des clefs de la vie qui existe entre lui-même et ceux qui l’aiment : c’est la méditation de sa parole comme un sacrement de sa présence. C’est un fait : nous n’avons pas la présence sensible de Jésus ; mais pour qui l’aime, quelle merveille, déjà, d’avoir sa pensée, sa parole. Notons que Jésus ne parle pas seulement d’une parole reçue intellectuellement, mais d’une parole “à laquelle on est fidèle“, d’une parole qui, “étant vécue“, rend réellement présent celui qui l’a lancée.

“Et l’Esprit que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout ; et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit“. L’Esprit est en nous comme l’écho de la Parole éternelle que Fils adresse à son Père dans leur amour commun et éternel. L’Esprit n’ajoute rien à Jésus, comme Jésus n’ajoute rien au Père. Il n’y a pas “trois Dieux“, mais un seul. Pourtant, ils sont trois distincts qui, sans être des modalités d’un seul, ne font qu’un. Le Père, c’est Dieu lui-même dans son invisibilité ; le Fils, c’est Dieu lui-même, Verbe de Dieu, qui vient parler aux hommes ; l’Esprit, c’est Dieu lui-même qui prolonge la parole et l’action de Jésus et du Père.

Aussi, cet Esprit est celui qui nous donne l’intelligence progressive de la Parole de Dieu qu’est Jésus, Verbe de Dieu. L’Esprit enseigne… et fait se ressouvenir… Les apôtres eux-mêmes qui avaient pourtant vécu des mois et des années avec Jésus, n’ont saisi que plus tard ce que Jésus disait, grâce à l’Esprit Saint en eux et parmi eux. “Plus tard, tu comprendras“, avait dit Jésus à Pierre.

C’est l’Esprit Saint qui aide l’Eglise à comprendre peu à peu ce que Jésus a révélé. Certains s’étonnent que l’Eglise “change“ comme ils disent. Mais il est clair que, pour Jésus, elle doit encore beaucoup changer, tout en restant elle-même, sous l’influence de l’Esprit. “L’Esprit vous enseignera et vous fera ressouvenir… “. Jésus a tout dit, mais la plupart de ses paroles n’ont livré toute leur substance qu’après avoir été longuement portées et priées dans la mémoire de l’Eglise au cours des siècles.

Et comme nous sommes dans le mois de Mai, remarquons que Marie, est-il dit, “méditait en son cœur les événements et les paroles de son Fils…“ (Lc 2.19,51). Que Marie nous aide à accueillir, comme elle, l’Esprit Saint qui ne cesse de ruminer en nous la Parole que le Fils de Dieu ne cesse d’adresser à son Père.

Et si nous accueillons avec amour cette Parole que ne cessent de s’échanger en nous les trois Personnes de la Sainte Trinité, toute notre vie en sera illuminée et rayonnante pour notre bien, pour le bien de ceux qui nous entourent.

jeudi 7 mai 2009

Les “publicains“, “Zélotes“, “Iscariotes“… - Pâques 4. Jeudi - (Jn 13.16-20)

“Je connais ceux que j’ai choisis. Mais il faut que l’Ecriture s’accomplisse : « Celui qui mange mon pain m’a donné un coup de pied »“.

La citation est du psaume 41.10 : “Même l’ami sur qui je comptais et qui partageait mon pain a levé le talon sur moi !“. La phrase vise celui qui vit de l’ami et qui soudainement prend une attitude hostile…

Naturellement, ici, c’est Judas qui est désigné. D’ailleurs, les versets suivant sont plus explicites : “L’un de vous va me livrer !“.

Personnellement, je me suis souvent interrogé sur Judas comme sur ceux qui “tournaient le dos“, soudainement, à Dieu…, à leur famille ou amis… Et je pense à l’attitude de certains qui, de leurs parents, ont “mangé le pain“ - celui des hommes et celui de Dieu - et qui “ont donné un coup de pied…“.

Et en pensant à la souffrance causée, je pense à celle de Jésus face à Judas… à ceux qui se sont éloignés…, face à Pierre qui a renié… etc.

Quand même ! Jésus aurait-il manqué de discernement dans le choix de ses apôtres, de ses disciples ? Ma réponse est tout à fait personnelle et je demande de la prendre comme telle.

Le Fils de Dieu en s’incarnant est venu profondément s’implanter en notre pâte humaine telle qu’elle avait été, qu’elle était et sera. Aussi a-t-il voulu que le groupe de ses apôtres puisse refléter cette humanité qu’il venait délivrer une fois pour toutes et pour tous les siècles passés et futurs.

Regardez le groupe des apôtres. Ce ne sont pas des saints que Jésus a choisis. Ils ont les défauts de tous les hommes : ambition, querelles, avarice, jalousie… etc. Bien plus ! Ce Simon appelé “le Zélote“ avait peut-être gardé quelque peu la hargne de ces farouches et violents opposants aux Romains qu’Hérode le Grand, 70 ans auparavant, avait cruellement exterminés dans les grottes des falaises d’Arbel peu éloignées de Nazareth (1). Qu’avait pensé Jésus de cette violence dont on parlait certainement puisque l’historien Juif Flavius Josephe en fait le récit. Peut-être est-ce en faisant route vers Capharnaüm que Jésus, passant devant ces falaises, répondra habilement : “Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu !“.

Et dans le groupe des apôtres, il y avait donc Judas, appelé “Iscariote“ ! Certains se demandent s’il n’y a pas un rapprochement à faire entre “sicaire“ et “Iscariote“. Les “sicaires“ étaient des gens qui dissimulaient un poignard sous leur tunique et qui profitaient de la foule pour couper le cordon des bourses de leurs voisins et qui, à l’occasion, n’hésitaient pas à massacrer pour se sauver. Judas aurait-il été l’un de ses anciens “sicaires“. En tous les cas, on sait qu’il fut voleur et traitre !

Et il y a toujours des “sicaires“ plus ou moins habiles ! Qu’en pensait Jésus devant Judas ? Une chose est certaine : face aux divers mouvements (politiques ou terroristes), Jésus affichait une certaine liberté presque désinvolte : devant Simon le Zélote, Judas l’“Iscariote“ et tous les autres, il est l’ami d’un Centurion de l’armée romaine ; il fréquente les publicains, voleurs notoires ; l’un d’eux, converti, fut Matthieu ; il accueille Marie-Madeleine, la Samaritaine et va souvent en pays païen – ce qu’on lui reproche facilement.

Alors, je me dis : presque toutes les figures de notre triste humanité se trouvaient réunies dans le groupe des apôtres et des disciples. C’est que Jésus est venu pour cette humanité-là qu’il appelle à lui pour la sauver. Or l’humanité est toujours l’humanité. Si Jésus venait en notre monde, on trouverait sans doute autour de lui des zélotes, des sicaires, des voleurs, des renégats et sans doute des traitres… ! St Jean Eudes (17ème s.) qui connaissait bien la misère morale de son temps pour avoir accueilli bien de ses victimes, a cette belle méditation : C’est vrai, dit-il, les mystères (de salut) de Jésus ont été parfaitement accomplis en sa personne. Néanmoins, ils ne sont pas parfaitement accomplis et parfaits en nous, en son Eglise. Il veut faire, dit-il comme une extension et une continuation de ses mystères en nous, en toute son Eglise… L’Eglise continue l’œuvre de Jésus pour notre temps. Alors ne nous étonnons pas de trouver dans l’assemblée de l’Eglise, comme dans le groupe des apôtres, quelques personnes qui, apparemment, paraissent peu recommandables.

Peut-être saurez-vous maintenant répondre à ma question. Le Christ est mort et ressuscité pour tous les hommes, pour tous les “publicains“, les “zélotes“ et les “sicaires“ de notre temps. En tous les cas, par ma prière, je place ma question dans le mystère de la grande miséricorde de Dieu.

Je dis aussi cela pour les personnes qui pleurent en voyant certains des leurs ou de leurs amis vivre apparemment loin du Seigneur. Qu’ils sachent que leur chagrin est celui du Christ venu sauver tous les hommes par sa mort et sa résurrection. Aussi puissent-ils garder, comme dit St Paul, “une foi active, une charité qui se met toujours en peine et une persévérante espérance en Notre Seigneur“. (I Thess. 1.2).

(1) Curieusement, ce fut près des falaises d’Arbel qu’eût lieu également la célèbre défaite des Croisés face à Saladin (1187). Toujours la violence ! Et que penserait Jésus devant certains chrétiens, les “zélotes“ d’aujourd’hui, plein de zèle mais toujours farouches ?

mardi 5 mai 2009

Main de Dieu, Main d’homme ! - Pâques 4 - Mardi - (Jn 10.22-30)

Après la multiplication des pains, les apôtres demandent : “Que faut-il faire pour travailler aux œuvres de Dieu ?“ Jésus répond : “L’œuvre de Dieu, c’est de croire en Celui qu’Il a envoyé !“. – Et aujourd’hui, Jésus nous donne une certitude merveilleuse : si nous acceptons de le suivre, de croire en lui, l’Envoyé de Dieu, personne ne nous arrachera de la main de Dieu ! Pas plus de la main du Fils (10.28) que de la main du Père (10.29).

La main de l’homme ! La main du Fils de l’homme ! La main de Dieu !

On peut dire en quelque sorte que la main est le propre de l’homme. Les mains de l’homme disent l’homme. Des mains du nouveau-né aux mains jointes du mourant, les mains traduisent ses possibilités et ses limites, sa force et sa faiblesse. La main qui peut s’ouvrir ou se fermer, prendre ou lâcher, retenir ou frapper est l’instrument le plus perfectionné du monde ! La main, elle écrit, peint, sculpte, assemble, exprime le plus beau de la pensée, de la science et de l'art, et par là même, la personnalité de chacun.
  • Pour bénir, pardonner ou guérir, on impose les mains.
  • Pour dire à l'être aimé qu'on se confie à lui, on lui accorde sa main.
  • On joint les mains pour prier. On les tend pour supplier, rendre grâce.
  • Elles battent pour dire notre joie, et on les joint après le dernier soupir.
  • …Une vie d’homme peut ainsi se juger par l'ouvrage de ses mains (Ps 90.17).

Cependant, il y a un étonnant paradoxe : d'une part, la main traduit ce qu'il y a de plus réel dans l'être humain ; et d'autre part, elle ne parvient pas à exprimer le plus intime de son cœur. D'un côté, elle traduit bien au dehors ; de l'autre, elle ne peut pleinement exprimer le dedans de l’homme.

Ce paradoxe nous aide à mieux comprendre ce que Jésus nous dit à propos des mains de Dieu. Si l'Ecriture affirme souvent qu'on ne peut enten-dre sa voix ni voir son visage, par contre, elle parle sans cesse de ses mains.
  • C'est par elles que tout fut créé. Le ciel est l'œuvre de ses mains. La terre ferme, ses mains l'ont façonnée, (Ps 102,26). Et de cette terre, Dieu, de ses mains, a façonné l'homme, comme l'argile dans la main du potier (Si 33.13).
  • C'est par sa main que Dieu sauve son peuple. Il l'a pris par la main pour le faire sortir d’Egypte (Jér 31,32). Il a étendu la main sur la mer libératrice (Is. 23,11). Il a conduit les siens par le désert, à main forte, à bras étendu (Dt 7,19).
  • Psalmistes et prophètes le répètent à l'envie: Puissante est ta main (Ps. 89,14). – Protège, Seigneur, cette vigne que ta main a plantée (80,16).
  • Non, la main du Seigneur n’est pas trop courte pour sauver ! (Is 50,2).
  • Et, par Isaïe, le Seigneur nous confirme : Vois, j’ai gravé ton nom sur les paumes de mes mains (Is 49,16).

Mais il faut bien le reconnaître :
  • la main de Dieu crée le monde, façonne l'homme, libère, protège, soutient nous révèle certes sa puissance et sa présence près de l’homme.
  • Mais la main de Dieu n'est ni son visage ni son cœur ; et le plus clair de son être, - sa gloire, sa beauté - nous reste encore inconnu. Quand passera ma gloire, dit le Seigneur à Moïse, sur la montagne, je te mettrai dans la fente du rocher et je t'abriterai de ma main, durant mon passage. Puis j'écarterai ma main et tu verras mon dos. Mais ma face, on ne peut la voir! (Ex33,22-23).

Voilà le mystère des mains de Dieu tel qu’il nous est révélé: Dieu est, tout à la fois, présent et caché. Tout nous parle de lui et l'on ne peut le voir sans mourir ! (33,20).

La première vérité cependant est celle de la Présence active de Dieu en ce monde qu’il crée, conduit, aime. Et nos propres vies portent les traces d’une présence divine, d'une Providence, d’une grâce prévenante et actuelle, (comme dit la théologie). Nous en trouvons les marques dans l’histoire de l’humanité et dans notre propre histoire. Le Seigneur nous accompagne, nous conduit, nous soutient, nous attire à lui (Jn 6,44) - Il faut savoir discerner dans nos vies et dans le monde, les “traces” des mains de Dieu. Oui, nous sommes enveloppés d'une présence, soutenus par une grâce, portés par une force : ce sont les mains de Dieu qui crée, sauve, conduit, sanctifie : Les mains de Dieu !

Mais il faut aussi le reconnaître : si Dieu nous atteint par l’œuvre de ses mains, nous ne pouvons, encore, le voir, l'entendre, le toucher dans toute la réalité de son être. - A la différence du Christ, vrai Dieu né du vrai Dieu, lui qui est dans le sein du Père (Jn.1,18) , nous sommes, nous, issus de ses mains. Lui, il est engendré ; nous, nous sommes créés ! Parler dès lors des Mains de Dieu qui nous créent et nous conduisent, c'est affirmer, à côté de sa Présence, sa distance (Jn l4,3), qu’ici-bas nous avons, avec sa grâce, à réduire, franchir pour aller vers lui, en Lui ! (Jn 20.17).

Mais que notre marche vers Dieu soit courageuse et réconfortée puisqu’il nous est dit que rien ni personne ne pourront jamais nous arracher des mains de Dieu.
  • Si malin que soit le démon, il peut rôder sans cesse autour de nous (I P 5,8); il ne pourra jamais entrer en nous!
  • Si nous veillons à ne pas donner prise au diable (Ep 4,27), personne ne nous arrachera jamais de la main du Christ, de la main du Père (Jn 10.28-29).

Quelle merveilleuse promesse! Quelle paix pour nous en cette certitude! Quelle espérance pour notre vie! - Les collines peuvent tomber, les montagnes s'effondrer, nous dit Dieu par Isaïe, mon amour pour toi ne s'en ira pas, et mon alliance de paix avec toi ne sera pas ébranlée (Is 54,10).

Que dire après cela? Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous?... J’en ai l'assurance, ni mort, ni vie, ni présent, ni avenir, rien ni aucune créature... ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu manifesté en J-C (Rm 8,31-39).

Il nous suffit de vouloir rester avec lui, de nous laisser conduire, enseigner, nourrir et éclairer par celui qui est notre berger, le Bon Berger (Jn 10,11 ). Mes brebis écoutent ma voix, je les connais et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle ; elles ne périront jamais et nul ne les arrachera de ma main. Le Père qui me les a données est plus grand que tout et nul ne peut rien arracher de la main du Père. Le Père et moi, nous sommes un (Jn 10,27-30).

Si nous tenons ensemble les mains de Dieu, de Dieu le Père et de Dieu le Fils, nous aussi, nous serons un. Dans l’unité bienheureuse de l’Esprit Saint qui est, comme le dit l’hymne de la Pentecôte, le “doigt de la Droite Paternelle” du Tout-Puissant (Veni Creator).