mercredi 30 décembre 2009

Péchés pardonnés - Noël - 30 Décembre - (1 Jn 2.12sv)

St Jean a probablement écrit ses lettres dans sa vieillesse. Comme beaucoup de vieillards, il se répète souvent. On dit qu’au seuil de la mort, il n’avait à la bouche que ce commandement nouveau dont nous avons médité hier la radicale nouveauté : Aimer son prochain comme soi-même ! Le Lévitique le commandait déjà ! Mais pas seulement cela : le commandement nouveau qui caractérise le Nouveau Testament, c’est d’aimer comme Dieu nous a aimés, jusqu’à donner totalement sa vie pour nous, et en nous montrant comment Dieu est Amour en lui-même, cet AMOUR que s’échangent de toute éternité le Père, le Fils et l’ Esprit-Saint !

Et c’est toujours au hasard de la banalité de la vie de tous les jours que nous sommes appelés à profiter des moindres occasions pour sortir de nous-mêmes : aller vers Dieu, Père et aller vers l’autre dans le service.

Notre “combat de vie“ réside donc en ce double élan :
  • la sortie de soi vers Dieu par la prière
  • et la sortie de soi vers l’autre par le service !

C’est le combat du double commandement qui, en fait, n’en fait qu’un et en lequel se réunissent la Loi et les Prophètes : “Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu !“ - “Tu aimeras le prochain comme toi-même !“, “… afin que notre vie, comme dit la quatrième Prière Eucharistique, ne soit plus à nous-mêmes, mais à Lui qui est mort et ressuscité pour nous !“.

Et pour dynamiser ce combat de la vie chrétienne, il y a cette certitude que nous rappelle St Jean dans la lecture d’aujourd’hui : “vos péchés vous sont pardonnés à cause du Nom de Jésus“.

Souvent, nous manquons de cette certitude de foi ! Que nous soyons jeunes ou que nous soyons vieux (“je vous le dis à vous, les plus anciens… ; je vous le dis à vous, les plus jeunes), nous traînons en nous des relents de culpabilité qui viennent d’un manque de foi en la gratuité du pardon, de ce pardon que les Anges chantaient en la nuit de Noël : “Paix sur la terre aux hommes, objet de la bienveillance gratuite de Dieu !“.

Trop souvent, nous ressemblons aux frères de Joseph (dans l’A.T.) qui avaient voulu le supprimer et qui ne croyaient pas au pardon qu’il leur avait totalement accordé : ils venaient se prosterner devant lui dans la peur que renaissent en lui des sentiments de rancune et de vengeance ! Ils se jetaient devant lui et disaient : " Nous voici tes esclaves !". Joseph leur répondit : "Ne craignez point. Suis-je en effet à la place de Dieu ? Vous avez voulu me faire du mal, Dieu a voulu en faire du bien en conservant la vie à un peuple nombreux comme cela se réalise aujourd'hui. Désormais, ne craignez pas, je pourvoirai à votre vie… et il les réconfortai et leur parlait cœur à cœur“. (Gen. 50 18-21).

Soyons, nous aussi, persuadés du pardon de Dieu en Jésus. Et une remarque au passage : ces relents de culpabilité que nous éprouvons parfois viennent souvent plus de l’amour propre que d’une contrition véritable, fruit, elle, d’une foi en l’AMOUR INDEFECTIBLE de Dieu à notre égard ! Il ne faut pas confondre : sentiment de culpabilité et contrition ! D’ailleurs ces sentiments de culpabilité sont négatifs : ils entament en nous les énergies dont nous avons besoin pour affronter le monde qui ignore cette certitude de l’Amour gratuit de Dieu, et qui marche trop souvent dans une logique de vie si différente où dominent rivalité, jalousie, vengeance et parfois violence, cruauté gratuites. Tout cela ne fait que traduire ce que St Jean dénonce dans la lecture : les désirs égoïstes de la nature humaine, les désirs du regard, l’orgueil de la richesse…, toutes ces pseudo valeurs destinées à disparaître…, alors que nous sommes appelés, nous, à miser sur ce qui ne passe pas : l’éternité de Dieu, son AMOUR dont la connaissance nous a été révélée.

Le nouvel An que nous allons célébrer est, à l’origine, une fête païenne. Elle célébrait le soleil qui commence à manifester sa victoire sur les ténèbres, avec les jours qui commencent à rallonger. L’Eglise, au début du Christianisme, envoyait ses missionnaires en leur donnant pour méthode de christianiser, autant que faire se peut, les fêtes païennes les moins barbares. Or, le monde dans lequel nous vivons est redevenu païen. Mais la fête du Soleil peut redevenir une occasion de redécouvrir le christianisme dans la nouveauté et la fraîcheur de ses origines. Profitons de cette occasion pour retrouver la jeunesse de notre christianisme qui est déjà une participation à l’éternelle jeunesse de Dieu, de Dieu qui pardonne !

L’Evangile d’aujourd’hui nous montre une certaine Anne qui représente ce qu’il y a de plus ancien dans l’Ancien Testament. Elle est là, dans le Temple, en compagnie du vieillard Siméon, pour accueillir les prémices du Nouveau Testament, pour annoncer la grande vitalité de ce SOLEIL divin qu’est le Christ qui, gratuitement, nous transmet le pardon de Dieu et nous introduit en la VIE même de Dieu qui est AMOUR ! Tout entier est évoqué par St Luc qui joint à la rigueur de l’historien la finesse d’un grand écrivain, tout le drame qu’il va décrire par la suite dans son évangile et dans les Actes des Apôtres : notre combat entre la Lumière et les Ténèbres.

Mais pour nous, chaque Eucharistie est un NOEL qui nous donne la LUMIERE divine manifestée en Jésus qui a dit : “Ne craignez pas ! J’ai vaincu le monde !“.

mardi 29 décembre 2009

Commandement nouveau – Noël - 29 Décembre - (1 Jn 2.3sv – Luc 2.22sv)

Dans la première lecture, St Jean insiste sur la nouveauté du “Commandement nouveau“ que les chrétiens ont reçu. Pourtant, le commandement d’aimer le prochain se trouvait déjà dans l’Ancien Testament. Il est écrit dans le Lévitique : “… ne te venge pas, et ne sois pas rancunier à l'égard des fils de ton peuple : c'est ainsi que tu aimeras ton prochain comme toi-même. C'est moi, le Seigneur“.

Cependant, la question restait posée : qui est le prochain que je dois aimer ? Question qu’un scribe pose à Jésus et qui nous vaut, en réponse, la parabole du “Bon Samaritain“. Jésus retourne la question : qui s’est montré le prochain de l’autre ? Lequel des trois, le prêtre, le lévite ou l’étranger Samaritain te semble avoir été le prochain de l’homme tombé entre les mains des brigands ? Le scribe répond : celui qui a exercé la charité envers lui. Et Jésus lui dit : “Va, toi aussi fais de même !“. (Luc 10).

Mais avec cet élargissement de la notion de prochain, on n’est pas encore dans ce “Commandement nouveau“ dont parle Jésus à ses disciples, dans le discours après la Cène, après le lavement des pieds.

Comprenons-bien :
  • Le disciple est celui qui suit son maître partout où il va : “Venez, suivez-moi !“, avait dit Jésus !
  • Il est également celui qui se met au service de son maître : “Je ne suis pas digne de lui ôter ses sandales“, avait Jean-Baptiste à propos de Jésus (Mth. 3.11). Autrement dit, je ne suis pas digne d’être son disciple !

Or voici que Jésus contredit ces deux attitudes fondamentales de tout disciple :
  • Il leur dit : “Là où je vais, vous ne pouvez venir !“. (Jn 13.33,36). Vous ne pouvez plus me suivre. Jésus marche vers la croix… ! (Or Pierre reniera !)
  • Il lave les pieds de ses apôtres, en leur expliquant : “Vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres !“ (Jn 13.14).

Ainsi, comme vous ne pouvez plus accomplir le commandement de tout disciple qui est de suivre son maître, d’être à son service, alors, je vous donne un “Commandement nouveau“, un commandement de “substitution“, si l’on peut dire : “Aimez-vous les uns les autres ! (Jn 13.34). Et quand vous aurez parfaitement suivi ce “Commandement nouveau“, alors seulement vous serez capables de reprendre le premier commandement qui est de me suivre jusqu’au bout…, jusqu’à la croix, s’il le faut ! – “Tu me suivras… plus tard“, dit Jésus à Pierre ! (Jn 13.36). “Tu feras les mêmes œuvres que moi !“ (Jn 14.12). Or, l’“Œuvre“ que Jésus accomplit, c’est que le Père soit glorifié. Et la gloire de Dieu…, Jésus l’accomplit en son mystère pascal de mort et de vie…

C’est en s’aimant les uns les autres jusqu’à en mourir s’il le faut que l’on peut suivre le Christ jusqu’en la gloire de son Père, grâce à son Esprit qui nous donne : “Aimez-vous comme je vous ai aimés“ (Jn 13.34)… de l’amour même de Dieu, de cet amour que s’échangent le Père et le Fils dans l’Esprit Saint.

Il dit alors : “Aimez-vous comme je vous ai aimés !“. Et cela demande un supplément de révélation qui n’est donné que sur la croix et dans la confidence que Dieu fait du “comment il est UN“ dans le mystère de la Trinité où chaque personne n’existe que comme relation subsistante vers l’autre. Je pense que dans le dialogue judéo-chrétien, on n’insiste pas assez sur la nouveauté du commandement nouveau dont il est parlé dans le Nouveau Testament. Nous en parlerions mieux certainement si nous-mêmes nous le pratiquions en reprenant conscience de cette nouveauté radicale.

Quant au récit de la présentation au temple, on n’en saisit l’importance que si on se rend compte qu’au temps de Jésus le temple, le 2ème temple était au point culminant de son importance. Centre non seulement religieux mais aussi national de toute une population juive déjà répandue à travers le monde connu de l’époque. Les prophètes avaient déjà prédit que ce 2ème temple serait encore plus important que celui de Salomon. Malachie parle d’une entrée solennelle et grandiose du Messie dans le temple à la fin des temps : “ Subitement, il entrera dans son Temple, le Maître que vous cherchez, l'Ange de l'alliance que vous désirez ; le voici qui vient, dit le SEIGNEUR le tout-puissant. Qui supportera le jour de sa venue ? Qui se tiendra debout lors de son apparition ?“. (Mal. 3.1-2)

Or, le contraste est saisissant entre la prophétie du dernier des prophètes et la réalisation : un jeune couple avec un bébé dans les bras. Et pour les accueillir : deux vieillards qui représentent le “reste d’Israël“ !

Dans les paroles de Syméon, la Vierge Marie entrevoit déjà le caractère tragique de la mission messianique de son enfant ! “Syméon les bénit et dit à Marie, sa mère : "Vois ! Cet enfant doit amener la chute et le relèvement d'un grand nombre en Israël ; il doit être un signe en butte à la contradiction - et toi-même, une épée te transpercera l'âme ! - afin que se révèlent les pensées intimes de bien des cœurs“ (Luc 2.34-35). Toute sa vie, jusqu’au pied de la croix, Marie déchiffrera ces paroles de Syméon !

“Détruisez ce temple, dira Jésus par ailleurs, et en trois jours je le reconstruirai !“. C’est après sa résurrection que l’on comprendra ces paroles ! Et le voile du Saint des saints se déchirera lors de la passion !

L’Eucharistie rend présent désormais, de présence réelle, ce qui s’est passé alors une fois pour toutes !

La mosquée d’Omar recouvre “le LIEU“ ; et on ne peut méditer sur Jérusalem qu’en se remémorant ce que fut le temple dans l’Histoire Sainte et en sachant qu’il y a ici plus que le temple en nos Eucharisties quotidiennes !

lundi 28 décembre 2009

Fête des Saints Innocents - 28 Décembre - notre Exil …!

Joseph et Marie s'en vont, le bébé dans les bras, le baluchon à l'épaule. Les voici sur les chemins de l'exil, chemins de peur…, vers un avenir incertain. Comme ces routes sont encore fréquentées aujourd'hui ! Elles sillonnent notre terre de leurs tracés d'angoisses et de misères. Des millions de personnes de tout continent : “déplacées”, déportés, exilés, réfugiés, immigrés ! Victimes du racisme, d’un système politique, de la guerre ou de quelque cataclysme. Ils fuient avant qu'il ne soit trop tard pour se soustraire à la misère, à la prison, à la mort…

Joseph et Marie vivent une situation incompréhensible, douloureuse. Allez comprendre qu'Hérode menace de mort un bébé, que le tyran n'en veuille qu'à l'enfant ! Pourquoi devoir quitter sa patrie et trouver refuge en Égypte, ce pays dont Israël garde un si mauvais souvenir, terre d'esclavage et de sévices de tous genres ?

L'attente en pays étranger est toujours longue ! … Jésus dira plus tard que l'homme, ici-bas, est sur une terre d'exil : le Royaume est encore à venir ! C’est peut-être la grande leçon de notre Evangile ! Et la lettre aux Hébreux le rappellera : l’homme, sur terre, n’est qu’un voyageur, un étranger !

Remarquons encore que le risque est toujours grand pour un exilé de s'installer dans l'exil, qu’en lui ne brille plus la lumière de sa patrie et qu'ainsi son identité soit mutilée. - N’est-ce pas parfois notre cas, oublieux que nous sommes de notre vraie Patrie, pactisant trop facilement avec les ténèbres de notre terre d’exil, dit St Jean ? Jésus n’acceptera, lui, ni l'écrasement ni la résignation. De Nazareth, il sortira pour dire qui il est : Chemin vers la Patrie, Lumière pour tout homme, Vie éternelle ! Mais on lui rétorquera : “N'es-tu pas de Nazareth ?” L’homme veut toujours enfermer l’homme !

Il n'est ni de Nazareth ni de Bethléem, ni d'un quelconque village de cette terre. Il est un exilé de chez son Père, du ciel. Et son regard s'éclairait toujours de la lueur grandissante du Royaume de son Père, du Royaume à venir.

Aussi, c'est de Nazareth qu'il part pour clamer les béatitudes des pauvres et des persécutés, des étrangers, il les proclame à tous les exilés de la vraie patrie, celle de son Père ! Il y avait toujours en lui quelque chose de puissant : il portait en lui l'espérance de tous les exilés. De toutes les servitudes, oppressions et fautes elles-mêmes, il tirait et tire toujours l’homme vers l'aube pascale de la liberté. Pour cela, il est passé par les chemins de l'exil qui s'enfoncent jusque dans l’ombre de la mort mais débouchent à la pleine lumière de la Vie éternelle !

Et cette mission de pleine liberté, de chemin vers la Patrie doit se réaliser en chacun d’entre nous ! St Paul l’a bien compris alors même que ses écrits rappellent les conditions sociales de son temps. Mais là n’est pas question ! D’ailleurs, d'une culture à l'autre, d'une époque à l'autre, bien des choses peuvent changer dans la condition des personnes. Et parfois, tant mieux ! Cependant, le chrétien, semble dire St Paul, ne doit pas commettre des erreurs de perspective. Pour l’Apôtre, il s'agit, avant tout, de rappeler quelques grands principes généraux de morale chrétienne. Et cette morale est théologale : elle a sa source en Dieu lui-même vers qui nous allons, auprès de qui est notre vraie Patrie.

Voilà pourquoi St Jean rappelle aux chrétiens que Dieu les a choisis pour être "ses fidèles et ses bien-aimés". Ceux que Dieu a aimés le premier doivent donc revêtir leur cœur des caractéristiques de la véritable Patrie ! Ils doivent laisser Dieu modeler en eux le citoyen du ciel !

Ainsi, au seuil de sa vie terrestre, Jésus a connu difficultés, soucis, épreuves ; il a été soumis aux heurs et malheurs des circonstances : un édit de l'empereur et il faut partir pour Bethléem ; la cruauté d'un roi et l’on doit s'enfuir, etc...

A Noël, nous avons chanté de diverses façons : "Notre Dieu est apparu sur la terre ; il a vécu parmi les hommes". Autrement dit, il faut situer résolument notre évangile d’aujourd’hui, si actuel encore, dans le mystère de l'Incarnation. Le Fils de Dieu s'est vraiment fait homme. Il n’a pas fui les réalités humaines. "Dieu est à l'œuvre en cet âge" comme le dit un chant, et non ailleurs. "N'attendons pas la fin des jours pour le trouver... !“. Ne rêvons pas qu'il est partout sauf où l'on souffre et meurt, et où vivent les hommes aux prises avec les réalités humaines.

Non ! Dieu s’est fait homme. Il est là en toute circonstance humaine pour nous entraîner vers le Royaume de son Père, entraîner tous les exilés que nous sommes vers notre véritable Patrie !

mercredi 23 décembre 2009

Elie ! - Avent 23 - Décembre - (Mala. 3.1sv)

La lecture nous invite à méditer sur les dernières lignes de la littérature prophétique avec le prophète Malachie.

Si on se reporte au texte original (de la Bible), on remarquera que Moïse et Elie sont évoqués conjointement dans ces derniers versets du dernier des prophètes :

Mal 3.22-23 : “Souvenez-vous de la Loi de Moïse, mon serviteur, à qui j'ai donné, à l'Horeb, des lois et des coutumes pour tout Israël. Voici que je vais vous envoyer Elie, le prophète, avant que ne vienne le jour du SEIGNEUR, jour grand et redoutable. Il ramènera le cœur des pères vers leurs fils, celui des fils vers leurs pères pour que je ne vienne pas frapper la terre d'interdit“.

Dans la lecture que nous propose la liturgie d’aujourd’hui, on ne parle pas de Moïse comme pour mieux concentrer notre attention sur Elie. On met l’accent sur Elie qui personnifie le prophétisme ; et on omet d’évoquer Moïse qui personnifie la Loi et les observances du Sinaï. Comme dans le récit de la Transfiguration, tel qu’il est rapporté dans St Marc, Elie passe avant Moïse : Mc 9.4 : “Elie leur apparut avec Moïse ; ils s'entretenaient avec Jésus“.

Il n’est peut-être pas sans importance de s’arrêter sur cette remarque. Il en va de la différence qu’il y a entre la lecture chrétienne de la Bible et le la lecture de l’Ancien Testament que l’on fait à la Synagogue.

Chez les Juifs, l’Ancien Testament s’appelle “Torah“ : la Loi, les Prophètes et les écrits. Et l’énumération se fait en ordre décroissant. Prééminence est donnée à la Torah, à la Loi que l’on lit d’un bout à l’autre, de manière continue tout au long de l’année (1). La lecture des prophètes vient ensuite ; elle se fait de manière discontinue, un passage étant choisi pour illustrer le texte qu’on a lu auparavant dans la Torah. Ensuite, en troisième lieu, viennent les écrits, avec une place privilégiée donnée aux psaumes.

En Terre chrétienne, il y a une différence fondamentale. La lecture des Ecritures en Christianisme se fait rétrospectivement à la lumière fulgurante de la résurrection du Christ. Quand il apparaît aux apôtres après sa résurrection, “il ouvre leur intelligence à la compréhension des Ecritures“ qui, dans une lumière nouvelle, apparaissent comme préparant, annonçant et préfigurant ce qui arrive à “la plénitude des temps“ (Noël, Pâques).

On ne considère plus la Torah, les prophètes, les écrits dans un ordre d’importance décroissante, mais, au contraire, dans un ordre de progression dans la connaissance de Dieu qui se manifeste à Noël et Pâques. Tout se concentre non pas sur une LOI, si importante soit-elle (pour mieux “s’ajuster“ à Dieu), mais sur une Personne : le Christ, Dieu fait homme, le “JUSTE“ par excellence qui nous entraîne en la vie même de Dieu !

Dans la perspective de la Synagogue, on dira même que si le peuple avait été fidèle à la Torah, Dieu n’aurait pas eu besoin de les rappeler à l’ordre par les prophètes.

Dans la perspective chrétienne, les prophètes apportent un supplément de révélation à la Loi, en nous préparant à “changer nos cœurs“ pour accueillir Dieu lui-même ! (2). Et c’est ainsi que Elie (le premier et le plus grand des prophètes) passe avant Moïse dans la lecture chrétienne de la Bible,
comme sur la montagne de la Transfiguration, comme nous le fait méditer le texte de ce jour qui nous mène à l’avant-veille de cette “plénitude des temps“ où Dieu envoya son Fils né d’une femme, où Dieu, dans la nuit de Noël, déversera gratuitement la grâce d’une “Nouvelle Alliance“ qui n’est rien moins qu’une nouvelle création !

Ma réflexion peut paraître un peu technique et subtile aujourd’hui. Elle est cependant d’importance. Plus qu’à une LOI, c’est à une PERSONNE qu’il nous faut nous attacher : le CHRIST, Dieu fait homme, mort mais ressuscité, qui veut vivre en nos cœurs si nous savons l’accueillir ! Que ce soit la grâce de Noël 2009 !

[Et une intention de prière : Les médias du monde entier vont nous inviter à penser à nos frères chrétiens de Bethléem. Efforçons-nous de les rejoindre au-delà de toutes les complications de la politique !]
  1. La Loi est écrite à la main par des scribes spécialisés, enveloppée de draperies somptueuses, couronnée une fois roulée, et déposée dans un “tabernacle“ où elle est vénérée comme le Saint Sacrement chez nous.
  2. On le constate d’ailleurs facilement : le Deutéronome, mis dans la bouche de Moïse, reflète la réforme du roi Josias qui se fit à la veille de la destruction de Jérusalem en 586 av. J.-C . Elle est fortement influencée par la prédication du prophète Jérémie qui parle de la Nouvelle Alliance où la Loi sera inscrite dans le cœur : Deut. 29.3 : “Moïse convoqua tout Israël, et il leur dit : Vous avez vu vous-mêmes tout ce que le Seigneur a fait sous vos yeux… Pourtant, jusqu'à aujourd'hui, le Seigneur ne vous avait pas donné un cœur pour reconnaître, ni des yeux pour voir, ni des oreilles pour entendre“. (C’est ce que Dieu fit à la “plénitude des temps“, à Noël-Pâques !).

mardi 22 décembre 2009

La folie du langage de Dieu - Avent - 21 Décembre - (Cant 2.8sv)

"J’entends mon bien-aimé qui vient !Il escalade les montagnes ; il franchit les collines. Il accourt comme une gazelle…“.

Il est une chose qu'on trouve assez fréquemment dans la tradition juive et dans la tradition patristique chrétienne : le péché a émoussé la fine pointe de l'intelligence humaine ; l'intelligence n'est plus capable de se mettre à l'écoute, de comprendre le langage discret que Dieu parle dans la nature : l’intelligence (à cause du péché) “retient captive la vérité“ (Rm 1.18), quoique le langage divin dans la nature existe toujours. “En effet, depuis la création du monde, les perfections invisibles (de Dieu) - éternelle puissance et divinité -, sont visibles dans ses œuvres pour l'intelligence…“. Mais les hommes “se sont fourvoyés dans leurs vains raisonnements et leur cœur insensé est devenu la proie des ténèbres“. (Rm 1.20-21).

Le livre de la Sagesse le disait déjà : “… En partant des biens visibles, ils (les hommes) n'ont pas été capables de connaître “Celui-qui-est“ ! En considérant les œuvres, ils n'ont pas reconnu l'Artisan…“. Pourtant, “qu'ils sachent combien leur Maître est supérieur : il est la source même de la beauté qui les a créées…, car la grandeur et la beauté des créatures font, par analogie, contempler leur Auteur“. (Sag 13.1sv).

Le 1er Concile du Vatican cite ces textes à l’appui de l’affirmation que Dieu peut être connu avec certitude par la raison humaine : L’Eglise “ tient et enseigne que Dieu, principe et fin de toutes choses, peut être connu avec certitude par la lumière naturelle de la raison humaine à partir des choses créées, car, "depuis la création du monde, ce qu'il y a d'invisible se laisse voir à l'intelligence grâce à ses œuvres" (Rm 1,20). Toutefois, il a plu à sa sagesse et à sa bonté de se révéler lui-même au genre humain par une autre voie, surnaturelle celle-là : "Après avoir à maintes reprises et sous maintes formes parlé jadis à nos Pères par les prophètes, Dieu, tout récemment, nous a parlé par le Fils" (He 1,1) (Cf. Denzinger 3004-5).

Oui, Dieu parle d'une manière nouvelle pour remédier à cette espèce d'abrutissement de notre intelligence !

Il parle d’abord comme en frappant sur la table, par des prodiges, par des merveilles…, des événements extraordinaires… !

Ce n'est pourtant pas sa manière normale de parler : Lui “qui Est” n'a pas besoin de “paraître“ !!! Ceux qui n'ont pas de consistance dans l’être font beaucoup de bruit ; et ceux qui font beaucoup de bruit, souvent, n'ont pas beaucoup de consistance dans l’être ! Or, Dieu est, par excellence, “Celui qui Est”, (l’interprétation grecque n'est pas tellement différente de l’interprétation hébraïque : Dieu = “O ôn” : “Celui-qui-est”) ... Il y a une espèce de proportion inverse entre l’“être“ et le “paraître“. Dieu “qui Est” n'a pas besoin de “paraître“. Et si on vit au plan du “paraître“, on risque de dire qu'Il n'existe pas alors que c'est nous qui sommes distraits…

Alors, soudainement, Dieu parle, parfois, par des prodiges… : I Co.1:21 : “Puisqu'en effet les hommes, par le moyen de la sagesse, n'ont pas reconnu Dieu dans la sagesse de Dieu, c'est par la folie de la prédication qu'il a plu à Dieu de sauver les croyants“. Et Dieu prend alors un autre langage : “Je perdrai la sagesse des sages”. (cf Is. 29.14).

Et ainsi commence cette histoire biblique, notre “Histoire Sainte“ où, - c'est curieux - il y a comme des paradoxes, “des vérités, selon le mot de Chesterton, qui marchent sur la tête pour se faire remarquer”. Ce sont :
  • les femmes vierges qui enfantent (on le proclamera dans quelques jours)…,
  • les puînés qui remplacent les aînés… (David…),
  • les pécheurs qui deviennent des saints, comme ce Jacob (dont le nom signifie : “le tordu !“) qui devient “Israël“, père de tous les Juifs,
  • l’étrangère comme Ruth qui devient l’aïeule du Messie,
  • etc. etc…

Oui, Dieu, paradoxalement, marque sa liberté, pour accomplir son dessein d’amour, en accomplissant des choses invraisemblables !

Et finalement, il descend vers nous par des démarches insensées :
  • du ciel à la crèche,
  • de la crèche à la croix,
  • de la croix au tombeau et au plus profond des enfers !
  • Et puis, il “rebondit“ jusqu'au ciel...

Bien plus, Dieu dit qu'Il veut non seulement se faire connaître à l'homme (par le langage de la création et le langage de ses prodiges…), mais s’unir à sa créature

Cant. 2.8 : “J'entends mon bien-aimé. Voici qu'il arrive, sautant sur les montagnes, bondissant sur les collines“ : du ciel à la crèche, de la crèche à la croix ! etc.

Alors, n'est-ce pas par des démarches insensées que nous devrions répondre, nous aussi, à cette démarche invraisemblable de notre Dieu ?

“Car ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes, et ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes“. (I Co. 1.25).

vendredi 18 décembre 2009

Fécondité divine - Délivrance humaine - Avent 18 Décembre - (Jér. 23.5sv - Math. 1.18 sv)

L’Evangile que nous venons d’entendre prend la suite de celui que nous avons médité hier. Il est tiré du prologue de St Matthieu, ce “bon scribe“ qui, à la charnière de l’Ancien et du Nouveau Testament, montre par excellence son talent de bon scribe qui “tire de son trésor de l’ancien et du nouveau“. De l’ancien et du nouveau !

Il continue à nous parler de cette métaphore que préparent toutes les crises de l’Histoire Sainte, avec ce paradoxe de continuité (d’ancien) et de dépassement (de nouveau) qui les caractérise et qui atteint maintenant son maximum, à la plénitude des temps, en ce temps de l’Incarnation du Fils de Dieu !

Hier, avec la généalogie qui résume toute l’Histoire, St Matthieu mettait l’accent sur la continuité. “Généalogie de Jésus Christ, fils de David, fils d’Abraham“. La généalogie aboutit à Joseph, époux de Marie de qui est né Jésus que l’on appelle le Messie“.

Aujourd’hui, il met l’accent sur le dépassement, la naissance miraculeuse avec l’action de l’Esprit Saint, cet Esprit qui couvrait l’Arche d’Alliance avant que ne la remplisse la Gloire de Dieu, cet Esprit Saint qui planait, comme un aigle, sur le peuple élu au cours de sa longue marche au désert, ce même Esprit qui planait au dessus des eaux, lors de la création du monde, au début de la Genèse. C’est maintenant l’heure d’une nouvelle Création !

Gen. 1.2 : “Le souffle de Dieu planait à la surface des eaux !“.

Dt 32.11 : Car l'apanage du SEIGNEUR, c'est son peuple… Il le rencontre au pays du désert... il l'entoure, l'instruit, veille sur lui… Il est comme l'aigle qui plane au-dessus de ses petits, déploie toute son envergure, les prend et les porte sur ses ailes“.

Dépassement-Continuité ! Continuité-Dépassement ! Tel est le talent de Matthieu qui tire de son trésor du neuf et de l’Ancien !

Son récit est très différent de celui que fait St Luc. Mais la différence même des traditions auxquelles ils se réfèrent, l’un et l’autre, milite en faveur de l’authenticité et de la véracité de l’évènement qu’ils relatent et qui est le même.

La lecture tirée de Jérémie parle finalement de cette naissance miraculeuse en termes de fécondité et que Matthieu relate “à la plénitude des temps !“ : “Voici venir des jours, déclare le Seigneur, et je donnerai à David un Germe juste“. On le nommera : “Le Seigneur est notre justice !“.

Dans la tradition juive, le Seigneur détient trois clefs qu’il ne donne à personne :
  • la clef du tombeau, car il “a les issues de la mort“ ;
  • la clef des nuages qui donnent la pluie et fécondent la terre ;
  • la clef du sein maternel.

C’est dans cette dernière forme de fécondité, par les naissances miraculeuses qui jalonnent l’Histoire Sainte depuis la naissance d’Isaac, que Dieu manifeste le plus sa capacité de faire des “merveilles“. On appelle Dieu, quand il est à l’origine de ces naissances miraculeuses : “El Shaddaï“. “Shad - Shaddaïm“ évoquent en hébreu le sein maternel.

Beaucoup des libérations que le “Dieu des délivrances“ fait surgir dans l’Histoire Sainte sont le fruit d’une naissance miraculeuse. A bien plus forte raison la naissance de celui qui, “à la plénitude des temps“, sera à l’origine de la grande libération qui délivrera l’humanité toute entière de l’esclavage de la mort et du péché. “Quand vint la plénitude des temps, dira St Paul, Dieu envoya son Fils né d’une femme“. (Gal 4.4).

Et au “langage de la fécondité“ succède naturellement et immédiatement “le langage des délivrances“. L’exode qu’évoque Jérémie n’est pas seulement la sortie de l’esclavage de l’Egypte, il est devenu le retour de tous les exils où nous sommes dans les terres lointaines de la dissemblance (d’avec Dieu), nous qui sommes pourtant créés “à l’image et à la ressemblance de Dieu“ : “Oui, des jours viennent - oracle du Seigneur - où l'on ne dira plus : "Vivant est le Seigneur qui a fait monter les Israélites du pays d'Egypte !" , mais plutôt : "Vivant est le Seigneur qui a fait monter, qui a amené la descendance des gens d'Israël du pays du nord et de tous les pays où je les ai dispersée, pour qu’ils s'installent sur leur sol !“.

La fécondité dont seul Dieu est le Maître et le retour de toutes les aliénations dont nous sommes victimes ! C’est ce qui caractérise les attentes de cette période de l’Avent et particulièrement au cours de cette neuvaine qui précède Noël.

[N.B : Autrefois il y avait cette belle antienne liturgique tirée d’Is. 45.8 : “Cieux, de là-haut répandez comme une rosée et que les nuées fassent ruisseler la justice, que la terre s'ouvre, que s'épanouisse le salut, que la justice germe en même temps ! C'est moi, le Seigneur, qui ai créé cet homme !“.]

jeudi 17 décembre 2009

SAINT ET JOYEUX NOEL


ET


BONNE ANNEE 2010

En union de prières.

Noël, fête de l'enfant, dit-on!

Il y a, bien sûr, beaucoup d'enfants autour de nous! Mais combien d'entre eux ressemblent déjà à certaines grandes personnes qui, gavées de bruits, d'images et d'objets, restent toujours sur leur faim jusqu'à en mourir… …

Ce petit-là était différent ; toujours attentif, il remarquait chaque chose et s'étonnait d'un rien ; j'ai vu dans ses yeux fascinés danser la flamme d'une bougie ; j'ai surpris sa main maladroite caresser une fleur et chérir une peluche ; j'ai observé son sourire admiratif en écoutant fredonner sa maman. Il respirait une paix contagieuse parce que, sans doute, il n'avait rien à perdre et encore tout à gagner.

J'ai alors voulu, pour mieux comprendre, rencontrer ses parents. Ils n'étaient ni pauvres ni prospères. Comme d'autres, ils auraient pu prétendre tout savoir ou tout pouvoir, et croire posséder la vie et dominer le monde. Mais telles n'étaient pas leurs convictions. Ils étaient plutôt riches de cette pauvreté qui permet d'exister et impose respect. Eux aussi respiraient la paix parce que, sans doute, après s'être tout donnés, ils n'avaient plus grand chose à perdre!

J'ai alors voulu, pour le partager, percer leur secret. Ils m'ont d'abord souri, en haussant les épaules, et répondu qu'ils ne faisaient qu'accueillir la vie et vivre leur humanité. Mais plus tard, ils me chuchotèrent qu'ils avaient eux aussi rencontré un enfant extraordinaire.

Il était né il y a deux mille ans, sur fond de nuit, de paille et de violence. Il ne vivait que par fascination pour les hommes, malgré leurs limites et défauts. Il croyait tant en chacun d'eux qu'avec patience et passion il désirait les rencontrer un à un!

J'ai alors imploré des précisions à son sujet; mais ils sont devenus silencieux, m'invitant simplement à le rencontrer à nouveau. Vous comprenez, une amitié - ce qui s'appelle vraiment une amitié -, ça ne s'explique pas, ça se vit !
Le Reste d’Israël - Avent - 17 Décembre - (Mth 1.1-17)

En ce 17 Décembre commence, dans la liturgie de l’Avent, une neuvaine qui nous prépare plus intensément à la venue du Sauveur.

L’Evangile que nous avons entendu est le premier chapitre du N.T. Il est du à ce bon scribe qu’était St Matthieu, l’auteur du premier évangile, recruté à son poste de douanier, entre Capharnaüm et Bethsaïde. De même que Jésus a fait des pêcheurs de poissons des pêcheurs d’hommes, de même il a fait de ce fonctionnaire le premier évangéliste.

Le bon scribe a pour caractéristique, ainsi que le dit Jésus à la fin du discours en parabole, de “tirer de son trésor du neuf et du vieux“ : Mth 13.52 : "Ainsi donc, tout scribe instruit du Royaume des cieux est comparable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et du vieux. C’est une allusion au Cantique des cantiques 7.14 : “A nos portes sont tous les meilleurs fruits. Les nouveaux comme les anciens, je les ai réservés pour toi, mon bien-aimé“.

St Matthieu montre son talent de “bon scribe“ dans l’ensemble de son évangile, surtout dans son prologue, et particulièrement dans le début : sa généalogie. Les scribes avaient souvent pour méthode de structurer mathématiquement certains récits auxquels ils attachaient une importance particulière. Et ce n’est pas par hasard que le chiffre 14 est trois fois répété à la fin de la généalogie : “Le nombre total des générations est donc : quatorze d'Abraham à David, quatorze de David à la déportation de Babylone, quatorze de la déportation de Babylone au Christ“.

14, c’est deux fois 7 ! Et comme la 1er chapitre de l’Ancien Testament qui relate la création est structurer autour du chiffre 7 pour aboutir au shabbat qui est le 7ème jour, on peut penser que Matthieu a voulu structurer le premier chapitre du Nouveau Testament autour du chiffre 14 (càd 2x7) pour insinuer l’idée qu’il s’agit d’une nouvelle création ! Un dépassement !

On peut remarquer aussi que la généalogie qui résume tout l’Ancien Testament, aboutit à Joseph : “Jacob engendra Joseph, l'époux de Marie, de laquelle est né Jésus, que l'on appelle Christ“. On ne pouvait mieux marquer le paradoxe de dépassement à continuité! Dépassement de la nouvelle création qui est dans la continuité marquée par l’aboutissement de la généalogie à Joseph, “Fils de David, Fils d’Abraham“.

S’il n’est pas dit explicitement que Marie est de la descendance de David - mais elle l’est très probablement -, ce n’est pas pour porter atteinte à son importance ; c’est au contraire pour marquer que c’est en elle que l’aspect “dépassement“ est le plus clairement exprimé !

La fête de l’Immaculée Conception nous a donné une fois de plus l’occasion de relire une fois de plus le récit de l’Annonciation à Nazareth. Quand l’ange Gabriel répond à la question de Marie : “Comment cela se fera-t-il puisque je ne connais point d’home ?“, il est dit : “L’Esprit Saint te couvrira de son ombre ; c’est pourquoi l’Etre Saint qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu !“.

Pour comprendre les paroles de Gabriel, il faut se rappeler
  • non seulement l’Esprit Saint qui, sous la forme de la nuée, recouvrait la Demeure achevée que vient remplir la gloire de Dieu : Ex. 40.34 : “La nuée couvrit la tente de la rencontre et la gloire du SEIGNEUR remplit la demeure“.
  • la nuée qui recouvrait le “Saint des Saints“ du temple de Salomon, en laissant un espace vide sur la plaque d’or ombragée par les ailes des chérubins : 1 Rois 8.10-11 : “Lorsque les prêtres furent sortis du lieu saint, la nuée remplit la Maison du SEIGNEUR ; et les prêtres ne pouvaient pas s'y tenir pour leur service à cause de cette nuée, car la gloire du SEIGNEUR remplissait la Maison du SEIGNEUR“.
  • mais encore, il faut se reporter au tout début du premier chapitre de la Genèse : Gen 1.1-2 : “Lorsque Dieu commença la création du ciel et de la terre, la terre était déserte et vide, et la ténèbre était à la surface de l'abîme ; l’Esprit de Dieu planait à la surface des eaux“.
  • Et il sera dit que cet Esprit de Dieu planait au dessus d’Israël tout au long de son histoire : Dt 32.10-11 : “Il rencontre son peuple au pays du désert… ; il l'entoure, il l'instruit, il veille sur lui comme sur la prunelle de son œil. Il est comme l'aigle qui encourage sa nichée : il plane au-dessus (c’est le même mot) de ses petits, il déploie toute son envergure, il les prend et les porte sur ses ailes“.

Quand vint la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils né d’une femme… Toute l’histoire Sainte est jalonnée de crises, de métaphores faites de continuité et de dépassement. La métaphore qui fait passer l’Histoire Sainte de l’Ancien au Nouveau Testament a été bien préparée ; et personne ne l’a mieux expliquée que Matthieu, le “bon scribe“ qui “tire de son trésor du neuf et de l’ancien“.

mercredi 16 décembre 2009

Dieu, Créateur du Bien et du Mal ? - Avent 3 - Mercredi – (Is. 45.6sv – Luc 7.18)

Le début de notre lecture peut paraître étonnant ! “Je suis le Seigneur ! Il n’y en a pas d’autre ! Je fais la lumière et les ténèbres. J’établis la paix (Heb. : bonheur) et je crée le malheur. C’est moi qui fais tout cela !“. Dieu aurait-il fait le bien et le mal ?

Pourtant le texte de la Genèse qui parle du “commencement“ du monde, de la création du monde en sept jours, est ponctué par ce refrain: “Et Dieu vit que cela était bon“, “… et même très bon !“.

Il semble que le texte de la Genèse soit assez tardif, rédigé à une époque où le Judaïsme était encore en contact - avec plus grande liberté intellectuelle - avec les Perses (Cyrus…). Or les Perses avaient élaboré depuis longtemps une religion dualiste. Le problème du mal est tellement obsédant dans l’humanité qu’ils en étaient arrivés à poser deux principes : le principe du Bien et le principe du Mal, principes égaux qui luttent au cours de l’histoire !

Et la Tradition judaïque qui, dès le début, était attaché à un seul principe - “Je suis le Seigneur ; il n’y en a pas d’autre !“ - a d’abord préféré affirmer que Dieu était créateur de tout ce qui se voyait - et du bien et même du mal - pour mieux souligner fortement l’unicité de Dieu : Un seul Dieu !

Ainsi, notre texte d’Isaïe reflète quelque peu cette mentalité dualiste (Bien et Mal) qui était très répandue en Orient. Mais il le fait en “enfermant“ ce dualisme sous un seul principe : “Dieu Unique“. Il préfère affirmer cette grande certitude d’un Dieu Unique en faisant une concession, si je puis dire, au courant dualiste si répandu à l’époque ! (Que voulez-vous : les théologiens se trompent parfois !).

Ce n’est qu’un peu plus tard que la tradition juive corrigera ce dualisme originel en affirmant - comme le font la Genèse et d’autres écrits - que tout ce qu’avait fait le Créateur - ce “Principe Unique“, Dieu - était très bon, et même très bon ! Et ne soyons pas étonnés de cette évolution dans l’expression de la foi ! La foi cherche toujours à comprendre de mieux en mieux au cours des siècles : “fides quaerens intellectum“ !

Une des tentations les plus constantes tout au cours de l'histoire de l'humanité, c'est ce dualisme. Nous en sommes actuellement encore victimes, consciemment ou inconsciemment. On le trouve partout, aujourd’hui encore, dans des gnoses malsaines, dans des méfiances à propos des valeurs de la nature, de la sexualité, du mariage… St Dominique, quand il a fondé son Ordre, était affronté à une résurgence de cette hérésie dualiste (Albigeois, Cathares…)…

Tout est bon ! Et la Bible - dans l’organisation de ses livres - a éprouvé le besoin, en mettant finalement le livre de la Genèse en premier (alors qu’il a été rédigé assez tardivement), de poser cette affirmation, d'emblée, "au commencement", pour pouvoir ensuite mieux accompagner la condition humaine jusqu'au fond de l'absurde, jusqu’au mal !

Il n'y a pas de littérature qui ait accompagné l'humanité aussi loin dans l'absurde (Cf. Job, Qohélet, certains psaumes…), qui l'ait accompagnée jusque dans la mort avec la certitude d'avoir affaire à un Dieu capable de mener “par delà la mort”. "Au commencement", on affirme que Dieu a fait toutes choses bonnes pour qu'on puisse ensuite mieux aborder le problème du mal et aller jusqu'au fond du problème du mal, sans jamais l'éluder, sans jamais, non plus, pouvoir l'expliquer totalement, mais sans jamais que ce problème devienne un doute ! "Mille problèmes ne font pas un doute", disait le Cardinal Newman.

Parce que l'on a la foi - et une foi qui cherche à comprendre -, on se pose des questions, des problèmes ; mais tous ces problèmes que nous nous posons (et on s'en posera tout au long de notre existence) ne feront pas que notre foi soit remise en question ! Et tous les problèmes que nous nous poserons sont déjà inscrits dans cette littérature biblique (la Parole de Dieu !) qui nous accompagnera jusqu'en tous les "scandales". Et notre foi en un seul Dieu qui mène “par delà la mort” ne sera pas remise en question !

Bien plus, nous allons affirmer dans quelques jours que le “Dieu Bon“ qui a fait toutes choses bonnes, est venu parmi nous - l’Emmanuel - pour nous accompagner jusque dans l’absurdité du mal que nous connaissons, jusque dans l’absurdité de la mort elle-même. Il nous a accompagné jusque là pour que l’on puisse affirmer, nous aussi, avec le prophète Zacharie : “Ils regarderont vers moi, celui qu’ils ont transpercé !“. St Jean lui-même a eu ce regard de foi au pied de la croix en voyant le centurion percer le côté droit du Christ :“Ils regarderont vers moi, celui qu’ils ont transpercé !“

Le Christ, lui non plus, n’a pas expliqué le pourquoi du mal. Il l’a pris sur lui en lui imposant une inversion de valeur : du MAL, par amour, il en a fait un passage vers le BIEN ! C’est en adhérant à cet EMMANUEL transpercé (en son mystère pascal), que nous recevons la VIE : Dieu lui-même parmi nous, en nous ! Noël annonce Pâques, annonce la VIE qui, avec le Christ, aura le dernier mot : “Mort, où est ta victoire ?

mardi 15 décembre 2009

Le “Reste“ d’Israël - Avent 3 – Lundi - (Siphonie 3.1sv)

Je pense que le texte de Sophonie est toujours très actuel !

Jésus a pleuré sur Jérusalem, “car elle n’avait pas connu le temps de sa visite“. C’était déjà comme cela au temps de Sophonie qui parle à Jérusalem vers 640 av. J.-C., à une époque où le Royaume du Nord s’est effondré sous les coups des Assyriens, où le Royaume de Juda, resté seul, est en pleine décadence. Jérusalem est sourde à l’enseignement des prophètes et on commence à craindre l’invasion babylonienne.

Mais, choses étonnante, c’est dans ce moment de crise que Sophonie formule la destinée universelle de Jérusalem. Tous les peuples viendront rendre un culte au Seigneur, à Jérusalem. Les adorateurs viendront de l’Ethiopie et des horizons les plus lointains pour invoquer le nom du Seigneur, d’un seul cœur. “D’au-delà des fleuves de l’Ethiopie, mes adorateurs viendront apporter leurs offrandes“, dit le Seigneur.

Mais alors même qu’on prend conscience de la mission universelle de Jérusalem, du peuple élu, il ne restera qu’un petit reste !
V/ 11-13 : “En ce jour-là, tu n'auras plus à rougir de toutes tes mauvaises actions…, car j'aurai enlevé du milieu de toi tes vantards orgueilleux, et tu cesseras de faire l'arrogante sur ma montagne sainte. Je maintiendrai au milieu de toi un reste de gens humbles et pauvres… Le reste d'Israël ne commettra plus d'iniquité ; ils ne diront plus de mensonges, on ne surprendra plus dans leur bouche de langage trompeur : mais ils pourront paître et se reposeront sans personne pour les faire trembler“.

Beaucoup de professeurs ont étudié ce thème biblique du “reste“ qui se contracte au cours des siècles, au fur et à mesure que s’élargit son importance universelle, sa valeur rédemptrice pour l’ensemble du monde.

Après-demain, on va commencer la neuvaine qui précède Noël. Le “reste d’Israël“ va trouver sa valeur rédemptrice universelle en la personne de Jésus, unité de nature humaine et de nature divine, - en lui, le monde est appelé à se “récapituler“, dira St Paul ! -. Nous l’attendons avec les pauvres de Jérusalem. Ceux qui sont là autour de la crèche, ceux qui seront là dans le temple pour l’accueillir comme Anne et Simon ! Ceux qui ont une “cœur qui écoute“, dira St Luc.
Accomplissement des promesses - Avent 3 – Lundi - (Nombres 24. 2sv)

La liturgie d’aujourd’hui nous fait rencontrer un curieux personnage, très ambigu, nommé Balaam. Il vient de l’Orient, du pays où il y avait beaucoup de spécialistes en Astrologie. Certains voient en lui un ancêtre de ces mages dont parle St Matthieu qui, dans le prologue de son Evangile, fait arriver les mages à la crèche. Comme ils viennent de loin, il n’est pas trop tôt pour parler d’eux, une quinzaine de jours avant leur arrivée à Bethléem. Peut-être est-ce aujourd’hui l’anniversaire de leur mise en route sur les indications de l’étoile ?

[Dans l’Ancien testament, il y a deux catégories d’hommes :
  • Il y a le peuple élu qui fait l’expérience de la rencontre du seul, vrai et unique Dieu vivant ;
  • et puis, il y a de l’autre côté, les idolâtres dont les plus respectables et les plus redoutables sont les “adorateurs d’étoiles“, les “Akoum“. C’est contre eux que Moïse met son peuple en garde : Deut. 4. 19-20 : “Ne va pas lever les yeux vers le ciel, regarder le soleil, la lune et les étoiles, toute l'armée des cieux, et te laisser entraîner à te prosterner devant eux et à les servir. Car ils sont la part que le SEIGNEUR ton Dieu a donnée à tous les peuples qui sont partout sous le ciel ; mais vous, le SEIGNEUR vous a pris et il vous a fait sortir de l'Égypte, cette fournaise à fondre le fer, pour que vous deveniez son peuple, son patrimoine, comme vous l'êtes aujourd'hui“.]

Balaam dont la réputation d’astrologue est très grande, le roi de Moab, nommé Balac qui est effrayé de voir son pays envahi par le peuple Hébreu, a été le chercher en Orient pour maudire le peuple élu dans les dernières étapes de sa longue marche vers la Terre promise. Il veut le payer très cher pour cela !

Nombres 22.2-6 : Balaq, fils de Cippor, vit tout ce qu'Israël avait fait aux Amorites. Moab fut très inquiet en voyant ce peuple si nombreux ; Moab fut pris de panique à la vue des fils d'Israël et il dit aux anciens de Madiân : "Cette multitude va maintenant tout brouter autour de nous, comme un bœuf broute l'herbe des champs". Balaq, fils de Cippor, était roi de Moab en ce temps-là. Il envoya des messagers auprès de Balaam, fils de Béor, à Petor sur le Fleuve, son pays d'origine, pour lui porter cet appel : "Nous avons là un peuple sorti d'Égypte qui couvre la surface de la terre : le voilà établi en face de moi ! Viens donc, je t'en prie, et maudis-moi ce peuple, car il est plus puissant que moi ; peut-être arriverai-je alors à le battre et à le chasser du pays. Car je le sais, celui que tu bénis est béni, et celui que tu maudis est maudit".Cette phrase évoque la prédestination d’Abraham et du peuple des croyants : Gen. 12.1-4 : Le SEIGNEUR dit à Abram : "Pars de ton pays, de ta famille et de la maison de ton père vers le pays que je te ferai voir. Je ferai de toi une grande nation et je te bénirai. Je rendrai grand ton nom. Sois en bénédiction. Je bénirai ceux qui te béniront ; qui te bafouera je le maudirai ; en toi seront bénies toutes les familles de la terre“.

Autrement dit, on attend de Balaam qu’il neutralise les promesses faites à Abraham et qu’il fasse perdre au peuple élu son identité qui est la seule raison qu’il a d’être en Terre promise ! Le nom même de Balaam indique cette mission d’anéantissement : “Bala, cela veut dire : “avaler, engloutir, faire disparaître“. (En hébreu moderne, on trouve cela dans le mode d’emploi des produits qu’on achète chez le pharmacien et qu’il faut avaler sans les croquer). Quant à “Am“, cela veut dire “Peuple“. Balaam, comme son nom l’indique déjà, est appelé pour anéantir le peuple élu.

L’histoire de l’ânesse de Balaam (qu’il faut lire dans le texte), assez pittoresque, symbolise les tergiversations qui se passaient dans le cerveau de Balaam.

D’une part, il n’a pas envie de perdre toutes les richesses qu’on lui propose en récompense, s’il fait bien son métier d’enchanteur ;

D’autre part, une force mystérieuse le pousse à formuler, mieux qu’on ne l’a jamais fait, la prédestination du peuple élu.

La lecture d’aujourd’hui se borne à rappeler cette prédestination en cette période de l’Avent qui nous prépare à recevoir Celui qui accomplit la promesse faite à Abraham et à sa descendance pour toujours, comme le chante la Vierge Marie dans son “Magnificat“.

St Paul, lui, semble se référer à Balaam quand il dit dans sa lettre aux Romains que les promesses de Dieu sont irréversibles. Rom 11.28-29 : “Par rapport à l'Evangile, les voilà ennemis (les Juifs), et c'est en votre faveur (les païens). Mais du point de vue de l'élection, ils (les Juifs) sont aimés, et c'est à cause des pères (= à cause des promesses faites aux pères). Car les dons et l'appel de Dieu sont irrévocables“.

Il nous sera utile de nous rappeler l’histoire de Balaam à l’Epiphanie quand on parlera des mages…

vendredi 11 décembre 2009

“Ne jugez pas !“ … - Avent 2 - Vendredi - (Isaïe 48.17sv)

Comparant le comportement de Jean-Baptiste et de Jésus, les gens bavardent comme des gamins… Je crois que nous sommes tous des gamins et que nous avons tous à profiter des mises en garde que fait Jésus quand il dit : "Qui n'est pas avec moi est contre moi, et qui n'amasse pas avec moi dissipe. Aussi je vous le dis, tout péché, tout blasphème sera remis aux hommes, mais le blasphème contre l'Esprit ne sera pas remis. Et quiconque aura dit une parole contre le Fils de l'homme, cela lui sera remis ; mais quiconque aura parlé contre l'Esprit Saint, cela ne lui sera remis ni en ce monde ni dans l'autre. "Prenez un arbre bon : son fruit sera bon ; prenez un arbre gâté : son fruit sera gâté. Car c'est au fruit qu'on reconnaît l'arbre. Engeance de vipères, comment pourriez-vous tenir un bon langage, alors que vous êtes mauvais ? Car c'est du trop-plein du cœur que la bouche parle. L'homme bon, de son bon trésor tire de bonnes choses ; et l'homme mauvais, de son mauvais trésor en tire de mauvaises. Or je vous le dis : de toute parole sans fondement que les hommes auront proférée, ils rendront compte au Jour du Jugement. Car c'est d'après tes paroles que tu seras justifié ; et c'est d'après tes paroles que tu seras condamné". (Mth 12.30-36-37).

Le premier évêque de Jérusalem, Jacques, le “frère du Seigneur“ à qui est attribué “l’épitre de St Jacques“ dans le N.T., est celui qui a parlé des intempérances du langage dont nous avons tous à nous méfier : "Si quelqu'un ne commet pas d'écart de paroles, c'est un homme parfait, il est capable de refréner tout son corps. Quand nous mettons aux chevaux un mors dans la bouche pour nous en faire obéir, nous dirigeons tout leur corps. Voyez encore les vaisseaux : si grands qu'ils soient, même poussés par des vents violents, ils sont dirigés par un tout petit gouvernail, au gré du pilote. De même la langue est un membre minuscule et elle peut se glorifier de grandes choses ! Voyez quel petit feu embrase une immense forêt : la langue aussi est un feu. …. La langue, personne ne peut la dompter : c'est un fléau sans repos. …Par elle nous bénissons le Seigneur et Père, et par elle nous maudissons les hommes faits à l'image de Dieu ! De la même bouche sortent bénédiction et malédiction. Il ne faut pas qu'il en soit ainsi. La source fait-elle jaillir par la même ouverture le doux et l'amer ? Un figuier, mes frères, peut-il donner des olives, ou une vigne des figues ? L'eau de mer ne peut pas non plus donner de l'eau douce. (3.1-12).

On juge un arbre à ses fruits ! St Jacques, comme Jésus, prend la comparaison du figuier. Ne pas pouvoir s’exprimer, c’est être étouffé. Il faut parler ! Mais encore faut-il le faire avec discernement après avoir purifié son cœur, car les paroles sortent du cœur et le révèlent. Bien plus, les paroles même les plus judicieuses demandent à être dites à propos et en temps voulu ! (in tempore opportuno“, disait St Benoît).

La littérature de Sagesse est pleine de versets qui dénoncent les ravages des paroles oiseuses. En voici un parmi d’autres : "Plutôt rencontrer une ourse privée de ses petits qu'un insensé en son délire". (Prov. 17.12). Feuilletez le livre du Qohélet (Ecclésiaste), c’est lui qui est le plus féroce sur les paroles inutiles.

Jean-Baptiste lui-même, le Précurseur, a eu du mal à comprendre le comportement de Jésus de qui pourtant il avait affirmé la certitude qu’il était le Messie accomplissant la loi et les prophètes. Alors ne nous étonnons pas d’être perplexes devant le comportement de l’un ou l’autre de nos proches qui ne vit pas selon nos catégories de pensée. Efforçons-nous de ne pas juger prématurément comme nous le défend d’ailleurs Jésus lui-même : “Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés !“. Porter un jugement sur quelqu’un, c’est souvent l’enfoncer dans ses torts, alors que tout le problème est de le reprendre pour l’accompagner et l’aider à en sortir. Le mal que nous avons-nous-mêmes à porter et qui doit provoquer un jugement sur nous-mêmes devrait nous aider à cultiver les sentiments de compassion que nous avons à éprouver pour les autres.

La Bible nous invite à marcher environnés d’une nuée de témoins qui surgissent de l’Ancien comme du Nouveau Testament. Ils nous servent de compagnons de route. Les Saints du Nouveau Testament, mieux encore que ceux de l’Ancien, nous aident à fixer notre regard sur le Christ. Leurs imperfections et leurs difficultés, mieux que leurs vertus parfois nous aident à marcher sur la route. On ne saurait compter les sermons qu’ont faits les Pères de l’Eglise sur St Thomas, cet Apôtre qui eut tant de difficultés à croire avant de mettre ses doigts dans les plaies de Jésus ressuscité et de s’écrier : “Mon Seigneur et mon Dieu !“.

Je crois que la culture biblique a pour résultat, et peut-être pour résultat principal, de nous guérir de cette tendance à juger sommairement et prématurément les gens qui ne pensent pas comme nous, de nous guérir de ces jugements qui ne font que durcir les situations, d’élargir les abîmes d’incompréhensions et de nous apprendre, au lieu de juger notre prochain, de le situer pour le rejoindre et devenir son compagnon de route vers la Jérusalem céleste.

Le Livre de la Consolation dans lequel la liturgie nous plonge actuellement nous montre combien Israël a eu du mal à déchiffrer les voies de Dieu ! Il en est venu jusqu’à le croire absent dans les moments où sa Providence s’exerçait le plus manifestement dans son histoire. Chacun, dans son existence, peut se trouver dans la même situation. “En vérité, tu es un Dieu qui se cache, Dieu d'Israël, Sauveur !“.
Jean-Baptiste – Avent 2 – Jeudi - (Isaïe 40.25sv)

Se profile dans l’évangile que nous venons d’entendre la figure de Jean-Baptiste qui est à la charnière de l’Ancien et du Nouveau Testament dans la littérature biblique.

Jean-Baptiste évoque le prophète Elie qui lui-même représente le prophétisme dans son ensemble : d’Elie, le premier des prophètes, on passe à Jean-Baptiste en embrassant tous les autres, en particulier ceux qui, comme Jérémie, ont parlé de la Nouvelle Alliance.

En parlant de Jean-Baptiste comme d’Elie, Jésus évoque celui dont la présence s’est manifestée, avec celle de Moïse, à la montagne de la transfiguration, lorsqu’il s’est entretenu avec eux de l’exode - c’est le mot employé par St Luc -, de l’exode au sens plénier du mot, cet exode qu’il devait accomplir au terme de sa montée à Jérusalem : Jésus est venu accomplir la Loi et les Prophètes en passant de la mort à la VIE (comme les Hébreux, en leur exode, de l’Egypte à la Terre promise). En voyant Jean-Baptiste, Jésus devait souvent se rappeler les dernières lignes de la littérature prophétique : “Voici que je vais vous envoyer Élie le prophète, avant que n'arrive le Jour de Dieu, grand et redoutable“. (Malachie 3.22-24).

Plusieurs fois, dans les évangiles, est évoqué le désarroi de Jean-Baptiste, celui qui est pourtant au sommet de l’Ancien Testament et dont Jésus, apprenant la mort, fait le panégyrique : “ Qu'êtes-vous allés voir au désert ? Un roseau agité par le vent ? … Un homme vêtu de façon délicate ?... Un prophète ? Oui, je vous le dis, et plus qu'un prophète. C'est celui dont il est écrit : « Voici que moi j'envoie mon messager en avant de toi pour préparer ta route devant toi ». En vérité je vous le dis, parmi les enfants des femmes, il n'en a pas surgi de plus grand que Jean le Baptiste ; et cependant le plus petit dans le Royaume des Cieux est plus grand que lui. Depuis les jours de Jean le Baptiste jusqu'à présent, le Royaume des Cieux souffre violence, et des violents s'en emparent. Tous les prophètes en effet, ainsi que la Loi, ont mené leurs prophéties jusqu'à Jean. Et lui, si vous voulez m'en croire, il est cet Élie qui doit revenir. Que celui qui a des oreilles entende !“ (Mth. 11.7-15).

Le plus grand parmi les enfants des hommes est bien cet Elie qui doit revenir à l’heure de l’avènement du Royaume ! Mais comme il est différent de Jésus ! Les foules bavardent à ce sujet comme des gamins : “A qui vais-je comparer cette génération ?“, demandait Jésus. “Elle ressemble à des gamins qui, assis sur les places, en interpellent d'autres, en disant : "Nous vous avons joué de la flûte, et vous n'avez pas dansé ! Nous avons entonné un chant funèbre, et vous ne vous êtes pas frappé la poitrine !". Jean vient en effet, ne mangeant ni ne buvant, et l'on dit : "Il est possédé !". Vient le Fils de l'homme, mangeant et buvant, et l'on dit : « Voilà un glouton et un ivrogne, un ami des publicains et des pécheurs ! ». Et justice a été rendue à la Sagesse par ses œuvres“. (Math 11.16-19).

Oui, Jean-Baptiste lui-même a été complètement déconcerté ! Plus que n’importe qui, il a expérimenté que, si les promesses de Dieu de réalisent toujours, jamais elles ne se réalisent comme les mieux préparés à les recevoir ne s’y attendent.

Car Jean-Baptiste est celui qui, au bord du Jourdain, avait vu le ciel se déchirer… Et il méditait comme Isaïe : “Ah! si tu déchirais les cieux et si tu descendais, - tel que les montagnes soient secouées devant toi, - tel un feu qui brûle les taillis, - tel un feu qui fait bouillonner des eaux…, pour faire connaître ton nom à tes adversaires ! Devant ta face, les nations trembleraient si tu faisais des choses terrifiantes que nous n’attendons pas : tu descendrais, les montagnes seraient secouées devant toi ! Jamais on n’a entendu, jamais on n’a ouï dire, jamais l’œil n’a vu qu’un Dieu, toi excepté, ait agi ainsi en faveur de qui a confiance en lui !“. (Is. 63.19b-64.2-3).

Or, que voit Jean-Baptiste : il voit Jésus descendre dans le Jourdain avec humilité, comme, autrefois, Naamân, le Syrien (cf. 2 Rois 5.14) (cf. Luc 4.27)… Il voit Jésus se mêler aux pécheurs…!

Aussi, du fond de sa prison, il envoie des émissaires demander : “Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ?“. Jésus lui répond par le langage des délivrances que nous entendons une fois de plus dans le passage du Livre de la Consolation que l’Eglise nous fait lire aujourd’hui (Isaïe).

Même si l’on est très familiarisé avec le langage de Moïse et des prophètes (comme Jean-Baptiste), le Nouveau Testament exprime surtout la gratuité de la grâce, la présence de celui qui est venu non pour les justes mais pour les pécheurs. Et une méditation sur ce sujet est toujours actuelle pour nous, chrétiens :
  • Ou bien on se considère comme des justes et on est imperméable à la grâce dont on n’a pas besoin car on cultive l’autosatisfaction.
  • Ou bien on se complaît dans d’interminables culpabilités en manquant de foi dans la rédemption que nous vaut le sang de Jésus versé sur la croix !

A Noël, on chantera : “Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes, objets de la grâce divine“ (et non : “aux hommes de bonne volonté“). Si nous pouvions être convaincus de cette grande réalité : Dieu fait grâce !

mercredi 9 décembre 2009

Dieu, le “Tout Autre“ se fait connaître !… - Avent 2 - Mercredi - (Isaïe 40.25sv)

“A qui donc pourriez-vous me comparer ?“, dit Dieu. Telle est la première phrase de notre lecture d’aujourd’hui !

Dieu est le “Tout Autre“ qui peut dire avec ironie à son peuple : “penses-tu que je suis comme toi ?“ (Ps 50.2).

Par condescendance, pour se mettre à la portée des hommes, Dieu le “Tout Autre“ qu’on n’a jamais pu enfermer dans une idée, un concept, une représentation daigne employer un langage humain, symbolique et métaphorique, pour nous parler.

Il va même jusqu’à envoyer son “VERBE“ demeurer parmi nous et nous parler non seulement par des mots, par tout son comportement, ses silences, ses gestes, ses regards, les “signes“ qu’il opère en guérissant les malades, en évangélisant les pauvres, en s’abaissant jusqu’à la crèche et la croix pour ramasser la condition humaine désagrégée par le mal et délivrer l’homme des aliénations du péché et de la mort.

La phrase “Qui es-tu, Toi ?“ retentit à travers toute la Bible, à commencer par le chant de triomphe qui suit le passage de la mer rouge et la sortie d’Egypte : “Au souffle de tes narines, les eaux s'amoncelèrent, les flots se dressèrent comme une digue... L'ennemi s'était dit : "Je poursuivrai, j'atteindrai..., ma main les supprimera". Tu soufflas de ton haleine, la mer les recouvrit, ils s'enfoncèrent comme du plomb dans les eaux formidables. Qui est comme toi parmi les dieux, Seigneur ? Qui est comme toi illustre en sainteté, redoutable en exploits, artisan de merveilles ?“ (Ex. 15.8-11).

Cette exclamation rythme toute la vie du peuple élu expérimentant les délivrances au cours de l’Histoire Sainte qui est l’Histoire du Salut.

Et si on la trouve exprimée par la collectivité du peuple, on la trouve aussi dans la bouche des individus qui, dans la solitude, souffrent de maladies diverses ou sont victimes d’injustices : “Tous mes os diront : “Seigneur, qui est comme toi pour délivrer le petit du plus fort, le pauvre du spoliateur ?“. (Ps 35.10).

Comment Dieu se fait-il connaître ? Les théologiens ne le disent pas assez, eux qui font de louables efforts pour penser le problème philosophiquement en maniant l’analogie. C’est vrai que si nous étions vraiment intelligents (intus legere), nous déchiffrerions quelque chose du mystère du Dieu caché à travers ses œuvres dans la nature et les événements de l’histoire. St Paul l’affirme suffisamment.

Certains théologiens préfèrent dire que Dieu étant le “Tout Autre“, on ne peut rien dire de lui sans sombrer plus ou moins dans l’idolâtrie. Le célèbre Maïmonide(12ème s.) semble mériter cette renommée dans la Tradition juive. Et chez les premiers chrétiens, on trouve aussi des “apophatiques“ (= on ne peut rien dire de Dieu !). Certains mystiques qui rejoignent Dieu en traversant des “nuits obscures“, trouvent une solution en s’exprimant dans un langage d’alliance, apparenté au Cantique des Cantiques qui est au centre de la Bible.

Et justement, dans la Bible, le Seigneur se fait connaître, se révèle par ses délivrances, les merveilles qu’il opère dans l’histoire. Parmi ces merveilles, tiennent une grande place les naissances miraculeuses, de l’annonciation à Sara en vue de la naissance d’Isaac à l’annonciation à Nazareth. Et retentit la phrase : “Y-a-t-il rien d’impossible à Dieu ?“ (+ Sanson, Samuel, Gédéon, Jean-Baptiste). Dieu se fait connaître par des choses que lui-même fait faire.

Dans la lecture d’aujourd’hui, Isaïe nous invite à lever les yeux vers le ciel et à nous mettre à l’écoute de ce premier langage que Dieu parle depuis les origines dans la nature. C’est à partir de son expérience dans l’histoire que le Peuple d’Israël est arrivé à démythifier les diverses cosmologies qui essayaient de rendre compte de l’origine du monde en employant les imageries païennes des phéniciens, égyptiens, assyriens, babyloniens… ! Dieu, le “Tout Autre“ n’est pas le produit de l’imagination qui le fait sortir d’un chaos primitif ! Il est celui qui le domine au contraire en créant l’harmonie en sept jours et par dix paroles très limpides!

Et ce Dieu, le “Tout Autre“, qui est capable de créer est aussi capable de recréer. Son Esprit qui planait au dessus des eaux (à la création) plane au dessus de la Vierge Marie dont nous avons fêté l’Immaculée Conception qui inaugure la Nouvelle Alliance, la nouvelle Création que prédisaient les prophéties et qu’accomplit Jésus : Jésus meurt sur la croix en disant : “Père je remets entre tes mains mon esprit…“. Il parlait dans la certitude que Dieu qui donne le souffle et le retire peut le redonner comme dit le psaume : “Tu caches ta face, ils s'épouvantent ; tu retires leur souffle, ils expirent... - Tu envoies ton souffle, ils sont créés, tu renouvelles la face de la terre. À jamais soit la gloire du Seigneur ; que Dieu se réjouisse en ses œuvres !“ (ps. 104.29-30). Il y a là de quoi beaucoup méditer en ce temps de l’Avent… !

mardi 8 décembre 2009

Immaculée Conception 09

Aujourd’hui sachons communier au regard de Dieu sur Marie afin que notre propre regard en soit transfiguré.

Le regard de Dieu

"Je te salue, pleine de grâce.", dit l’ange de la part de Dieu. En regardant Marie, Immaculée, Dieu se contemple lui-même, en quelque sorte comme dans un miroir fidèle. En Marie, il se voit “à son image et ressemblance“, sans défiguration. En regardant Marie dans sa transparence et sa pureté, Dieu se retrouve au matin de sa Création : "Dieu vit tout ce qu'il avait fait ; et il vit que cela était bon" : "Tota pulcra es Maria". Savons-nous partager l’émerveillement de Dieu-Père devant cette toute jeune fille : "Comme tu es belle, totalement belle, toi qui es totalement née de Dieu !". C'est la relation à Dieu-Père, Créateur, qui constitue la beauté, la dignité de Marie. Son âme est toute orientée vers Dieu, Créateur et Père. “Dominus possedit me in initio viarum suarum : Dieu m’a créée au début de ses desseins“ (ps 8.22). [Comme le dit la bulle de la définition du dogme de l’Immaculée Conception : “Dieu l’a comblée de l’abondance de tous les dons célestes pour que, belle et parfaite, elle apparut dans une telle plénitude d’innocence et de sainteté qu’on ne peut, hors de Dieu, en concevoir une plus grande“].

Mais le regard de Dieu n'est pas seulement celui d'un Père, il est celui d’un époux : "L’Esprit Saint viendra sur toi ; il te couvrira de son ombre", comme, autrefois, il avait couvert de son ombre l’arche d’ALLIANCE ! Marie a été créée à l’image et à la ressemblance de Dieu, pour une union incroyable et en vue d'une fécondité extraordinaire. L'évangile de Luc l’atteste. L’Annonciation pourrait se résumer, dans une “demande en mariage“ : "Marie, veux-tu devenir la mère de mon Fils ?". "Oui, tu as trouvé grâce auprès de Dieu ; tu as été choisie entre toutes les femmes". On peut penser - les Pères de l’Eglise ne s’en sont pas privé - au dialogue du Cantique des cantiques entre le Bien-Aimé et sa Bien-Aimée : "Que tu es belle ma bien-aimée, et sans aucune tache !". Marie, elle seule, peut parfaitement reprendre les expressions de St Jean de la Croix : "Votre beauté, Seigneur, est telle qu’en nous regardant mutuellement, je parais semblable à vous en votre beauté ; et je me vois en votre beauté". De cette union à Dieu par l’Esprit Saint, de cette proximité inouïe, l’Eglise a conclu que Marie, dès son origine, a été créée dans la beauté, sans aucune ombre de péché. “Je te salue Marie, pleine de grâce. Tu es le chef d’œuvre de la Création, toi l’Immaculée !“.

Mais il ne faut pas oublier le pourquoi de la grandeur de Marie : "Tu concevras et enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus-Sauveur. L'enfant sera saint et sera appelé Fils de Dieu". Et Élisabeth la saluera bientôt du nom de "mère de [son] Seigneur". - Comment Dieu n'aurait-il pas comblé de tous ses dons celle qu'il destinait à être la mère de son Fils Unique et bien aimé ? Tout à l'heure c'était sa relation au Père, à l’Esprit qui rendait Marie “toute belle“. Mais on peut dire aussi que c'est sa relation au Fils qui fait la grandeur de Marie. Oui, le Seigneur a fait pour toi des merveilles, Marie, et nous sommes de ces générations qui te proclament bienheureuse. (1)

Notre regard

Mais à force de communier au regard de Dieu sur Marie, de contempler Marie “par lui, avec Lui, en Lui“, notre regard finira bien par devenir semblable à son regard, transparent comme un cristal : “Si ton œil est sain, ton corps sera tout entier dans la lumière“.
Il nous faut retrouver, avec Marie, le regard de Dieu et voir le monde tout neuf, tel qu’il a été voulu au matin de la Création, tel qu’il sera au matin de la re-création éternelle, Marie étant déjà toute baignée dans la lumière de ce même jour éternel. Alors, avec Marie, nous pouvons dire que ce qui fait encore la bonté et la beauté du monde, c’est bien sa relation à Dieu-Père, Créateur ; c’est bien sa naissance originelle à partir du Père de qui tout est sorti !

Et si notre pauvre monde a été souillé, défiguré par la volonté mauvaise des hommes (et dès le premier jour de la création), alors il faut le mettre, - c’est notre mission - le remettre, grâce à Marie, sous le regard de Jésus-Sauveur, en relation avec son Fils qui est le “Fils de Dieu“ venu pour laver le monde que nous avons sali. Marie nous associe à l’œuvre de son Fils, pour la plus grande joie de Dieu, Père et Créateur qui, en son Fils, "nous a choisis (comme Marie) avant la création du monde pour que, dans l’Amour, nous soyons saints et irréprochables sous son regard".

Et Marie nous aide grandement en inspirant nos actions et surtout en vivifiant nos prières si nécessaires. Si, à cause de l’âge et des infirmités, nous ne pouvons rien faire d’autre que de prier, ou même que d’avoir un élan vers Dieu qui, lui, englobe en son regard tous les hommes, redisons-nous que c’est le principal, en nous demandant seulement : notre regard priant est-il assez pur pour envelopper - comme Marie qui porte Jésus-Sauveur - tous les hommes dans l’Amour de Dieu notre Père ?

En notre regard priant, à l’exemple de la Vierge Marie en prière, alors Zachée, de pécheur public devient celui qui accueille Jésus ; Madeleine, la pécheresse devient une femme debout, relevée, restaurée, retrouvée ; la Samaritaine, cette hérétique, devient, en notre regard priant, missionnaire ; l’officier romain, ce soldat arrogant, devient un père en détresse de son enfant.

Oui, que notre regard priant devienne, avec Marie Immaculée, comme une provocation efficace devant Dieu, le Père de toute miséricorde, pour que tout homme, quelle que soit sa déchéance, reprenne conscience de sa vocation première et originelle, celle de fils de Dieu, celle d’être “à l’image et ressemblance“ de Dieu !

Aussi, n’en finissons pas de contempler Marie, notre modèle de pureté et de lumière, et, peu à peu, sa lumière dont Dieu est la source, s’étendra sur tous les frères de son fils. Ils sont tous nés pour Dieu au matin éternel de la création. Et, s’ils se sont perdus, comme l’enfant prodigue, notre cœur plein de tendresse, notre regard priant plein d’admiration sur ce qu’ils étaient et sur ce qu’ils doivent redevenir par-delà leurs misères, les provoquera au retour vers le Père. Prions, prions comme des apôtres, prions avec Marie, Reine des apôtres !

Oui, la fête de l’Immaculée Conception sonne le glas du mépris, de la critique négative et de l’accusation. Il faut en finir avec ce qui abîme l’homme créé à l’image du Dieu-Lumière, du Dieu-Amour, du Dieu-Beauté. Avec Marie, la fierté de l’humanité, est venu le temps de la louange et de l’admiration : “Je te salue, pleine de grâce“ !

(1) Commentant le Cantique des cantiques, St Bernard, toujours très imaginatif, voit dans celui qui “saute par-dessus les montagnes et qui bondit par-dessus les collines“ (Ct 2.8) le Fils de l’Eternel qui descend vers Marie ! Et, s’amusant, si je puis dire, il a joute : “Celui qui était au-dessus des anges est descendu comme l’un d’eux et avant lui : Il a précédé l’ange Gabriel auprès de la Vierge, de sorte que l’Archange s’étonne : celui qu’il vient de quitter au ciel, il le retrouve tout aussitôt dans le sein de la Vierge ! Il faut qu’il ait volé sur les ailes du vent. Tu es vaincu, ô Archange : celui qui t’avait envoyé devant lui t’a dépassé dans son élan“.

lundi 7 décembre 2009

La Vengeance de Dieu !... - Avent 2 - Lundi - (Isaïe 35.1-10)

La lecture d’aujourd’hui est en quelque sorte la description du retour d’exil .
  • sous une forme épique : c’est la “geste de Dieu“ qui libère son peuple !
  • sous une forme quasi liturgique : c’st une longue procession de pèlerins joyeux qui montent vers Jérusalem, “le lieu que Dieu a choisi pour y faire habiter son Nom“ !
  • sous une forme lyrique : la terre elle-même participe à cette joie des exilés qui reviennent en chantant : le désert se couvre de fleurs ; les forêts son comparables à celles du Liban ; l’eau jaillit de partout ; plus de bêtes féroces. C’est la paix.

Bref, c’est une description de paradis terrestre - paradis, “pardeis“ : jardin merveilleux -, image d’un bonheur éternel que Dieu veut pour son peuple, image que nous gardons, nous aussi, pour annoncer la gloire du ciel !

Mais je retiendrai aujourd’hui une expression assez souvent employée et qui peut paraître étrange parce que trop correspondante à nos mentalités si portées parfois à répondre au mal par un plus grand mal. “Voici votre Dieu. C’est la vengeance de Dieu qui vient, la revanche de Dieu !“ Dieu se laisserait-il aller à assouvir sa vengeance ? Et bien oui ! Mais non à la manière affreuse des hommes, mais à sa manière à lui, divine !

Cette expression est certainement tirée de pratiques tribales que reflétait encore la loi du talion : “œil pour œil, dent pour dent“. Cette loi du talion était déjà un énorme progrès en considération de certaines pratiques dont on se glorifiait dès le début de l’humanité : “J’ai tué un homme pour une simple blessure !“, exultait Lamek, un des descendants de Caïn.

Et justement, dès le début de l’humanité, Dieu reprend cette idée de vengeance, mais pour la transformer, la transfigurer.
  • La vengeance de Dieu est une vengeance à l’écoute de l’innocent. Quand Abel est tué par Caïn, Dieu s’adresse à celui-ci : “Ecoute ! Le sang de ton frère crie du sol !“. Dieu, lui, écoute le cri du sang versé de l’innocent ; il demande de l’écouter. C’est sa première “vengeance“, sa vengeance “ puissance 1“, si je puis dire. Notre Seigneur dira : “L’homme bon, de son bon trésor, retire de bonnes choses“ (Heureux est-il !). “L’homme mauvais, de son mauvais trésor, retire de mauvaises choses“ (Malheureux est-il !). Et, malheureux, Caïn est obligé de fuir de devant Dieu qui, lui, est à l’écoute du sang d’Abel injustement répandu et qui crie du sol ! C’est la première “vengeance“ d’un Dieu bon qui, au terme de l’histoire des hommes, accueillera “ceux qui ont lavé leur robe dans le sang de l’Agneau“, l’Innocent par excellence.
  • Mais il y a une vengeance de Dieu, “puissance 2“, si je puis dire, lorsque sa miséricorde s’exerce pleinement. Caïn, fuyant Dieu parce qu’il n’a pas écouté le cri du sang de son frère, se dit : “ma faute est trop lourde à porter… Je serai errant et vagabond sur la terre ; et quiconque me trouvera me tuera !“. (Remarquons avec humour : qui peut tuer Caïn puisqu’il n’y pas encore d’autres hommes sur la terre ? mais cela ne fait rien à la réflexion de la révélation divine !). Autrement dit, Caïn n’a plus de protecteur. Alors, Dieu met un signe sur Caïn pour que personne, lors d’une rencontre, ne le frappe ! La vengeance de Dieu va s’exercer en défendant la fragilité de l’homme même s’il est lui-même responsable de cette fragilité. Du fait de son crime, l’homme va devenir un vulnérable, un maudit sur lequel la haine va s’accumuler. Alors, à ce moment-là, Dieu, la vengeance de Dieu devient prévoyante en mettant un signe sur Caïn comme pour acquérir le sang du criminel qui devrait être répandu en stricte justice. Il devient le rédempteur (“goël“, en hébreu) du sang du criminel contre vents et marées. C’est sa vengeance à lui !

Autrement dit :
  • Dieu se venge du sang de l’innocent. On ne sait pas encore comment. On le saura surtout avec le Christ.
  • Et, en même temps, paradoxalement, il se venge du mal en protégeant celui qui devient vulnérable du fait de son crime, de sa faute.

Et c’est toute l’histoire du salut : Ainsi
  • Dieu n’intervient dans l’histoire de Jacob que lorsque celui-ci, par ruse coupable, a volé la bénédiction de son père et est obligé de fuir Esaü. Le Seigneur n’intervient que lorsqu’il fait l’expérience de la vulnérabilité.
  • C’est quand le peuple, par sa faute, est exilé que Dieu intervient pour le libérer.
  • C’est lorsque l’enfant prodigue devient vulnérable à cause de sa faute que l’on découvre les trésors de la paternité du père.
  • C’est lorsque l’homme se perd que Dieu intervient en son Fils.

Voilà la vengeance de Dieu !

A l’égard du sang, de l’esclave, du patrimoine, de la veuve et de l’orphelin. Dieu exerce sa vengeance en nous rachetant, en rachetant les exilés que nous sommes, marqué au front par le sang de l’Agneau !

Aussi, St Paul dira plusieurs fois : ne vous vengez pas vous-mêmes ! Laissez la vengeance de Dieu agir. (Rm 12.19) Laissez agir la colère de Dieu, car il est écrit : “A moi la vengeance ; c’est moi qui rétribuerai“. Or c’est une vengeance, une rétribution d’amour. Une vengeance d’amour !

vendredi 4 décembre 2009

Le temps messianique !… - Avent 1 - Vendredi - (Isaïe 29.17-24)

Pour mieux comprendre la lecture, il faudrait, me semble-t-il, la faire précéder d’un verset seulement : “Prendra-t-on le potier pour l’argile ? L’œuvre dira-t-elle de l’ouvrier : « Il ne m’a pas faite ! » ? Le vase dira-t-il du potier : « Il ‘n’y entend rien ! » ? – C’est ce que j’appelle “l’inversion sacrilège, par excellence“ ! L’homme qui se prend pour Dieu ; l’homme qui dit à Dieu : “Pourquoi m’as-tu fait ainsi ?“ ! Cela aurait pu être mieux autrement !“. - “Quel renversement des rôles !“, dit le prophète Isaïe.

Au contraire, quand on accueille Dieu, quand on écoute sa parole, ses instructions et conseils, quand on prend conscience de son dessein de salut pour tout homme, qu’on accepte son alliance, alors tout revient dans l’ordre. Et c’est déjà sur terre, un avant-goût du ciel !
  • Le Liban devient verger ; et le verger une grande forêt“. Le psalmiste chantera : “Heureux l’homme qui se plait à la loi du Seigneur. Il est comme un arbre planté près des ruisseaux qui donne du fruit en sa saison. Heureux cet homme ! Il réussit tout ce qu’il fait !“ (ps.1) … Non à la manière humaine, sans doute ; mais à la manière du Christ que l’on découvre peu à peu !

  • Les sourds entendent“ ! Ecouter, c’est la première disposition pour faire alliance avec Dieu ! Le premier péché - celui d’Adam et Eve - fut de n’avoir pas écouté la voix du Seigneur. C’est la tentation permanente. Dans la Bible, le contraire de “prêter l’oreille“, c’est “avoir la nuque raide“. On se “raidit“ pour ne pas écouter. L’oreille…, “l’oreille du cœur“, j’entends (“ayez donc un cœur qui écoute“, dira St Luc), c’est extrêmement important ! - Aristote (“De natura rerum“) remarquait déjà que nous avons deux oreilles et une seule bouche. On peut en tirer beaucoup de conclusions. En tous les cas, on devrait deux fois plus écouter que parler : “Le Seigneur m’a donné une langue de disciples pour que je sache apporter une parole de réconfort. - Il éveille chaque matin mon oreille pour que j’écoute comme un disciple…“ (Is. 50.4). Et le psalmiste s’écrie : “Tu ne voulais ni sacrifice ni oblation ; tu m’as ouvert l’oreille“ ! (Ps 40.7). [Curieusement, la lettre aux Hébreux, reprenant ce psaume à propos du Christ, transcrit : “Tu m’as formé un corps !“. Comme pour dire que le mystère de l’Incarnation se poursuit par l’écoute de la Parole !]

  • Quant aux aveugles, leurs yeux verront !“. Voir ! Un thème si fréquent dans la Bible ! On se met en route pour voir un jour celui qui nous voit sans cesse. Comme à Abraham, il nous est dit : “Va pour toi“ (c-à-d pour ton bonheur) vers le pays que je te ferai voir, vers le pays de Morrhya (=de la vision) ! Ici-bas, cependant, on ne peut voir Dieu que de dos, comme Moïse ; on ne voit que ses manifestations en notre vie : “en voyant ce que j’ai fait au milieu d’eux, dit Dieu par Isaïe, ils proclameront la sainteté de mon Nom“. - “Dieu était là, disait Jacob ; et je ne le savais pas. Mais maintenant je le sais !“.

  • Et pour arriver à percevoir la présence de Dieu en notre vie, il faut exercer son intelligence avec l’aide de l’Esprit-Saint. “Les esprits égarés découvriront l’intelligence“, dit Isaïe. Dans la Bible, “l’homme intelligent“, c’est celui qui cherche Dieu. Et Dieu, lui, comme dit le psaume, regarde des cieux pour voir s’il y a un seul juste, “masquil“, un homme intelligent. Et qui cherche trouve. A celui qui frappe on ouvrira !

  • Alors, ce sera la fin des tyrans…, de tous ceux qui sont empressés à faire le mal. Le Mal ! C’est la grande difficulté de notre foi ! “Dieu ferait-il périr le juste avec le coupable ?“, demandait déjà Abraham. Nous sommes souvent comme Job qui, face au mal, n’hésite pas à demander des comptes à Dieu ! Déjà Thomas d'Aquin voyait dans le mal l'objection la plus redoutable contre l'existence de Dieu : Dieu ne peut être que le Bien infini ! “Donc, si Dieu existait, il n’y aurait plus de mal. Or, l'on trouve du mal dans le monde. Donc Dieu n'existe pas”. Le syllogisme est parfait. St Thomas, comme bien d'autres, a essayé de dénouer l'objection…

Et que dit le Christ lui-même ? Un jour, à Siloé, l’effondrement d’une tour a provoqué la mort de 18 personnes. “Pensez-vous qu'elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ?”. (Lc 13, 1-13). Non, dit Jésus qui ne se met pas en quête d’un coupable. Il n'en tire qu'une seule leçon : l'urgence de la conversion, l’urgence de se tourner vers Dieu . Le psalmiste ne dit-il pas : “Non, il ne somnole ni ne dort, le gardien d’Israël”. (Ps 121,4) Bien plus, il a répondu à notre attente : “Ah ! Dieu, si tu déchirais les cieux et si tu descendais !”. (Is 63,19). - Il est descendu. Et lui-même, Dieu, non seulement a été affronté au mal [“Il commença à ressentir tristesse et angoisse”. (Mt 26,37)], mais, par sa résurrection, il a rendu crédible que le mal qu’il a subi par sa propre mort consentie, est vaincu déjà en sa racine ! “O Mort, disait St Paul, (O Mal) où est ta victoire ?“.

Avec la puissance du Christ ressuscité, en nous et autour de nous, ce “ce sera la fin des tyrans…, de tous ceux qui font le mal !“. Telle est notre foi active !
Elan missionnaire ! - 3 Décembre - St François-Xavier…

L’Eglise doit faire connaître partout le message de son fondateur, le Christ. Dynamisme, expansion, propagande sont pour elle des devoirs impérieux. Au temps des conquistadores (16e s.), nul ne fit plus que l’un des premiers Jésuites, François Xavier, pour étendre le Royaume de Jésus. En une douzaine d’année, avec les moyens pauvre de son temps, il réussit à parcourir près de cent mille kilomètres, implantant le Christianisme en Inde, Indonésie, Japon. Il mourut quand il s’apprêtait à entrer en Chine. Une telle œuvre, au temporel, est comparable à celle d’un Alexandre le Grand ou d’un Christophe Colomb ; au spirituel, elle rappelle St Paul.

Il était issu d’une noble famille de la Navarre, pays basque espagnol, de nos jours, alors que la Navarre venait d’être envahie par les Castillans. Il lutta avec ses frères contre les Espagnols (ce n’est donc pas nouveau !). Mais le dernier mot resta aux gens de Charles-Quint. Après une résistance plus qu’honorable, sa famille se soumit.

François partit alors pour Paris où il rencontra un petit groupe dont faisait partie un certain Ignace de Loyola. Ces jeunes, à l’occasion de l’ordination de l’un d’entre eux (Pierre Favre), offrirent à Dieu leur bonne volonté. On suivrait les désirs du pape ; on irait prêcher l’évangile par toute la terre, même chez les ennemis de la foi chrétienne. L’aventure venait de commencer !

Et sa fête rappelle à chaque chrétien le devoir missionnaire qui lui incombe. Elle nous invite à seconder l’apostolat missionnaire de toute l’Eglise. Le Concile Vatican II l’a rappelé très souvent. Nous sommes peut-être, en France, trop timides sur ce point, marqués que nous sommes par toute une histoire encore récente (3ème République anticatholique) et désormais par une certaine pusillanimité sous le prétexte plus ou moins fallacieux de respecter les autres religions, les opinions diverses, la fameuse “laïcité“ !… etc. Et l’on dit - et on pense - : notre foi ne doit pas “casser la tête“ (si je peux m’exprimer ainsi) aux autres ! Et c’est vrai d’une certaine manière. L’histoire est là encore pour stigmatiser une certaine attitude missionnaire. Et le Concile Vatican II l’a répété de diverses manières (“décret sur la liberté religieuse“, en particulier).

Cependant, je me permets de poser une question, de lancer une réflexion !

La “Résurrection du Christ“ qui fonde notre foi, qui donne sens à toute notre vie n’est-elle pas la “Bonne Nouvelle“ par excellence … ? Alors qu’est-ce une “Bonne Nouvelle“ qu’on ne voudrait pas partager ?

Aujourd’hui, on ne parle que de “partage“. Et il faudrait tout partager, sauf le principal, et surtout pas cette “Bonne Nouvelle“ qui est le centre pivot de notre démarche existentielle?

Ce n’est quand même pas rien que cette “Bonne Nouvelle“ : l’absurdité de la mort a été vaincue ; il y a désormais une “tête de pont“ pour “l’autre rive“, pour l’autre Cité. Ce n’est quand même pas rien que cette certitude qui réside au plus profond de nous-mêmes : si nous marchons comme Lui (le Christ) a marché, nous parviendrons là où il est. Alors, on partagerait tout sauf cela ?

Qu’est-ce qui a envoyé François Xavier jusqu’au Japon ? Sinon ce dynamisme intérieur qu’on ne peut pas contenir. Il ne s’agit pas de “casser la tête“ aux autres, de leur faire perdre leur identité. Il s’agit, au contraire, de leur donner ce qui leur permettra d’épanouir ce qu’il y a de meilleur dans leur personnalité. Et la religion judéo-chrétienne (n’ayons pas peur de ce mot !) est un grand fleuve qui traverse toute l’histoire du monde et qui est capable de mener à leur plein épanouissement toutes les valeurs qu’on trouve dans toute civilisation (comme disait un de mes professeurs : il ne faut pas opposer le Dieu-Créateur au Dieu-Rédempteur ! C’est le même !).

Toutes les civilisations, comme toute personne, sont des arbres plantés au bord de ce grand fleuve qui coule de la Genèse à l’Apocalypse, afin que ces arbres donnent leurs fruits “en leur temps et selon leurs espèces“, pour que les échanges soient de plus en plus riches en la future et définitive Cité de Dieu.

Certes, on pourra toujours citer des erreurs commises au cours de l’histoire, des manières de faire trop humaines, liées à telle ou telle époque… Mais que l’arbre ne cache donc pas la forêt ! Avec François Xavier et tous les missionnaires, nous sommes invités à entrer, avec respect et grand discernement, dans le grand jeu de la fécondité divine qui se manifeste dans toute la création et tout au long de l’histoire.