dimanche 26 juin 2011

Fête-Dieu !

Corps du Christ 11/A

Prononcer des paroles le jour de la fête du Corps et du Sang du Christ est toujours un danger, un danger de parler trop légèrement et maladroitement. Pourquoi ?
- Parce que parler du Corps et du Sang du Christ, c'est vouloir rendre compte de ce que vous vivez intimement chaque dimanche, chaque jour en venant, ici ou ailleurs, participer à l’Eucharistie.
- Parler du Corps et du Sang du Christ, c’est vouloir parler d’une réalité si riche que ni les paroles, ni les images ne peuvent y suffire ! D’ailleurs, au cours des siècles, on a additionné les mots pour désigner ce don immense du Christ : Repas du Seigneur, Cène du Seigneur, Saint Sacrifice, Eucharistie, Communion... Chacun de ces mots révèle un aspect du Mystère, car il est impossible d'en faire le tour. Il faut choisir.

Aussi, je n’ai retenu, ce matin, que deux aspects en forme de question :
- La première, on la pose souvent : La “présence réelle du Corps et du Sang du Christ”, comment le croire, le dire ?
- La deuxième, vous l'entendez souvent. Célébrer chaque jour ou chaque dimanche le Mystère de cette présence du Christ, à quoi ça sert ?... À quoi ça nous avance ?

Oui, et d’abord cette interrogation : “Comment cet homme peut-il nous donner sa chair à manger ?” Qui a prononcé cette phrase ? Ce sont, déjà, les premiers auditeurs de Jésus quand il a tenté de leur parler du “Pain Vivant“. St Jean nous le rapporte dans son évangile.
Et parmi nous, qui ne s’est pas, qui n'a pas, un jour ou l'autre, interrogé ? “Comment cet homme peut-il nous donner sa chair à manger ?” C'est vrai que ce langage sanglant nous choque : “manger la chair, boire le sang” !

Même pour un croyant, la question est de taille. Il s'agit de la présence réelle du Christ à la messe ! Et la parole de l'Église est claire, pas question de la minimiser ! La foi de l'Église est formelle. Les chrétiens sont convaincus que c'est bien le Christ qu'ils reçoivent quand ils communient. Cette affirmation, il est vrai, peut étonner, et tant mieux finalement, parce que l'Eucharistie est une réalité étonnante, merveilleusement étonnante. Étonnante mais pas incompréhensible, mystérieuse mais pas absurde. Il ne nous est pas demandé de croire des absurdités qui alimenteraient des accusations faciles et sordides contre le Christianisme, religion cannibale.

Alors que veut donc dire exactement l'Évangile avec ces mots-là ? Les exégètes nous éclairent : l'expression corps et sang, dans la langue hébraïque, n'a pas la même signification qu'en français. Le corps, c'est la personne tout entière, le sang, c'est le symbole de la vie. Lorsque Jésus dit : “Ceci est mon corps, Ceci est mon sang”, c'est comme s'il disait : “C'est ma vie, c'est moi tout entier” !
Quand nous communions, nous communions à sa Personne vivante. Nos dents ne croquent pas sa chair, mais nos cœurs accueillent sa vie, toute sa vie. Sa présence n'est pas comme une présence matérielle, chimique. Il s’agit d’une Personne - la Personne du Fils de Dieu - avec un Corps bien sûr, mais un Corps ressuscité, glorieux ; C’est la présence vivante d’un Amour - Dieu est Amour - qui se propose à une rencontre qui se fait nourriture de vie. Oui, les chrétiens choisissent de s'alimenter à ce Pain-là !

Un jour, un jeune homme demanda à un prêtre : “Comment est-ce possible que le pain et le vin deviennent Corps et Sang du Christ ?”. Le prêtre répondit : “Puisque ton corps transforme le pain et le vin en chair et en sang, pourquoi cela ne serait-il pas possible à Dieu ?”.
Mais l’autre d’insister : “Mais comment une si petite hostie peut-elle être tout le Christ ?”. Le prêtre lui dit : “Regarde la campagne qui se trouve devant nous. Elle est grande et tes yeux sont bien petits ; pourtant une image de toute cette belle campagne se trouve dans tes yeux. Pourquoi cela ne serait pas possible au Christ-Dieu de se faire aussi petit qu’une hostie pour venir en toi. Dieu est si grand qu’il peut se faire tout petit”.
Mais le jeune homme d’insister encore : “Comment le Christ peut-il être dans toutes les églises en même temps ?”. Le prêtre prit un miroir et le laisse se regarder dedans. Puis il jeta le miroir au sol et dit : “Même dans chaque morceau de ce miroir tu peux voir en même temps ton image !”.
Ce ne sont là que des comparaisons, mais comparaisons pour une réalité merveilleuse : Dieu avec nous ; chacun de nous avec Dieu, en Dieu !

Et c’est là déjà répondre à la deuxième question : celle que beaucoup de jeunes et même des adultes posent : “La messe, à quoi ça sert ? Aller à la messe, à quoi ça vous avance ?”
Bonne question, finalement ! Que faisons-nous à la messe ? Quelle présence avons-nous à la messe ? Avons-nous une présence réelle ou répétons-nous des mots qui ne brûlent plus personne, des rites ponctuellement exécutés mais un peu vides de sens ?

Non, c’est bien une présence réelle que nous venons chercher, une présence divine, active. L’Eucharistie n'est pas une dévotion. C'est une action, une “liturgie“ (“leitos“ - “urgos“ : travail en commun - et avec Dieu et avec nos frères).

L'Action eucharistique doit nous rendre actifs, acteurs dans le monde. La phrase de Jésus : “Faites ceci en mémoire de moi” ne signifie pas seulement : “Faites ce repas en souvenir de moi”. Certes pas ! Mais : “dans ce repas, j'offre ma vie par amour ; faites-en autant avec moi. Unissez-vous a moi pour marcher (vivre) comme moi-même j’ai marché (vécu)” (Cf 1 Jn 2.6). À la Cène, le Jeudi Saint, Jésus a donné sa vie ; nous refaisons ce repas pour apprendre à donner la nôtre.
Bien sûr, l'Eucharistie est et doit être une communauté de table liturgique, rituelle, mais c'est à nous d'en faire aussi une communauté de table réelle. Je veux dire : comment se nourrir réellement de la vie du Christ si nous prenons notre parti des inégalités et des injustices du monde et de nos sociétés et de tout près de nous, où les uns sont repus et les autres se retrouvent chaque année devant un grenier vide ?

Ou encore, si nous communions chaque dimanche à la messe, pas question de nous excommunier. Pas question de dresser des barrières de haine ou même des murs d’indifférence entre les races, les cultures, les religions, ou tout simplement entre membres d’une même famille. C'est donc bien après l’Eucharistie que l'on sait si l’Eucharistie a été vraiment vivante, après l'Eucharistie que l'on sait si cette Eucharistie nous fait vivre (même si elle a été célébrée avec quelques fausses notes) !

Oui, l’Eucharistie nous donne bien le Christ en chacun de nous. Si bien que nous sommes, vous êtes le Corps du Christ (1 Co 12.27) ! Alors, que faisons-nous de lui… tout au long des jours ?

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