samedi 3 mars 2012

"Transfiguration !"

2ème Dimanche de Carême B.12

Nous changeons tous au long de notre vie : notre corps, notre visage, notre allure générale se transforment. Loin de moi de faire offense à quiconque, mais prenez une de vos photos vieille de dix, vingt ou trente ans ; et vous aurez peut-être un peu de mal à vous reconnaître !

Nous changeons même d'un moment à l'autre. Imaginez-vous au moment d'une fête quelconque (familiale ou autre). Vous êtes tout souriant ! Mais si une mauvaise nouvelle vous arrive, vous voilà tout "défiguré", comme l'on dit ! Et si vous pouvez écarter le malheur de cette mauvaise nouvelle, la joie transfigure à nouveau votre visage !

Or, l'évangile d'aujourd'hui nous rapporte le récit de la transfiguration de Jésus : Jésus s'est montré à ses apôtres le visage transformé ! pourquoi ?

Jésus était alors en route vers Jérusalem et il savait parfaitement que là-bas, les autorités avaient décidé de le faire mourir. A plusieurs reprises déjà, Jésus avait prévenu ses amis ; il leur avait dit qu'il lui faudrait beaucoup souffrir, être rejeté, condamné à mort… et qu'il ressusciterait ! Alors, les apôtres étaient inquiets, troublés, déconcertés : ils ne comprenaient pas !

Aussi, Jésus décide de leur faire entrevoir un bref instant sa vie glorieuse de Fils de Dieu après sa résurrection. Comme pour leur dire : Oui, vous me verrez, défiguré, traité comme un maudit, rejeté comme un lépreux. Mais, même alors, gardez confiance : je ressusciterai et, avec la puissance de la gloire divine, je serai pour toujours avec vous.

Oui, ne cesse-t-il de répéter, je serai pour toujours avec vous ! Comme moi, vous cheminez, vous aussi, vers une vie tout autre, vers la transfiguration éternelle, là où Dieu essuiera toute larme de vos yeux (selon l’expression de St Jean dans l’Apocalypse), là où il effacera toute ride de vos visages qui retrouveront leur aspect originel, c’est-à-dire celui d'enfant de Dieu que Dieu a pensé de toute éternité ! Car, insiste St Jean, “nous sommes appelés « enfants de Dieu » ; et dès à présent, nous le sommes !“ … “Mais ce que nous serons n’a pas encore été (totalement) manifesté“. - “Lorsque le Christ paraîtra, nous lui serons semblables puisque nous le verrons tel qu’il est !“ (I Jn 3.1-2)

Aussi, cette transfiguration éternelle, il nous faut la préparer dès ici-bas. Et Jésus est venu. Jésus vient à nous, précisément pour nous y aider.
Aussi, la grande question qu’il nous faut nous poser est bien celle-ci :
qu'est-ce qui défigure nos vies ?


C'est d'abord le péché
, un manque de vie théologale, c’est-à-dire de relation avec Dieu, relation empreinte essentiellement de Charité, d’Amour. Oui, le péché, c'est un manque d'amour (envers Dieu et envers le prochain), qui se monnaie en égoïsme, manque d'attention aux autres, repli sur soi-même, injustice, orgueil, esprit de domination… et que sais-je encore ! Tout cela nous avilit, tout cela défigure nos vies, contredit notre dignité de fils et de filles de Dieu, d’enfants de Dieu. Il est bon d’y réfléchir en ce temps de carême !

On m'a rapporté cette anecdote : à un jeune Camerounais, chrétien, venu en notre pays, on a posé cette question : “Que pensez-vous des chrétiens de France ?“ - Et la réponse fut rapide : “Je suis étonné que, apparemment, la foi chrétienne ne change pas grand chose à leur manière de vivre : ils pensent beaucoup à leur pouvoir d'achat, au progrès de leur niveau de vie, à leurs distractions, à leurs vacances d'hiver et d'été, exactement comme ceux qui ne sont pas chrétiens. Chez nous, notre foi transforme - on pourrait dire : "transfigure" - notre vie. On vit notre foi en Dieu comme une fête perpétuelle. Quand on participe à l'Eucharistie, on est comme "transfiguré". Tout le monde chante, est joyeux; tout le monde participe.

Ce qui défigure encore nos vies et la vie du monde, c'est la souffrance, la misère. - Oui, la misère est avilissante pour l'homme. C'est pourquoi Dieu n'en veut certainement pas ! Aussi tout au long de sa vie, Jésus a lutté contre la souffrance humaine. Les évangiles sont remplis de ces récits où Jésus rend la vue aux aveugles, relève des paralysés, guérit toutes sortes de malades.

Et Jésus nous appelle, nous aussi, à lutter de toutes nos forces contre le mal et la souffrance. Ce qu'il a fait le premier durant sa vie terrestre en faveur des malheureux, il veut continuer à le faire maintenant par nos mains. Le Christ compte sur chacun de nous pour lutter contre toute souffrance qui défigure la vie d’un homme, d’une femme, de l'humanité. Le Christ, aujourd'hui, n'a pas d'autres mains que nos mains pour lutter contre la souffrance. Le Christ aujourd'hui n'a pas d'autre cœur que nos cœurs pour donner des preuves de son amour, pour donner de la joie, pour faire naître un sourire sur le visage de cet homme qui se morfond dans sa solitude, pour transfigurer les visages de nos frères en visages de Dieu !

Oui, quand nous faisons quelque chose ensemble pour rendre ceux qui nous entourent plus humain, plus heureux, le monde se “transfigure“ peu à peu en Royaume de Dieu. Car là où il y a l'amour, Dieu est là.

Ce qui défigure encore nos vies et le monde d'aujourd'hui, c'est le doute, le découragement, la peur. Aujourd'hui, bien des gens n'ont plus confiance en rien : ils sont déçus par bien des aspects de notre vie moderne du 21ème siècle. Aucune idéologie n'a répondu à leur espérance. Beaucoup même se mettent à consulter de soi-disant prédictions, des Nostradamus et autres semblables devins de tous genres. Les ouvrages d'astrologie, d'ésotérisme ne se sont jamais aussi bien vendus qu'à notre époque. Et regardez tous ces inquiets : leurs visages sont défigurés

Notre destin n'est jamais fixé d'avance. Il n'est pas inscrit dans les étoiles. Il nous est proposé par Dieu. Et c'est nous qui avons à le réaliser. Jésus nous montre le chemin : nous n'avons pas à avoir peur ; nous pouvons lui faire confiance. Comme dit St Paul : “Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Il nous a donné Jésus son Fils !“ (Rm 8.31). Et puisque le Christ est mort et ressuscité, puisqu'il intercède pour nous, pourquoi douter, pourquoi avoir peur, pourquoi nous décourager ? Que dès maintenant, l'espérance revienne transfigurer nos visages, malgré les difficultés qui sont nôtres !

Voilà, en général, tout de qui défigure nos vies et la vie du monde : le péché, le mal, la souffrance, le doute, la désespérance… En ce 2ème dimanche de Carême, Dieu nous redit à quelle transfiguration nous sommes appelés à la suite de Jésus.

Cette transfiguration, préparons-la dès maintenant en mettant plus d'amour dans nos vies.
Chaque fois qu'on pardonne,
chaque fois qu'on aide un voisin à retrouver le sourire,
chaque fois qu'on redonne à un frère courage et espérance,
on transfigure un peu la vie.

Cherchons, chacun, ce que nous allons faire pratiquement pour cela en ce temps de carême qui nous achemine vers la lumière, la lumière du Christ ressuscité, “transfiguré“, glorieux !

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