dimanche 29 avril 2012

Le Bon Berger !


4ème dimanche de Pâques 12 – 

Chaque dimanche, voire chaque jour, nous sommes rassemblés pour répondre à l'appel de l'unique Berger - “Je suis le bon berger !“, dit Jésus -. Par l'Eucharistie, nous célébrerons sa mort et sa résurrection, ce mystère immense par lequel il a réconcilié les hommes avec Dieu, par lequel il fait Alliance entre le ciel et la terre.

Mais son œuvre doit être continuée, poursuivie, actualisée de génération en génération. Il le fait par ceux qu'il a choisis et par chaque baptisé. Certes, aujourd'hui, l'Eglise nous rappelle la mission particulière du prêtre au service de l'Evangile et des sacrements, et en particulier de l'Eucharistie. Mais c’est aussi  la “Journée mondiale de prières pour les vocations“ !  Pour toutes vocations ! Oui, chaque baptisé est invité, selon sa propre vocation  à prendre sa part à cette annonce de l'Evangile, cette “Bonne Nouvelle“ qui nous sollicite à suivre le “Bon Berger“, jusqu’en la gloire de son Père !

Or toute vocation est un appel, une réponse et un envoi.

Et le premier Appelé, c'est Jésus-Christ lui-même. Car le premier Berger, ce n'est pas Jésus, c'est Dieu. Déjà dans l'Ancien Testament, Il se déclare le Berger d'Israël qui est son peuple, son troupeau. “Il conduit ses brebis dans de verts pâturages“, dit le psaume. Jésus le nomme son Père. C'est ce “Dieu-Berger et Père“ qui le choisit à être Berger à son tour : “Tu es mon Fils Bien-aimé !“ (Mc 1.11) ; sois le Pasteur de mon troupeau tout entier, afin qu'il n'y ait qu'un seul troupeau et qu'un seul Pasteur ! Ainsi Jésus peut dire : “Je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis !... Voilà le commandement de mon Père“, le “Berger“ d’Israël.

A cet appel du Père, à cette vocation, Jésus répond : “Me voici, je suis venu pour faire ta volonté“ (Heb 10.7,9). Avant de devenir Berger par rapport à son troupeau, Jésus est l'Agneau par rapport à son Père à qui il répond : "Me voici". - Et il est envoyé pour sauver le troupeau : “Voici l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde“ (Jn 1.29). Il donne sa vie pour toutes les brebis du Père. Cette vie, dit-il, “nul la prend, c'est moi qui la donne !“. Comme l'Agneau pascal, il s'immole pour faire le don de son corps, de son sang, de sa personne. Voilà comment se réalise sa vocation de “berger“ : en étant d’abord l’“agneau immolé“ !

On n'a pas suffisamment remarqué ce renversement, cette révolution, apportée par Jésus dans le sacrifice qu'il fait ainsi de sa vie pour toutes les brebis. En effet, comment d'ordinaire se comporte un Berger ? Il finit par tuer ses brebis pour les manger, car il est le Maître ! Jésus, lui, parle du mauvais berger qui vient pour égorger, voler, détruire, piller. "La raison du plus fort et toujours la meilleur", disait La Fontaine. Et delà vient l'angoisse des hommes devant la vie, devant le temps, face à la mort et face à Dieu lui-même, parfois.

Or voilà que Jésus nous révèle sa vocation de Bon Berger, à la suite de son Père ! Ce n'est pas de nous dévorer, mais de se laisser manger par ses brebis : Je leur donne la vie éternelle, ma propre vie. “Moi, le Bon Berger, je suis le Pain de Vie. Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle et moi je le ressusciterai au dernier jour“. C'est le monde renversé !

Jésus nous révèle ainsi qui est Dieu, premier Berger qu'il appelle son Père. Et il suffit de le regarder : "Qui me voit, voit le Père". Dieu est bon, il est le Bon Berger, Il donne ; il se donne en son Fils. Dieu est donneur de vie. Dieu est Résurrection. Dieu est Amour. “Le Père et moi, nous sommes un“. Ainsi Jésus est “berger“ en étant “agneau immolé“ !

Aussi, la lettre aux Hébreux pourra conclure solennellement : “Que le Dieu de la paix qui a fait remonter d’entre les morts, par le sang d’une alliance éternelle, le grand pasteur des brebis, Notre Seigneur Jésus, vous rende aptes à tout ce qui est bien pour faire sa volonté“ (Heb 13.20-21)

“…Vous rende aptes… à faire sa volonté !“. Car, à la suite de Jésus, il y a les autres appelés : Jésus, le premier Appelé, va devenir le premier Appelant : “Viens et suis-moi, tu seras Berger. Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis“ (Cf. Jn 15.16).

Quand le Berger appelle, il ne devrait y avoir qu'une seule réponse possible : "Me voici, Seigneur". Comme Jésus lui-même a toujours dit à son Père : “Me voici, je suis venu pour faire ta volonté“ ! C'est la condition du véritable bonheur. Sinon, nous éprouverions ce que le jeune homme riche a ressenti : “Il s'en alla tout triste, car il avait de grands biens“ (Mth 19.22).

“Viens et suis-moi !“-  Dieu propose toujours, mais c'est à chacun de consentir librement, à la suite du Christ. Prions particulièrement aujourd’hui pour que des Jeunes, riches de leurs talents divers, répondent à l’appel qu’ils ressentent - et beaucoup ressentent cet appel du Seigneur- !

Oui, prions pour les vocations sacerdotales ! Etre prêtre, en effet, c'est tout donner pour Dieu-Berger, pour le troupeau, pour l'Eglise ; c’est livrer son intelligence, son cœur, son temps, sa vie tout entière. Le prêtre, à la suite de Jésus, l’“Agneau immolé devenu Berger“, ne peut être le loup qui dépouille les brebis et les dévore, ni le mercenaire, le salarié qui tond le troupeau et l'abandonne au moindre danger. Oui, prions pour les prêtres, pour les jeunes en recherche afin que leur vie n'ait qu'un sens : proclamer avec Jésus et comme Lui : “Voilà mon corps livré pour vous, voilà mon sang répandu pour tous, sans exception“. - “Pour vous et pour la multitude !“, répètent les Prières Eucharistiques !

Enfin, l'Eglise - les brebis appelées par le Christ au nom de son Père - est un Corps organique avec des membres différenciés : les diacres, Religieux, Missionnaires…, les Laïcs avec leurs divers ministères : liturgie, catéchèse, action caritative auprès des malades, des pauvres, les mouvements d’évangélisation... Tous, par leur baptême, leur confirmation, sont des appelés. Chacun a sa vocation unique et irremplaçable.
A la suite de St Paul, prenons une comparaison et pensons à cathédrale de notre diocèse où les chrétiens aiment se rassembler dans les grandes circonstances : tous ne peuvent être l'autel, ni la croix, ni la voûte, ni les vitraux, ni les fondations ! Mais chacun, à sa place, est une pierre vivante.
Et l’une des pierres maîtresses, aujourd’hui, c’est la famille chrétienne, l’“église domestique“. C’est l’appel qui est souvent lancé par notre évêque : s’il y a aujourd’hui des familles chrétiennes, demain, il y aura des prêtres au service du Peuple de Dieu !

Finalement, une seule question importe : Est-ce que dans l'Eglise et dans le monde qui nous attend, je viens pour servir ? Pour m'offrir ? Pour aimer ?

Chacun est sollicitée par cette question : Brebis appelée par l'unique Berger, suis-je devenu moi-même berger pour mes frères ou loup redoutable, suivant ce vieil adage romain : "L'homme est un loup pour l'homme" ? Jésus, Lui, fut un Bon Berger en se comportant comme l'Agneau livré : "Voici l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde" ! 

vendredi 27 avril 2012

Saul de Tarse !


Pâques 3 - Vendredi   - Saul de Tarse       (Ac 9, 1-20 - Jn 6, 52-59)

On dit souvent que St Luc est, de tous les évangélistes, celui qui se rapproche le plus de l’idée qu’on se fait, à l’époque moderne, de l’historien. De l’historien de qui on peut attendre une reproduction chronologique et topographique aussi fidèle que possible des évènements qu’il rapporte.


Je crois qu’on éviterait beaucoup de faux problèmes si on lisait plus attentivement le prologue de son évangile où il expose ses intentions.
Après m’être informé exactement de tout depuis les origines, j’ai décidé d’en écrire pour toi l’exposé suivi, pour que tu te rendes bien compte de la sûreté des enseignements que tu as reçus, excellent Théophile“. (Lc 1,3-4). 

Le but de St Luc est, tout en respectant l’exactitude des informations qu’il a collectionnées, d’en faire un exposé suivi. Et cet exposé suivi, il le fait avec le talent du médecin et de l’artiste qu’il est, préoccupé avant tout de dégager les lignes de forces d’un développement, en l’occurrence ici des origines du christianisme.  Ainsi :
- De Jérusalem, l’Evangile se propage aux alentours, à la suite de la dispersion provoquée par la prédication d’Etienne.
- Au chapitre 8, il note simplement la présence de Saul qui gardait les manteaux de ceux qui lapidaient Etienne et l ‘acharnement qu’il met à étouffer la prédication !
- Mais, il lui paraît encore prématuré de concentrer l’attention de son lecteur sur celui qui va jouer le rôle principal dans l’expansion universelle de la Bonne Nouvelle. Il juge opportun d’ouvrir une parenthèse sur la propagation de l’Evangile par le diacre Philippe, aux environs immédiats de Jérusalem, comme nous l’avons vu les jours précédents, en Samarie et sur la route de Gaza.
- Cette parenthèse se ferme aujourd’hui et l’attention se concentre sur Paul de Tarse, sur sa conversion sur la route de Damas.

Cet évènement capital dans l’histoire de l’Eglise est relaté trois fois par St Luc. Il en reparle au chapitre 22ème et au chapitre 26ème. Il y a grand intérêt, bien sûr, à confronter ces rédactions entre elles ! Concordantes pour le fond, elles nous montrent aussi des divergences de détail qui s’expliquent par la  différence des genres littéraires : les deux autres relations font partie du discours de Paul lui-même. Et il reste encore à les confronter avec ce que St Paul dit dans l’épître aux Galates.

Laissons aux spécialistes le soin de faire de l’histoire scientifique au sens moderne du mot, et consacrons plutôt notre temps à admirer le talent avec lequel St Luc, à travers cette complexité, montre la progression de la prédication évangélique telle qu’il l’a perçoit quand il fait son enquête et procède à sa rédaction avec le recul du temps qui lui a permis de dégager les lignes de force et la signification providentielle des évènements.

Aussitôt après avoir raconté la conversion de Saul de Tarses sur la route de Damas, Luc le mettra, lui aussi, entre parenthèse pour rappeler que c’est toujours Pierre qui est le chef de l’Eglise ; et il nous parlera avec un art consommé de cette seconde Pentecôte qui a eu lieu pour les païens à Césarée Maritime avec la conversion du centurion Corneille.

C’est l’art du narrateur qu’on est invité à admirer quand on lit son Evangile et les Actes des Apôtres, bien plus encore que la fidélité qu’il se soucie de garder à l’égard des faits qu’il rapporte.

Cette réflexion est d’ailleurs valable pour toute la Bible où les auteurs inspirés ont pour principal souci de nous rapporter la signification providentielle des évènements qu’ils ont perçue avec le recul du temps, avec l’aide de cet Esprit qui mène vers la Vérité tout entière.
Je pense que cette réflexion est plus actuelle que jamais au regard d’émissions ou d’éditions faites par de soi-disant spécialistes – historiens ou autres - qui ne voient que des contradictions, là où l’harmonie de l’Esprit Saint et de l’inspiration s’est révélée le plus subtilement.
C’est là une clef de lecture que je me permets de vous transmettre, car je la pense importante ! Demandons à St Luc de savoir discerner et dans les Ecritures et dans les événements de notre vie tout à la fois, la présence du Christ ressuscité !

C’est ce que nous sommes invités à faire avec la lecture d’aujourd’hui ! Car, avec Luc, retenons surtout que Paul de Tarses a véritablement rencontré la personne du Christ ressuscité. Voilà ce que Luc veut nous dire. C’est de la réalité de cette rencontre que l’apôtre tirera l’assurance et la force pour propager la “Bonne Nouvelle“ à toutes les nations !

Aussi, retenons pour notre méditation quotidienne, si vous le voulez bien, cette interrogation : Saul, pourquoi Me persécutes-tu ?
 
Pour retrouver les principaux textes, voir Blog : http://mgsol.blogspot.com/

mercredi 25 avril 2012

Le diacre Philippe !


Pâques 3 Mercredi –                     (Ac 8, 1b-8 - Jn 6, 35-40)

Le jour même de la lapidation d’Etienne, une violente persécution se déclenche contre l’Eglise de Jérusalem. Persécution dont Saul de Tarses se montre un des participants les plus actifs et les plus violents.

Cette première persécution a pour effet de disperser les chrétiens et, par le fait même, de propager la “Bonne Nouvelle“, cet Evangile qu’il est impossible de ne pas partager !

Les premiers bénéficiaires de cette évangélisation hors de Jérusalem sont - on peut s’en étonner - les Samaritains dont la réputation était si mauvaise à l’époque qu’on évitait de traverser leur région quand on voyageait de Judée en Galilée. C’est tout à fait dans la logique de Jésus qui scandalisait ses contemporains en luttant contre les préjugés qu’ils entretenaient avec ces Samaritains. Rappelons-nous la parabole du bon Samaritain, l’entretien avec la Samaritaine au puits de Jacob, l’épisode des dix lépreux qu’il guérit et dont le seul à manifester de la reconnaissance est, comme par hasard, un Samaritain.

L’évangélisation de la Samarie est donc attribuée au diacre Philippe, qu’il ne faut pas confondre, bien sûr, avec l’apôtre Philippe.

Philippe est comme Etienne, l’un des sept diacres. Comme Etienne, il ne se contente pas de décharger les Apôtres du service des tables pour que ceux-ci puissent mieux se consacrer à la prière et au service de la Parole ; Comme Etienne, il a “la langue bien pendue“ et ne se prive pas de prêcher l’Evangile. Vous le rencontrerez demain sur la route de Gaza, alors qu’il baptise l’eunuque de la reine Candace, après une belle catéchèse baptismale.

Si vous poursuivez la lecture de notre texte d’aujourd’hui, vous verrez que Philippe doit lutter, parmi les déséquilibrés - ou possédés - auxquels il a affaire, contre un certain Simon, “Simon le Magicien“.

Cet homme voit son prestige - et en même temps son chiffre d’affaire - baisser à cause  de Philippe qui provoque dans la foule, par sa prédication et ses guérisons, des merveilles qui impressionnent les foules beaucoup mieux que lui-même ne réussissait à le faire par ses sortilèges. Beaucoup de conversions se manifestent ; et Philippe baptise un grand nombre de personnes !

Alors, Simon lui-même se laisse convaincre et se fait baptiser. Les Apôtres viennent de Jérusalem confirmer le travail d’évangélisation de Philippe. Le texte dit qu’ils descendirent de Jérusalem. On ne peut que descendre de Jérusalem même quand la route monte pour la quitter. A remarquer : seuls les Apôtres, en imposant les mains, donne l’Esprit-Saint à ceux qui ont accueilli la “Bonne Nouvelle“ apportée par Philippe et les premiers Evangélistes.

Simon est alors dans une grande admiration en voyant les Apôtres faire plus encore que Philippe. Mais son vrai personnage se dévoile. C’est un homme vénal et, en toute candeur, il propose de l’argent aux Apôtres afin de posséder, lui aussi et comme eux, le pouvoir de conférer l’Esprit Saint. « Donnez-moi ce pouvoir à moi aussi : que celui à qui j’imposerai les mains reçoive l’Esprit Saint ». Cela provoque chez Pierre une indignation qui s’exprime avec une éloquence peu commune : « Pierre lui répliqua : "Périsse ton argent, et toi avec lui, pour avoir cru que tu pouvais acheter, avec ton argent, le don de Dieu ! …. » (Ac 8,20-24). 

Je ne sais ce qu’est devenu ce “Simon le Magicien“ ! Mais on peut dire que son mauvais esprit s’est longtemps maintenu : un des péchés dont l’Eglise a eu (et a toujours) le plus de mal à combattre tout au long des siècles est le péché de simonisme. Il consiste à vendre contre argent comptant, les pouvoirs reçus gratuitement. Jésus avait pourtant dit clairement : «vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement». Le simonisme est un des péchés qui se déguise le plus facilement et qui donne, aujourd’hui encore, beaucoup d’urticaire à la conscience de beaucoup.

Et chacun de nous doit se rappeler : Dieu nous donne gratuitement ; donnons, nous aussi, gratuitement ce que nous avons reçu ! A l’exemple du Christ qui nous a tout donné, jusqu’à sa vie… Mais Dieu l’a ressuscité pour que nous vivions de sa vie divine !

 Il sera dit par la suite que Philippe, le diacre habitait Césarée Maritime. Se rendant  à Jérusalem, St Paul profitera de son hospitalité : « Nous nous rendîmes de Tyr… à Césarée. Descendus chez Philippe…, nous demeurâmes chez lui. Il avait quatre filles vierges qui prophétisaient. »   (Ac 21,7-9).

Quatre filles prophétesses !!! Bigre ! Je me dis (malicieusement) que ça ne devait pas être drôle tous les jours ! Aussi, on trouve Philippe beaucoup plus sur les chemins que dans son foyer familial. Peut-être se distrayait-il de l’ambiance familiale en prenant souvent la route ! En tous les cas, il inaugure ainsi  l’apostolat en auto-stop ! Il devrait être le patron des auto-stoppeurs !  

mardi 24 avril 2012

“Le vrai Pain !“


Pâques 3 - Mardi   -       (Jn 6)


Une simple réflexion aujourd’hui !

L’Evangile, comme celui d’hier,  nous invite à entrer dans la compréhension de ce que Jésus appelle “Le pain“, d’après St Jean : “Je suis le Pain de vie !“.

Lors de la première tentation, Jésus avait répondu à Satan : “L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de ce qui sort de la bouche de Dieu“.

Pour bien comprendre cette expression : “ce qui sort de la bouche de Dieu“, il faut se reporter à ce qui est dit dans le livre des Nombres :
“Le jour où l'on avait dressé la Demeure, la Nuée avait couvert la Demeure…  Lorsque la Nuée s'élevait au-dessus de la Tente, alors les Israélites levaient le camp ; au lieu où la Nuée s'arrêtait, là campaient les Israélites. Les Israélites partaient sur l'ordre de Dieu et sur l’ordre de Dieu ils campaient… S’il arrivait que la Nuée restât peu de jours sur la Demeure,  alors ils campaient sur l'ordre de Dieu et partaient sur l'ordre de Dieu“.  … Ainsi, “sur l'ordre de Dieu ils campaient,  et sur l'ordre de Dieu ils partaient… “. (Nb 9,15-23).

“Sur l’ordre de Dieu“ se dit en hébreu : “Al pi Adonaï“ : “sur la bouche de Dieu !“. C’est l’expression de Notre Seigneur : il faut toujours agir, vivre selon ce qui “sort de la bouche de Dieu“ ! Voilà le pain qui nous fait vivre spirituellement !

Aussi, en Samarie, quand les apôtres reviennent le retrouver au bord du puits de Jacob, en rapportant des provisions, et l’invitent à manger, Jésus dit : “J’ai une nourriture (un pain) que vous ne connaissez pas, c’est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé“. “Le pain“ pour Jésus, c’est d’agir, vivre selon “ce qui sort de la bouche de Dieu“ - “Al pi Adonaï“ -. “Le Pain“ c’est d’abord la Volonté de Dieu telle qu’elle se manifeste au long de l’existence.

Oui, le véritable “Pain“ pour Jésus, c’est de faire la volonté de Dieu dont il faut se nourrir jour après jour en la déchiffrant dans les évènements d’où la Providence n’est jamais absente.

Mais ce qu’il y a de nouveau, dans le texte d’aujourd’hui, c’est l’identification de ce “Pain“ que fait Jésus avec lui-même : “Moi, je suis le Pain de vie“ !
La lettre aux Hébreux traduira :  “Tu n'as agréé ni holocaustes ni sacrifices pour les péchés. Alors j'ai dit : Voici, je viens, car c'est de moi qu'il est question dans le rouleau du livre, pour faire, ô Dieu, ta volonté“.    (He 10,6-7)

“Moi, je suis le Pain de vie !“. Remarquons bien d'abord cette expression : “Je suis“ : (“Ego eimi !“ !, en grec). “Je suis !“. C’est par ces mots que Dieu se révélait à Moïse !

Ainsi toutes les réalités de l’Ancien Testament viennent se ramasser, si je puis dire, en la personne du Verbe Incarné pour y trouver une plénitude de signification avant d’aller se répercuter dans le monde entier, dans le cœur de tous les croyants.
Jésus n’a pas seulement fait des discours sur la volonté de Dieu. Il l’a traduit par tout son comportement de Verbe incarné. Et il nous donne la possibilité non pas seulement de l’imiter comme on imite un héros que l’on admire ; mais il vient vivre cette vérité mystérieusement en chacun de nous. “Je suis !“ - “Je suis avec vous !“, alors même que nous serions dans l’épreuve : “Je complète encore dans ma chair (= en tout mon être),disait St Paul, ce qui manque aux épreuves du Christ“ qui n’est venu ici-bas que pour faire la volonté du Père, lui qui est “Verbe de Dieu“, “al pi Adonaï“, “Bouche de Dieu !“.

Faire la volonté du Père, c’est donc la   vocation, l’épanouissement de tout notre être, créé “à l’image et ressemblance de Dieu“ ! - “Celui qui vient à moi n’aura plus jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura plus jamais soif“ – “Je suis le Pain de vie !“

Avec le Christ, “Verbe de Dieu, - et principalement lors de toute Eucharistie -, je deviens, moi aussi, “Pain de vie“, je deviens “al pi Adonaï“, “ce qui sort de la bouche de Dieu“, comme au moment de ma création tel que Dieu m'a voulu "à son image et ressemblance", comme au moment de la Pâques du Seigneur qui n’est rien moins qu’une re-création éternelle et permanente !

lundi 23 avril 2012


Pâques 3 - Lundi   - Le vrai Temple de Dieu !   (Ac 6, 8-15)


La lecture d’aujourd’hui et celle de demain centrent notre attention sur le premier des diacres, St Etienne. Et à propos de leur institution, nous avons déjà vu  qu’une division s’était infiltrée à l’intérieur de l’Eglise primitive.

Il y a d’une part les « Hellénistes » : des juifs qui avaient vécu hors de Palestine et disposaient à Jérusalem de synagogues particulières où la Bible se lisait en grec. Avec la langue grecque, ils adoptaient assez naturellement certaines manières de penser et de vivre que réprouvaient les juifs autochtones, les « Hébreux » qui parlaient l’araméen, mais avaient cependant maintenu dans leurs synagogues l’usage de lire la Bible en hébreu.

L’initiative des missions partira du premier groupe, les « Hellénistes » dont font parti les diacres qui portent tous des noms grecs, sauf un seul, Nicolas. Il n’est pas Juif de naissance, non plus ! C’est un prosélyte, un ces païens complètement convertis au judaïsme, qui avaient accepté la circoncision, et étaient devenus ainsi membres du peuple élu. Ils se distinguent en cela d’une troisième catégorie de gens qu’on appelle les « Craignant Dieu » qui sympathisent avec le judaïsme, fréquentent leurs synagogues, mais ne vont pas jusqu’à la circoncision et la pratique rituelle de la Loi.

Il est important de bien situer ces trois catégories de gens pour bien suivre les péripéties de l’éclosion universelle du peuple de Dieu.

Avec Etienne, on est au point de départ de cette éclosion universaliste. La discussion à laquelle nous assistons aujourd’hui se place à la synagogue des « Affranchis ». On pense que ces dits « Affranchis » sont des descendants de juifs emmenés à Rome par Pompée en 63 av. J.C. et vendus comme esclaves ; beaucoup furent affranchis. Ils constituaient à Rome une colonie prospère et influente. Rien d’étonnant qu’ils aient eu leur synagogue à Jérusalem.

Etienne fut donc lapidé “hors de la ville“ ! Les Grecs vénèrent le lieu du martyre du côté de Gethsémani, près du pont qui traverse le Cédron. Les Latins ont repris une tradition byzantine qui situe l’évènement au nord de la porte de Damas, là où le P. Lagrange a fondé l’“Ecole biblique“ sur les ruines d’une basilique que construisit l’impératrice Eudoxie (début 5ème s.).

La “dispute“ qui aboutit à la lapidation d’Etienne se fait donc à la “synagogue des Affranchis“, dans le milieu hélléniste. Saul de Tarse devait déjà s’y trouver, lui qui gardera les vêtements de ceux qui lapidèrent le protomartyre. Il doit peut-être sa vocation, en partie, au sacrifice d’Etienne, s’il est vrai que “le sang des martyrs est une semence de chrétiens“ (Tertullien).

Dans la synagogue, la discussion se transforme en émeute. Etienne, accusé de blasphème, est traîné devant le Grand Conseil où commence un procès avec des accusations très semblables à celles qui furent portées contre Jésus, au sujet du Temple et de la Loi. On produisit, est-il dit, “ de faux témoins qui déclarèrent : "Cet individu ne cesse pas de tenir des propos contre ce saint Lieu. Nous l'avons entendu dire que Jésus, ce Nazôréen, détruira ce Lieu-ci…

C’est l'attaque la plus violente contre le temple ! Voici le thème qu'Etienne aurait développé : le temple n'a plus de raison d'être.  A la mort de Jésus, le voile du temple s’étant déchiré, la victime a été offerte une fois pour toutes et pour toute l'humanité. Les sacrifices du temple sont désormais caducs et inutiles ! Voilà ce que dit Etienne, selon les témoins.

On nous dit que ce sont de faux témoins ! Sans doute ! Mais ce qui est frappant, c'est de voir que dans le plaidoyer d'Etienne lui-même (dans la suite du texte), ce thème revient. Autrement dit, les faux témoins avaient sûrement durci l’accusation, mais pas fondamentalement déformé la pensée d'Etienne. “Le Très-Haut n'habite pas des demeures faites de main d'homme, dira-t-il, Comme le dit le prophète : « Le ciel est mon trône et la terre l'escabeau de mes pieds : quelle maison me bâtirez-vous, dit le Seigneur, et quel sera le lieu de mon repos ? »” (Act. 7:48) 

Le temple de Jérusalem n’a plus de valeur ! Voilà l’affirmation qui condamne Etienne ! Mais sous sa pensée et celle des premiers chrétiens, on retrouve, là, cette vieille tradition, aux multiples facettes, qui revient, s’accentue et s’approfondit :
- L’homme ne peut pas “loger” Dieu ! Les prophètes l’avaient déjà affirmé face aux dérives de l’institution du temple !
- Cependant, Dieu peut très bien chercher un “lieu pour y faire habiter son Nom”. Les prophètes eux-mêmes le reconnaissaient, tout en refusant certaines dérives de cette localisation du Nom de Dieu : bénéfices commerciaux, considération exagérée d’une caste … etc…
- Par contre, que Dieu, de sa propre initiative, vienne “habiter”, “voisiner” avec les hommes, c’était, là, une perspective un peu nouvelle !

Certes, dans le désert, il y avait la “Demeure” de Dieu, la “shékhinah”. La racine de ce mot signifiant “le voisin”, c’était déjà reconnaître le “divin voisinage” : Dieu qui se faisait mitoyen de l’homme en établissant sa “Demeure” à l’intérieur de la Cité, si l’on peut dire. C’était la Gloire divine “domestiquée” - la “Maison” de Dieu étant au milieu des maisons des hommes (comme dans un monastère) ! - Mais une Gloire “domestiquée” non par l’homme, comme s’il pouvait être le “dompteur” de la Gloire divine.  Cette “inversion sacrilège” serait la pire de toutes ! Mais que la Gloire divine elle-même accepte de s’approcher de l’homme, de voisiner avec l’homme, cette pensée devenait non seulement concevable, mais évidente de plus en plus. C’était, en quelque sorte, amplifier l’affirmation du livre des Proverbe qui fait dire à la “Parole de Dieu”, à la “Sagesse de Dieu” : “J’ai trouvé mes délices à être avec les enfants des hommes !” (Pr. 8.31)

Ce thème-là devient très chrétien, sera post-chrétien. Il était  pré-chrétien, en ce sens qu’il était déjà profondément inscrit dans la foi juive et dans l’Ecriture ! Il sous-tend déjà un texte comme celui de S. Jean : "Et le Verbe s'est fait chair ; il a demeuré parmi nous" ! Et sous le verbe grec “demeurer“, on peut deviner le terme hébreu : il a établi sa "shekhinah" parmi nous.

Mais il n’en reste pas moins vrai que “le Très-Haut n’habite pas des demeures faites de mains d’homme”, comme le disait Etienne !

C’était, probablement, un fougueux, cet Etienne, très, trop fougueux même ! Avec plus d’habileté, il aurait pu, peut-être, faire comprendre que le temple était au fond un archétype, un idéal, un pressentiment du dessein de Dieu de venir habiter parmi les hommes. Et les sacrifices offerts dans ce temple n’étaient que des présages, des signes annonciateurs du sacrifice pascal du Christ.

Sans doute, n’aurait-il pas eu plus de succès ! Car ces présages, ces pressentiments avaient été trop institutionnalisés ! Et c’est souvent le drame ! Car l’institutionnalisation de la “Demeure de Dieu” n’est pas la “Demeure authentique” dont Dieu a l’initiative. L’institutionnalisation du “sacrifice” n’est pas le “Sacrifice authentique” dont Dieu seul a l’initiative. Le drame fut de transformer les promesses en institutions. Ce fut le danger dans l’Ancien Testament ; les prophètes en sont les témoins !

Mais ne nous moquons pas ! Ce danger est toujours actuel. Certes, pour nous, chrétiens, il ne s’agit plus de promesses, mais de germes du grand dessein d’Amour de Dieu pour l’homme. Ces germes du “salut éternel” pour l’homme nous sont bien donnés, par les sacrements, notamment ! Deo gratias ! Mais le danger, c’est de transformer ces germes en musées de semences. C’est grave parce que les germes ne sont pas faits pour être mis dans un musée ; et les semences ne sont pas faites pour être présentées sous globe de verre. Et affirmer cela risque parfois, plus ou moins, de conduire au même destin que celui d’Etienne !

Finalement, Etienne est un personnage rayonnant qui nous invite à un “culte en esprit et vérité“ en attendant d’entrer définitivement “dans la ville qui a pour architecte et constructeur Dieu lui-même“ ! (Heb. 11.10)

dimanche 22 avril 2012

"Intelligence des Ecritures !"


3ème dimanche de Pâques 12 –  

Il est des nouvelles stupéfiantes qui paraissent incroyables ! Ce fut le cas pour celle que les disciples d'Emmaüs racontèrent aux Apôtres en revenant à Jérusalem : ils avaient vu le Seigneur, ils l'avaient reconnu à la fraction du pain ! Mais comment croire vraiment à la résurrection ? Les Apôtres, dit St Luc, “restaient saisis d'étonnement” (Luc 24.41). Pourtant n'étaient-ils pas instruits par l'enseignement des Prophètes ? Mais comme il est difficile de s'ouvrir à la nouveauté ! Comme il est difficile de ne pas vivre sur son acquis, prisonnier des habitudes de pensées et de traditions !

“Alors Jésus leur ouvrit l'esprit à l'intelligence des Ecritures”. Les Ecritures, les Apôtres croyaient les connaître. La loi de Moïse leur était familière. Ils priaient avec les psaumes et méditaient l'enseignement et l'espérance des prophètes. Comme tous les fidèles Israélites, ils attendaient le Messie, décidés à lui obéir généreusement. Mais avaient-ils vraiment compris le mystère d'amour caché au cœur de Dieu ? Avaient-ils vraiment l'intelligence des Ecritures, paroles de Dieu ?  

Toute sa vie, Jésus avait pourtant ouvert l'esprit de ceux au milieu de qui il vivait. Sans cesse il dépassait les limites dans lesquelles, au nom d'une étroite interprétation des Ecritures, on voulait l’enfermer.

Cela commence très tôt. Agé de douze ans, Jésus se rend en pèlerinage à Jérusalem. Il s'attarde dans le Temple, écoute les Docteurs de la Loi, les interroge et oublie l'heure du retour. Marie et Joseph ne le retrouveront qu'au bout de trois jours. “Mon enfant pourquoi as-tu agi ainsi ? Il leur dit : Pourquoi me cherchiez-vous ? Ne savez-vous pas qu'il me faut être chez mon Père ?” Certes les parents savaient le mystère de la naissance de l'enfant déjà annoncée dans les Ecritures. Mais ils ne comprirent pas parfaitement tant il y a loin entre la connaissance théorique et la véritable “intelligence des Ecritures” !

Un jour on lui dit : “ta mère et tes frères se tiennent dehors, ils veulent te voir”. Et Jésus répondra : “ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la mettent en pratique” (Mth 12.47sv). Certes, comme toutes les mamans, Marie savait que son fils n'était pas destiné à rester auprès d'elle à Nazareth. Mais avait-elle bien toute “l'intelligence” des paroles de son fils ? Cependant elle retenait “tous ces événements en son cœur, et les méditait“, dit St Luc par deux fois (2.19,51). Mais, comme il est noté dans l’épisode précédent : ses parents “ne comprirent pas la parole qu’il venait de leur dire”. (Lc 2.50)

Les Pharisiens avaient une connaissance parfaite des prescriptions de la Loi de Moïse. Ainsi, comme les Apôtres arrachaient des épis un jour de sabbat, ils protestent : “Regarde ce qu'ils font le jour du sabbat ! Ce n'est pas permis”. Et Jésus de répondre : “Le sabbat a été fait pour l'homme et non l'homme pour le sabbat, de sorte que le Fils de l'homme est maître même du sabbat”. N'était-ce pas situer la prescription de Moïse dans un éclairage tout nouveau ? (Luc : 6,1-5).

De même Pierre. Il a pourtant entendu les prédications de Jésus ; et il était de ceux qui étaient “frappés de son enseignement car il enseignait en homme qui a autorité” (Mc 1,22). Et pourtant, lorsque, près de Césarée de Philippe, Jésus demande à ses Apôtres : “Et vous qui dites-vous que je suis ?” Pierre répond : “Tu es le Messie”. Pourtant, Pierre n'a encore rien compris au mystère du Messie. Il connaît bien la prophétie d'Isaïe qui annonce le “Serviteur souffrant”. Mais lorsque Jésus annonce qu'il “fallait que le Fils de l'homme souffre beaucoup, qu'il soit rejeté et mis à mort”, Pierre, nous dit l’Evangéliste Marc, “le tirant à part, se mit à le réprimander”. (Mc, 8,32). Pierre n'avait pas encore “l’intelligence des Ecritures”.

 Il faudra encore beaucoup de temps à Pierre pour comprendre que Jésus, le Messie, doit passer par la mort, et la mort de la Croix, avant de connaître la gloire de la Résurrection.
Il lui faudra du temps également pour prendre la mesure du commandement du Seigneur : “Allez par le monde entier, proclamez l'évangile à TOUTES les créatures....” (Marc : 16,15-16). Car, lui, le Juif fidèle, répugne à nouer des relations avec des païens. Or c'est un païen, le centurion Corneille, qui lui demande de venir chez lui à Césarée. Inspiré par Dieu, Pierre s'y rend : “Comme vous le savez, ce n’est pas bien pour un Juif d'avoir contact avec un étranger. Mais Dieu vient de me faire comprendre qu'il ne fallait déclarer impur aucun homme” (Ac. 10.28). A partir de ce moment les Apôtres commenceront à avoir une meilleure intelligence du commandement du Seigneur : “Je t'ai établi lumière des nations pour que tu apportes le salut aux extrémités de la terre” (Ac. 13,47).

Tous ces passages de l'Evangile et des Actes des Apôtres doivent nous remplir d'humilité. Seul le Seigneur peut nous “ouvrir l'esprit à l'intelligence des Ecritures”. Nous entendons chaque dimanche, voire chaque jour, les lectures bibliques que l'Eglise propose à notre méditation. Nous savons par cœur bien des passages de l'Evangile. Les prêtres, religieux prient avec le psautier…  Fort bien ! Cependant sommes-nous entrés dans le mystère que ces textes nous révèlent ? Avons-nous vraiment l’esprit ouvert à  l’intelligence des Ecritures ?

 St Jean, dans sa première lettre, nous donne un moyen de répondre. “Celui qui dit : ‘je le connais’ en parlant de Jésus, et qui ne garde pas ses commandements est un menteur. La vérité n'est pas en lui” (I Jn 2.4). Avoir “l'intelligence des Ecritures”, ne serait-ce pas d’abord accepter de se laisser interpeller par elles, accepter qu'elles remettent en cause notre manière de vivre ? Peut-on “avoir l'intelligence des Ecritures” sans accepter la conversion à laquelle elles nous invitent, pour, sans cesse, accueillir le Christ “Verbe de Dieu“ ?

Car il faut bien comprendre et l’admettre : les Ecritures ne sont pas un recueil de lois et de décrets, ni un traité de philosophie morale. Elles sont d’abord un recueil de témoignages. Au cours des siècles, Dieu a parlé par les prophètes, puis il s'est manifesté en son Fils Jésus. Avec Pierre, les Apôtres ont proclamé : “Lui, le Chef des vivants, vous l'avez tué ; mais Dieu l'a ressuscité d'entre les morts, nous en sommes témoins” (Cf. Ac. 10.39sv).

“Avoir l'intelligence des Ecritures”, c'est rencontrer le Christ vivant grâce à la parole de ceux qui ont été et sont ses témoins, qui ont eu l’expérience de sa présence désormais permanente, et qui nous disent : “convertissez-vous et revenez à Dieu” (Ac. 3.19). C'est accepter de nous laisser transformer intérieurement par l'Esprit de Jésus qui perce la carapace de notre orgueilleuse suffisance et les résistances de notre égoïsme. Sinon, on ne peut comprendre les Ecritures. Avoir l’esprit ouvert à l’intelligence des Ecritures, c’est, finalement, rien moins que d’être ouvert à l’irruption du Christ toujours vivant en notre vie ! De sorte que l’on puisse dire : “Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi“ (Gal. 2.20). Et c’est lui seul qui me conduit au Père : “Personne ne va vers le Père si ce n’est par moi“, disait Jésus (Jn 14.6). [“Laissez-moi aller vers le Père“, demandait Jean-Paul II, juste avant sa mort !] Et, chose remarquable :  “si nous sommes en communion avec le Père, nous sommes en communion les uns avec les autres“ (Cf. 1 Jn 1.3). Autrement dit, ouvrir son esprit à l’intelligence des Ecritures, c’est , en même temps“, s’ouvrir aux autres, fils d’un même Père du ciel !

Ainsi, “avoir l’intelligence des Ecritures“ n’est certes pas recevoir un éclairage intellectuel, si spirituel fusse-t-il, c’est recevoir la Lumière de Dieu-Père qui “a envoyé son Fils comme Sauveur du monde“ (I Jn 4.14), car “le Verbe est la vraie lumière qui, en venant dans le monde, illumine tout homme“ (Jn 1.9) !


Un jour de Noël, le poète Paul Claudel, alors incroyant, entra à Notre-Dame de Paris. Il eut soudain une illumination : “J'eus tout à coup, racontera-t-il plus tard, le sentiment déchirant de l'innocence, de l'éternelle enfance de Dieu. Voici, mon Dieu, que vous êtes devenu QUELQU'UN”. Et il ne cessera d’inviter à cette innocence qui, sans cesse, nous ajuste à Dieu, grâce à sa Parole !

En ce temps de Pâques, prions les uns pour les autres, afin de nous laisser remettre en cause par le Seigneur ressuscité présent parmi nous, en nous appuyant sur le témoignage des apôtres, en nous livrant au mystère de sa présence qu’est l’Eucharistie que nous allons célébrer. Alors nous ressentirons vivement la justesse de cette annonce : “Jésus leur ouvrit l'esprit à l'intelligence des Ecritures”


P.S.  Un incident technique m'a empêché de communiquer les commentaires de Vendredi et Samedis derniers. Vous les trouverez transcris aujourd'hui seulement !

Ouverture ! !


Pâques 2 Samedi       (Ac 6,1-7 -Jn 6,16-21)

                La mer, dans la Bible, évoque toujours le chaos primitif où Dieu a fait régner l’ordre et l’harmonie en dix paroles et en sept  jours, déployant  sur le cosmos tout entier les énergies victorieuses dont il fera sans cesse preuve par les délivrances opérées dans l’histoire au bénéfice du peuple élu.

Le peuple hébreu n’est  pas un peuple de marins - loin de là ! - comme ses voisins phéniciens. Il n’y a pas de ports naturels au sud du Carmel. (Césarée-Maritime a été construit bien plus tard, par Hérode le Grand). Du haut des collines, ils contemplent une côte sablonneuse et rectiligne et s’étonnent que Dieu réussisse à contenir ce reste de chaos primitif, cette puissance maritime par une simple ligne de sable.
Moi, dit Dieu par le prophète Jérémie (Jr 5,22), ne me craindrez-vous pas ? Ne tremblerez-vous pas devant moi qui ai posé le sable pour limite à la mer, barrière éternelle qu'elle ne franchira point. Ses flots s'agitent, mais sont impuissants ;  ils mugissent, mais ne la franchissent pas !“

                Je crois que c’est en évoquant ce contexte biblique, qu’on rejoint le mieux la manière dont St Jean rapporte, dans l’Evangile, la marche de Notre Seigneur sur les eaux. Jésus, comme Dieu, domine le vent et les flots, et calme la tempête comme le Créateur aux origines a mis de l’ordre dans le chaos primitif. Il se révèle, là, comme le maître de la création. Si ses disciples se confient à lui sans crainte, rien ne pourra leur nuire.
                Il y a beaucoup de tempêtes, parfois, dans nos vies ! Au milieu des diverses agressions - même d’ordre spirituel - sachons reconnaître la venue du Seigneur : il vient, comme Dieu au matin de la création, pour nous tirer du chaos et nous re-créer sans cesse “à son image et ressemblance“ !


                La lecture nous montre que l’unité des cœurs, l’harmonie qui régnaient dans la communauté primitive de Jérusalem, n’a pas tardé à être troublée par des dissensions. St Luc ne les dissimule pas. Ces dissensions semblent être, au sein des croyants d’origine juive, entre ceux qui parlent grec et ceux qui pratiquent la langue hébraïque. Parmi les diacres que l’on ordonne pour remédier à la situation, un seul,  que Luc nomme, est païen, originaire d’Antioche, converti au judaïsme : Nicolas. Il apparaît comme une exception. Il n’y a pas encore de séparation entre les disciples de Jésus et le judaïsme de l’époque.

Mais St Luc, par ce récit, nous fait déjà soupçonner que les chrétiens de langue hébraïque ne vont pas jouer le rôle principal dans l’expansion universaliste qu’il va raconter dans la suite du livre des Actes. En bon écrivain, St Luc annonce que cette expansion fut d’abord comprise et pratiquée par les Juifs convertis qui parlaient grec. Il veut souligner dans ce texte l’importance qu’a joué le judaïsme alexandrin dans l’éclosion qui va se produire, celle du peuple élu, aux dimensions universelles, comme l’avaient prédit les prophètes.
Et maintenant le Seigneur a parlé, lui qui m'a modelé dès le sein de ma mère pour être son serviteur, pour ramener vers lui Jacob, et qu'Israël lui soit réuni ; …Il a dit : « C'est trop peu que tu sois pour moi un serviteur pour relever les tribus de Jacob et ramener les survivants d'Israël.  Je fais de toi la lumière des nations pour que mon salut atteigne aux extrémités de la terre »“  (Is 49,5-6).

                Si précieuse que soit la Massore, le texte hébreu, minutieusement ponctué par les scribes de Tibériade au 9ème siècle après J.C., il ne faut pas pour autant négliger la tradition grecque des Septante qui fut fondée à Alexandrie, deux siècles avant la naissance du christianisme. Elle peut renfermer des textes plus proches des originaux et dont certaines modifications dénotent un progrès théologique vers la plénitude des temps et en particulier vers cette expansion universaliste que chante le vieillard Siméon dans le temple en recevant l’Enfant Jésus dans ses bras.
“ Lumière pour éclairer les nations et gloire d’Israël ton peuple“ !

                La lecture d’aujourd’hui ne nous parle que d’un accroissement du nombre des croyants à Jérusalem même.
“La parole du Seigneur gagnait du terrain, le nombre des disciples augmentait fortement à Jérusalem“ !
                Ce n’est qu’un début, en attendant la suite, si je puis dire !
                Et ce n’est jamais fini ! Prions à cette intention : le salut de Dieu pour tout homme, pour le monde entier. Ce doit être une préoccupation constante de notre prière.


                St Luc note encore qu’une grande foule de prêtres accueillaient la foi. Bien des commentateurs de la lettre aux hébreux, pensent que cette lettre avait précisément comme premiers destinataires ces prêtres convertis et que l’auteur, s’il est fortement imprégné des pensées de St Paul, serait plutôt un juif d’Alexandrie, peut-être cet Apollos dont il est parlé plus loin dans le livre des Actes des Apôtres.
“Un Juif nommé Apollos, originaire d'Alexandrie, était arrivé à Éphèse.  C'était un homme éloquent, versé dans les Écritures.  Il avait été instruit de la Voie du Seigneur, et, dans la ferveur de son âme, il prêchait et enseignait avec exactitude ce qui concerne Jésus, bien qu'il connût le baptême de Jean seulement. Il se mit donc à parler avec assurance dans la synagogue.  Priscille et Aquilas, qui l'avaient entendu, le prirent avec eux et lui exposèrent plus exactement la Voie“. (Ac 18,24-26)

                Retenons peut-être pour aujourd’hui que, malgré les chaos de notre temps, les tempêtes de nos vies, le Seigneur mène la barque de son Eglise vers une expansion qui ne sera rien moins qu’une re-création :  le “Royaume de Dieu“.

"A la fraction du pain" !


Pâques 2 - Vendredi   -         (Jn 6.1sv)

Cela s'est passé sur la montagne, de l'autre côté de la mer de Galilée, entre deux traversées. D’abord la mer, puis la montagne ! Montagne et mer, un décor bien connu dans la Bible !

Et sur la montagne il y avait de l'herbe car “la Pâque était proche“. La Pâque ! C'est l'évocation de la première Pâque avec Moïse. Traversée de la Mer Rouge. Alliance avec Dieu sur la montagne ! C’est la Pâque ! Toujours une traversée de la mort à la vie !  Toujours une traversée, un exode d’un peuple libéré que Dieu va nourrir de la Loi et de la manne, va nourrir de paroles et de pain.  Et, dans l’évangile, Jésus est là comme un nouveau Moïse qui libère, lui aussi, par sa parole et par son pain.

Et d'un seul coup, ils sont cinq mille. Ils sont la foule, la foule de l’humanité. Cinq mille qui sont là avec leur faim de tout : leur faim de manger et de vivre, leur faim de vérité, leur faim d'espoir, de justice et de paix. Ils sont la foule ! C’était hier et c’est aujourd'hui, encore !

Jésus fait asseoir la foule, car il va donner la nourriture de la Parole de Dieu. Il est venu pour cela, lui, le Verbe de Dieu.

Mais il commence par se préoccuper comme tout un chacun. Aussi demande-t-il  à Philippe : "Où allons-nous acheter du pain pour tout ce monde-là ?". Acheter, toujours acheter et vendre, c'est le monde d'aujourd'hui. Philippe répond ce que tout le monde répond : le salaire de deux cents journées de travail n'y suffirait pas ! ... Et c’est encore la réflexion de beaucoup. Malheureusement ! Comment acheter du pain pour tout le monde ?

Cependant, dans l'Évangile, un enfant est là avec cinq pains et deux poissons. Les jeunes, ce n'est pas seulement l’avenir, c'est aussi le présent. Heureusement, les jeunes sont là !  Souvent rapides, ils devinent quand est-ce qu’il faut être là ! Jésus ne fait pas appel à l'argent, il fait appel aux jeunes, à leur cœur ! Un appel pour tout de suite.

Mais il ne faut pas tout attendre des jeunes ! Ils ne peuvent résoudre tous les problèmes, surtout pas ceux que l'égoïsme des adultes leur laisse parfois en héritage. 
Ainsi, dans l'Évangile, André, le disciple de Jésus, un adulte, est ironique. Il ne fait pas confiance, il est désabusé face à l’enfant : "Qu'est-ce que cinq pains et deux poissons pour nourrir tout ce monde ?". André ne sait pas que les jeunes sont généreux quand ils ne sont pas devenus vieux avant l’âge (ce qui arrive malheureusement !). L'enfant donne tout ce qu'il a : ses pains et ses poissons. Il donne tout ! Avec grand cœur ! C'est avec le cœur de ce jeune que Jésus va nourrir les foules. Il faut s’en rappeler !

Jésus dit : “Faites-les asseoir”. Arrêtez-vous ! Prenez le temps du temps. Prenez le temps de respirer Dieu. Prenez le temps du cœur. Prenez le temps d'aimer. Prenez le temps de la paix.

Alors, c'est l'abondance, et quelle abondance ! C'est l'abondance de Dieu. C'est l'abondance de la justice de Dieu, de Dieu qui, par sa pédagogie toujours délicate et patiente, ajuste tout, ajuste les choses pour l’homme, ajuste l’homme à Dieu, peu à peu. C’est cela la justice de Dieu ! L’injustice vient toujours de l’homme qui refuse.
La justice de Dieu donne et le pain de la terre et le pain du ciel ! Tout le monde, est-il dit, mange enfin à sa faim. Les riches comme les pauvres, chacun selon sa faim. Comme les Hébreux dans le désert : “Rien de trop à qui avait plus et qui avait moins n’avait pas trop peu“ (Ex 16.16)

Et il y aura encore douze corbeilles qui vont êtres remplies avec les pains qui restent. Douze corbeilles, pour que rien ne soit perdu. Ce ne sont pas seulement les restes qu'il ne faut pas laisser perdre. C'est surtout l'humanité de l'homme qu'il ne faut pas perdre. Aucun homme, aucune femme, aucun enfant ne doivent être perdus. Rien de ce qui est humain ne doit être perdu. Ne pas perdre la tendresse de Dieu toujours à l’œuvre en l’homme.
Douze paniers de pain, douze comme les tribus d'Israël. Douze comme les douze apôtres, douze comme le nouveau Peuple de Dieu.

Mais l'Évangile ne dit pas ce que les Apôtres ont fait de ces douze corbeilles de pain. L'Évangile ne le dit pas, parce que c'est à chacun, à nous de répondre. Qu'allons-nous faire de ces douze corbeilles de pain ? Qu'allons-nous faire de la tendresse de Dieu ? De l'abondance de Dieu ? Et encore qu’allons-nous faire de l’abondance de Dieu quand il nous rassemble pour partager son pain ?

St Paul, par exemple, a accueilli cette abondance de Dieu. Il est l’un des premiers grands témoins de la “fraction du pain”, première expression pour désigner l’Eucharistie dont il rapporte l’institution. Fraction, disait-il, et non pas multiplication, terme que St Jean n’emploie pas non plus !

Oui. Il faut rompre le pain pour que chacun en ait. Comme le gâteau de fête que l'on admire entier, mais qui doit être coupé pour que tous goûtent à la même joie qu'il signifie. Dans sa rupture en morceaux, le pain peut se donner à tous en signe efficace d'unité. Car les morceaux de pain nourrissent un même corps, celui du Christ.

La conséquence est claire. St Paul ne cesse de dire : "Supportez-vous les uns les autres avec amour". C’est l’abondance, l’amour de Dieu qui unifie. Portez et aimez vos différences. Ne plus faire qu'un, c'est rester plusieurs. Unité d'un seul Corps composé de plusieurs membres, mais tous vivifiés par un seul Seigneur, le Christ, Dieu parmi les hommes.

L'Eucharistie est pain de vie et d'unité.

Que faisons-nous de l’abondance de Dieu qui nous rassemble, qui doit unir tous les hommes en un seul Corps ? 

mardi 17 avril 2012

Renaissance !

Pâques 2 - Mardi - (Jn 3.1-15)

“Personne, à moins de renaître de l’eau et de l’Esprit, ne peut voir le Règne de Dieu“ !

C’est toute la “pédagogie“ de Dieu à travers l’histoire biblique. Une pédagogie d’un “renouveau“, d’une “Nouvelle Alliance“ qui ne sera pas moins qu’une “nouvelle Création“.

Le Peuple de Dieu (et, à travers lui, toute l’humanité) a souvent fait l’expérience de son infidélité à l’égard de Dieu, infidélité qui le conduisait immanquablement vers un “esclavage“, vers la mort… Du fond de son malheur, il criait vers Dieu… Et Dieu, à cause de son amour toujours fidèle, lui envoyait un Sauveur qui le délivrait, lui redonnait vie !

Cette pédagogie de Dieu s’applique non seulement au peuple de Dieu, mais également à chaque homme qui crie comme David : “Mauvais, je suis né… Crée en moi un cœur pur ; restaure en ma poitrine un esprit nouveau !“. Mais pour cela, il faut d’abord descendre au plus profond de soi-même : “Tu aimes la vérité au fond de l’être !“ (Ps 51.7), cette vérité qui dévoile la misère de notre condition. Et, justement, c’est toujours en cette profondeur, en cette vérité, que Dieu nous attend ! Il faut aller jusqu’en la profondeur de son être pécheur pour rebondir vers le bonheur d’une véritable Alliance avec Dieu !

Ce fut donc l’expérience du Peuple de Dieu bien des fois :

- Il fut invité, par exemple, à regardé le “serpent d’airain“ que Moïse dresse sur un bois, serpent qui était le symbole de sa faute. Et celui qui, contrit, reconnaissait sa faute bien en face si je puis dire,en regrdant le serpentn Dieu le sauvait ! Jésus rappelle cela au cours de son entretien avec Nicodème, lui qui deviendra, à cause de nos fautes, objet de mépris sur le bois de la croix ! C’est en reconnaissant le Christ mort sur la croix à cause de nos fautes que nous sommes sauvés !

- C’est encore l’expérience du peuple dans le désert quand il “cherche querelle“ avec Dieu aux eaux “amères“ de Massa et Mériba. Reconnaissant alors sa faute, Dieu fait jaillir l’eau d’un rocher. (Ex 17 ; Nb. 20). Et St Paul, considérant que cette situation est bien actuelle, s’écrit, faisant fi des lois naturelles : “Ils buvaient à un rocher spirituel qui les suivait ; ce rocher, c’était le Christ !“ (I Cor. 10.4). – Il faut toujours renaître de cette eau qui délivre comme celle de la mer rouge…., celle du Jourdain, celle de la source de Gihon, au temps d’Isaïe…etc.

- Pour le Peuple de Dieu (comme pour chacun d’entre nous) vint un moment où cette pédagogie de Dieu s’accélère au rythme de ses infidélités. Et ce fut pour ce Peuple l’exil à Babylone ; il n’est plus alors qu’”ossements desséchés“. Il se rend compte qu’il lui faut une nouvelle et définitive Alliance avec Dieu pour “renaître“, “ressusciter“. Et Dieu, par son prophète Ezéchiel (36.20sv) lui dit : “Je vous donnerai un cœur nouveau, un esprit nouveau. Je mettrai mon esprit en vous. Vous serez mon peuple et je serai votre Dieu !“ - Et ce Peuple revit “au souffle de Dieu“, par l’Esprit de Dieu ! C’est une nouvelle Création !

C’est à toute cette symphonie d’images qui illustrent la pédagogie salvatrice de Dieu à l’égard de l’homme que Jésus fait allusion devant Nicodème, cette pédagogie divine qu’il aurait dû facilement déchiffrer : “Tu es Maître en Israël ; et tu ignores ces choses !“.

Oui, Nicodème aurait dû savoir que l’homme, comme dira St Paul, est “semé corps animal (’mauvais je suis né’) pour ressusciter corps spirituel (’restaure en moi un esprit nouveau’) ... - “Ce qui est né de la chair, disait Jésus, est chair ; ce qui est né de l’Esprit est Esprit ! Personne, à moins de renaître de l’eau et de l’Esprit ne peut entrer dans le Royaume de Dieu !“.

Il faut reconnaître cet Esprit qui, peu à peu, fait la vérité en nous, cet Esprit “que le monde (de péché) est incapable d’accueillir parce qu’il ne le voit pas et parce qu’il ne le connaît pas !“ (Jn 14.17). Mais, vous, désormais, vous le connaissez, dira par ailleurs St Jean !

Certes, “le vent (l’Esprit) souffle où il veut…“. Il souffle dans les circonstances très inattendues, alors qu’on ne l’attend pas ! Jusqu’au fond de notre être pécheur. Et là, s’il est reconnu, il nous entraîne vers le mystère de la Vie de Dieu, cette vie qu’on ne soupçonnait pas : “Tu ne sais d’où il vient, ni où il va. Ainsi en est-il de tout homme qui est né de l’Esprit“.

Oui, il faut renaître de l’eau, de cette eau qui sortira du côté droit du Christ en croix - comme du côté droit du temple, dans la vision d’Ezéchiel - , de cette eau qui devenant un large fleuve vient nous laver jusqu’en la profondeur de notre être pécheur. Et c’est ainsi que l’on peut se laisser conduire par l’Esprit de Dieu : “En effet, ceux-là sont fils de Dieu qui sont conduits par l’Esprit de Dieu !“ (Rm 8.14).

Et c’est ainsi que l’on peut “renaître“, par l’eau et l’Esprit, à la VIE même de Dieu…, avec le Christ ressuscité, …dès ici-bas !