samedi 30 novembre 2013

La foi à transmettre

Saint André - 30 Novembre

"Si de ta bouche, tu confesses que Jésus est "Seigneur" ; et si, dans ton cœur, tu crois que Dieu l'a ressuscité des morts, tu seras sauvé !".

Voilà bien, en une concision très paulinienne, la prédication des premiers apôtres et évangélisateurs - tel St André que nous fêtons aujourd'hui ! -.

St Paul, envoyé vers les païens, considère la foi sous son double aspect extérieur et intérieur.

Aspect EXTERIEUR. C'est la "profession de foi" chrétienne (la Profession religieuse), la proclamation de notre attachement au Christ ! C'est l'adhésion, en conséquence, à une religion visible, sociale, telle que l'a voulue, par exemple, St Benoît en organisant la Vie monastique ! Cette expression de la foi doit être visible !

A cette foi visible, St Paul désigne comme objet essentiel la confession de la "Seigneurie du Christ" - "Si tu confesses que Jésus est "Seigneur !" -.  Autrement dit, c'est affirmer la divinité du Christ, puisque "Seigneur" ("Kurios") dans le langage biblique est un nom divin. Et cette "Seigneurie" est manifestée par le signe le plus éclatant qui soit : la résurrection d'entre les morts !

On peut dire que le "kérygme", c'est-à-dire la "proclamation à haute voix" des premiers apôtres se ramène finalement à cette simple expression : "Jésus est Seigneur !" : Jésus est Dieu ! Aucune autre expression n'était plus révélatrice de leur foi, ni plus familière aux premiers chrétiens. Si bien qu'en donnant à Jésus le titre de "Seigneur" ("Kurios" - "Dominus"), ce titre est devenu comme le nom propre du Christ : "Le Seigneur !". St Paul en témoigne en transmettant aux Philippiens une hymne probablement liturgique en laquelle il est dit de Jésus : "Dieu l'a souverainement élevé (ressuscité)... afin que toute langue confesse que le "Seigneur", c'est Jésus Christ !" (Phi. 2.11).

Aspect INTERIEUR.  Mais cette "proclamation", cette profession de foi visible vient d'une adhésion intime du cœur : "Si, dans ton cœur...", dit l'apôtre.
L'expression est empruntée au livre du Deutéronome (30.14) : "Oui, la Parole est toute proche de toi ; elle est dans ta bouche et dans ton cœur pour que tu la mettes en pratique".

Le cœur, dans le langage biblique, désigne non pas tellement le côté affectif de l'activité spirituelle, mais le principe même de cette activité tout ensemble intellectuelle et volontaire - les deux facultés, intelligence et volont, s'activant réciproquement dans l'acquisition des vérités surnaturelles, des vérités à mettre en pratique.

Chez les Sémites, ce mot a une richesse de sens qu'on ne retrouve pas dans nos langues occidentales, sauf chez de grands auteurs (St Augustin, Pascal...). Pour Jésus lui-même, le cœur est le principe de toute vie sensible, intellectuelle et morale : "Du cœur, en effet, proviennent intentions mauvaises, meurtres, adultères, inconduites, vols, faux témoignages, injures..." (Mth 15.19). Le cœur est le laboratoire où s'élabore l'élan, l'avenir de notre vie !

Ainsi, c'est dans le cœur que se réalise l'adhésion au Christ "Seigneur", et "Seigneur" parce que "ressuscité" ! Signe (la résurrection) et vérité révélée ("Le Christ est Seigneur") sont saisis par un seul et même acte intérieur du cœur, un acte que Paul appelle "croire" : "Si tu crois...". C'est ainsi qu'il écrira aux Thessaloniciens : "Si nous croyons que Jésus est mort et qu'il est ressuscité, de même aussi, ceux qui sont morts, Dieu les ramènera par Jésus et avec lui" ( I Thess. 4.14).

On peut encore remarquer que St Paul a énoncé la profession extérieure de la foi ("Si tu confesses de bouche...") avant l'adhésion intérieur ("si tu crois dans ton coeur..."). On attendrait l'inverse : croyance intime, puis manifestation au dehors. Mais l'apôtre a suivi l'ordre des termes qu'il emprunte au teste du Deutéronome que j'ai cité (30.14) : "La Parole est dans ta bouche et dans ton cœur...".

Mais, ensuite, Paul revient vite à l'ordre plus logique :
"Croire par le cœur conduit à la justice
Et confesser de sa bouche conduit au salut".
La foi chrétienne - adhésion intime au Christ manifestée extérieurement - nous "justifie", nous rend justes devant Dieu. (A son habitude, St Paul suppose cette foi vivifiée par la charité. Bien sûr !)
Et la foi, en nous "rendant justes", nous met dans la voie dont le salut - la vie éternelle avec le Christ ressuscité - est le terme logique, normal.
Tout homme, Juif ou païen, peut y accéder, sans distinction de race ou de caste : le Christ, "Seigneur" de tous, dispense à tous ses trésors de grâce.

"Car quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé !". L'unique et même "Seigneur" de tous est Jésus Christ !
Cette invocation du nom du Seigneur est emprunté au prophète Joël (3.5). Et St Paul applique au culte du Christ ce que le prophète avait dit du culte rendu à Dieu ! - "Rien de plus fort, notait le P. Lagrange, pour prouver la divinité de Jésus... ou l'obligation des Juifs de se joindre aux païens dans l'union d'une même foi et d'un même culte rendu au "Seigneur" ! Si ce "Seigneur" n'était pas clairement celui de l'Ancien Testament, on pourrait parler d'une religion nouvelle. Mais c'est bien toujours "le Seigneur" que Joël avait dit qu'on invoquerait dans les derniers jours qu'est le Christ descendu du ciel, issu d'Israël selon la chair... (Cf. Rom 9.5). Cette remarque est importante pour asseoir notre union et toute relation avec les Juifs, comme l'a souligné le Concile Vatican II dans sa déclaration "Nostra aetate".

Et ensuite St Paul pose une série d'interrogations qui expriment, en gradation ascendante, les conditions de la foi explicite au Christ :
Comment invoquer sans croire ? Comment croire sans entendre ?
Comment entendre sans proclamation ? Comment proclamer sans envoyés ?

Et l'apôtre de conclure : "Qu'ils sont beaux les pieds de ceux qui annoncent de bonnes nouvelles !". C'est une citation du prophète Isaïe (52.7) qui, dans la bouche de Paul, célèbre, à juste titre, la vocation des missionnaires de l'Evangile !

On peut remarquer pour terminer que ce même prophète - Isaïe - qui louait l'activité des envoyés de Dieu s'interroge, comme l'apôtre Paul le fait également : "Seigneur, qui a cru à notre prédication ?". Le prophète qui annonçait les souffrances du "Serviteur de Dieu" (ch. 53) prédisait en même temps que son message se heurterait à l'incrédulité. Ce fut l'expérience très pénible de Paul face aux Juifs, ses compatriotes. Et c'est encore l'expérience de bien des missionnaires... Mais pourquoi s'en étonner ? Ce fut l'expérience du Christ qui pleura sur Jérusalem devant être détruite parce que, disait-il, "tu n'as pas reconnu le temps où tu as été visitée !" (Lc  19.44).

Mais à ces interrogations légitimes, il ne nous est pas permis de répondre. Pour ma part, je préfère affirmer la miséricorde de Dieu qui s'exerce très souvent dans la "Communion des Saints", dans l'interaction, si je puis dire, entre croyants et incroyants ou mal-croyants. Ce que St Paul affirmait à sa manière : "Portez les fardeaux les uns des autres !" (Gal. 6.2). C'est notre mission ! Et, tous, nous nous retrouverons à former le Corps du Christ, l'Eglise de la "Cité Sainte, la Jérusalem nouvelle !".

mercredi 27 novembre 2013

Plan de Dieu !

T.O. 34 imp. Lundi  -     Sens de l'Histoire     (Dan. 5.1-sv)

Le livre de Daniel nous propose une lecture, une théologie de l'Histoire en laquelle notre foi cherche à discerner le plan de Dieu sur le monde, son dessein d'amour pour les hommes, pour tous les hommes appelés à "faire alliance" avec lui, appelés à être Unique "Peuple de Dieu", éternellement !

La lecture d'hier - décrivant la fameuse statue aux pieds d'argile - nous apprenait que le monde n'est pas stable manquant de cette Unité en Dieu qu'il rejette souvent : les royaumes, les règnes se succèdent rapidement, s'anéantissent régulièrement. Et puis ce sont catastrophes, massacres, tremblements de terre..., épidémies étranges, et puis guerres et guerres encore, guerres des nations, guerres politiques, sociales, culturelles... et autres choses aussi terrifiantes. L'homme s'étant détourné de Dieu, la terre elle-même se révulse sous son emprise comme à Somme et Gomorrhe... !

Notre Seigneur lui-même nous a prévenus : tout disparaîtra dans ce chaos du monde - même, disait-il dans l'évangile d'hier, le temple de Jérusalem, une des merveilles du monde de son époque -. Tout disparaîtra de ce que l'on voit, de ce que l'on fait !

Cependant : dans l'incohérence des avatars que l'Histoire humaine véhicule, se développe, en même temps, un dessein, un plan, le plan de Dieu qui, sans nullement égratigner la          liberté humaine, - liberté dont il est plus jaloux que nous-mêmes - donne un sens à toute l'Histoire de la création, à notre propre histoire personnelle si l'on veut bien y réfléchir quelque peu avec un regard de foi.

Ce sens divin de l'Histoire, dégagée des conditionnements du temps et de l'espace, apporte une lumière qui permet de déchiffrer quelque peu les voies de la Providence divine. A travers le rythme fondamental de l'histoire qui scande anéantissements et surgissements, morts et résurrection..., pointe le "Jour du Seigneur", de Dieu qui vient et pour le monde et pour chacun d'entre nous.
Il y a - c'était la lecture d'hier - cette pierre - comme celle de la fronde atteignant le colosse Goliath -, "pierre d'achoppement qui fait tomber" (Rm 9.32 ; I Pet. 2.8) les puissances sans foi et espérance, pierre de fondation d'une "maison spirituelle", en vue "d'offrir des sacrifices agréables à Dieu" (I Pet. 2.5). C'est l'Eglise. Et l'homme de foi s'exclame déjà devant toutes les nations, celles d'hier anéanties et celles d'aujourd'hui : "Je vois la cité sainte, la Jérusalem nouvelle..., demeure de Dieu avec les hommes" (Apoc. 21.2-3).

Cette vision de l'Histoire est d'une étrange actualité surtout pour les plus anciens nés au lendemain de la première guerre mondiale et qui ont été témoins de tant de révolutions, de transformations entraînant souvent bien des pays, des nations dans la violence et d'affreuses souffrances. Elle est encore d'actualité dans bien des régions : Afrique, Moyen-Orient..., Amérique du Sud...et parfois jusque chez nous ! Daniel, notre visionnaire - un ancien, un sage, certainement - dresse là un tableau d'un monde que, finalement, nous connaissons bien, un monde destiné à disparaître.

Cet auteur a su déchiffrer - Il a déchiffré la vision du livre : "Mené" (compter), "Thékel" (peser), "Parsin" (fractionner). - Le temps est "compté". Dieu a "pesé". Il va "réduire en morceaux"... Car, comme disent souvent les psaumes, Dieu ne renonce pas à intervenir pour faire triompher la justice et rétablir le bon droit. Et nous savons, nous, que notre "justice", notre "justification", notre "bon droit" pour une alliance éternelle a été définitivement rétablie du haut d'une croix, dans un anéantissement en vue d'une résurrection définitive.

Regardant le Christ - mort et ressuscité -, nous devons être sans aucune illusion. Tout disparaîtra, et même ce qui nous apparaît comme "images d'éternité", nos belles cathédrales elles-mêmes... Car "la figure de ce monde passe !" (I Co. 7.31).

Faut-il, pour autant, vivre dans l'insouciance, l'oisiveté, attendant tranquillement la venue du Seigneur, le Règne de Dieu : "Seigneur que ton Règne vienne !". NON ! Bien sûr !

Et cela pour bien des raisons. J'en retiens deux principales.

A ceux qui vivent dans l'oisiveté - cette oisiveté qui "enseigne tous les mauvais tours" (Si 33.29) -, à ces Thessaloniciens qui, misant sur le retour du Seigneur, voulaient vivre pieusement sans doute mais sans travailler, "affairés sans rien faire", St Paul dit catégoriquement : "que celui qui ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus" (II Thess 6. 10sv). "Il ne faut pas, dit-il, manger le pain d'autrui". Et la consigne bénédictine - même si elle n'est pas textuellement dans la Règle de St Benoît -, est bien celle-ci : "Ora et labora". Prière et ravail ! Le "repos laborieux du cloître !", a-t-on dit encore ! Sujet difficile depuis toujours !

St Luc note les paroles de Notre-Seigneur adressées à ses disciples qu'il envoie en mission : "Le travailleur mérite son salaire" (Lc 10.7). St Paul semble acquiescer à cette règle comme une loi de la mission  , tout en renonçant, pour son compte, à en bénéficier : "Nous avons travaillé pour n'être à la charge d'aucun d'entre vous, non pas que nous n'en ayons pas le droit, mais pour vous donner un exemple !" (II Thes 3.9).
"Non pas que nous n'en ayons pas le droit...! dit l'(apôtre. Certes ! Prier est une grande part de notre travail ! Mais n'a-t-on pas parfois abuser de ce principe pour recevoir gratuitement ? Nous qui avons fait vœu de pauvreté, et en un temps où la misère s'accentue chez nous, autour de nous, il me semble qu'il faille toujours faire attention à cette loi du travail pour "n'être à la charge de personne" !

Une deuxième raison de travailler, et de bien travailler, est celle-ci. Je l'ai glanée dans un petit livre de Khalil Gibran - un sage libanais -, appelé "Le Prophète !". Il disait :
"Le travail, c'est l'amour rendu visible !"
Un amour pour Dieu !  D'abord ! Lorsqu'on travaille avec amour, on devient une flute, disait-il ; et au cœur de cette flute, le murmure des heures se transforme en musique, en prière. Et "Le Prophète", ce Sage d'introduire dans le travail ce qui doit être notre sentiment à travers bien des psaumes que nous chantons : "Le vent ne parle pas aux chênes géants plus tendrement qu'au plus menu des brins d'herbe ; Mais seul est grand celui qui convertit le hurlement du vent en un chant que son propre amour a rendu plus suave !".

Un amour pour nos frères !
Et qu'est-ce que travailler avec amour pour nos frères ?
C'est tisser la toile avec des fils tirés de son cœur comme si son frère devait s'en parer. C'est bâtir une maison avec affection, comme si son frère devait y habiter. C'est semer avec tendresse les graines et récolter la moisson avec joie, comme sison frère devait en manger le fruit.
"C'est, disait Khalil Gibran, changer toutes choses que vous façonnez d'un souffle de votre âme même".

Et il ajoutait :
Et si vous ne pouvez travailler avec amour, mais avec déplaisir, mieux vaudrait renoncer à votre travail et vous asseoir à la porte du temple, et quémander l'aumône de ceux qui travaillent avec joie.

Tout disparaîtra ! Oui ! Sauf une seule chose qui a valeur d'éternité : l'amour que nous aurons eu pour Dieu et pour nos frères tout en même temps ! "La charité ne passe jamais, nous dit St Paul. Les prophéties ? Elles disparaîtront. Les langues ? Elles se tairont. La science ? Elle disparaîtra !".

Mais la chairté ne passera jamais ! 

lundi 25 novembre 2013

Persécution et délivrance !

T.O. 34 imp. Lundi  -         (Dan. 1.1-20)

Le livre de Daniel rapporte la foi des exilés à Babylone. Epoque très dure ! On ne pouvait même plus rendre un culte au Dieu Un, au Dieu trois fois Saint, à ce Dieu qui avait tant fait pour son peuple depuis la traversée de la mer rouge, qui avait fait "passer" leurs ancêtres de la "servitude" au "service" du Dieu Unique ("servitude"-"service", jeu de mots également en hébreu : "advout-avoda").
Et de ce passage, de cette "Pâque" primitive, de ce baptême en quelque sorte, les hébreux avaient gardé foi et espérance indéfectibles !
Aussi, au milieu de leur captivité, ils priaient, ils chantaient : "Notre Dieu est un Dieu de délivrance" (Cf. nombre de psaumes écrits à cette époque !). Il a accompli des merveilles pour son peuple. Il en accomplira encore ! La Merveille de la délivrance !
Et, de fait, en 538, Cyrus, roi de Perse, demande aux Juifs de revenir sur la terre de leurs ancêtres pour rebâtir de temple !
C'est comme une résurrection !

On sait que la rédaction - la rédaction finale du moins - de ce livre de Daniel date de l'époque ou les Juifs sont à nouveau persécutés : on veut les contraindre à adorer des divinités étrangères placées dans le temple - "Abomination de la désolation !" -. C'est le temps de la persécution organisée par Antiochus-Epiphane (l'occupant grec !). C'est le temps des martyrs dont nous avons entendu les récits dernièrement (Livre des Macchabées).
On se rappelle alors l'enseignement des exilés d'autrefois. Le Livre de Daniel, ce livre de style apocalyptique, dévoile (c'est le sens du mot "apocalypse") qu'au-delà des épreuves, des persécutions même très fortes, il y aura comme une résurrection semblable à toutes les précédentes.
Le peuple est donc dans l'attente du "Jour du Seigneur", du Roi victorieux que nous avons fêté hier : "Donne, Seigneur, donne la victoire !" (Ps 118..25).

Toujours au cours de l'histoire, il y a eu des persécutions.
Toujours, au cours de l'histoire, il y a eu des martyrs, hérauts de la Royauté de Dieu !
Toujours, au cours de l'histoire, les chrétiens proclamaient, chantaient : "La victoire qui a vaincu le monde, c'est notre foi !" (I Jn 5.4).
Toujours, au cours de l'histoire, il y a cette énergie pleine de cette certitude que tout ce qui existe est appelé à sur-exister.
St Paul l'affirmait à sa façon alors qu'il était dans le dénuement : "Nous ne voulons pas nous dévêtir, mais revêtir un vêtement sur l'autre, afin que ce qui est mortel soit englouti par la vie. Celui qui nous a formés pour cet avenir, c'est Dieu qui nous a donné les arrhes de l'Esprit". (2 Co. 5.4)
Et plus récemment, c'est ce que proclamait, par exemple, le patriarche Athénagoras (réflexion que j'avais notée naguère) :
"Désormais, tout a un sens.
Toi, et toi encore, tu as un sens. Tu ne mourras pas !
Ceux que tu aimes, même si tu les crois morts, ne mourront pas !
Ce qui est vivant et beau, jusqu’au dernier brin d’herbe,
jusqu’à cet instant fugitif où tu as senti tes veines pleines d’existence,
tout sera vivant à Jamais.
Même la souffrance et la mort ont un sens, deviennent des chemins de vie.
Tout est déjà vivant parce que le Christ est ressuscité !".

Les chrétiens savent de certitude absolue cette réalité à venir ! Comment cela se fera-t-il ? Ils ne le savent pas très bien. Mais ils savent cette réalité à venir ! Parce que le Christ est ressuscité !

Et c'est cette certitude qu'à travers les siècles chantent les martyrs ! Telle Catherine d'Alexandrie que nous fêtons aujourd'hui.

Mais remarquons : au cours de l'histoire, il y eût des "persécutions fortes" et des "persécutions plus sournoises".

On peut rappeler toutes sortes de "persécutions fortes" depuis les origines du christianisme jusqu'au 20ème siècle, jusqu'à maintenant !
Pensons-nous suffisamment à tous ces chrétiens actuellement persécutés, physiquement, psychologiquement, spirituellement. Ils sont nombreux de par le monde. Ils crient leurs souffrances comme au temps des exilés à Babylone ! Ils crient : on les entend parfois par médias interposés. Ils crient leurs souffrances ; et ils chantent aussi leur foi. Puissions-nous chanter, nous aussi, avec eux, à l'aide des psaumes qu'ils récitaient, notre prière pleine d'espérance à leur intention.
Non seulement "leur sang est semence de chrétiens", disait Tertullien. Mais il ont suivi le Christ jusqu'au bout, jusqu'à la croix, manifestant
- une "foi active",
- un "amour qui se met toujours en peine" face à leurs bourreaux eux-mêmes,
- une "persévérante espérance en Notre Seigneur Jésus Christ..." (Cf. I Thess. 1.3).

Foi, espérance, charité qui viennent d'un "au-delà de la mort elle-même". "O mort, où est ta victoire ?, demandait St Paul ! (I Co. 18.35).

Mais il y a aussi et plus encore des "persécutions sournoises". Ce sont celles auxquelles fait allusion notre lecture. Les persécuteurs sont, du coup, plutôt attrayants. Ils veulent apprivoiser les chrétiens, les conduire vers une culture remplis de tentations diverses, de richesses (matérielles ou autres) très attrayantes, mais culture qui oblige à plus ou moins s'éloigner du Christ. C'est courant ! C'est actuel !
Les chrétiens sont parfois comme ces jeunes gens dont il est question dans la lecture et à qui on promet vie facile, fastueuse, agréable... et que sais-je encore. En lisant le livre de Daniel, on peut penser à ce que St Jean écrit dans sa première lettre : "N'aimez ni le monde ni ce qui est dans le monde. Si quelqu'un aime le monde, l'amour du Père n'est pas en lui. Car tout ce qui est dans le monde - la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l'orgueil de la richesse - vient non pas du Père, mais du monde. Or le monde passe avec ses convoitises ; mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement" (I Jn 2.15-17).

Ces jeunes gens de la lecture renoncent finalement à toutes les séductions, avec force et habilté tout à la fois. Et ils apparaissent finalement plus "beaux", plus "jeunes" que ceux qui s'adonnent aux plaisirs de la vie, tout en manifestant grande sagesse.
C'est, là encore, comme une sorte de résurrection. La fidélité à Dieu fait acquérir sagesse divine et, déjà, jeunesse éternelle.

C'est notre foi ! Elle exige souvent esprit critique vis-à- vis du monde, du pouvoir qu'il peut offrir, de ses diverses séductions. Et il arrive parfois d'être franchement en rupture avec les modes diverses qui fleurissent ici ou là, matériellement, intellectuellement, ...et que sais-je encore... !

Cependant, au milieu de ces ruptures - qui peuvent faire souffrir parfois - Dieu est présent ! Il nous mène "al mouth", dit le psaume 48ème, c'est-à-dire "au-delà"..., au-dela de tout, au-delà de la mort elle-même, pour nous faire participant de sa vie, de sa vie divine!

Telle est notre foi que nous devons proclamer en toutes circonstances. Que le Seigneur vous assiste ; Que le Seigneur nous assiste ! Car le Christ est ressuscité !

dimanche 24 novembre 2013

Christ - Notre Roi !

Fête du Christ-Roi   -   2013

Tout le drame de notre vie est contenu dans une question, une question du Christ à nous-mêmes, à chacun d’entre nous. Et, pour terminer l’année liturgique, l’Eglise nous ramène à cette seule question que le Christ, au suprême moment de sa vie terrestre, a posée par sa seule présence du haut de la croix, à deux hommes.
Or un seul a bien répondu : celui que l’on appelle le “bon larron”.

St Augustin, commentant cette page d’évangile, s’étonne de ce que le bon larron ait mieux compris la Bible que les experts, les docteurs de la Loi qui, eux aussi, se trouvaient au calvaire, mais qui se moquaient du Christ. Et il prête à ce bon larron cette réponse : “Non, je n’avais pas étudié les Ecritures ; mais Jésus m’a regardé, et, dans son regard, j’ai tout compris”.

Pour nous aussi, pour chacun de nous, il s’agit non pas de s’imaginer le Christ à notre façon...
- façon tout humaine, trop humaine que nous utilisons souvent : ce que j'appelle facilement l'"inversion sacrilège". "Dieu a créé l'homme à son image ; et l'homme le lui a bien rendu !", disait Voltaire ! C'est toujours notre tentation !-
 ... il s’agit non pas de s’imaginer le Christ à notre façon, mais il s'agit surtout de rencontrer le regard du Christ, de rencontrer le Christ lui-même, sa personne.

Et aujourd’hui, sachons tirer de l’évangile les conditions indispensables pour se préparer à cette rencontre.
Nous pouvons en reconnaître trois :
- l’humilité : se reconnaître coupable : “Pour nous, c’est juste !”, disait le bon larron.
- la foi : “Lui n’a rien fait de mal”. Il est pur "par excellence" ! Il est "Fils de Dieu" !
- la prière : "Jésus, souviens-toi !".

La première condition, en effet, pour se préparer à la rencontre du Christ, est simple, immédiate, mais parfois difficile à réaliser, c’est admettre humblement la vérité de notre condition de pécheurs devant Dieu.  Que dit, en effet, le bon larron ? “Pour nous, c’est juste !”.
C’est ce cri des humbles que nous rencontrons si souvent dans la Bible :
- C'est le cri de David après sa faute : "Oui, je reconnais mon péché ! Purifie-moi !
- C’est Zachée qui, devant Jésus, se reconnaît voleur...
- C’est la pécheresse qui pleure ses égarements...
- C’est la Samaritaine qui a honte de sa situation et ne cherche pas à la nier...
- C’est Pierre qui après sa trahison, dit à Jésus : “Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un pécheur !”, et qui aurait pu dire lui aussi : “Dans son regard, j’ai tout compris !”.

Et nous pouvons nous demander nous-mêmes : cette vérité-là, l’avons-nous admise ? C’est pourtant dans cette vérité qui souvent nous brûle et fait mal que seulement nous rencontrerons le Christ.
“Pour être sanctifié en vérité, écrivait notre grand Bossuet, il faut voir la vérité de ses fautes”. Et, à propos de Notre Dame, il ajoute : “Les mauvais anges étaient chastes, mais avec toute leur chasteté, parce qu’ils étaient superbes, Dieu les a repoussés jusqu’aux enfers. Il fallait donc que Marie fût humble autant que ces rebelles ont été superbes ; et c’est ce qui lui a fait dire : ‘Je suis la servante du Seigneur’. Il ne fallait rien moins pour la faire ‘Mère de Dieu’ !”

“L’humilité suffit pour conduire à Dieu” (St Jean Chrysostome) ; car “l’humilité qui met les choses à l’échelle de Dieu est aussi l’échelle qui permet de monter à Dieu” (Mgr Ghika).

Si l’humilité fait la lumière, la vérité sur notre condition de pécheur, elle nous amène également à recevoir la lumière, la vérité d’un Autre. C’est cela la foi ! (2ème condition).
Nous reconnaissant incapable d’accéder à la Vérité toute entière, nous sommes prêts cependant à la recevoir. “Pour croire, disait naguère le Pape Paul VI, il faut un principe intérieur qui ne peut venir que de Dieu”, qui ne peut venir que du Christ en croix : “une fois élevé de terre, j’attirerai tout à moi”. Oui, fixqnt le Christ en croix, nous pouvons comprendre et nous exclamer : "Dans son regard, j’ai tout compris”.

Mais, il faut bien préciser : la foi n’est pas un “saut dans l’absurde” ! Si la foi est bien l’assentiment de notre intelligence (éclairée par l’Esprit Saint), elle ne doit pas se contenter de cette adhésion, mais méditer sur la lumière qu’elle reçoit de Dieu lui-même, s’en nourrir, s’en pénétrer de plus en plus, à l'exemple de Notre Dame qui, dit St Luc, “méditait toutes ces choses en son cœur”. Et jusqu'au pied de la croix, elle ne cessait de le faire, de méditer ! Paul VI écrivait encore : “La foi risque de périr par asphyxie ou inanition, si elle n’est pas tous les jours alimentée et soutenue, entretenue”.

Si nos connaissances humaines doivent progresser sans cesse tout au long de notre vie, notre foi doit également progresser en s’approfondissant sous le regard du Christ, en se structurant, en s’enracinant davantage en Dieu lui-même.
Et cela par de simples actes de foi, certes !
Mais aussi par l'information, la réflexion priante. Une foi qui cherche toujours à mieux appréhender, disait St Thomas d’Aquin, à mieux comprendre.
Malheureusement, on en reste souvent à des notions rudimentaires, ou à certaines notions apprises dans la jeunesse. Et l'âge venant, on arrive à se contenter d'un acquis souvent plus ou moins sclérosé, ou à une pratique d'habitudes qui ont perdu leurs significations profondes - telle la pratique dominicale -. Alors, un déséquilibre se produit entre connaissances religieuses plus ou moins rudimentaires et connaissances humaines qui se développent obligatoirement... Faute de mettre sans cesse notre regard dans celui du Christ, il y a le risque d'y avoir en nous-mêmes comme une distorsion entre foi et raison ; on ne comprend plus très bien. Et le Christ ne peut plus véritablement régner en nous !

L’humilité, condition de la foi ! Et prière également ! (3ème condition) : “Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras comme Roi !”  La prière, c’est déjà la rencontre de Dieu dans la foi. Prier, c’est veiller dans l’attente de sa venue, c’est avoir soif de la visite du Seigneur, c’est marcher à la rencontre de celui qui vient, qui ne cesse de venir : “Seigneur, souviens-toi de moi, disait le psalmiste, c’est ta face que je cherche”.

L’humilité est déjà comme une prière continuelle. Elle est sans cesse un appel au secours lancé vers Dieu. Elle ne nous permet pas de nous appuyer sur notre propre puissance ou sagesse, ou de nous estimer supérieurs aux autres, ce qui arrive dans cette terrible maladie qu’est la suffisance, l’orgueil.

L’humilité et la prière sont inséparables. Elles sont indispensables pour rencontrer le Seigneur dans la foi, avant de le rencontrer face à face lorsqu’il remettra toute chose à son Père, lorsqu’il reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts. Alors son règne n’aura pas de fin.

vendredi 22 novembre 2013

Jubilez !

22 Novembre   -    Ste Cécile

Fête de Ste Cécile, patronne des musiciens, de tous ceux qui chantent, de tous ceux qui chantent le Seigneur, qui chantent pour le Seigneur !

St Augustin affirmait : "Il prie deux fois, celui qui chante bien" !
Encore faut-il bien chanter ! Pas toujours évident, n'est-ce pas !
Joseph Samson (Maitre de chapelle en la cathédrale de Dijon, naguère) tempêtait :
"Si le chant n'est pas là pour me faire prier, que les chantres se taisent !
Si le chant n'a pas la valeur du silence qu'il a rompu, qu'on me restitue le silence !".

Alors, comment bien chanter ? Surtout si je ne suis pas très en forme (cela arrive, n’est-ce pas !).

Certes, St Augustin recommandait encore :                   
“Chantez à Dieu le cantique nouveau !
Homme nouveau, Testament nouveau, Cantique nouveau !
Les hommes nouveaux sont les seuls à l’apprendre, car ils sont renouvelés par la grâce loin de leur ancien état ; et ils appartiennent désormais au Testament nouveau qui est le Royaume des Cieux. C’est pour lui que soupire tout notre amour !
Chantez donc le cantique nouveau et chantez bien !
Chante pour Dieu, et évite de chanter mal. Il ne faut pas blesser ses oreilles. Chantez bien, mes frères !“

Cependant il ajoutait : "Chantons le cantique nouveau non seulement par notre bouche mais par toute notre vie".

Et dans son commentaire du psaume 32ème, il précisait :
“Qui peut oser chanter devant Dieu, lui qui juge le chanteur et à qui n'échappe aucune fausse note ?
Rassure-toi. Il t'indique la manière de chanter : Contente-toi de jubiler. Bien chanter devant Dieu, c'est jubiler.
Qu'est-ce-à-dire ? Renonce à comprendre, renonce à dire avec des mots ce qui se chante seulement dans le cœur.
Regardez ceux qui chantent : moissonneurs, vendangeurs, et les autres : leur joie s'allume d'abord avec les paroles des chansons, mais bientôt cette joie les envahit ; ils laissent les mots et l'on n'entend plus que leur seule jubilation. Musique sans paroles, parce que le cœur exprime ce qui ne peut se dire.
A qui cela convient-il mieux qu'au Dieu ineffable.  
Ineffable : tu ne peux dire ce qu'il est. Tu ne peux le dire et pourtant tu ne peux pas garder le silence. Ouvre donc ton cœur au-delà des mots pour que déborde ton allégresse plus grande que la parole“.

Ainsi, que toute notre vie chante certes, mais surtout jubile devant Dieu !

Et en ce temps où les évêques de France, à la suite du pape François, veulent encourager toutes les familles chrétiennes à bien chanter et à jubiler devant Dieu, je me permets de former quelques vœux, avec ma prière :

* Familles où les enfants se sentent aimés, protégés et encouragés à devenir des "grands", se sentent accompagnés dans leur découverte de la vie ;
familles où l'on se chamaille, mais où éclatent aussi rires et cris de joie ;
Familles, jubilez devant Dieu et bénissez-le !

* Familles où les adolescents trouvent des limites pour se construire et des repères pour mieux prendre leur envol...
Familles où les jeunes se sentent soutenus dans leurs difficultés à devenir des adultes responsables, où ils sont reconnus et aimés tels qu'ils sont, prenant parfois des chemins différents de ceux de leurs parents...
Familles, jubilez devant Dieu et bénissez-le !

* Familles où les parents s'épanouissent dans une vie équilibrée entre travail extérieur et présence au foyer ;
où chacun sait prendre du temps pour soi et du temps pour l'autre et du temps pour Dieu,
Familles où un dialogue ouvert permet à l'amour de grandir toujours davantage,
Familles, jubilez devant Dieu et bénissez-le !

* Familles où les Anciens ont leur place, grandement heureux de voir grandir leurs petits-enfants, leur donner parfois le temps que les parents n'ont pas toujours ;
Familles où chacun s'enrichit de la présence des autres...
Familles, jubilez devant Dieu et bénissez-le !

Aujourd'hui, implorons Ste Cécile. Avec elle, que toutes les familles de la terre, quelles qu’elles soient, puissent “bien chanter“ par toute leur vie, le “cantique nouveau“. Et s'il y a parfois quelques fausses notes - c'est inévitable -, que le cœur de chacun puisse cependant toujours jubiler devant le Seigneur !

jeudi 21 novembre 2013

"Jour Un", éternel !

21 Novembre - Présentation de la Vierge Marie

En 543, on fit, à Jérusalem, la dédicace de la basilique Sainte-Marie-la-Neuve, érigée sur la colline de Sion, face à l'esplanade du temple. Et les Eglises d'Orient ont rattaché à cette dédicace le souvenir de l'entrée au temple de la Vierge Marie que rapportent certains écrits..., écrits anciens mais très peu fondés historiquement, tel le pro évangile de St Matthieu (écrit vers 150).

Il n'empêche : malgré l'aspect historique peu fondé, Marie apparaît toujours comme "le temple de la sainte gloire du Christ notre Dieu", selon une expression de la liturgie orientale ! C'est ce qu'il faut retenir et vénérer !

C'est en ce sens que l'on peut appliquer à Marie ce que le livre des Proverbes (notre lecture) dit à propos de la Sagesse - créature qui, dans l'Ancien Testament, est personnifiée en quelque sorte et qui existe avant même la création du monde - : 
"Le Seigneur m'a créée, prémices de son œuvre...".

"Prémices" : "bereschit" en hébreu ! "Au commencement !"
- C'est le même terme qu'au début du livre de la Genèse (1.1) : "Au commencement ("bereschit"), Dieu créa...".
- C'est ce même terme auquel fait allusion St Jean au début de son évangile : "Au commencement était le Verbe... Et le Verbe fut chair". (Jn 1.1,4). Et il précise : "Ce qui était dès le commencement, nous vous l'annonçons !" (I Jn 1. 1).

"Prémices" : "bereschit" ! "Au commencement !".
- "Au commencement" ! Au commencement du premier jour de la création !
"Jour Un", unique ! Car il est dit : "Dieu sépara la lumière de la ténèbre. Il y eut un soir, il y eut un matin : premier jour". "Yom erad" en hébreu : "jour un", unique, comme si l'auteur de la Genèse ignorait qu'il y aurait un second, un troisième jour, etc.
- "Au commencement", dit St Jean ! C'est-à-dire au commencement du premier jour de la re-création opérée par le Christ : "Tout fut par lui... En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes !" (Jn 1.3,4).
"Jour Un", unique lui aussi, parce qu'il manifeste une "plénitude" ("plèrôma"), selon St Paul :
+ Jour unique de la plénitude, de "l'accomplissement des temps" (Gal 4.4),
+ Jour unique de la "plénitude" du Christ dans tout l'univers (Col. 1.23 ; Eph. 4.13),
+ Jour unique de la "plénitude" de Dieu sur terre, dans la création, en nous (Eph. 3.19), comme il est dit de la Sagesse : "trouvant ses délices avec les fils des hommes" !
- "Au commencement" ! Au commencement de la création, de la re-création par le Christ ! Au commencement également du "Jour Un", unique de Dieu, le jour éternel... annoncé par le prophète Zacharie : "Voici qu'il vient le jour de Dieu…" (Za. 14.1) - "Et il y aura un jour unique...!" ("Yom erad") (Za 14.7).

"Jour Un", unique de Dieu !
- Parce que c'est dans l'unité divine qu'a été lancée la création.  
- Parce que c'est dans cette même unité divine que la création a été renouvelée par le Christ !
- Parce que c'est dans cette même unité encore que la création s'achèvera à la fin des temps ! "Jour Un", unique ! ("Yom erad").

Oui, c'est dans l'unité, dans l'unité divine, dans cette Unité d'Amour qui ensserre les trois personnes divines que nous sommes appelés à vivre au "Jour Un", unique, étarnel de Dieu ! "Voyez de quel grand amour le Père nous a fait don, que nous soyons appelés enfants de Dieu" ; et nous le sommes ! Déjà ! "... Dès à présent nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n'a pas encore été manifesté. Nous savons que, lorsqu'il paraîtra, nous lui serons semblables, puisque nous le verrons tel qu'il est" (I Jn 3.1sv). En son "Jour Un", unique, étarnel !

Et Marie est "présente", "présentée" en ce "Jour Un", unique, éternel !

Comme elle fut toujours "présente", "présentée" au jour temporel du Fils de Dieu qui s'est incarné en elle.
+ Toujours "présente", Marie : à la "présentation", au "recouvrement" de son enfant au temple.
+ Toujours "présente"..., aux noces de Cana, premier signe d'alliance entre Dieu et l'homme.
+ Toujours "présente" près de la croix.
+ Toujours "présente" en tout moment.,
+ Toujours présente à la Pentecôte, naissance de l'Eglise.

Aussi chante-t-elle l'accomplissement des "promesses faites à Abraham et à sa descendance à jamais !",
promesses faites "dès le commencement",
accomplies en et par elle,
et promesses que nous célébrerons nous-mêmes au "Jour Un", unique, éternel, avec Marie qui nous redira : "Le Seigneur m'a créée, prémices de son œuvre...".

Oui, Marie se présente dans le "commencement" ("bereschit") de Dieu, au "Jour Un", unique, éternel de Dieu. Elle est au début comme elle est au terme, selon cette loi divine que proclame la liturgie juive : "Ce qui arrive au terme de la création, c'est ce que Dieu avait dès le début !", ce qui correspeond à notre principe scholastique, plus rationnel : "Ce qui est dernier dans l'ordre de l'exécution est premier dans l'ordre de l'intention".

En ce sens, Marie est finalement de chef d'œuvre de la Création. C'est elle qui est déjà la "Jérusalem céleste", "le temple de la sainte gloire du Christ notre Dieu", dit la liturgie orientale.

Ici-bas, elle fut, "par excellence", comme l'arche d'alliance au désert, signe de la présence permanente de Dieu au milieu de son peuple.

Elle est éternellement le "temple de Dieu", un "temple qui n'est pas fait de la main des hommes" (Cf. Act. 7.48 ; 17.24). Elle est ce même temple en lequel elle désire nous placer, car nous sommes destinés, nous aussi, à être "le temple du Dieu vivant", comme dit St Paul ! (2. Co. 6.16).

Et pour nous, chrétiens, c'est merveilleux de savoir que nous marchons vers la conquête de quelque chose qui existe déjà ! Et nous pouvons nous dire que chacun de nous est dans le "commencement" de Dieu, dans le "Jour Un", unique, éternel de Dieu, en lequel il nous pense "à son image et ressemblance".

Et il me plaît de penser à Marie en éternel état de présence, de "présentation", comme le souligne ses apparitions à Lourdes ou ailleurs : Elle est toujours en "état de présentation", pour la gloire de Dieu et pour le salut des hommes... ! Comme elle se présente à Dieu, elle se présente à nous pour nous porter vers son Fils, vers Dieu !
C'est la raison pour laquelle, le pape Jean-Paul II, à la suite du Concile Vatican II, a déclaré fort légitiment "Marie, Mère de l'Eglise", Eglise appelée à être éternellement "Temple de Dieu", à l'exemple de Marie.

Allons vers Marie sans aucune hésitation, car il nous sera toujours dit qu'on trouvera Jésus en trouvant Marie et Joseph, à l'exemple des bergers : "ils découvrirent Marie et Joseph avec le nouveau-né", Jésus Fils de Dieu et fils de Marie !

mardi 19 novembre 2013

Prier !

33e Mardi T.O. 13/C                   Prier avec Zachée !      (Mth 19 3.10)

Cet évangile, nous le connaissons bien. Il nous a été proclamé il y a un peu plus de deux semaines (31ème Dim. du  T.O.). Aussi, je me permets de ne retenir aujourd'hui qu'une seule phrase, une phrase qui non seulement a provoqué multiple conversions, mais a aiguisé chez les chrétiens un grand sens de la prière, de cette prière permanente dont parle St Paul. Oui, retenons aujourd'hui cette si délicate sollicitation de Notre Seigneur qu'il adresse à chacun d'entre nous : "Il faut que j'aille demeurer chez toi !".

Certains me disaient naguère : "Je ne suis ni prêtre, ni religieux ou religieuse ; et n'étant pas spécialiste de la prière, je ne sais pas prier !". Bonne excuse ! Car il y a cette demande du Seigneur adressée à chacun : "Il faut que j'aille demeurer chez toi !". D'ailleurs, il est bon de remarquer que Zachée, le fameux Zachée de Jéricho, n'était pas un mystique, loin s'en faut ; il ne se sentait nullement porté vers une grande spiritualité. Il brassait beaucoup d'affaires et devait plutôt surveiller attentivement son compte en banque...

Et pourtant, il y avait en lui ce désir sournois mais tenace qu'aucun de ses détracteurs n'eût pu soupçonner : il voulait "voir Jésus !". Je crois que ce simple désir est non seulement le début d'une vraie prière, mais le ressort permanent de toute prière. Jadis, un jeune - de bonne famille, certes - s'était livré à la drogue. Il en est heureusement sorti par grâce divine et avec l'aide intelligente et assidue de parents et amis. Remis de cette errance, il avouait : "Quand je me piquais, je cherchais quelque chose, un absolu..., mais je ne savais pas que c'était quelqu'un !" - "Il faut que j'aille demeurer chez toi !".

Répondre à cette invitation, avec le désir de "voir Dieu", c'est un appel à le rencontrer véritablement, à nouer un dialogue avec lui et d'abord l'écouter... C'est le début de toute prière ! Car il ne faut pas inverser les rôles - cette fameuse "inversion sacrilège ! -. Ste Thérèse d'Avila qui, dans sa conversion, avait vivement ressenti cette invitation adressée à Zachée, disait cependant : "Si je cherche Dieu, c'est que lui, le premier, me cherche. Si je le regarde, c'est que d'abord il m'a regardé. Si je commence à l'aimer, c'est que son amour m'a précédé !". Cette prise de conscience est bien le fondement de toute relation avec le Christ. "Ce n'est pas vous qui m'avez choisi...", disait Notre Seigneur - et pourtant on le dit, on le pense facilement : "j'ai choisi la vie religieuse ; j'ai choisi Dieu ...!" - "Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis..." (Jn 15.16). La prière, c'est donc d'abord écouter humblement cette de demande du Seigneur : "Il faut que j'aille demeurer chez toi !".

Beaucoup cherchent aujourd'hui des maîtres spirituels ! Mais comment discerner les véritables des charlatans ? "Si un aveugle guide un aveugle, disait Jésus, tous deux tomberont dans un trou" (Lc 6.39). C'est une souffrance de voir des jeunes, et même des adultes, suivre des illuminés ou simplement des soi-disant spirituels trop suffisants d'eux-mêmes ! Les résultats - on le sait - sont lamentables et parfois tragiques. Récemment, les évêques réunis à Lourdes ont stigmatisé ce qu'ils ont appelés des "abus spirituels", invitant à être très attentifs à cette dérive permanente. Pourtant, l'Eglise du Christ +ne manque pas de guides sûrs, tels St Benoît, St François d'Assise dont se réclame notre pape, Ste Thérèse d'Avila, et celle de Lisieux, et tant d'autres...

De plus, le Seigneur a laissé le soin à chacun, selon ses charismes comme l'on dit, de répondre personnellement à sa demande : "Il faut que j'aille demeurer chez toi !". Dans l'évangile, Jésus donne peu de conseils pour prier sinon celui de la persévérance et celui de prier "en son nom" ! Il ne nous a donné aucune technique, car Dieu ne se laisse pas capturer par une technique - comme il ne voulait pas se laisser enfermer dans un temple désiré par le roi David -. On ne peut que se disposer à l'accueillir, lui qui sans cesse nous dit : "Il faut que j'aille demeurer chez toi !". Car, l'amour qui l'a poussé à cette demande formulée jusque sur la croix, cet amour-là ne se met pas sur un ordinateur.

Cependant les grands saints nous apprennent commet accueillir le Seigneur, le prier. St Benoît, bien sûr. Ste Thérèse d'Avila également, elle qui a écrit un petit opuscule en ce sens : "Le chemin de la perfection" (1). Pour accueillir le Seigneur, elle nous donne ce précieux conseil, si simple : "Ne quittez pas le Christ, ni des yeux, ni du cœur. Lui qui s'invite en votre demeure nous dit qu'il est le Chemin, la Vérité, la Vie. Lui seul peut nous mener au Père" !
Ne pas quitter le Christ ni des yeux, ni du cœur, mais le Christ tel qu'il se présente à nous dans les évangiles : accueillir le Christ, Dieu et homme ! La prière ne consiste donc pas à rentrer dans une espèce de vide mental où nous attendrions, à force de concentration volontariste, une union fusionnelle avec la Divinité impersonnelle. Vivre intimement avec le Christ, ce n'est pas avoir "l'âme en l'air, sans appui", disait Ste Thérèse elle-même dans son langage parfois imagé. Prier, c'est accueillir le Christ, Fils Unique de Dieu, incarné, à Bethléem, crucifié à Jérusalem sous Ponce Pilate et ressuscité le troisième jour. C'est ce Jésus-Là qui nous dit : "Il faut que j'aille demeurer chez toi !". Vouloir se passer de Jésus, Dieu incarné, c'est vraiment manquer d'humilité. Et Ste Thérèse d'ajouter, devançant notre grand Pascal : "Nous ne sommes pas des anges ; nous avons un corps. Vouloir faire l'ange pendant que nous sommes sur la terre, c'est de la folie !".

"Il faut que j'aille demeurer chez toi !". Cette parole est celle d'un Dieu qui s'est fait vraiment homme pour que l'homme devienne Dieu, selon l'expression des Pères de l'Eglise. Notre prière ne peut jamais faire l'économie du Christ, Dieu qui s'est fait homme.

"Il faut que j'aille demeurer chez toi !". Prier, c'est notre amour qui répond à l'amour du Christ pour nous ! Dans la prière, "il ne s'agit pas de penser, mais d'aimer". Et l'amour a conduit Zachée à partager ses biens, a conduit Benoît à organiser une "école" d'union à Dieu, de prière", a conduit Ste Thérèse à devenir fondatrice d'une réforme, et la petite Thérèse de Lisieux à être patronne des missions.

Aussi accueillir Jésus - Dieu et homme - nous pousse toujours à un don de soi pour nos frères, les hommes. Car, avec Jésus, la prière n'est pas un but en elle-même. Le but de la prière, c'est de devenir libre pour aimer, à l'exemple d'une autre grande sainte, Mère Térésa de Calcutta. Son amour sans frontières s'enracinait dans la prière, disait-elle, dans son union à Celui qui disait : "Ce que vous ferez au plus petit d'entre les miens, c'est à moi que vous le faites !" (Mth 25.31-46).. Pour être capable d'aimer, il faut prier (accueillir le Christ en soi) ; le fruit de la prière, c'est l'amour ; et le fruit de l'amour est le service" !

Puissions-nous pressentir l'urgence de n'être plus comme Zachée, un banquier crispé sur ses richesses, mais d'être un Zachée accueillant et devenu, de ce fait, un "serviteur de l'amour !", comme disait Ste Thérèse d'Avila.

Alors, n'oublions pas : "Il faut que j'aille demeurer chez toi !".


(1) qui n'est finalement qu'un commentaire de la prière enseignée par Jésus : le "Notre Père" !