dimanche 30 juin 2013

Suivre le Christ pascal !

T.O. 13  Dimanche  2013 -        (Luc 9.51-62)

L’évangile d’aujourd’hui se situe à la charnière des deux grandes parties du récit de St Luc.

Jusqu’ici, il avait répondu à la question que tous se posaient à propos de Jésus : “Mais qui donc est cet homme ?” Cet homme qui parle comme jamais homme n’a parlé et accomplit tant de prodiges. Sa notoriété était si grande que ses compatriotes, agacés, avaient délégué quelques observateurs pour s’enquérir des faits et gestes de ce concitoyen qui mettait leur bourgade de Nazareth en valeur médiatique.

Mais voilà que Jésus, selon son habitude, avait soudainement retourné l’interrogation. A ses disciples, il avait posé la question : “Et pour vous, qui suis-je ?” – Pierre, au nom de tous, avait répondu : "Tu es le Messie, le Christ !

Alors, Jésus avait dévoilé à trois d’entre eux son identité messianique, sur la montagne de la Transfiguration.

C’est alors que Luc note de façon lapidaire : “Jésus prit résolument la route de Jérusalem”. En mot à mot : “Jésus durcit son visage vers Jérusalem”, formule qui rappelait la détermination du "Serviteur souffrant", selon Isaïe, face à ses adversaires : “Le Seigneur me vient en aide ; dès lors, je ne cède pas aux outrages, j'ai rendu mon visage dur comme pierre ; car je sais que je ne serais pas confondu” (Is 50, 7)
Luc veut déjà faire allusion au mystère de la Croix, à celui de la Résurrection et encore à celui de l’Ascension : “Comme s’accomplissaient les jours de son enlèvement”, dit-il. Il emploiera le même mot le jour de l’Ascension, ce jour où Jésus est enlevé vers la gloire de son Père, comme Elie dont il est question dans la première lecture fut enlevé au ciel sur un char de feu au regard de son disciple Elisée.

Autrement dit, Jésus se détermine à prendre la route de Jérusalem où se réalisera tout le mystère pascal : Mort, Résurrection, Ascension, mystère qui constitue le fondement de notre foi et doit déterminer notre vie de baptisé.

Aussi, ne faut-il pas chercher dans l’évangile de Luc des données topographiques du chemin de Jésus, mais bien plutôt des consignes pour se mettre à la suite de Jésus !

Et St Luc note, de façon très intentionnelle, le passage de Jésus par la Samarie.
Quand on sait la haine séculaire qui, fondée sur des motifs raciaux, politiques et religieux, oppose Juifs et Samaritains, on ne s'étonne pas du mauvais accueil de ceux-ci. Mais ce rejet prend pour Luc une valeur particulière ; il sert à souligner le climat d'hostilité générale qui pèse sur Jésus :
- il a déjà essuyé le refus des siens à Nazareth (4, 28-30),
- celui des païens à Gérasa (8, 37) ;
- bientôt ce sera la condamnation du Sanhédrin.
Tout cela fait partie du prologue du mystère pascal.

Mais les disciples ne comprennent pas le sens de la mission de leur Maître. Ainsi, Jacques et Jean, les “fils du tonnerre” (Mc 3, 17), en appellent au feu du ciel, ce feu qu’Elie fit tomber sur ses persécuteurs (2 R 1, 9-12) ; Luc aime à montrer en Jésus l'accomplissement d'une attente juive qui escomptait un retour d'Élie ; or, ici, il y a bien plus qu'Élie : Jésus triomphera de ses adversaires, mais en livrant sa vie par amour. C’est le feu de l’Amour divin qui anéantira tous les opposants au Dieu du ciel.


Remarquons encore que Luc semble porter un intérêt particulier à la Samarie :
- Seul il nous rapporte ce passage qu'y fait Jésus,
- Seul il nous raconte la parabole du Samaritain (10, 30-37) l'histoire du lépreux guéri en reconnaissant : “or c'était un Samaritain !” (17,16).
- Sans doute, l'évangéliste entend-il préparer ainsi ce que, dans son livre des Actes, il relatera sur la conversion de ce pays maudit (Ac 8, 5-25).
- Peut-être, pense-t-il déjà, qu'un autre feu du ciel, un jour, descendra sur les Samaritains : celui de l'Esprit Saint par l'imposition des mains de Pierre et Jean (Ac 8, 17).

Et sur cette route de Jérusalem, l'évangéliste place ici trois petits dialogues qui expriment, avec une vigueur volontairement choquante, les exigences qui s'imposent à quiconque veut suivre Jésus de la croix à la gloire : “Ne fallait-il pas que le Christ souffrit cela pour entrer dans sa gloire ?", expliquera-t-il plus tard.


Je ne m’attarderai pas longuement sur ces trois petits récits qui doivent une partie de leur force à leur schématisme : on devine que ces récits ont tellement été dits, redits et répétés qu’il suffisait d’une concision extrême pour en rappeler toute la profondeur.

La première exigence proposée à qui veut suivre Jésus est d'être prêt à partager l'inconfort et l'insécurité qu'il connaît ; plus nettement que les autres, Luc signale la dure condition itinérante de Jésus.
Or, ne sommes-nous pas tous que des itinérants ici-bas ? Notre véritable patrie est dans les cieux, dira l’épître aux Hébreux.
De plus, l’emploi du titre de “Fils de l'homme” attribué ici à Jésus rappelle que notre pèlerinage ici-bas [même si nous avons beaucoup d’amis qui nous accueillent, au contraire des Samaritains à l’égard de Jésus] comporte, comme pour lui, bien des difficultés, dangers, souffrances et la mort elle-même. Cependant, à la suite de Jésus qui prend sa croix, nous savons que quiconque perd sa vie avec lui la sauvera. St Luc venait de le dire quelques versets auparavant.

Le deuxième dialogue est tout aussi dur et même, révoltant : les cérémonies funèbres constituaient dans le judaïsme une obligation sainte fondée sur le 5ème commandement du Décalogue (Ex 20, 12). Par cette formule, là encore trop concise à force d’être répétée, Jésus veut qu’on s’éloigne du Règne de la mort, de toute mort.
Ceux qui le suivent doivent annoncer le Règne de Dieu. Or Dieu, dira Jésus, n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants. Le chrétien doit porter en lui-même les signes de la Vie, la Vie même de Dieu, lui qui a les issues de toute mort.

Le dernier candidat sollicite un délai pour prendre congé des siens ; c'est ce qu'avait demandé, lors de son appel, Élisée (l R 19, 19-21, 1ère lecture) ; et le prophète Élie le lui avait accordé.
Jésus est plus exigeant. Sa réponse souligne l'urgence de la mission, la nécessité d’une rupture profonde. Il ne faut plus regarder en arrière.

Le meilleur commentaire serait celui de St Paul dans la seconde lecture. Il nous parle de vraie liberté. Plus on se détache, plus on est libre et pour Dieu et pour ses frères. Nous savons combien d’attachements divers nous contraignent et nous empêchent d’accéder au bien que Dieu veut pour nous et pour nos frères !

Baptisés, nous marchons avec Jésus vers l’accomplissement de son mystère pascal en nous-mêmes. Ce mystère se réalisera pleinement avec lui en la Jérusalem céleste !
Oui, notre route est parfois inconfortable, au milieu des signes de mort qui nous entourent, exigeante aussi. Mais notre route va vers le Royaume de Vie : la Vie même de Dieu.


Aussi, soyons comme St Paul qui, avec tant d’autres, avait compris tout cela : désormais, disait-il, “je m'élance pour tâcher de saisir le Christ, parce que j'ai été saisi moi-même par lui, le Vivant !... Mon seul souci : oubliant le chemin parcouru et tout tendu en avant, je m'élance vers le but..." (Ph 3, 12-14).

samedi 29 juin 2013

L'Eglise de Pierre et Paul !

 29 Juin -            Colonnes de l'Eglise - Sts Pierre et Paul

St Pierre et St Paul représentent chacun un aspect essentiel de la vie de l'Eglise.

Pierre a bien connu Jésus pendant sa vie publique ; les évangiles parlent beaucoup de lui, en particulier cet évangile de Matthieu où on le voit proclamer sa foi au Seigneur. D'origine juive, il se consacra surtout au peuple d'Israël, en Palestine, et dans ce qu'on appelait la "diaspora". Sa mission le mena ainsi jusqu'à Rome où il mourut martyr sous le règne de Néron. 

Paul, en revanche, tout en étant lui aussi d'origine juive, était né en plein monde païen. A la suite de sa conversion au Christ sur la route de Damas, il se sentit appelé à annoncer l'Evangile surtout à ce monde païen qu'il connaissait bien, ce qui l'amena à voyager dans tout l'empire romain.

L'un et l'autre, nous dit la préface d'aujourd'hui, ont travaillé, "chacun selon sa grâce", à rassembler l'unique famille du Christ, l'Eglise !

Pierre nous montre donc l'Eglise comme la communion de tous ceux qui ont mis leur foi en Jésus Christ. Quand nous nous retrouvons tout spécialement pour l'Eucharistie le dimanche ou chaque jour, nous sommes en communion les uns avec les autres. Si Jésus a dit à Pierre : "Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise...", cela suppose que nous sommes tous, reposant sur Pierre, les pierres vivantes de l'Eglise de Jésus.
Pierres vivantes unies par le ciment de la foi et de l'amour.
Pierres vivantes qui ont chacune leur place dans la communauté.
Pierres vivantes responsables du dynamisme de toute l'Eglise.

Mais pierres vivantes imparfaites. Il faut le reconnaître, l'Eglise, c'est tout à la fois un peuple de saints et un peuple de pécheurs, à tel point que St Augustin s'attristait dans une formule bien connue : "L'Eglise a des enfants parmi ses ennemis et des ennemis parmi ses enfants !". Et le Cal Newman affirmait : “Dieu s’est humilié jusqu’à l’Eglise !”.
Oui, l'Eglise a ses faiblesses, ses routines, ses maladresses, car nos faiblesses et nos défaillances rejaillissent sur l'ensemble. Oui, mais il faut affirmer en même temps que si cette Eglise est un peuple de pécheurs, c'est aussi et surtout un peuple en marche vers la sainteté.
Et affirmons haut et fort que si l'on voulait un Dieu sans Eglise, comme certains le souhaitent, on aurait vite des églises sans Dieu !

C'est que l'Eglise, malgré ses faiblesses et ses trahisons, continue l'incarnation du Jésus tout au long des siècles et dans le monde entier. Bossuet disait magnifiquement : "L'Eglise, c'est Jésus Christ répandu et communiqué !". Oui, par les sacrements, par l'Eucharistie, par la diffusion de la parole de Dieu, l'Eglise ne cesse de répandre en nous la vie de Jésus Christ et de nous la communiquer, afin qu'à notre tour nous la répandions et la communiquions aux autres !

Paul, lui, par toute sa vie apostolique, nous montre surtout l'Eglise en mission, l'Eglise ouverte aux nouvelles cultures et à ceux qui ne connaissent pas encore le Christ !

Etre chrétien, être d'Eglise, c'est rayonner l'esprit du Christ, l'esprit des béatitudes, en sorte que se vérifie la parole du Seigneur : "Quand j'aurai été élevé de terre, j'attirerai tout à moi !".
Comment Jésus, aujourd'hui, pourrait-il attirer à lui tous les hommes si son Eglise leur apparaît comme une administration prétentieuse et ignorante du monde d'aujourd'hui ? Comme le dit une prière eucharistique (facultative), il faut que l'Eglise apparaisse aux hommes d'aujourd'hui comme "un lieu de vérité et de liberté, de justice et de paix, afin que tout homme puisse y trouver une raison d'espérer encore". C'est souvent ce discours que tient aujourd'hui notre pape actuel, François !

Oui, il faut savoir transmettre le message du Christ, et le transmettre aux hommes de notre temps. Ce fut le but affirmé du pape Jean XXIII, à l'annonce du Concile Vatican II. Et n'ayons pas peur de certains changements, car comme l'écrivait Mme Swetchine, une exilée russe, amie de Dom Guéranger : 
"L'Eglise, sans doute, est immuable comme tout ce qui vient du ciel. Sans doute elle innove, comme il convient au temps, ce grand novateur. Seulement, ce qui change dans l'Eglise n'est pas de la même essence que ce qui ne change pas. Sa partie osseuse reste intacte ; ses changements s'arrêtent à la surface ; c'est à fleur de vérité seulement que ce font ses changements !".

Eglise, communion de tous ceux qui croient au Christ !
Eglise missionnaire ouverte à ceux qui cherchent un sens à leur vie.
Parmi les chrétiens, il y en a qui se reconnaissent mieux dans l'Eglise à la manière de Pierre, et d'autres davantage dans le dialogue avec les indifférents à la manière de Paul !

Oui, les chrétiens d'aujourd'hui sont divers, mais il n'y a qu'une seule Eglise, celle de Jésus Christ, ouverte à tous quelles que soient leurs sensibilités propres.
Comme Mme Swetchine, le grand Cardinal Newman pensait que "l'Eglise ne change qu'à sa superficie, et non dans sa structure ; bien qu'elle ne se transforme qu'afin de demeurer identique".

Aussi, l'essentiel n'est-il pas de travailler avec amour pour le Christ, "chacun selon sa grâce", comme Pierre et Paul, tout à la fois dans l'union mutuelle et l'ouverture aux autres.


A la suite de bien des saints, Mère Térésa avait raison d'écrire avec grand espérance : "Les temps sont difficiles pour l'Eglise (Ils le sont toujours !). Ne vous laissez pas troubler par les commérages. Vous entendrez parler de prêtres et de religieuses qui renoncent, de foyers détruits. Mais n'oubliez pas qu'il y a des milliers et des milliers de prêtres, de religieuses et de familles fidèles. Cette épreuve purifiera l'Eglise des infirmités humaines et elle en sortira plus belle et plus vraie !".

jeudi 27 juin 2013

Epreuve et vision de Dieu !

T.O. 12  Jeudi  2013 -              (Gen 16.1sv)

Un des leitmotiv de toute la Bible est bien celui-ci : Dieu prend l’homme “tel qu’il est et là où il en est“ - et ce n’est pas toujours joli - pour le rendre saint, le faire “marcher“ (“marche devant ton Dieu !“) vers lui, le “Trois fois Saint“ !

Dans cette optique, on peut lire l’épisode d’Abraham, de Sara et d’Agar.

- D’abord, Sara, stérile, met Agar, sa servante, dans les bras d’Abraham afin d’obtenir une descendance. C'était courant, à l'époque. Autres temps, autres mœurs ! Quoique ! Ces mœurs furent encore celles de bien des empereurs du “Saint Empire germanique“ et de très chrétiens rois de France… !
Et remarquons : ce moyen détourné pour s'assurer une descendance était quand même un manque de foi en les promesses divines de la part d'Abraham, "notre père dans la foi", pourtant ! Même les saints ne sont pas sans défaillances !

- Et lorsque Agar est enceinte de par la faute de Sara, celle-ci devint fortement jalouse. C’est quand même un peu fort !

- De plus, Abraham lui-même n’a quand même pas un comportement très noble face à la jalousie de Sara : “Ta servante est entre tes mains ; fais-lui comme il te semblera bon !“. Quand même !
Agar, tellement maltraitée, est obligée de fuir. C’est plus qu’une dispute de femmes, qu’un crêpage de chignons, ce qui, déjà, n’est pas généralement très joli ! (Une scène semblable est représentée sur la miséricorde de l'une des stalles de l'Abbaye de Montbenoît, dans le Jura).

Et c'est pourtant dans ce contexte scabreux qu'il y a un épisode merveilleux : L’ange du Seigneur rencontre Agar près d’une source salvatrice.
Il faut savoir qu'en hébreu "source" se dit “ein“ ce qui veut dire “œil“. La source, c’est “l’œil de l’eau !“.
Alors, l’ange, près de cette “source“ qui pour elle devient un “œil“ de vie, un regard, une vision de vie, lui dit : “Tu auras un fils ! Il s’appellera : “Ismaël“, ce qui veut dire : “Dieu écoute“ (ta plainte).

Et Agar, intelligente, comprend vite et s’exclame : “Tu es El Roî“ (“El“, c’est Dieu ; et “Roï“, c’est la racine du mot "voir").
Autrement dit : “Tu es le Dieu qui me voit !“.
Autrement dit : telle qu'elle est et là où elle en est, Agar reconnaît dans cette circonstance difficile la providence divine, la présence de Dieu ! Dieu est toujours là, même dans nos difficultés !

Et après, sans doute, un moment de réflexion, elle se demande : “Est-ce qu’ici (en cette circonstance difficile) j’ai vu (Dieu) après qu’il m’ait vu ?“ (1). Et elle nomme le puits “Lahaï Roï“, ce qui veut dire : “Au vivant qui me voit !“ (2).

“Etre vu“ et “voir“ ! C’est la réflexion qui traverse toute la Bible. Nous sommes comme le pèlerin du psaume 83ème qui monte vers le temple de Dieu et demande : “Quand irai-je et verrai-je la face de Dieu.“ (3)

“Quand irai-je et verrai-je la face de Dieu ?“ : Nous-mêmes, nous nous mettons en route comme Abraham, notre “père dans la foi“, sans trop savoir où nous allons, ...vers la montagne de Moriah
(encore une racine du mot “voir“ : vers la montagne de la vision, vers Jérusalem, la Jérusalem céleste de l'Apocalypse).
... Nous allons vers la montagne de Moriah ; et nous ferons l’expérience, 
peut-être dans l’absurde apparent, - comme au moment du sacrifice d’Isaac ! -,
en tous les cas, au milieu même de nos fautes, de nos égarements - comme Abraham lui-même vis-à-vis d’Agar - que Dieu ne nous a pas quitté du regard.

Et, un jour, nous serons au seuil de cette expérience, de cette vision de Celui qui nous voit maintenant : nous le verrons alors comme il nous voit. Nous seront alors “divinisés“, disaient les Pères de l’Eglise, après St Jean qui écrivait : alors, "nous serons semblables à lui", à Dieu (I Jn 3.2) !
 
Oui, Dieu prend l’homme “tel qu’il est et là où il en est“. Il est Celui qui sans cesse nous voit. Car il nous destine à “voir celui qui nous voit sans cesse !“.

Notes :

 (1) Après le verbe “voir“, il manque le complément. Ce fut sans doute le Nom de Dieu qui était écrit mais que l’on a supprimé par la suite car, selon la Loi mosaïque, “l’homme ici-bas ne saurait voir Dieu et vivre“ (Cf. Ex. 33.20).

(2) Il faut remarquer un autre passage de la Bible : le serviteur qu’Abraham, préoccupé d’assurer sa descendance, enverra pour trouver une épouse à son fils Isaac, revint avec Rebecca. Or, c’est au puits de “Lahaï Roï“ que les futurs époux se rencontrent (Gen. 24.62) : Au puits “du Vivant qui voit“…, qui prévoit, qui guide son peuple vers l’avenir. Il faut raconter cela aux fiancés. Rien n'est hasard. Tout est providence !
A remarquer encore que dans la Bible les difficultés de la vie, tous ces “combats de vie“, comme celui de Jacob, se terminent souvent par cette interrogation : “Ai-je vu celui qui me voit ?“. Jacob, après son combat avec l’ange, appelle le lieu “Penouël“, ce qui veut dire : “J’ai vu la face de Dieu !“. J’ai vu la face de Dieu et ma vie a été sauve ! (Cf. Gen. 32.30-31).

(3) Naturellement, la Tradition juive n'a pas compris ce verset en ce sens. Voir Dieu ici bas ! Non, ce n’est pas possible. Aussi les scribes (de Tibériade - la Massore -) ont corrigé le verbe transitif par le passif tout en gardant le complément d’objet direct : “Quand irais-je et serais-je vu la face de Dieu ?“ ! Curieux ! Initialement, c'était certainement : “Quand irais-je et verrais-je la face de Dieu ?“ 

Pour retrouver les principaux textes, voir Blog : http://mgsol.blogspot.com/

mercredi 26 juin 2013

Miséricorde divine et humilité !

T.O. 12  Mercredi  2013 -    

J'ai déjà commenté naguère, me semble-t-il, la lecture d'aujourd'hui. Aussi, je me bornerai à une remarque générale sur la "geste" d'Abraham, sur celles des patriarches en général. Et ce sera aussi comme un préambule à la lecture de demain qui nous rapporte une affaire un peu scabreuse, peu honorable pour Abraham.
Il y a beaucoup d'histoires, dans la Bible, qui ne sont pas très morales, peu correctes..., au point que lorsque j’étais collégien, la Bible, dans son intégralité, n’était pas à la disposition des élèves, tant elle recèle pas mal d’histoires peu recommandables, scabreuses !

Pourtant, je trouve qu'il faut savoir ne pas escamoter ces épisodes curieux moralement parlant. Ils illustrent l’un des thèmes les plus fondamentaux qui se développe tout au long de la Bible jusque dans le Nouveau Testament et encore dans l’histoire de l’Eglise ! Et comme je souhaiterais que ce thème soit bien connu et reconnu par tout chrétien - et même et surtout par tout religieux - et également par tout homme d’où qu’il vienne et quel qu’il soit, à l’exemple d’Agar - nous le verrons demain -  une servante - une esclave - égyptienne, de surcroît !

Ce thème est celui-ci : Dieu prend toujours l’homme, prend chacun d’entre nous, “tel qu’il est et là où il en est.
Si Dieu attendait que l’homme soit parfait pour faire alliance avec lui, et bien l’éternité ne lui suffirait pas pour attendre !
Si le père de l'enfant prodigue avait attendu que son fils ait une contrition parfaite pour l'accueillir, je crois qu'il attendrait encore... ; il ne l'aurait jamais reçu !
Elle est importante cette remarque pour notre vie et celles de nos frères. Car Dieu, lui, prend toujours l’homme fait “de chair et de sang“, “tel qu’il est et là où il en est“ avec ses qualités et aussi avec ses défauts qui, souvent, ne sont pas minces !

Penser le contraire est d’ailleurs une hérésie : le pélagianisme, du nom de son propagateur : Pélage (4-5ème siècle), cet austère moine breton (à la tête un peu dure sans doute ; en fait c’était sans doute un Irlandais !).
Pour faire court, on peut dire qu'il soutenait que l’homme peut par sa seule volonté, par ses forces humaines, mener une vie vertueuse et mériter ainsi le ciel. Nul besoin de la grâce de Dieu réduite aux dons naturels accordés par le Créateur (le libre arbitre, la raison, la conscience…).
Remarquons au passage que cette hérésie n’est pas tout à fait éteinte : certains ne sont pas loin de penser - inconsciemment, certes - qu’ils sont en “alliance“ avec Dieu du seul fait de leurs observances vertueuses ou - pire encore - du fait de leurs louables intentions humaines libérées, à leurs yeux, de toute loi trop servile !

Et bien Non ! Il nous faut toujours le secours, la grâce de Dieu. Et c’est la raison pour laquelle le Fils de Dieu s’est fait homme pour que de sa pauvreté, nous devenions riches, comme dit St Paul.

Oui, Dieu prend l’homme “tel qu’il est et là où il en est“ - et ce n’est pas toujours joli - pour le rendre saint, le faire “marcher“ (“marche devant ton Dieu !“) vers lui, le “Trois fois Saint“ !

Ainsi, la Bible nous parle toujours d'un "Dieu lent à la colère et plein de miséricorde !". La première démarche spirituelle et chrétienne, c'est de nous confier à la miséricorde divine. St Benoît ne dit pas autre chose. C'est le fondement d'une vie humble qui veut tout recevoir de Dieu et non d'elle même. "Qu'as-tu que tu n'aies reçu ?", demandait encore St Paul.

Demandons ce fondement de l'humilité. Et sachons que toute suffisance - tout orgueil - est un rempart à la venue de Dieu. C'est une "tour de Babel" ! Seuls, les pauvres de cœur ont, dès ici-bas, un accès auprès de Dieu !

C'est ce que souligne, à sa façon, l'épisode d'aujourd'hui : une humble ouverture à Dieu permet de faire alliance avec Dieu qui seul peut avoir l'initiative... et non pas nous-mêmes, voyons !...

Et la lecture de demain soulignera encore ce leitmotiv biblique : Dieu prend toujours l’homme, prend chacun d’entre nous, “tel qu’il est et là où il en est.


Il n'y a donc aucun motif de désespérance... ou même d'acédie, cette sorte de dépression spirituelle tant combattue par nos ancêtres

lundi 24 juin 2013

Qui suis-je ?

T.O. 12  Dimanche  2013 -     
              
Vous l'avez certainement remarqué : quand un mal ou un malheur arrive dans notre société que l'on qualifie pourtant de hautement développée, tout de suite on cherche un responsable. Cela n'aurait pas du arriver, pense-t-on ! Il doit y avoir une erreur quelque part, erreur humaine, peut-être même une faute, faute professionnelle... Et on se souvient de l'affaire du sang contaminée où l'un des prévenu avait proclamé : "Responsable, oui, mais pas coupable !". Ce fut un beau "tollé" ! Notre monde ne se satisfait pas d'une explication purement matérielle : au-delà d'une défaillance technique, il recherche les coupables comme si, pour exorciser sa peur, pour que tout rentre dans l'ordre, il lui fallait une victime sur qui décharger son angoisse, un bouc émissaire chargé de tout le mal !

Quelqu'un peut être ainsi la victime de la mauvaise conscience d'une société qui cherche à se libérer ; victime de l'injustice des hommes car parfaitement innocent du mal dont on le charge. Il peut se révolter dans l'impuissance ; mais on le sait d'avance : cela ne changera rien !

Cette victime peut choisir encore une voie plus haute : celle qui consiste à prendre sur soi, par amour, le mal d'un peuple - cela est arrivé durant la dernière guerre, par exemple - ! Porter sur soi le mal de l'humanité ! Porter, comme un agneau innocent, le péché du monde, enlever le péché du monde, comme un juste souffrant qui offre sa vie pour le salut de tous !

Cette figure du "Serviteur Souffrant", un prophète du temps de l'exil du peuple élu à Babylone, le "Second Isaïe" l'avait évoquée dans ses oracles, au 6ème siècle avant Jésus Christ.
Et voici qu'un peu plus tard, vers le milieu du 4ème siècle, un autre prophète, Zacharie, le présente à nouveau : il nous est décrit dans notre première lecture ! Il s'agit d'un "Juste" que l'on a rejeté, accablé comme un bouc émissaire, en se débarrassant sur lui de tous les maux pour se donner bonne conscience... : schéma classique et banal jusque là !
Mais voici une nouveauté : Zacharie entrevoit le jour où les hommes ouvriront les yeux devant le résultat de leur méchanceté. Ils reconnaîtront leur péché dans une vraie conversion, et "ils lèveront leurs yeux vers celui qu'ils ont transpercé", dans une attitude pleine de foi et d'espérance. Et pour nous chrétiens, le texte de Zacharie est encore plus significatif puisqu'il fait dire à Dieu, littéralement : "ils lèveront leurs yeux vers Moi, celui qu'ils ont transpercé".

Mais - il faut le reconnaître - ce type de Messie, de Messie souffrant qui nous sauve en donnant sa vie, le peuple d'Israël - et donc les apôtres - ne l'avait pas beaucoup retenu dans sa mémoire collective : ce qu'ils attendaient, c'était un Messie libérateur de la puissance occupante, un Messie vengeur, guerrier, triomphant qui assurerait la victoire de son peuple et ferait régner la paix, la justice.

Jésus, au contraire, semble bien comprendre que c'est ce type de "Juste souffrant" et "donnant sa vie" qu'il doit être pour libérer les hommes du mal intérieur qu'est le péché... !
On peut mesurer la distance entre l'attente des apôtres et le projet de Jésus... Alors, dans notre passage d'évangile, aujourd'hui, Jésus prend l'initiative et il pose la question : "Pour la foule, qui suis-je... et pour vous ?".

La scène est bien connue et l'on sait qu'elle est la réponse de Pierre. Mais notre mémoire a surtout retenu le récit de l'évangile selon St Matthieu qui est centré sur Pierre : "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant", avec la réponse de Jésus : "Tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise ; je te donnerai les clefs du Royaume des cieux...". Puis, Jésus annonce sa passion. Pierre veut l'en détourner et se fait traiter de Satan, car il fait obstacle à Jésus qui a choisi d'être un "Messie souffrant". Cela, c'est le récit de Matthieu, centré sur la personne de Pierre.

Ici, dans notre passage, St Luc procède différemment. La scène n'est pas située à Césarée de Philippe, comme en Matthieu, ni même située dans le temps de façon précise : "Un jour...", dit Luc, et la réponse de Pierre est différente : "Tu es le Messie de Dieu ! ". Le Messie, c'est -à-dire l'envoyé de Dieu, le consacré. Mais cette profession de foi demeure encore ambiguë dans la bouche de Pierre. Jésus va préciser : "il faut que le Fils de l'homme soit rejeté par les Autorités, qu'il soit tué, pour ressusciter le troisième jour".

C'est ici qu'intervient la différence entre Luc et Matthieu. Luc ne nous parle plus de Pierre, ni de sa primauté dans l'Eglise, ni de son opposition à Jésus. Luc nous montre Jésus s'adressant alors à la foule. La foule des disciples, c'est-à-dire nous, les croyants. Et Jésus proclame : "Celui qui veut marcher à ma suite, qu'il renonce à lui-même, qu'il prenne sa croix, chaque jour, et qu'il me suive...".

Ainsi, Luc enchaîne directement la profession de foi de Pierre, l'annonce de sa passion et les exigences pour nous, ses disciples. Pour Luc, dans ce passage, Pierre devient le type même du croyant, du disciple, de celui qui marche à la suite de Jésus. Pierre devra accepter que Jésus soit un "Messie souffrant", le "Serviteur Souffrant".
Bien plus, pour être disciple de Jésus, il faut accepter de le suivre sur ce chemin entrevu par le prophète Zacharie : suivre Jésus jusqu'à la Croix, en acceptant par amour de perdre sa vie, en levant les yeux avec foi vers la croix de Jésus, "vers moi, dit Dieu, Celui que l'on a transpercé !". C'est là, en Jésus - Dieu et homme - où se manifestent de façon suprême la bonté, la miséricorde divines envers tous les hommes.

Tout comme nous-mêmes, Pierre et les disciples auront du mal à accepter que Jésus soit "Messie Souffrant". Certes, un peu plus tard, la Transfiguration viendra apaiser le trouble que cette annonce avait dû provoquer. Il n'empêche, dans cet épisode, Jésus se présente bien comme le Messie qu'il a choisi d'être, à contre-courant des attentes de son peuple : un "Messie" qui sauve par la croix.
Ce ne dut pas être facile pour Jésus, et les tentations au désert nous le montrent bien. Pour Jésus, c'est un choix, un choix mûri dans la prière, comme le souligne St Luc, lui que l'on appelé "l'évangéliste de la prière" : "Un jour Jésus priait à l'écart !" Et c'est après la prière de Jésus qu'il est précisé : "Comme sers disciples étaient là, il les interrogea : pour vous, qui suis-je ?".

Au cours de cette Eucharistie, Jésus nous interroge : pour toi, qui suis-je ? Et il nous avertit : "Celui qui veut être mon disciple, qu'il renonce à lui-même, qu'il prenne sa croix, chaque jour, et qu'il me suive". Devant la spirale de la violence, le déchaînement du mal dans notre monde et la recherche incessante de boucs émissaires, il nous faut humblement regarder la croix, essayer de suivre Jésus sur le chemin de la vie donnée par amour pour qu'enfin le mal soit vaincu, en moi et dans le monde !

Jean Baptiste !

24 Juin 2013 -        Nativité de Jean-Baptiste.    

Vous connaissez l'histoire de la naissance de Jean-Baptiste. Dieu promet à Zacharie, son père, comme autrefois à Abraham (il y a un parallèle à faire !), le plus merveilleux cadeau, celui d'un enfant.
Mais le vieillard reste sceptique ; il s'oppose à cette annonce : Il est trop vieux ; il n'a plus de force… Aussi, réclame-t-il un signe.
Et il n'obtient que le signe de son doute : il est réduit au silence ; il ne peut plus parler puisqu'il n'a pas cru ! Oui, le manque de foi rend sourd à la Parole de Dieu ; et alors les lèvres de l’incrédule sont paralysées. En coupant la communication avec Dieu, il réduit Dieu au silence : Il ne peut plus en témoigner !

Mais malgré notre surdité, Dieu, lui, agit toujours. Voici qu’un père radieux tient dans ses mains le "Don de Dieu" - c'est la signification du nom de Jean -. Et ce père reconnaît enfin ce "Don de Dieu. Du coup, l'Esprit-Saint ouvre ses lèvres. Il peut parler de Dieu ! Il bénit Dieu ! Il témoigne ! 
Oui, l’homme, réconcilié avec Dieu, peut à nouveau communiquer. Il peut communiquer Dieu aux autres hommes grâce à un “Don de Dieu“, reconnu comme tel.

Et cette réconciliation de Zacharie avec Dieu ne peut être vécue finalement que dans une profonde communion entre le père et son enfant. Zacharie revit la même aventure qu'Abraham, celle d'une véritable paternité.
[et ce que je dis là de la paternité, je le dis aussi de la maternité !].
Tous deux, Abraham et Zacharie ont connu la plus grande épreuve d’une vie, celle de la stérilité, de la solitude. Cependant, l'un et l'autre, comme tout homme, ont été visités par la grâce de Dieu : Je te donnerai un enfant : Isaac, "Dieu a ri", Jean-Baptiste, "Don de Dieu".

Ainsi, réconciliés avec Dieu grâce à l'extraordinaire miracle de la paternité (paternité charnelle ou spirituelle), Abraham et Zacharie tiennent leur petit garçon dans leurs bras et s'écrient : “Je suis vraiment père. Gloire à Dieu ! De par Dieu, je suis père ! Et je rends grâce à Dieu en marquant cet enfant du signe de l'Alliance avec Dieu, en le marquant d’un signe de communion avec Dieu…, du signe de la circoncision…, du signe du baptême !“.
Tant il est vrai que toute paternité vient de Dieu, que toute communion avec son enfant (charnel ou spirituel) ne peut donc être véritablement vécue que dans la communion avec Dieu-Père. C’est le même geste que poseront Marie et Joseph au jour de la présentation de Jésus au temple ! Le signe d’une Alliance avec Dieu, grâce à leur enfant, Jésus !

Mais cette communion du Père avec son enfant, vécue dans la communion avec Dieu-Père, ne peut se réaliser sans une communion parfaite du père avec son épouse, mère de l’enfant !
Certes, Elisabeth était toute donnée à son époux ; ils étaient unis ! Mais ils ne pouvaient plus profondément communiquer, Zacharie étant devenu muet. Tant il est vrai que la communion entre époux se détériore quand l’un ou l’autre ou tous les deux s’enferment plus ou moins dans la sphère close de leurs égoïsmes réciproques, de leur “moi“ humain. Ne communiquant plus avec Dieu, on n’arrive plus à communiquer véritablement même entre personnes qui s’aiment !
Il faut alors, d’une manière ou d’une autre, une grâce divine. Il faut qu’arrive un “don de Dieu“ - et reconnu comme tel -, de sorte que tous puissent s’exclamer : “C’est un don de Dieu !“. C’est en reconnaissant le “don de Dieu“ en bien des circonstances qu’on communie davantage les uns avec les autres et que tous peuvent, en famille si je puis dire, s'unir grâce au “don de Dieu“ !

Et si on continuait la vie de Jean-Baptiste, on le verrait poursuivre sa mission de réconciliation, de communication des hommes avec Dieu et, de ce fait, des hommes entre eux ! C'est donc d'abord la famille ; et puis, ensuite, les voisins qui sont stupéfaits et qui commencent à annoncer la "Bonne Nouvelle" du “Don de Dieu“, dans la montagne de Judée. On racontait ces merveilles, on s'interrogeait sur l'avenir de cet enfant. La langue, ici, retrouve sa fonction : ce ne sont ni commérages, ni médisances ou calomnies, mais proclamation de "Dieu avec nous". Oui, la communion avec Dieu engendre la communion entre les hommes !

Et ce fut toute la mission de Jean-Baptiste par son baptême de conversion dans le Jourdain. Communiant avec Dieu, il met les hommes en communion et avec Dieu et les uns avec les autres !
Certes, il y aura l’échec apparent avec Hérode. Et Jean-Baptiste sera décapité. Mais sa passion en cachera une autre, sa mort annoncera le martyre suprême de Jésus-Sauveur.   Et, en un juste retour, la résurrection de Jésus et son entrée dans la gloire annoncent celle de Jean. Oui, en Jésus, tous les hommes peuvent être réconciliés avec Dieu. Et, en cette réconciliation, tous les hommes peuvent véritablement communiquer entre eux.


Voilà ce qu'annonçait Jean-Baptiste depuis sa naissance jusqu'à son martyre en étant le précurseur de Jésus. Puissions-nous continuer son œuvre de réconciliation, de communion, de communication. Et ainsi, nous aussi, nous proclamerons les merveilles de Dieu en Jésus-Christ, les "dons de Dieu" pour chacun d’entre nous !

vendredi 21 juin 2013

St Joseph à chaque Eucharistie !

Saint Joseph invoqué à chaque Eucharistie !

Un décret de la Congrégation pour le Culte divin et la discipline des sacrements, en date du 1er mai 2013, en la fête de saint Joseph travailleur, et publié le 19 juin dernier par le Saint-Siège demande
"que le nom de Saint Joseph, Epoux de la Vierge Marie, soit désormais ajouté aux Prières eucharistiques II, III et IV de la troisième édition typique du Missel Romain, après le nom de la Bienheureuse Marie toujours Vierge".

Personnellement, j'en suis fort heureux. Et je ne ferai aujourd'hui que reprendre ce que le Saint-Siège explicite en formulant cette demande :

"Placé à la tête de la Famille du Seigneur, Saint Joseph de Nazareth a accompli avec générosité la mission reçue de la grâce dans l’économie du salut en tenant lieu de père à Jésus.

En adhérant pleinement au mystère salvifique de l’humanité, qui en était à ses débuts, il est devenu
- un modèle exemplaire de cette généreuse humilité que la foi chrétienne exalte au plus haut point,
- et un témoin de ces vertus communes - humaines et simples - qui sont nécessaires pour que les hommes deviennent de vertueux et authentiques disciples du Christ.

C’est en mettant en œuvre ces mêmes vertus que cet homme juste,
- qui prit soin de la Mère de Dieu avec amour,
- et se dédia avec un joyeux dévouement à l’éducation de Jésus Christ,
est devenu :
- le gardien des trésors les plus précieux de Dieu le Père,
- et le soutien du Corps mystique, c’est-à-dire de l’Eglise, lui que le peuple de Dieu n’a cessé de vénérer tout au long des siècles.

Dans l’Eglise catholique, les fidèles ont toujours manifesté d’une manière ininterrompue une grande dévotion envers saint Joseph, honorant solennellement et constamment la mémoire de l’Epoux très chaste de la Mère de Dieu et du Patron céleste de toute l’Eglise,
tant et si bien que, durant le très saint Concile Œcuménique Vatican II, le Bienheureux Jean XXIII prit la décision d’ajouter son nom dans le très vénérable Canon Romain.

Ayant présent à l’esprit la communion des saints, qui nous accompagnent dans le cours du temps comme pèlerins en ce monde pour nous conduire au Christ et nous unir à lui, le Souverain Pontife Benoît XVI a bien voulu accueillir et approuver les vœux très pieux, formulés par écrit, en provenance de multiples lieux, - une décision qui a été confirmée récemment par le Souverain Pontife François -.

Ainsi, au vu de ce qui précède, cette Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements, en vertu des facultés concédées par le Souverain Pontife François, décrète très volontiers que le nom de Saint Joseph, Epoux de la Vierge Marie, soit désormais ajouté aux Prières eucharistiques II, III et IV de la troisième édition typique du Missel Romain, après le nom de la Bienheureuse Marie toujours Vierge : "...la Mère de Dieu..., le Bienheureux Joseph, son époux..."


Et je me permets une réflexion à propos de nos défunts mariés (nos parents, par exemple) : quand nous faisons mémoire de l'un, nous faisons mémoire de l'autre ! Une réflexion qui serait à développer avec le concours de la Vierge Marie et de son époux St Joseph !

Je me souviens que le P. Dominique BARTHELEMY o.p. confiait un jour qu'il gardait une grande affection pour ses parents. Cependant, son père était ou se disait athée. Mais il avait promis à son épouse, lors de leur mariage, qu'elle serait libre d'éduquer leurs enfants dans la religion chrétienne. Et mêle, par la suite, il accompagnait parfois sa famille à l'église, le dimanche, sans prendre part à la communion, évidemment. Et il est décédé sans changer apparemment de sentiments. Sa mère, éplorée et inquiète du destin éternel de son mari, s'était confiée à un prêtre. Celui-ci lui rétorqua : "Pensez-vous aller au ciel ?" - "Je l'espère fortement", répondit-elle. - Et vous croyez que celui qui a dit : 'Ceux que Dieu a unis, que l'homme ne les sépare pas' puisse enfreindre lui même cette consigne dans l'Eternité ?".
La mère du P. Barthélémy fut rassurée. Elle comprit mieux ce que St Paul voulait dire "Portez les fardeaux les uns des autres !". Dans l'union conjugale, elle portait son mari devant Dieu qui - elle en était alors persuadée - avait certainement accueilli son mari près de lui, à cause de leur union sacramentelle.


Prions désormais et Marie et Joseph ensemble pour toutes nos familles !

Les tournesols !

N. B. : Le 19 Juin fut marqué en ce Prieuré "La Paix Notre-Dame" par le jubilé sacerdotale de 25 ans du P. Bruno Delaroche, curé de Château du Loir, et par celui de vœux monastiques de Mère Marie-Maximilien, Prieure.
 A cette occasion je leur ai adressé un "mot" amical. Je n'avais nullement l'intention de le transmettre par ce blog ou par e-mail. Cependant, plusieurs m'ont invité à le faire. Ceux qui liront voudront bien se placer en cette circonstance particulière et s'associer à l'action de grâce des Jubilaires. Merci.

Jubilé - 25 ans -
de sacerdoce du P. Bruno Delaroche, curé de Château du Loir
de vœux monastiques de Mère Prieure - "La Paix Notre-Dame" -    

Quand le Père Bruno Delaroche et Mère Prieure ont décidé - bien légitimement - de fêter ensemble, en ce Prieuré "La Paix Notre-Dame", leurs vingt-cinq ans de sacerdoce ou de vœux monastiques, j'en fut très heureux !
Evidemment !
- Pour eux-mêmes d'abord : une heureuse occasion d'action de grâce commune et de prières, en vue, naturellement, de leurs futurs jubilés de cinquante, soixante, soixante-dix ans... et peut-être plus... ! Soyez donc assurés, Cher Père Curé et Révérende Mère Prieure de nos prières !
- J'en fus heureux aussi pour moi-même, car je me suis dit : une bonne occasion de ne pas faire d'homélie, ou plutôt d'en écouter une ; c'est désormais si rare pour moi ! Mais le Père Bruno m'a ensuite confié son ennui bien compréhensible de s'adresser aujourd'hui non pas à Mère Prieure, évidemment, mais à lui-même en même temps, en cette occasion commune.

Vous êtes donc contraints, bien malgré moi, de m'entendre aujourd'hui encore ! Et que dire ? Devant vous, cher Père, je ne n'ose pas prendre un style "homélie" ; et vous-même, Ma Mère, vous m'entendez si souvent, trop à n'en pas douter... !

Alors j'ai pensé résoudre le problème en vous adressant simplement à tous deux un mot amical pour rejoindre votre démarche humaine, spirituelle et ecclésiale. Aussi, je me suis dit que, dans votre pensée, ces vingt-cinq ans de sacerdoce ou de vie monastique ne pouvaient être imaginés autrement que comme un immense bouquet de fleurs, de fleurs visibles et invisibles.

C'est alors que je me suis souvenu... ! Au cours du dernier été, durant mon repos imposé, j'ai rencontré un agriculteur qui, près de son champ, m'avait lancé fièrement, avec un grand geste et un large sourire : "J'ai semé du tournesol !". Sans doute rêvait-il déjà aux larges fleurs ensoleillées.
D'ailleurs quelques tiges s'étaient déjà élevées avec leurs larges feuilles solides et frustres. Quelques jours plus tard, la pluie et la chaleur se succédant, une poussée brusque s'était produite comme un assaut vers le ciel. Et un matin, j'ai vu ici ou là, dans l'étendue verte, quelques fleurs - une vingtaine peut-être - qui semblaient soulever une lourde paupière et chercher. Elles venaient de s'ouvrir. Déjà grisées de lumière, elles tâtonnaient, aurait-on soupçonné, pour s'orienter vers le soleil.

Quand je suis encore repassé quelques jours plus tard, il n'était plus possible de les compter. Tout le monde n'avait pas ouvert les yeux, mais il y avait partout des fleurs qui levaient la tête. Puis, ce fut la foule immense : des milliers et des milliers de petits soleils éclatants, tournés vers l'unique.

Certaines fleurs semblaient désorientées. Mais ce n'était qu'une hésitation temporaire. Toutes les autres se mouvaient lentement, leur regard accompagnant la course du grand soleil. Une multitude de rayons jaunes fascinés par l'astre du jour ! Certes, le temps était souvent couvert l'été dernier - on s'en souvient - ! A travers le ciel gris, l'œil ne pouvait percevoir la position du soleil. Mais les tournesols regardaient à travers les nuages dans la bonne direction.

J'ai appris ensuite que cette vaste fleur est un "capitule", c'est-à-dire un réceptacle qui peut porter plus de mille cinq cents fleurs minuscules, serrées les unes contre les autres, et qui donneront autant de graines oléagineuses. Et tout ce monde floral était entouré d'une couronne de flammèches jaunes. Ainsi, dans l'océan des "fleurs" de tournesol, chacune contenait des centaines de fleurs serrées, modestes, réduites à l'essentiel : le désir solaire les mouvait toutes ensemble.

Notre Seigneur parlait, lui, des lys des champs. Je vous dédie ma parabole et mes "fleurs" de tournesol s'éveillant au soleil et qui veulent le suivre "à son image et ressemblance" pour recevoir de lui mouvement, vie, et fécondité.

L'exégèse de ma parabole est facile, me semble-t-il. Vous la ferez vous-mêmes, cher Père et Révérende Mère. Mais pensez cependant : les trois-cents-soixante-cinq tournesols annuels de vingt-cinq ans doivent recouvrir un vaste espace humain et spirituel tout à la fois. J'ai fait le calcul : 9125 tournesols, au moins. De ce nombre, il est certain, cher Père, que St Augustin, bien connu de vous, en donnerait une ou plusieurs explications quelque peu pythagoriciennes. Mais je pense qu'il retiendrait notre attention principalement sur l'huile qu'ont pu donner tous ces tournesols, une huile de bienfaits, une huile sacramentelle, une huile de grâces divines.

Et cette réalité nous pousse à imaginer plus encore, comme une prière : si l'on savait véritablement ouvrir les yeux, partout, sur les "tournesols" humains que Dieu a créés "à son image et ressemblance"..., s'il était possible, tous ensemble, de nous laisser former et transformer par le Soleil de tous les univers..., si nous savions, aux matins de brume, rester fixés sur lui..., quel bonheur serait le nôtre !


Certes, ma parabole ne retient que quelques aspects de l'existence illuminée des tournesols. Je n'ai parlé ni des tiges grossières, ni des feuilles plus ou moins dentelées comme scies, ni des adaptations subtiles qui permettent au pédoncule de tourner insensiblement au long du jour avec une lente élégance. C'est vrai ! Et je sais que pour la fleur il faut tout cela ! Mais je préfère aujourd'hui rester illuminé, dans votre action de grâces, par vos vingt-cinq fois trois-cent-soixante-cinq tournesols tournés vers le Soleil divin !

lundi 17 juin 2013

Apôtre du Christ !

T.O. 11 Lundi             (II Co. 6.1-10)

Paul, après s’être expliqué sur son comportement qui, selon lui, a pu entraîner quelques malentendus ou incompréhensions chez les Corinthiens, a très vite élevé le débat sur sa mission, sur la mission de tout apôtre, de tout missionnaire, de tout disciple du Christ :

- Pour écarter les déviances qui peuvent s’infiltrer dans la proclamation de l’Evangile, il faut toujours s’en remettre au Christ qui, seul, ouvre l’esprit à l’intelligence des Ecritures (“la lettre tue, disait-il, mais l’esprit vivifie), en envoyant son Esprit.

- Avec le Christ se réalise comme un dévoilement de l’Alliance avec Dieu. Celle-ci était encore “voilée“ avec Moïse (allégorie du “voile“). Avec le Christ, elle est transparente alors même que le missionnaire (tout baptisé) vit parfois difficilement le contraste
entre la condition de son existence humaine vouée à la mort
et sa condition de fils de Dieu (baptême) qui lui donne accès déjà à la Vie éternelle avec Dieu.
Mais ce contraste manifeste finalement la puissance victorieuse du Christ contre les forces de mort qu’il rencontre ici-bas et contre la mort elle-même.

- Ce dévoilement de l’Alliance avec Dieu, opéré par le Christ, expose chacun à être à nu, à découvert non pas tellement devant les hommes, mais devant le Christ qui connaît les replis de chaque conscience. Et c’est dans cette pensée (uniquement) que Paul a agi, même si son comportement n’a pas toujours été compris.

- Mais l’amour du Christ manifesté dans le mystère pascal de mort et de vie le submerge, “l’étreint“ à tel point qu’il ne peut connaître le Christ à la manière humaine, “selon la chair“ (comme certains l’affirment). Avec le Christ, il est déjà “créature nouvelle“ ; le monde et les manières du monde (les “apparences“), c’est déjà du passé, même s’il faut encore en tenir compte pour mieux communiquer le message du Christ ou pour se défendre face à ses adversaires.

On pourrait résumer sa pensée : En recevant l’Esprit qui donne l’intelligence des Ecritures et nous dévoile le mystère d’Alliance avec Dieu opéré par la victoire du Christ sur la mort, Paul vit déjà, en toute transparence, de la Vie du Ressuscité, l’amour du Christ le submergeant.

Arrivé à ce moment de réflexion, conscient d’être l’instrument de l’œuvre du Christ en chacun, Paul exhorte ses lecteurs (c’est notre lecture) avec enthousiasme et presque passion : le temps se fait court, dit-il. C’est le moment favorable. C’est le jour du salut. De tout son être, Paul ne cesse de tendre vers le Christ en sa gloire, tant il désire ce jour éternel, le Jour de Dieu ! Ce sera après cette vie d’ici-bas… c’est-à-dire après demain…, demain…, Non ! C’est déjà aujourd’hui… ! 
C'est le "Jour unique" (Yom erad), selon l'expression du début de la Genèse et celle du dernier des prophète, Zacharie, à la fin de son livre !

Il l’affirme d’autant plus - et là, il se répète – que s’il fallait fournir des lettres de créance auprès des Corinthiens, elles ne consisteraient pas en des attestations de grands personnages (comme certains le font), elles ne feraient que décrire la puissance de Dieu qui se déploie dans sa faiblesse :
- Malgré les épreuves (afflictions, contraintes, détresses, prison… etc…), il ne cesse de recevoir vertus et grâces (pureté d’action, science de Dieu, patience, bonté…).
- Dieu lui donne, par sa justice, des armes défensives et offensives pour le combat de la Vie.
- Jusque dans le contraste de sa vie, il est sûr de Dieu :
° Certains le tiennent pour imposteur, mais il est reconnu véridique et devant les Corinthiens et surtout devant Dieu.
 ° Certains parlent de lui comme d’un inconnu, mais il est bien connu et devant les Corinthiens et surtout devant Dieu.
° Certains le tiennent pour mort alors qu’il est bien vivant et devant les Corinthiens et surtout devant Dieu.
° Certains le méprisent parce que pauvre alors qu’il est riche de Dieu… etc

C’est toujours le mystère de Pâques que Paul contemple en le découvrant en sa propre existence. Il affirmera un peu plus loin : Vous connaissez la générosité du Christ, qui, pour nous, de riche qu'il était, s'est fait pauvre, afin que, par sa pauvreté, nous deveniez riches ! (Cf. 8.9).