dimanche 30 mars 2014

L'aveugle qui voit !

4e Dimanche de Carême 2014.A 

Quelle merveilleuse aventure que celle de cet aveugle de l’évangile. On est facilement ému par ses tribulations, ses conflits avec les Pharisiens, sa ren-contre avec Jésus, ses dernières paroles si émouvantes : "Je crois, Seigneur !".

L’événement a lieu à l’occasion de la fête de Soukkot ; cette fête, appelée aussi “fête des tentes”, faisait mémoire des merveilles accomplies par Dieu au cours de la traversée du désert par le peuple hébreu. Entre autres, et principalement :
- le miraculeux jaillissement de l’eau à partir du rocher frappé par Moïse pour étancher la soif de tout le peuple ;
- et l’apparition de la colonne lumineuse qui conduisait le peuple tout au long de leur périple.
Ces deux éléments - l’eau et la lumière - rappelaient à leur façon la délivrance d’Egypte et l’entrée en Terre promise.

Et voici que Jésus reprend ces deux éléments :

- Il demande à l’aveugle d’aller se laver dans la piscine de Siloë qu’alimentait, par un fameux canal, l’eau qui jaillissait du rocher à l’extérieur des remparts, à la source de Gihon.
Cette source de Gihon qui rappelait celle du désert était un autre lieu très symbolique de délivrance depuis la déroute des armées de Sennachérib, au temps du prophète Isaïe (8ème s.).
Et c’était cette petite source située au côté droit du temple qui, un siècle plus tard, était devenue, dans la vision très imaginative d’Ezéchiel, ce grand fleuve qui se jetait dans le Jourdain et dans la mer morte (symbole de tous les péchés) pour la purifier et la rendre féconde.
“Va te laver dans la piscine de Siloë !”. C’était demander à l’aveugle cette foi qui avait permis aux Hébreux de passer, par la mer rouge, de la “servitude de l'homme au service de Dieu”, de traverser le Jourdain pour être purifié comme naguère Naaman, le Syrien, d’aller s’abreuver à cette source que Dieu ne cessait d’alimenter pour le salut du peuple.

- De plus, la fête voulait rappeler la nuée lumineuse qui conduisait le peuple tout au long de leur chemin de délivrance à travers le désert. Aussi, durant ces jours de fête, tout Jérusalem était illuminé avec un luxe incroyable et des moyens qu’on a peine à imaginer aujourd’hui.
Et c’est justement en entrant à Jérusalem au dernier jour de cette fête de Soukkot que Jésus déclare solennellement : “Je suis la lumière du monde. Celui qui vient à moi ne marchera pas dans les ténèbres”.

Le récit de notre évangile veut donc montrer tout à la fois la mission de lumière accomplie par Jésus en ce monde, et le conflit dramatique qui en résulte, opposant violemment entre elles la lumière qui permet de voir et les ténèbres : "La lumière est venue dans le monde, avait déjà dit St Jean, et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière !" (3/19).

Il est important de comprendre les circonstances de cette guérison qui nous interpellent nous-mêmes : comment nous-mêmes réagissons-nous devant cette “Lumière du monde” qu’est le Christ, nous qui avons été purifiés par les eaux du baptême ?  Il suffit alors de reprendre attentivement le récit.

- Il y a d'abord l'attitude des PHARISIENS.
Parmi eux, certains se demandent avec bonne foi qui est cet homme qui accomplit de tels miracles ; mais la plupart ont un parti pris évident contre Jésus. Ils sont murés dans leur suffisance, leur orgueil, leur contentement d'eux-mêmes : "Nous savons…" - "Nous voyons… !" - "Sommes-nous des aveugles, nous aussi ?…". Ils ne veulent pas voir. C'est le "péché contre la lumière", comme dira St Jacques. Alors, ils s'enfoncent dans d'irrémédiables ténèbres. La lumière, au lieu de les éclairer, les aveugle davantage. - C'est une situation dramatique qui culminera au moment de la passion du Christ.
Puisse la lumière de notre intelligence ne pas nous enfermer sur nos petites convictions, nos petites certitudes, avec suffisance ou paresse, mais nous ouvrir à la lumière même de Dieu !

- Le récit met encore en scène LES PARENTS de l’aveugle ! Leur attitude, à eux, c'est la peur de se compromettre avec Jésus. Ils refusent d'opter ! "Nous n'en savons rien !". C'est encore un "péché contre la lumière" qui les empêche de rencontrer le Seigneur, d'être éclairés.
Cette erreur est toujours actuelle : le silence de notre foi, par respect humain, par crainte de l'opinion d’autrui, par peur de se compromettre. On oublie facilement le Christ en le reléguant dans la sphère du privé, uniquement. Pourtant, le Seigneur ne cesse de nous redire : "N'ayez donc pas peur !".

- Imitons plutôt L'AVEULGE-NE, un des personnages les plus attachants de l'Evangile. C'était un mendiant ignoré, méprisé. Lui seul pourtant va savoir proclamer hardiment la vérité devant des gens considérés, instruits, devant les autorités.
Remarquez sa sincérité : il raconte les faits avec exactitude !
Remarquez son courage. Il accepte les insultes, les outrages à cause du Christ ! Remarquez son humilité devant Dieu. Il est le type des “Pauvres de Dieu”. Parce qu'ils sont humbles, petits à leurs propres yeux, ils reçoivent la lumière !

Cependant, il n'accède pas d'un coup à la lumière ; et ce n'est pas un des moindres intérêts de ce récit que ce cheminement intérieur et très progressif de cet homme ! En cela, il est un modèle de loyauté, de docilité à la grâce, à l'Esprit-Saint. Tout au long de l’épisode dramatique, on le voit s'élever, de degré en degré, à une intelligence spirituelle plus haute et de l'événement dont il a été le bénéficiaire, et de la Personne même du Christ !
+ Au début, Jésus n'est encore pour lui que "l'homme appelé Jésus", et sa propre guérison qu'une aventure inouïe, inexplicable. "Où est-il, ce Jésus ?", lui demande-t-on. Il n'en sait rien !
+ Puis, témoin des divisions des Pharisiens, il commence à comprendre que sa guérison a une signification religieuse. Alors, il n'hésite pas à dire que ce Jésus est un "prophète", et sa guérison, par conséquent, un miracle et un "signe".
+ Enfin, quand les Juifs durcissent leur position et font décidément de Jésus un pécheur, l'aveugle s'affermit, de son côté, dans la sienne : Jésus est un homme religieux ; c’est parce qu’il prie que Dieu l’exauce. Bien plus, il ajoute : "Si cet homme-là ne venait pas de Dieu, il ne pourrait rien faire !". Ces paroles courageuses provoquent son expulsion !
+ L'Aveugle guéri en est là quand Jésus le trouve. On dirait qu'il le cherchait. L'aveugle est au seuil de la foi. Pour accéder à la pleine lumière, il lui faut encore cette rencontre ; et Jésus ne la lui refuse pas !
+  "L'ayant trouvé, Jésus lui dit : "Crois-tu au Fils de l'Homme ?". Il répondit : "Et qui est-il, Seigneur, pour que je crois en lui ?". Admirable disponibilité : son cœur est prêt à croire. Puissions-nous avoir cette disposition loyale - et qui n'est pas naïveté, bien sûr -  pour recevoir la lumière, la vérité, pour recevoir Dieu lui-même ! 
"Jésus lui dit : "Tu le vois; c'est lui qui te parle" !
Alors il dit : "Je crois, Seigneur".  Et il se prosterna devant lui".      

L'aveugle accepte le témoignage de Jésus. Ses yeux s'ouvrent : il voit Jésus des yeux de la foi, et pas seulement de ses yeux de chair guéris par le miracle.  Il voit en lui l'Envoyé de Dieu, le Sauveur du monde.
Non seulement il connaît désormais les choses qu'il voit ; mais il reconnaît celui qui le fait voir. En lui, il reconnaît Dieu qui s’était déjà manifesté dans le désert, lors de la traversée de la mer rouge et par l’eau qui sortait du rocher... Et Dieu vient de le purifier dans cette eau qui sort du côté droit du temple !

Ainsi, le mendiant, l'aveugle-né, l'homme estimé "péché" et rien que "péché" depuis sa naissance, devient le "signe" vivant de l'homme illuminé et régénéré par Jésus qui ne peut agir que par puissance de Dieu !

Comme les Hébreux au désert, comme cet aveugle-né, nous aussi, nous avons un itinéraire spirituel à parcourir. Nous devons rencontrer le Christ dans sa parole, dans ses sacrements, dans la prière… Ce sont ces rencontres personnelles avec Jésus qui donnent à notre foi sa véritable dimension !

Alors, en toute circonstance, dans le secret du cœur ou devant les hommes, nous pourrons dire, nous aussi : "Je crois, Seigneur" !

vendredi 28 mars 2014

L'amour d'une prostituée !

Carême  3. Vendredi                                                             (Osée)            
                             
La lecture est du prophète Osée ! Aussi, comme pour Isaïe et Jérémie, je me permets quelques mots sur cette grande figure de ce “petit prophète“  qui a eu une grande influence !

Tout son message peut se résumer dans la première phrase de son livre : “Le Seigneur dit à Osée : « Va, prends-toi une femme se livrant à la prostitution. Car ce pays ne fait que se prostituer en se détournant du Seigneur »“.

Il est très probable qu’Osée a déchiffré le “mystère de l’Alliance“, de l’Amour de Dieu pour les hommes à partir de sa vie conjugale qui, semble-t-il, n’a pas été très heureuse !  Car Dieu aime, lui aussi ! C’est un Dieu d’amour ! Partout, dans son livre, l’union avec Dieu a des résonnances nuptiales. Et depuis lors, on ne trouvera pas de meilleure comparaison pour exprimer l’“Alliance avec Dieu“ que l’amour de l’homme et de la femme, malgré tous les avatars qu’il peut parfois rencontrer !

J’avoue simplement que cela me plaît ! Croyez-vous qu’aux noces de Cana (“premier signe“ de Notre Seigneur, selon St Jean), Jésus ait fait un simple tour de “passe-passe“ en transformant l’eau en vin par déférence envers les époux d’une noce de village ?
Non ! Jésus pensait toujours dans les dimensions à la fois verticales et horizontales. Toujours, le Verbe de Dieu fait chair, s’exprimait divinement avec son intelligence humaine ! Toute réalité avait pour lui une telle consistance que, sans cesse, il invitait à partir du réel  - quel  qu’il soit, même “scabreux“ moralement - à découvrir une vérité plus réelle encore ! Ainsi, pour les noces de Cana ! Car, en fait, de quelles noces s’agissait-il ? St Augustin répondra : “Quoi d’étonnant que Jésus soit venu dans cette maison pour des noces, lui qui est venu dans le monde pour des noces ? Et quelles noces ! Les noces de Dieu avec l’humanité… !".

Et St Paul ne déclare-t-il pas à propos du mariage : “Ce mystère est grand ! Je le dis en pensant au Christ et à son Eglise !“ (Eph 5.23).

Et que dire encore du dialogue entre la Samaritaine et Jésus ? Celle-ci ne devait pas avoir, elle non plus, une vie maritale très heureuse (cinq maris !). Mais était-ce là le plus important ? Jésus l’oriente vers le culte “en esprit et vérité“ ! Et, sur ce plan, les cinq maris de la Samaritaine ne sont-ils pas surtout les cinq divinités païennes importés par les Assyriens après la conquête de Samarie (cf. 2 Chro. 17.30) et dont il fallait se séparer pour vivre l’“Alliance avec Dieu“ , en "esprit et vérité" ?
Du coup, les hommes de la Samaritaine passent au second plan. On n’en parlera plus. Cela me plaît ! Dieu prend toujours l’homme tel qu’il est et là où il en est : il descend toujours vers lui pour le faire monter, remonter à des réalités plus importantes ! La seule condition qu'il demande à l'homme, c'est de reconnaître sa pauvre situation avec grande humilité, comme le fit David après sa faute !
Notre Dieu est le "Dieu vivant" qui se met en prise, si je puis dire, avec des hommes "faits de chair et de sang". Il est bon de voir comment cette “empoignade“ évolue et se termine. C’est plus précieux que tous les traités abstraits de morale, expliqués parfois avec un peu de superbe - ce qui n'est pas la méthode "pastorale" de notre Dieu-Berger - ! Certes, ces traités donnent des principes absolument nécessaires, en conformité étroite avec la Parole de Dieu. Mais ils ne manifestent souvent aucune sève de vie, la sève de l’Amour de Dieu qui sans cesse se penche sur l’homme ! Car Dieu aime !, dirait Osée.

En considérant dans la Bible les multiples exemples de cette pédagogie "pastorale" de Dieu à l’égard de l’homme, on acquiert plus facilement, me semble-t-il, cette grande vertu qui, selon St Thomas d’Aquin, est à la frontière des vertus intellectuelles et des vertus morales, la vertu de "Prudence“. Cette grande vertu permet à la liberté de s’exercer avec grande lucidité... !

Il y a ainsi dans la Bible (dans le livre d’Osée) moult exemples qui peuvent heurter, en un premier temps, notre hiérarchie de valeurs. Mais il est bon d’être, parfois, un peu bousculé et de se rendre compte de la complexité de la vie. Cela permet de rentrer d’une façon plus réaliste et avec grande humilité dans un véritable dialogue avec “le Dieu vivant“ et aussi de mieux rencontrer les hommes et les femmes "faits de chair et de sang“ qui sont également aux prises avec ce même “Dieu vivant“ qui cherche l’homme, tout homme, même le "paumé", “tel qu’il est et là où il en est“ !

Ne me faites pas dire que les principes moraux sont inutiles. Je dis simplement qu’ils ne sont pas suffisants ! “C’est l’amour qui me plait, dit Osée au nom de Dieu, et non le sacrifice !“ (6.6.). “S’il me manque l’amour, disait St Paul, je ne suis rien !“ (I Co 13.2).

Cela dit pour la vie un peu “scabreuse“ de notre prophète Osée ! Cela dit pour bien des récits “sauvages“ de la Bible et même de l’évangile : la Samaritaine et cette femme prise en flagrant délit d’adultère… Jésus la “relève“ ! A son sujet, je me suis toujours demandé : Mais où est donc l’homme ? (Il me semble qu’on est toujours deux en ce cas de délit !). Curieuse morale !

C’est dans cette perspective qu’il faut lire le prophète Osée, ce prophète si malheureux dans ses amours humaines. C’est que toute sa vie - avec ses grandes déceptions - est une grande leçon d’amour, de l’amour de Dieu pour chacun d’entre nous. Dieu nous aime même dans le désert de nos dénuements d’ici-bas : “Je te rappelle ton attachement, du temps de ta jeunesse, ton amour de jeune mariée : tu me suivais au désert, dans une terre inculte“ (Jérémie 2.2, disciple d’Osée). C’est dans le désert que Dieu avait dit : “Je t’aime d’un amour d’éternité ; aussi, c’est par fidélité que je t’attire à moi“ (31.3).

Et nous retrouvons notre lecture : “Reviens, Israël, au Seigneur ton Dieu, car tu es tombé à cause de ton péché (comme la prostituée d’Osée). Revenez au Seigneur et dites-lui : “… nous ne dirons plus “Notre Dieu“ à l’œuvre de nos mains…“. Alors, dit Dieu,
"je serai pour Israël comme la rosée, (tendre comme la rosée),
il fleurira comme le lys (d’une blancheur de lys !),
il enfoncera ses racines comme le cèdre du Liban (la solidité de l’amour)
sa beauté sera celle de l’olivier (le bel arbre du pays chaud)
son parfum sera celui du Liban (le parfum d’une grande vertu)
on viendra s’asseoir à son ombre (lieu de toute confidence en pays chaud).

jeudi 27 mars 2014

Ecoutez !

3e Semaine de Carême - Jeudi 2014.

La lecture et le psaume d'aujourd'hui ne font que commenter les textes de dimanche dernier. Ils nous rappellent l'importance de l'"écoute" ! Ecouter la voix du Seigneur pour suivre ses conseils. "Ecouter" et "obéir" ! C'est le même mot en hébreu (comme pratiquement en grec et latin (1).

Ne pas suivre la voix du Seigneur, ses conseils, c'est, avant tout, la conséquence d'un manque d'écoute : "Ils ne m'ont pas écouté, ils n'ont pas prêté l'oreille, ils ont raidi leur cou !".
Je me souviens que c'est le P. Bernard Couroyer (2) qui a démontré que le contraire de "prêter l'oreille", c'est, en effet, d'"avoir la nuque raide", de ne pas savoir s'incliner humblement "pour tendre l'oreille", de se raidir !
Israël est ainsi souvent désigné comme "un peuple à la nuque raide". Il est comme l'homme qui ne s'incline pas pour tendre l'oreille, qui se tient "droit dans ses bottes", comme l'on dit, "raide comme la justice", comme s'il avait avalé un parapluie qu'il sait très bien déployer d'ailleurs en cas de danger, regardant hommes et évènements de sa hauteur (même s'il est tout petit !).
Ne pas écouter, c'est toujours le propre de l'orgueilleux, de l'infatué qui, parfois, devient arrogant, toujours fier de lui-même et, de ce fait, dédaigneux et de Dieu et des hommes... ! Il est le seul "parfait" et veut surtout qu'on le reconnaisse... ! Bref, il se prend pour Dieu lui-même ! Ce fut l'attitude d'Adam et de tous les "Prométhée" à travers les siècles.

Pourtant, "prêter l'oreille", c'est l'une des attitudes les plus importantes ! La tradition philosophique (3) et rabbinique souligne que nous avons bien deux oreilles et qu'une seule bouche. Vous pourrez vous-mêmes en tirer bien des conclusions ! Aussi, St Benoît avait-il raison de commencer sa "Règle" par cette recommandation : "Ecoute, mon fils, les préceptes du Maître et tends l'oreille de ton cœur !".

Il est vrai, comme le soulignaient les textes de dimanche dernier, que nous sommes souvent découragés comme les Hébreux à l'étape de Rephidim où il n'y a pas d'eau, comme la Samaritaine désabusée de sa vie et pourtant assoiffée. Ou comme les Hébreux encore à l'étape des "eaux amères" qu'ils ne peuvent boire (Ex 15). Aussi récriminent-ils : "Qu'allons-nous boire ?".

Et la vie elle-même devient alors "amère".
Comme pour Noémie (4) qui demande : "Ne m'appelez plus "Noémie l'agréable" ; appelez-moi : "Mara", car Dieu m'a rendu la vie amère !" (Rth 1.20).
Ou encore comme le roi Ezéchias très malade. Le prophète Isaïe (Is 38) vient le visiter ; et pour toute consolation, il lui dit qu'il n'en a plus pour très longtemps à vivre. Comme consolation, ce n'est pas terrible ! Alors, le roi lui répond : "Amère, pour moi, est mon amertume !" - "Mar li mar !" - ce qui pourrait se traduire : "J'en ai marre, mais vraiment marre !". C'est notre langage, n'est-ce pas ? "Mar li mar !".

Au fond, quand, assoiffé, l'homme se trouve "dans un désert de vie", il est normal qu'il râle... et qu'"il en a marre" ! Il ne faut quand même pas trop s'en étonner ! Nous ne sommes pas encore arrivés au but de notre vie ; nous ne sommes qu'en chemin. Et il est normal que les "dura et aspera" (les duretés et aspérités) du chemin nous fassent mal et nous fassent crier parfois notre amertume ! "Mar li mar !" - "J'en ai marre" en mes eaux de "mara" !

Alors, que nous répond Dieu ? Le psaume nous le dit : "Aujourd'hui, si vous écoutez Sa voix, ne soyez pas comme à Mara...!".  - "Oui, il est notre Dieu et il nous conduit...". Il est notre "rocher", ce "rocher", nous a rappelé la lecture de dimanche dernier, d'où va couler une eau abondante en notre désert de vie. Alors, "approchons de lui en rendant grâce !"

A Moïse, est-il dit, "Dieu montra un morceau de bois". [Etait-ce déjà le bois de la croix ?]. "Moïse le jeta dans l'eau" [était-ce déjà l'eau du baptême ?] ; "et l'eau devint douce !".
Et, ajoute le texte : "Là, il leur donna un précepte !" - "Sham sam lo rok !". - Quand on rencontre ainsi des onomatopées qui se suivent, on sent qu'elles veulent traduire un enseignement qui devait trouver son application en bien des situations tout au long des âges. Aussi, cet enseignement se transmettait-il oralement et facilement par ces procédés sonores de langage [comme chez nous quand on appelle le coq le "cocorico", mot d'orgueil, compréhensible en bien des langues]. Ce n'est qu'ensuite que ces onomatopées furent enchâssées, comme un refrain, dans des récits qui décrivaient des situations analogues !
Et c'est souvent qu'il nous est dit dans nos découragements : "Sham sam lo rok !" -"Là, Dieu leur donna un précepte !". A travers nos amères amertumes qui nous font crier : "Mar li mar !" - "J'en ai marre !".

Et quel fut ce précepte ? La suite le dit formellement comme notre psaume : "Si tu écoutes bien la voix du Seigneur ton Dieu..., je ne t'infligerai aucune des maladies que j'ai infligées à l'Egypte, car c'est moi le Seigneur qui te guéris !". Ici, c'est le mot "rapha" d'où vient le prénom de l'ange dans le livre de Tobie : "Raphaël" - "Dieu guérit !". C'est lui notre véritable médecin !

Autrement dit, si l'on écoute bien la voix du Seigneur, - surtout en nos difficultés de vie -, nous sommes assurés que Dieu vient nous guérir. Il vient nous guérir et nous guider tout au long de nos étapes de vie, comme il l'a fait pour son peuple dans le désert.
Une des images de Dieu qui revient le plus souvent dans la Bible, c'est l'image de Dieu-Berger : "Le Seigneur est mon Berger ; rien ne me manque ; sur des prés d'herbe fraîche, il me fait reposer ; vers les eaux du repos, il me mène ; il y refait mon âme !" (Ps. 23).

"Si tu écoutes sa voix... !". Alors, nous faisons l'expérience d'un Dieu qui, comme le bon pasteur, s'occupe des brebis qu'il connaît chacune par son nom propre !

Oh ! Si nous pouvions dire, chaque jour, avec grande conscience, les mots du prophète Isaïe : "Le Seigneur Dieu éveille chaque matin mon oreille pour que j'écoute comme un disciple. Le Seigneur Dieu m'a ouvert l'oreille ; et moi, je n'ai pas résisté, je ne me suis pas dérobé !" (Is 50.4).
Et le psaume 40ème nous fait chanter : "Tu ne voulais ni sacrifice ni oblation, tu m'as ouvert l'oreille !". Chose curieuse : dans les Septante et dans la lettre aux Hébreux (10.7-8), là où il est écrit : "Tu m'as ouvert l'oreille, tu m'as creusé l'oreille", on lit : "Tu m'as formé un corps !". Comment est-on passé de l'oreille au corps ? Je ne sais pas. Mais c'est une allusion, bien sûr, à l'Incarnation du Verbe de Dieu, l'Incarnation de la "Parole de Dieu" qu'il nous faut sans cesse accueillir !

C'est dire finalement que pour bien écouter, devenir disciple du Christ, il faut, comme l'a si bien recommandé le Concile Vatican II, nous nourrir inlassablement aux deux "tables" : celle de la Parole et celle de l'Eucharistie qui nous donne le "Corps du Christ" !
C'est alors que nous aussi, nous deviendrons de plus en plus membres de ce "Corps du Christ", membres du "Verbe de Dieu" venu sur terre pour accomplir parfaitement la volonté du Père ! Et nous irons proclamant : Seigneur, "que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel !".

(1) Ecouter et obéir. En grec : "akouein" et "upakouein" ; en latin : "audire" et "obaudire".
(2) o.p., professeur de copte et d'arabe à l'école biblique de Jérusalem au dernier siècle
(3) Aristote dans son "De natura rerum".

(4) Cf. le beau livre de Ruth

mardi 25 mars 2014

Annonciations !

25 Mars 2014   - Annonciation à Marie

On a souvent du mal à comprendre le sens de l'Alliance de Dieu avec son peuple, le sens de la Nouvelle Alliance de Dieu avec l'humanité, et donc avec nous-mêmes.

On se dit : Dieu est tout-puissant. Comment peut-on parler d'alliance avec lui ? Pour qu'il y ait alliance, il faut qu'il y ait une certaine égalité entre les deux contractants : ils se lient entre eux par des droits et des devoirs réciproques. Il ne peut donc y avoir alliance qu'entre deux personnes à peu près égales, qu'entre deux peuples indépendants, mais pas entre un Maitre et Seigneur tout-puissant et ses serviteurs, ni même entre un père et ses enfants.

Or, nous ne sommes que les serviteurs de Dieu : comment peut-il se lier par des devoirs à notre égard, lui qui a tous les droits sur nous ? Et même s'il veut bien nous élever à lui et faire de nous ses "enfants", de toute façon, nous lui appartenons, nous n'avons aucun droit sur lui. Il y a une telle distance entre Dieu et nous que le mot "alliance" ne peut pas convenir.

Mais il faut comprendre que l'alliance de Dieu avec son peuple et avec chacun de nous est avant tout une affaire d'amour !

C'est vrai qu'il y a entre Dieu et nous une distance infinie. Mais, précisément, Dieu a voulu par amour se faire tout proche de nous, et même se faire l'un d'entre nous.

C'est vrai que Dieu est le Seigneur et qu'il a tout pouvoir sur nous. Mais il ne veut pas en user ; il nous traite comme des êtres libres et pleinement responsables ; il veut respecter notre pleine liberté pour nous offrir son amour, pour mieux nous offrir son alliance !

C'est vrai que Dieu est notre Père et qu'il nous appelle à vivre comme ses "enfants". Mais il ne nous contraint pas. Il ne nous contraint jamais !

Le mot "Alliance" qui évoque l'union des époux dans le mariage convient donc parfaitement : de même qu'un jeune homme fait à celle qu'il aime une demande en mariage, qu'il attend sa réponse et qu'il désire que cette réponse soit pleinement libre, de même Dieu qui aime les hommes - qu'il a voulu libres et responsables de leurs actes - , de même donc, Dieu qui nous aime nous propose son alliance, il nous offre de nous initier à sa propre vie, il attend notre réponse. Il la veut parfaitement libre, car son amour est si grand qu'il respecte pleinement notre consentement... ou notre refus.

Il est bon de préciser cela pour comprendre le sens des diverses Annonciations dans la Bible, et le sens profond de l'annonciation faite à la Vierge Marie.

Car cette annonce de Dieu à Marie que nous célébrons aujourd'hui a été précédée de beaucoup d'autres tout au long de l’Ancien Testament ; et c'est toujours pour proposer à l'homme son alliance, l'affermir ou pour la renouveler.

Il y eut l'annonce de Dieu à Abraham : "Ta descendance sera aussi nombreuse que les étoiles du ciel et le sable au bord de la mer ... !".

Il y eut l'annonce à Moïse : "J'ai vu la misère de mon peuple. Va ! je t'envoie pour le délivrer ... !".

Il y eut les annonces à David, à Salomon, aux prophètes, etc...

Et Il y eut, "au moment où les temps furent accomplis", l'annonce faire à Marie.
Cette annonce me fait penser à la demande en mariage qu'un jeune homme fait à celle qu'il aime : cette demande, Dieu la fait humblement, presque timidement, car, s'il espère une réponse positive, il veut surtout que cette réponse soit pleinement libre. Oui, Dieu se fait humble, respectueux de Marie, car c'est une réponse parfaitement libre qu'il attend d'elle.

Et de fait, c'est par un amour total et plein de joie que Marie a répondu à la demande de Dieu. Et elle y a répondu, non seulement en son nom personnel, mais au nom de l'humanité toute entière : "Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit exulte de joie en Dieu mon sauveur... Toutes les générations me diront bienheureuse !".

Ce "Oui" de Marie, elle l'a redit tout au long de sa vie, à travers tous les événements qu'elle a traversés, un peu comme les époux se redisent le "oui" du jour de leur mariage tout au long de leur vie, dans les périodes d'épreuves comme dans les périodes heureuses.

Grâce à ce 'Oui" de Marie, Dieu allait s'incarner en la personne de Jésus et vivre sur notre terre une vie humaine semblable à la nôtre !

Grâce à ce "Oui" de Marie, le Royaume de Dieu allait devenir peu à peu une réalité terrestre qui s'enracinerait dans la vie et le cœur des hommes et qui allait grandir peu à peu insensiblement, comme une semence, pour s'épanouir en vie éternelle.

Car si cette annonce à Marie avait été précédée de beaucoup d'autres, elle devait être suivie aussi de beaucoup d'autres annonciations tout au long de l'histoire de l'Eglise et tout au long de notre propre histoire à chacun de nous.

Quand une maman s'aperçoit qu'elle va donner la vie à un petit être, n'est-ce pas une annonce de Dieu, un appel de Dieu à faire grandir cette vie et à y être pleinement attentive ?

Quand un événement se présente qui nous appelle à prendre une décision plus ou moins importante pour nous-mêmes ou pour notre entourage, n'est-ce pas une annonce de Dieu, un appel auquel il nous faut répondre ?

Si nous étions attentifs et croyants dans le sens le plus authentique du mot, peut-être saurions-nous deviner, à travers toutes les situations que nous avons à vivre, autant d'annonciations, d'appels de Dieu, souvent très discrets, auxquels nous avons à répondre, comme Marie, d'un cœur libre, aimant et tout joyeux.

L'annonce faite à Marie se prolonge ainsi tout au long de nos existences quotidiennes. Pour Marie, c'était un appel à enfanter Jésus et à faire germer autour d'elle le Royaume de Dieu.
Pour nous, il en est de même : chaque fois que Dieu s'annonce à nous à travers tous les petits ou grands événements de notre vie, c'est toujours pour faire grandir Jésus en nous, pour que nous répandions son esprit d'amour et de paix sur ceux que nous entourent, pour que son règne vienne et s'achemine vers sa transfiguration éternelle.

Marie a répondu par un "Oui" libre, réfléchi, pleinement responsable. Elle ne doute pas que Dieu soit là, dans cette annonce mystérieuse qui lui est faite, tout en cherchant à mieux comprendre : "Comment cela va-t-il se faire, puisque je suis vierge ?". - C'est un "oui" libre, réfléchi, et pleinement responsable que Dieu attend de nous chaque jour.

Le "Oui" de Marie fut un "Oui" humble : "Je suis la servante du Seigneur. Que tout se passe pour moi selon sa volonté !". Elle ne s'imagine pas supérieure aux autres. Pour elle, Dieu n'en est pas à une merveille près ; la Bible raconte tout au long de l'histoire les merveilles de Dieu pour son peuple. Ce qui se passe en elle est bien dans la ligne de ce que Dieu a toujours fait pour son peuple.  Elle rappelle en son "Magnificat" !

Que nos "oui", à nous aussi, soient humbles ! Qu'ils s'inscrivent à la suite de tous ceux et celles qui ont témoigné des merveilles de Dieu accomplis à travers le temps !

Mais surtout, le "Oui" de Marie fut un "Oui", plein d'amour, de joie, de reconnaissance. Jusqu'au pied de la croix, elle était là, dans la douleur la plus profonde, mais consentante, dans la foi, et probablement sans comprendre encore pleinement ce mystère de la rédemption qui n'était qu'une suite logique du mystère de son Annonciation
.
Que nos "oui" soient toujours inspirés par notre amour pour Dieu et pour Jésus, pour que son règne vienne, pour que sa volonté de salut se réalise toujours davantage. Dieu se sert de tous ceux qui veulent bien le suivre, en vue du salut du monde, mais toujours dans le respect des libertés humaines.

Si nous comprenions cela, toute notre vie, en chacun de ses instants, deviendrait un joyeux accueil des annonces de Dieu.
Et soyons même très pratiques : Comme s'exclamait un jour Madeleine Delbrel : "Quelqu'un frappe à la porte ! Vite, ouvrons ; c'est Dieu qui vient nous aimer ! Et si on vient m'inviter à dîner ! Allons-y ; c'est toujours Dieu qui vient nous servir, nous aimer !".
Oui, notre vie en chacun de ses instants est comme une "annonce faite à Marie, de la part de Dieu !

Soyons toujours prêts à répondre à toutes les annonciations de Dieu !

samedi 22 mars 2014

Le "Rocher" !

3e Dimanche de Carême 2014.A 

"Dieu est-il avec nous ou bien n'y est-il pas ?". Avec les Hébreux dans le désert de la tentation (1ère lecture), cette interrogation traverse toute la Bible.
Je n’en prendrai qu’un exemple. Après l’entrée en Terre promise, les Hébreux prospèrent. Mais leurs voisins, (Madianites) ravagent souvent les fruits de leur travail. Un jour, un ange apparaît à un certain Gédéon pour lui confier une mission de délivrance : “Le Seigneur est avec toi’ !” lui dit-il ! Et Gédéon de lui répondre du tac au tac : “Pardon, si le Seigneur est avec nous, pourquoi tous ces malheurs sur nous ? ... Pourquoi nous a-t-il pas abandonnés ?” (Jug. 6.14sv).

Cette question est de toujours : "Dieu est-il avec nous ou bien n'y est-il pas ?". Qui n'a pas prononcé cette phrase un jour ou l'autre ? Quand on est accablé de malheurs, affronté à un scepticisme ambiant, quand une mère (ou un père) apprend qu'un cancer ne lui laisse pas d'espoir... ; quand, simplement, on regarde notre monde qui va mal, la question se pose : “Dieu est-il vraiment avec nous ?”. Où est-il, lui qui semble sourd et muet ?

Je dis cela en pensant à tous ceux - nombreux - qui, posant cette question, ne trouvent pas de réponse. Or, les textes d’aujourd’hui peuvent nous éclairer.

Avec la première lecture, l’histoire se passe en plein désert. Moïse guide le peuple de point d'eau en point d'eau. Mais à l'étape de Rephidim, l'eau manque. En plein désert ! Si vous avez un peu l'expérience d'un désert, vous savez que c'est dramatique. Aussi, pris de panique, le peuple cherche un responsable - c'est courant en ces cas-là ! -. On s'en prend à Moïse : “Pourquoi nous as-tu fait sortir d’Egypte ? Est-ce pour nous faire mourir de soif, moi, mes enfants et mes bêtes ?”.

Cette phrase est grammaticalement curieuse ! Elle a été modifiée dans le texte liturgique - c'est dommage ! -. Il s’agit du peuple qui murmure : “Pourquoi nous as-tu fait sortir ?”. Et voilà que le texte souligne ensuite la réflexion de tout un chacun : moi, mes enfants, mes bêtes !”. On dirait qu’au fur et à mesure que l’insécurité grandit, l’égocentrisme se renforce, chacun se recroquevillant sur lui-même. C’est la multiplication des “moi” qui se rebelle non pas tellement contre Moïse, mais contre Dieu : Ce Dieu dont tu nous as rappelé les prodiges, ne va-t-il pas faire mourir “moi, mes enfants, mes bêtes?”. Cet égocentrisme bien compréhensif est de toujours en temps de crise. On ne pense plus aux autres ; il suffit de voir la ruée d'un chacun vers les grands magasins lorsqu'une grève risque de paralyser le commerce ! On ne pense plus qu’à soi ! Cela est à remarquer. Une réaction toujours actuelle !

Et le récit continue. Moïse crie vers Dieu : "Que vais-je faire ? Ils vont me lapider !". Moïse lui-même ne pense plus qu’à sa sécurité ! Elle est courante encore, cette réaction, au cours de l'Histoire des hommes ! Et Dieu répond : “Prends ton bâton, frappe le rocher sur lequel je suis. Il en sortira de l'eau”
Dans le récit analogue, au livre des Nombres, il est dit que Moïse frappa deux fois le rocher. La tradition juive explique : Moïse et Aaron n’entrèrent pas en Terre Promise parce qu’ils auraient manqué de foi ! Au lieu de frapper le rocher, d'un seul coup, avec foi, ils auraient fébrilement donné deux coups. Cette insistance n'est-elle pas, parfois, la nôtre ? Or, si Dieu aime notre persévérance dans la foi, la prière, il déplore toujours l'insistance de notre anxiété humaine, même compréhensible. La foi, "si vous en aviez gros comme une graine de moutarde... !", dira Notre Seigneur.

Cette histoire du rocher, c’est donc bien d’abord une histoire de doute… : "Dieu est-il avec nous ou bien n'y est-il pas ?"  D’un doute qui peut atteindre parfois jusqu’à des responsables comme Moïse ! Et oui ! Les responsables sont parfois - comme tout homme - atteint par cette question brûlante : "Dieu est-il avec nous ou bien n'y est-il pas ?".

Quoi qu’il en soit, l’eau jaillit du rocher !
C’est que même au désert, l'eau peut jaillir. Même en nos déserts, Dieu est avec nous. Même dans le désert terrible de la maladie, dans le désert glacial de la solitude, et surtout dans le désert brûlant de la mort.
"Pourquoi m'as-tu abandonné ?", demandera Jésus lui-même empruntant cette question au psaume 22ème. Mais, même dans ce désert de la mort, la source de la vie n'est pas tarie : "Tu m'as répondu, ô mon Dieu !", a du murmurer Jésus sur la croix, avec ce même psaume, "Il n'a pas rejeté un malheureux dans la misère !".
Voilà bien la réponse de la foi ! Dès que l’on croit en la présence de Dieu, malgré parfois les événements apparemment contradictoires, on avance sur le chemin de la vie. Sinon on reste en nos déserts de soif.

"Dieu est-il avec nous ou bien n'y est-il pas ?". Il n'y a qu'une réponse de foi : Dieu est toujours présent ! Voilà pourquoi, selon une tradition juive, ce “rocher” du désert (symbole de la présence salvifique de Dieu) va, dès lors, se déplacer et accompagner les Hébreux tout au long de leurs étapes ! Car ce “rocher”, c’est Dieu toujours présent qui se déplace avec son peuple ! Bien des psaumes le répéteront : “Seigneur, tu es mon roc, mon rocher !".

Et, pour nous, l’histoire de ce rocher - ce rocher de la foi - n’est pas terminée.
St Paul fera nettement allusion à cette tradition du rocher qui se déplace, en y apportant une explication essentielle : “nos pères passèrent, comme par un baptême, à travers la mer rouge. Tous... buvaient à un rocher spirituel qui les suivait : et ce rocher, c’était le Christ !" (I Co. 10.4).

St Paul est toujours d’une radicalité extrême dans ses raccourcis ! “Un rocher qui les suivait !”.
- Le rocher va conduire le peuple de l'Ancienne Alliance jusqu’à Jérusalem, “ce lieu que Dieu a choisi pour y faire habiter son Nom !”.
- Ce rocher devenu le Christ - car "ce rocher, c’était le Christ !" - va conduire la multitude des hommes jusqu'en la Jérusalem céleste, lieu d'union plénière avec Dieu !   

Oh ! Bien sûr, ce "rocher" n'a plus de réalité historique ! C'est évident !
"C'est une image", diront certains ! Oui, mais une image qui revêt une signification aux harmoniques de foi multiples :

+ Ce rocher parvenu à Jérusalem, sera la "pierre angulaire" d'un temple au lieu même où Abraham, appelé à sacrifier son fils au mont Morrya qui veut dire "mont de la vision", sera capable de voir, par delà l'absurdité de la mort, de "voir, par la foi, Celui qui nous voit sans cesse…!". - “Dieu est-il vraiment avec nous ?” - Dieu est là, dit Abraham ! Aussi, deviendra-t-il, dira St Paul, notre Père dans la foi ! (Rm 4.11sv), nous apprenant à "voir" Dieu, même dans nos déserts de vie !

+ Et "ce rocher, c’était le Christ !", poursuit l'apôtre. Il devient la "pierre angulaire" d’un Temple nouveau - le voile de l’ancien temple se déchirant - afin de rétablir, par-delà l'absurdité de sa mort, l’union de Dieu avec l'homme !
- “Dieu est-il vraiment avec nous ?” -. Dieu est là, par-delà sa propre mort, par-delà nos déserts de malheurs et le désert même de notre propre mort ! Si le Christ n'explique pas le mal, il le remplit de sa présence victorieuse !

+ Et c’est de ce même rocher qu’Ezéchiel avait vu jaillir une eau si abondante qu'elle allait purifier les eaux de la Mer morte, symbole du péché du monde, des malheurs des hommes.
Aussi, au Calvaire, au désert de la mort elle-même, la lance d'un soldat, dira St Jean, frappera ce rocher qu'est le Christ. Et il en sortira de l’eau. Et cette eau, plus encore que le fleuve dont parle Ezéchiel, cette eau qui sort du côté du Christ transpercé, devient un immense fleuve destiné à purifier, par la foi, toute l'humanité. - “Dieu est-il vraiment avec nous ?” - Dieu ne cesse de nous baigner en son fleuve de vie !

C'est ce que nous exprimerons aux jours de la Semaine Sainte, de sorte qu'avec foi, nous chanterons au jour grandiose de Pâques : “J’ai vu l’eau vive jaillissante du cœur du Christ, j’ai vu la source devenir un fleuve immense ; tous ceux que lave cette eau seront sauvés.
J’ai vu le Temple s’ouvrir à tous ; tous ceux qui croient en son Nom seront sauvés et chanteront Alléluia !".

Il y avait toutes ces harmoniques de signification dans la conversation de Jésus avec la Samaritaine au puits de Jacob. A celle qui a traversé multiples déserts de soif, Jésus affirme qu'il est le "rocher" d'où surgit l'eau qui est source jaillissante pour la vie éternelle, une eau qui nous fait adorer Dieu "en esprit et vérité !". - "Dieu est-il avec nous ou bien n'y est-il pas ?" -. Il est là, à cette source permanente qui coule en nous depuis notre baptême !

"Dieu est-il avec nous ou bien n'y est-il pas ?". St Paul (2ème lecture) a raison de nous redire que même dans tous les déserts de nos soifs, il y a toujours une source jaillissante en nos cours pour la vie éternelle, puisque "l'amour de Dieu a été répandu en nos cœurs par l'Esprit Saint" ! Et "la preuve" que Dieu nous aime, c'est que le Christ est mort pour nous !". Il a, lui-même, traversé tous nos déserts de mort pour nous en délivrer !
Désormais il est ressuscité. Il est notre vie au milieu de nos souffrances et par-delà la mort elle-même ! "O Mort, où est ta victoire ?" (I Co. 15.55). Le Christ ressuscité est toujours là près de nous, en nous !

Et si à l'approche de notre mort, revient cette question récurrente : "Dieu est-il avec nous ou bien n'y est-il pas ?", puissions-nous répondre, nous confiant en la miséricorde divine : Ma vie ne fut que le temps de le chercher ; ma mort sera le temps de le trouver ; et l'éternité le temps de le posséder ! (d'après François de Sales).

vendredi 21 mars 2014

Le pardon !

Carême  2. Vendredi    ("Histoire de Joseph")
(Eucharistie à Notre-Dame de la Couture au Mans)

Faites votre “mot“ !

De Joseph à Jésus !

Ce matin, au "Prieuré la Paix Notre-Dame", où je me trouve habituellement, nous avons fêté avec tous les Bénédictins le jour anniversaire de la mort de St Benoît, ou plutôt, comme disaient les Anciens, son "Dies natalis" c'est-à-dire le jour de sa naissance au ciel ! Ce n'étaient pas, naturellement, les mêmes textes liturgiques que ce soir !

Aussi, je me suis demandé si ce soir j'allais vous adresser "un mot" comme je dis, ce "mot" que je mets habituellement sur internet. Et j'en profite pour remercier ceux qui non seulement me lisent, mais m'encouragent en ce sens.

Alors, après réflexion, je me suis dit que je vous solliciterai simplement, avec humour, à faire vous-mêmes votre "mot". Oui, vous-mêmes ! Et à l'écrire en famille, surtout avec vos enfants, petits-enfants, arrière petits-enfants… !

Pour ce faire, lisez, relisez vous-mêmes cette histoire de Joseph à laquelle fait allusion la lecture. Lisez-la, relisez-la ! Et puis, pénétrés de cette lecture, racontez-la avec “vos mots“ à vous, à vos enfants, même aux tout-petits.
Cette belle histoire de Joseph,
vendu par ses frères,
esclave en Egypte,
attaché aux fers d’une prison…
puis, soudainement, devenu premier ministre d’un grand roi (Pharaon),
capable alors de sauver ses frères qui l’avaient rejeté, 
capable de sauver toute sa famille et tout son peuple d’une famine terrible qui allait tous les anéantir… 
c’est une histoire merveilleuse pour les enfants (que nous sommes tous).
C’est un conte de “mille et une nuits“, infiniment plus éloquent que ceux que l’on écrit aujourd’hui et qui, curieusement, me semble-t-il, enchantent parfois davantage les adultes que les jeunes !!!

Racontez cette belle histoire de Joseph à vos enfants en la résumant, bien sûr, en passant très vite sur certains passages, évidemment… Et, selon les épisodes de votre récit, vous verrez leurs yeux tantôt attristés et presque larmoyants, tantôt écarquillés de suspense, émerveillés du dénouement… !

Et ensuite, faites votre “mot“ vous-mêmes. Mieux : écrivez-le avec vos enfants ! Avec vous, ils trouveront le “mot“ juste !  En effet :
- La jalousie des frères de Joseph, c’est celle de Caïn envers Abel, au seuil de l’humanité… ; c'est celle que les scribes et pharisiens suscitaient à propos de Jésus… ; c'est celle encore que l’on devine entre frères et sœurs d’une même famille… Et Jésus ne disait-il pas : “Ton œil serait-il mauvais (jaloux) parce que, moi, je suis bon ?“. (Mth 20.15). Faites votre “mot“ ainsi !
- Et la tunique (sans couture, bien sûr) de Joseph… ne vous dit-elle rien ? Faites donc votre “mot“ !
- Et le prix de la vente affreuse de Joseph aux Madianites… pour 20 sicles ? Cela ne vous dit-il rien ? Faites donc votre “mot“ !
- Et la descente de Joseph dans les fers de la prison…, dans les fers de l’enfer… et sa remontée comme intendant du roi… ? Je suis sûr que vos enfants, et même petits enfants devineront. Faites votre “mot“ avec eux !
- Et Joseph qui sauve sa famille et tout son peuple… ? Faites votre “mot“ !
- Et jusqu’aux pleurs de Joseph, les pleurs du pardon accordé… comme les pleurs de Jésus sur Jérusalem et ses larmes de sang au jardin de Gethsémani, avec son cri sur la croix : “Père pardonne-leur… !“. Faites donc votre “mot“ !

A ce moment, par contre, arrêtez-vous un peu pour faire une petite catéchèse que vos enfants ne peuvent deviner.
Vous pourrez leur dire comme à des adultes : Vous savez ! Le pardon, ce n'est quand même pas toujours facile. Joseph ne pardonne pas à ses frères tout de suite et d'un seul coup. Et même, avant de leur pardonner - vous pourrez vérifier -, il leur fait des "tours de cochon", comme l'on dit vulgairement. C'est seulement quand du cœur de l'un de ses frères (Juda) s'échappe un profond sentiment d'humanité, quand ce frère lui dit, avec larmes sans doute : "Je ne peux pas retourner chez mon père sans le plus jeune", le petit dernier, Benjamin que Joseph voulait retenir, c'est alors que celui-ci ne se contient plus. Il éclate en sanglots et pardonne si totalement et gratuitement que ses frères ont peine à y croire !

Et ayant évoqué cette psychologie du pardon humain, vous pourrez rappeler la première apparition de Jésus ressuscité à ses apôtres, eux qui n'avaient pas eu - le moins qu'on puisse dire - une attitude très honorable durant sa passion. Il y a un étonnant rapprochement à faire entre Joseph et Jésus. La première parole du Seigneur est celle-ci : "La Paix soit avec vous !".  Joseph a mis du temps à pardonner. Jésus, lui, pardonne immédiatement et pleinement pour montrer comment Dieu pardonne, peut toujours nous pardonner !

Une dernière remarque que vos enfants comprendront : Quand ses frères repartent, Joseph leur dit : "Surtout ne vous disputez pas en chemin !". - Maintenant que je vous ai pardonné de m'avoir vendu autrefois, la question n'est quand même plus de vous chamailler en chemin pour savoir qui était le responsable ! Il s'agit toujours de pardonner comme Dieu pardonne !

Oui, faites votre “mot“ !

Un dernier conseil : si, pour une raison ou pour une autre, vous ne pouvez réunir vos enfants, petits-enfants…, faites quand même votre "mot" et confiez-le au service postal de la Jérusalem céleste. C'est un service peu visible mais très efficace ! Les anges sauront parfaitement le transmettre, mieux qu’à l’aide des ondes de notre web ! -
Et puis - permettez-moi - : s’il vous plaît, envoyez-le moi ! Car je ne suis qu’un enfant, moi aussi. Et je veux le rester : enfant de Dieu !

Anniversaire de la mort de St Benoît

21 Mars 2014   - "Transitus" de St Benoît  ("Mort-naissance" de St Benoît)
Messe propre aux Bénédictins !

La première lecture, en cette fête de St Benoît, nous redit cet appel que Dieu a lancé à Abraham, qu'il a lancé à St Benoît, qu'il ne cesse lancer à chacun d'entre nous : "Pars" - ou plutôt littéralement, comme j'ai eu l'occasion de le souligner déjà -, "Pars pour toi !" ; "Pars pour ton bonheur !".
Notre Dieu n'est pas un Dieu captatif comme peut l'être parfois un amour humain - paternel, maternel, conjugal ou même amical -, ce genre d'amour que nous pouvons manifester parfois nous-mêmes, ce genre d'amour fraternel qui n'est qu'un prétexte, voire une occasion à n'aimer que soi-même ! L'amour de Dieu n'est pas un amour qui dit en quelque sorte : "Viens ici ; tu m'appartiens !". L'amour divin, au contraire, est un amour qui s'exprime ainsi : "Va pour toi ! Va librement ton chemin ; épanouis tout ce que j'ai mis en toi quand je t'ai créé à ma ressemblance !".

Certes, ce chemin, parce qu'il est "chemin de liberté" - Dieu nous disant toujours : "Si tu veux !" - n'est pas sans embûches, sans dangers de toutes sortes, sans fatigues multiples. St Paul qui en a fait fréquemment l'expérience, le répète souvent dans ses lettres.
Et le grand Bossuet, dans son panégyrique de St Benoît, le souligne en son grand style : "Toute la perfection de l’Evangile, toute la discipline chrétienne, toute la perfection monastique est entièrement renfermée dans cette seule parole : “Egredere”, “Sors”. - "Pars !", Pars pour toi !"...
La vie du chrétien est un long et infini voyage durant le cours duquel, quelque plaisir qui nous flatte, quelque compagnie qui nous divertisse, quelque ennui qui nous prenne, quelque fatigue qui nous accable, aussitôt que nous commençons à nous reposer, une voix s’élève d’en haut qui nous dit sans cesse et sans relâche : “Egredere” – “Sors”, et nous ordonne de marcher plus outre.  - Telle est la vie chrétienne, et telle est par conséquent la vie monastique. Car qu’est-ce qu’un moine véritable, un moine digne de ce nom, sinon un parfait chrétien ?  Faisons donc voir aujourd’hui dans le Père et le législateur et le modèle de tous les moines, la pratique de ce beau précepte".

Et Bossuet de remarquer les trois pays où nous sommes tentés de nous arrêter :
- le pays du plaisir des sens auquel on doit résister par l'esprit de pénitence auquel nous convie St Benoît dès l'entrée au monastère ;
- le pays de la satisfaction de soi-même que doit combattre la pratique de l'obéissance ;
- et enfin le pays de l'orgueil à la vue de ses propres progrès spirituels, ce qui doit être radicalement anéanti par une véritable humilité et devant Dieu et devant ses frères !

C'est alors que nous pouvons partir - "Pars !" - et faire le grand pèlerinage de notre vie terrestre avec ce conseil d'un grand pèlerin ("Parabole du pèlerin" de Hilton) d'avoir toujours en son cœur et parfois sur les lèvres ces seuls mots : “Je ne suis rien, je n'ai rien, je ne désire qu'une seule chose, et c'est Notre Seigneur Jésus ; et d'être avec lui dans la paix, à Jérusalem !”.
L'humilité dit : “Je ne suis rien, je n'ai rien” ; et l'amour : “je ne désire que Jésus !”.

Le chrétien - et a fortiori le moine - traversera alors soucis, souffrances, tentations même, avec la joie dans le cœur ! St Paul nous le dit dans la seconde lecture (Phil. 4.4-9). Et notre pape François ne cesse de le répéter et par sa parole - son "Evangile de la joie" - et par le témoignage de son attitude toujours souriante. Comme St Paul, il nous redit : "Réjouissez-vous dans le Seigneur, en tout temps. Je le répète : réjouissez-vous ! ... Le Seigneur et proche !".
Pour l'apôtre, la source de cette joie, c'est la proximité du Seigneur ! Le Seigneur est toujours là, près de nous, avec nous, en nous ; et, un jour, il nous sera pleinement manifesté. Ce ne sera pas un jour de deuil, mais un jour de naissance - "dies natalis", disaient les Anciens ! -, le jour de notre naissance plénière en la vie même de Dieu ; c'est ainsi que nous fêtons aujourd'hui celui de St Benoît !

Alors, ajoute l'apôtre, "la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence gardera vos cœurs et vos pensées en Jésus-Christ !". Il précise même : "Tout ce que vous avez appris - ce qui est noble, juste, tout ce qui mérite l'éloge -, tout ce que vous avez reçu (du Seigneur), mettez-le en pratique. Et le Dieu de la paix sera avec vous !".

Lorsque l’unité, l’harmonie et l’ordre sont établis dans l’âme, lorsque le désaccord avec Dieu, avec nos frères, avec nous-mêmes a cessé, alors nous avons la paix !  La paix n’est pas la paresse, ni un faux désintéressement ; c’est l’attitude que prend spontanément notre âme unie à Dieu dans la charité. La paix est le fruit de l'amour, de la charité.
Oui, la paix, comme la joie, n’est pas précisément une vertu, mais le fruit de la plus haute des vertus : la paix est la fille de la charité. Il faut la chercher comme un trésor caché. Il faut la poursuivre au besoin. Parfois elle a l’air de fuir ; il ne faut pas s'en irriter, s’irriter de ses lenteurs qui d’ailleurs ne sont peut-être que nos lenteurs à nous. Il n’y a jamais motif à sortir de cette paix : ni événements, ni souffrances, ni fautes même ; car on ne corrige pas des erreurs avec du désordre ; et le repentir n’est pas le trouble.

L’apôtre Paul envisage la paix comme un lien très fort qui maintient notre âme près de Dieu : “la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence gardera vos cœurs et vos pensées en Jésus Christ”. La paix est tout à la fois récompense, fruit, indice et facteur de notre vie intérieure ancrée en Dieu !

C'est alors que nous pouvons comprendre cette parole de Jésus s'adressant à son Père : "Je leur ai fait connaître ton nom et je le leur ferai connaître, pour que l'amour dont tu m'as aimé soit en eux et moi en eux". La paix qui est le signe de notre intimité avec le Seigneur, nous fait déjà entrer en la vie de Dieu-Amour, en la vie de Dieu-Trinité, avant d'y parvenir plainement, à l'exemple de St Benoît dont nous fêtons, avec joie, son entrée au ciel !

Si nous savions vraiment le don de Dieu !
"Il est une créature, s'écriait la Bienheureuse Elisabeth de la Trinité (de Dijon), il est une créature qui connut ce don de Dieu, qui n'en perdit pas une parcelle, une créature qui fut si pure, si lumineuse qu'elle semble être la lumière elle-même : "Speculum justitiae" (miroir de justice) ; une créature dont la vie fut si simple, si perdue en Dieu que l'on ne peut presque rien en dire : "Virgo fidelis", c'est la Vierge fidèle, celle qui "gardait toutes choses en son cœur" !"...

Aussi, en ce Prieuré "La Paix Notre-Dame", en union avec St Benoît, prions Marie, comme le faisait Marthe Robin
"O Mère bien-aimée,
toi qui connais si bien les voies de la sainteté et de l'amour,
apprends-nous à élever souvent notre esprit et notre cœur vers la Trinité,
à fixer sur elle notre respectueuse et affectueuse attention.
Et puisque tu chemines avec nous sur le chemin de la vie éternelle,
ne demeure pas étrangère aux faibles pèlerins que nous sommes...
Que rien ne puisse jamais troubler notre paix ni nous faire sortir de la pensée de Dieu ;
mais que chaque minute nous emporte plus avant dans les profondeurs de l'insondable mystère, jusqu'au jour où notre âme, pleinement épanouie aux illuminations de l'union divine, verra toutes choses dans l'éternel amour et dans l'unité !".