25e T.O. 17/A
Cette
page d'évangile n'est pas faite pour nous dire comment un chef d'entreprise
doit rétribuer son personnel. S'il en était ainsi, l'entreprise en question
aurait vite fait de se mettre en faillite et d'envoyer au chômage tous ses
employés.
L'intention
de Jésus est tout autre. Elle est d'abord de nous révéler l'immense bonté de
Dieu pour les pauvres, les déshérités, les pécheurs; et surtout sa bonté
miséricordieuse, toute gratuite, à l'égard de ceux qui n'ont aucun mérite à
faire valoir.
Reprenons
cette parabole : "Le royaume des
cieux est comparable au maître d'un domaine qui embauche des ouvriers pour les
vendanges".
Le
Maître du Royaume des cieux, c'est Dieu lui-même. Bien sûr ! Les ouvriers,
c'est nous, les hommes. Et le Maître embauche dès le matin, puis à midi, puis vers trois heures, enfin vers cinq heures de l'après-midi,
car le travail presse. A la fin de la journée, c'est le salaire. Or, il donne
autant aux derniers embauchés qu’à ceux qui ont travaillé dès le matin, alors que les derniers n'ont fait qu'une heure
Qu'est-ce
que ça veut dire ? Ces derniers représentent les malheureux, les pauvres, tous
ceux qui n'ont pas eu de chance dans leur vie, ceux qu'on a envie d'ignorer,
ceux que l'évangile appelle souvent les "publicains et les pécheurs".
Personne ne leur a parlé, ne leur a annoncé le Royaume de Dieu !
Eh
bien, ceux-là, Jésus nous dit que Dieu les aime tout comme les autres et
qu'il veut les sauver, car ils gardent toute leur valeur à ses yeux. C'est pour
cela que Jésus les fréquente et qu'il mange avec eux, comme avec des amis. "La volonté de mon Père, dit-il, c'est
que pas un seul ne se perde !".
Oui
: Dieu est comme ça. Il ne pose aucune condition à l'amour qu'il porte aux
pauvres et aux pécheurs. Tout homme, quel qu'il soit, est précieux à ses
yeux ! C'est même écrit dans la bible.
Alors
attention à ne pas nous tromper de Dieu ! Le vrai Dieu révélé par Jésus, c'est
celui qui nous a aimés le premier, alors que nous ne le connaissions même
pas ; c'est le Dieu généreux, magnanime, qui met sa gloire à offrir son salut à
tous les pécheurs, à tous les malchanceux. Il ne calcule pas selon nos mérites
mais selon sa miséricorde.
Il
y a dans les évangiles de nombreuses pages qui nous révèlent ce vrai Dieu,
tellement différent de ce que nous pensons spontanément. Souvenez-vous : la
parabole de l'enfant prodigue ! Ce garnement qui avait quitté la maison
familiale pour aller faire la noce dans un pays lointain et qui finit par
revenir parce qu'il n'avait plus rien à manger... Son père, qui représente
Dieu, court au devant de lui ; et dès qu'il l'aperçoit sur la route du
retour, il l'embrasse ; il lui a déjà tout pardonné ; on fait la fête
pour l'accueillir.
A
travers tout cela, Jésus nous enseigne :
Un
premier enseignement :
Vous aussi, faites de même. Ne soyez pas mesquins ! soyez généreux ! Soyez
magnanimes et miséricordieux comme votre Père du ciel ! Ne calculez pas !
Vous
vous souvenez de l'évangile de dimanche dernier : Pierre demande à Jésus : "Combien de fois devrai-je pardonner
à mon frère ? jusqu'à sept fois ? Mais non, répond Jésus, non pas jusqu'à sept fois, mais jusqu'à
soixante-dix fois sept fois !" - Cesse donc de calculer ! Est-ce que je
calcule, moi, le nombre de fois où je vous pardonne ?.
C'est
ce que Jésus fera, par exemple, après sa résurrection : Pierre l'avait renié.
Jésus, non seulement lui donne son pardon, mais il lui redonne en plus toute sa
confiance ; il en fait le premier chef de son Eglise : "Sois le pasteur de mon troupeau tout entier". Folie de
l'amour de Dieu !
Oh !
Certes ! Cette façon de faire n’est pas toujours évidente dans les
conjonctures de nos vies quotidiennes, sur des plans divers, économiques,
sociales, morales… Mais il faut au moins s’y essayer. “Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait”, dira N.S.
Deuxième
enseignement à retenir, surtout
: nos rapports avec Dieu ne doivent pas être des rapports de serviteurs à
maître. Jésus nous a dit : "Je ne
vous appelle plus serviteurs, mais amis". Le serviteur attend de son
maître ce qui lui est dû pour le travail qu'il a fourni ; il espère même un peu
plus, il est toujours prêt à réclamer davantage, comme l'homme de la parabole
qui proteste par jalousie, par dépit de voir que ceux qui n'ont travaillé
qu'une heure reçoivent autant que lui.
C'était
la mentalité des pharisiens du temps de Jésus : puisqu'ils pratiquaient la loi,
ils estimaient être quittes envers Dieu, et Dieu se devait de les récompenser :
"J'ai fait ceci, alors Dieu me doit bien cela !”.- “J’ai fait telle prière avec conviction, j'ai
fait telle bonne action, alors Dieu se doit de me répondre !”.- Non, Dieu n'est pas un commerçant dont nous
serions les clients, ni un comptable. Si nous avions cette mentalité, nous
ferions partie de ces premiers dont parle Jésus et qui passeront les derniers
dans le Royaume des cieux, après les publicains et les prostituées qui se sont
convertis.
Avec
Jésus, nous ne sommes plus sous le régime de la loi et du droit, mais sous
le régime de l'amour et de la grâce. Nous ne serons jamais quittes envers
Dieu, car nous ne pourrons jamais l'aimer comme il nous a aimés. Ce qu'il faut
donc, c'est l'aimer d'un cœur pleinement filial, puisqu'il est notre Père, et
aimer Jésus de toutes nos forces, puisqu'il nous a choisis pour ses amis. Il
nous faut passer d'une mentalité religieuse juridique à un esprit d'amour.
Vous
voyez, nous n'aurons jamais fini de découvrir notre vrai Dieu. C'est pour cela
qu'Isaïe nous disait tout à l'heure : "Cherchez le Seigneur !"
Cherchez-le
dans la prière filiale, cherchez-le dans l'étude et la méditation de
l'évangile, cherchez-le avec votre intelligence, et aussi et surtout avec votre
cœur. Et plus vous le chercherez, plus vous sentirez le besoin de le chercher
encore davantage.
Et
ce ne sera jamais fini, car il nous dépassera toujours : "Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant ses
chemins sont élevés au-dessus de vos chemins, et ses pensées au-dessus de vos
pensées".