2ème
Dimanche de Carême 18/B
Nous venons de lire l’une des plus belles
pages de l’évangile.
Sachons contempler cette scène que rapportent
les trois synoptiques ! Nous devrions être fascinés, comme les trois apôtres
privilégiés, par cette soudaine révélation de la gloire de Jésus.
Et notre foi en sera illuminée, notre
espérance réchauffée !
Les trois apôtres eux-mêmes avaient gardé de
cette vision - Jésus transfiguré - un souvenir inoubliable ! St Pierre en
témoigne dans sa seconde lettre :
"Ce
n’est pas en suivant des fables que nous vous avons fait connaître la puissance
et la venue de Notre Seigneur Jésus Christ, mais pour l’avoir vu de nos yeux
dans tout son éclat. Car il reçut de Dieu le Père honneur et gloire quand la
voix venue de la splendeur magnifique de Dieu lui dit : "Celui-ci est mon
Fils bien-aimé qui a toute ma faveur". Et cette voix, nous-mêmes, nous
l’avons entendue venant du ciel quand nous étions avec lui sur la montagne
sainte". (II Pier.
1/16sv).
St Marc qui nous rapporte les souvenirs de St
Pierre écrit que “Jésus fut transfiguré
devant eux. Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que
personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille”. St Matthieu est
encore plus évocateur : “Son visage
resplendit comme le soleil ; ses vêtements devinrent blancs comme la lumière”.
Ce qu’ils veulent dire, c’est que le Christ se
manifesta alors tel qu’il était en réalité : en sa gloire divine !
Jésus est Dieu ! Et la gloire divine est son “état naturel”! Ce qui aurait dû
être normal, c’est que cet état naturel, divin, rejaillisse sur son corps !
C’était par un miracle permanent que ce rejaillissement de gloire ne se
produise pas. Mais Jésus le voulait ainsi pour qu’il puisse, en son corps,
souffrir comme nous, afin qu’il puisse, par son corps, s’adapter à notre
faiblesse.
Sa gloire demeurait donc voilée. Mais, pour
un instant, à la transfiguration, cette gloire, déchirant son voile, rayonna
librement, et les apôtres purent la contempler, éblouis.
Oui : éblouis ! Contemplons, nous aussi l’humanité
du Christ transfiguré ! C’est ce qu’il y a de plus grand dans la création :
c’est l’aboutissement de la création et le terme même du grand dessein de
Dieu : l’humanité arrachée à sa condition périssable et vivifiée par
l’Esprit de Dieu !
Voilà l’important. Car c’est à cette
transfiguration que nous sommes destinés, c’est à cette transfiguration que
le Christ, premier-né d’une multitude de frères, conformera les siens. “Il transformera notre corps si misérable à
son corps glorieux” (Phil 3/21).
C’est pour cela que la transfiguration qui
annonce la résurrection est pour nous la source d’une immense espérance, cette
espérance qui, seule, donne son sens à notre vie chrétienne.
Nous aussi, un jour, nous serons transfigurés
à l’image du Christ. Plus exactement, cette transfiguration est déjà
mystérieusement commencée par la grâce.
Cette grâce, nous l’avons reçue en espérance
à notre baptême. Jamais nous ne mesurerons parfaitement les merveilles signifiées
et réalisées par ce sacrement : Dieu met
dans le baptisé les germes de cette gloire que les apôtres ont vue sur le
visage du Christ. Et ce commencement de transfiguration atteint lentement notre
être et nos activités jusqu’à une plénitude qui s’obtiendra dans le retour
glorieux du Seigneur.
Tout cela est invisible, mais nous touchons
cette réalité par la foi : “Votre vie est
cachée avec le Christ en Dieu. Quand le Christ, votre vie, paraîtra, alors,
vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire” (Col 3/3-4).
Nous touchons cela par la foi ; et, parfois,
nous l’expérimentons également comme sensiblement, mystiquement, diraient
certains, par une élévation spirituelle qui dépasse nos forces humaines. A
certaines heures de grâce qui est une ardente communion au Christ glorieux,
rayonnant comme d’une irradiation intérieure, ne pourrions-nous pas affirmer
comme l’apôtre Paul : “Nous sommes
transfigurés avec une gloire toujours plus grande par le Seigneur qui est Esprit”
(2 Co. 3/18).
Et cette transfiguration doit éclairer toutes
choses, doit rénover le monde entier jusqu’à l’apparition de la "terre
nouvelle" et des "cieux nouveaux". “Car la création attend avec une impatience la révélation des fils de
Dieu ; livrée au pouvoir du néant, elle garde l’espérance : elle aussi sera
libérée… pour avoir part à la gloire des enfants de Dieu.” (Rm 8/19-21)
Comme de telles paroles devraient nous élever
et nous aider à assumer notre vie quotidienne parfois dure, douloureuse et
parfois crucifiée à la lumière de ces grandes réalités splendides de notre vie
chrétienne !
Citons encore St Jean, l’un des trois témoins
de la Transfiguration : “Mes bien-aimés,
dès à présent, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n’a pas été
encore manifesté. Nous savons que, lorsqu’il paraîtra, nous lui serons
semblables puisque nous le verrons tel qu’il est” (I Jn 3/2). J'aime à remarquer que l'apôtre
bien-aimé exprime cette réalité mystérieuse par un magnifique jeu de mots :
nous lui serons SEMBLABLES [evso,meqa (esométha)] parce que nous le VERRONS [ovyo,meqa (opsométha)]. Essayons d'avoir
cette contemplation qui est un commencement de vision !
Et pour arriver à ce terme, Dieu nous ne nous
donne qu’un seul conseil : Ecouter ! - “Tu
désires voir, disait St Augustin, écoute
d’abord” (Phrase que reprendra St Bernard) - “Voici mon Fils bien-aimé ! Ecoutez-le !”